Dansla premiĂšre version du film, telle qu’elle est passĂ©e au cinĂ©ma, on pouvait voir un reflet dans le verre pendant un bref instant. Toutefois, ce petit dĂ©tail a Ă©tĂ© corrigĂ© Ă  l’occasion de la sortie en DVD. MW MWM ÍS>» ÌW .'$6 fi^*gĂ­ÂŁĂ«& Ăą-MWK .H > .tĂ­mPiĂŹjR fcj»' 'i-Ă­sÚíki a* WN2 ĂŹL>K JHLÍr^O Ktz^ĂȘĂą Bch^Ă  *S*Í ‱‱‱ ĂŻ^*Ié£?'Ă­ ‱' -i-Ă Ă iĂ EĂȘĂȘ Ă  s/AjjlMk-s V & ^ ^-Ă  V Rct/r 0 C >H X X X »? X . X XXX X Ăą X X X x x X ^ X x xx x x X x X x x X X X X X X X X X X xxxx *=- -—— ^=- —-— ——~ Ji 4 ÉBAUCHE DE L’HISTOIRE DES ETRES ORGANISÉS AVANT LEUR FÉCONDATION. 4= -L-—.. — - » L A naissance d’un homme , d’un animal , d’un infecte , i’apparition d’une plante qui perce la terre pour la couvrir par fa verdure , ont fourni sĂ»rement Ă  tous les hommes penfans un problĂšme dontla solution devoit intĂ©resser singuliĂšrement leur curiçsitĂ©. Quand le premier homme vit, il y a six mille ans , fou exisience si agrĂ©ablement doublĂ©e par la naissance de son premier enfant ; quand il le vit fe dĂ©velopper peu-Ă -peu a n Ebauche & lui offrir enfin un ĂȘtre semblable Ă  lui-mĂȘme ; quand de nouveaux enfans lui prĂ©sentĂšrent encore le mĂȘme sujet de tendresse , d’étonnement & d’ad- miration ; quand ses descendans luĂź apprirent avec attendrissement qu’ils avoient, comme lui, le bonheur d’ĂȘtre pĂšres ; il chercha , sans-doute , les causes de ce phĂ©nomĂšne auĂ­Ăźi constant qu’il paroiffoit obscur peut-ĂȘtre ne vit-il rien au-delĂ  de l’union des sexes pour le produire ; mais c’est aussi vainement que deux cent gĂ©nĂ©rations se sont succĂ©dĂ©es. En vain une foule d’hommes ingĂ©nieux & profonds ont rassemblĂ© des observations fur cette matiĂšre importante ; en vain les gĂ©nies les plus hardis ont analysĂ© ce fait capital. La succession des siĂšcles nc prĂ©sente qu’une succession d’erreurs ; & tandis que les tĂ©nĂšbres les plus Ă©paisses couvroient toujours aux Physiologistes raisonnables le secret de la gĂ©nĂ©ration , les idĂ©es les plus incroyables , les contradictions les plus fortes, le travestissement le plus incohĂ©rent de la Nature faisoient la science de de l* Histoire, &c. iu ceux qui se piquoient d'en expliquer les phĂ©nomĂšnes. M. Bonnet, par une analyse profonde, avoir devinĂ© la marche de la Nature dans cette opĂ©ration; Haller la dĂ©couvrit dans Ion beau travail fur le Poulet dans l’Ɠuf, & M. l’AbbĂ© Spallanzani la mise au grand jour dans les Ă©tonnans MĂ©moires qssil a publiĂ© fur ce sujet. Le siĂšcle de Bonnet , de Haller & de Spallanzani cil celui oĂč l'on a un essai prĂ©cieux fur l'histoire de la gĂ©nĂ©ration, au lieu des romans que les bons esprits ne pou voient lire qu’avec dĂ©goĂ»t. C’est ici qu'o n verra fur-tout l'AbbĂ© Spallanzani lutter victorieusement avec la Nature , & produire, par son adresse , les mĂȘmes effets qu’elle a opĂ©rĂ© si souvent depuis la crĂ©ation , & dont elle avoit su voiler jusques aujourd’hui les moyens. C’est par la justesse de ses imitations qu’il prouve la soliditĂ© de ses dĂ©couvertes ; & il dĂ©montre les vĂ©ritĂ©s qu’il enseigne, en mettant sous !es sens les Ă©lĂ©mens de fa dĂ©monstration. Pour faire mieux connoltre le prix des travaux & des dĂ©couvertes de a z iv Ebauche l’AbbĂ© Spallanzani , il me parois nĂ©cessaire de donner une idĂ©e du problĂšme physiologique qu’il vient de rĂ©soudre , des difficultĂ©s qu’il a Ă©tĂ© forcĂ© de vaincre & des succĂšs qu’il a obtenus. Je me garderai bien de faire la censure des autres Naturalistes qui se sont trompĂ© en s’emparant de ce grand sujet je crois que ceux qui se trompent mĂ©ritent des Ă©gards, parce qu’ils ont cherchĂ© la vĂ©ritĂ© , dc qu’ils ont cru savoir trouvĂ©e. II suffira de leur faire voir la vĂ©ritĂ© toute nue ; ils sentiront bientĂŽt qu’ils ne l’avoient pas su saisir; ils penseront avec joie qu’ils ne tromperont plus personne malgrĂ© eux , & qu’eux-mĂȘmes ne seront plus les dupes d’un prĂ©jugĂ© ; ils abandonneront une opinion qu’ils avoient chĂ©rie, parce qu’ils la croyoient vraie, pour adopter & chĂ©rir de la mĂȘme maniĂšre une opinion diffĂ©rente , parce qu’ils la recon- noĂźtront pour ĂȘtre la feule qui soit avouĂ©e de la Nature & marquĂ©e du sceau de la vĂ©ritĂ©. L’imagination des hommes fortement Ă©mue par lĂ©s phĂ©nomĂšnes que DE L* H I S T O I R E f & C. Y prĂ©sente la gĂ©nĂ©ration , soit dans le rĂšgne animal, soit dans le rĂšgne vĂ©gĂ©tal, forma diverses hypothĂšses pour les expliquer ; car ce n’est que depuis Haller qu’on a fait des observations efficaces fur cette matiĂšre , jusques Ă  lui les recherches des Savans avoient Ă©tĂ© plus au profit de l’anatomie qu’elles ne servirent Ă  l’avancement de la Physiologie. 11 Ă©toit impossible d’aĂ­sister Ă  l’apparition du fƓtus dans les grands animaux ; on ne pouvoit le distinguer que plusieurs jours aprĂšs fa fĂ©condation le moment prĂ©cieux Ă©toit passĂ© ; on ne pouvoit lire dans ce qu’il faifoit voir, ce qu’il pouvoit avoir Ă©tĂ© ; les incertitudes fur ce qu’il devoit ĂȘtre , fur ce qu’il avoit pu ĂȘtre, ne pouvoient plus ĂȘtre fixĂ©es il falloit rĂȘver pour dire quelque chose; aussi l’on erra autour de la vĂ©ritĂ© & quand on ne la tient pas , on ne peut la remplacer que par des sables plus ou moins bien t issues. Mais quelques efforts qu’on saisie, on n’obtient que des vraisemblances qui font toujours d’autant plus dangereuses , qu’elles font plus sĂ©duisantes & a 3 vi Ebauche par consĂ©quent plus propres Ă  Ă©garer. Quoique le nombre des systĂšmes imaginĂ©s pour expliquer les phĂ©nomĂšnes de la gĂ©nĂ©ration soit trĂšs-con- fĂŹdĂ©rable ; car , comme il n’y a qu’une seule voie qui mĂšne au vrai, il y en a ryille qui Ă©garent cependant, ils peuvent tous ĂȘtre rĂ©duits Ă  deux principaux , dont tous les autres seront plus ou moins les modifications. PremiĂšrement , on peut considĂ©rer l’ĂȘtre rĂ©sultant de la gĂ©nĂ©ration comme ayant Ă©tĂ© formĂ© dans son entier par l’aĂ©te qui a donnĂ© lieu Ă  sa naissance ; en sorte qu’il n’existoit en aucune maniĂšre auparavant , & qu’il a reçu toutes ses parties avec leur coordination & leurs propriĂ©tĂ©s lorsqu’il a Ă©tĂ© produit ; comme une montre ne peut exister qu’autant que l’on en fabrique sĂ©parĂ©ment toutes les piĂšces, & qu’on les rĂ©unit d’une maniĂšre rĂ©lative Ă  leurs rapports & Ă  l’efßÚt qu’elles doivent produire ; tel est le fameux systĂšme des MolĂ©cules organiques. Secondement, l’ĂȘtre rĂ©sultant de la gĂ©nĂ©ration est un ĂȘtre dĂ©jĂ  existant , DE L’ H I S T 0 1 R E , &C. vil que l’acte qui a donnĂ© lieu Ă  sa naissance a seulement tirĂ© de l’état de torpeur ou il Ă©toit pour lui donner une vie plus active j^qu’il a rendu visible d’invilĂŹble qu’il Ă©toit auparavant, & qui lui a donnĂ© une Ă©nergie suffisante pour recevoir un accroissement rapide & propre Ă  lui faire parcourir les vicissitudes de la vie. Quand on a lu les ouvrages de Hal- ler. , de MM. Bonnet & Spallan- zani , on ne tarde pas Ă  reconnoĂźtre l’impoffibilitĂ© du premier systĂšme , on trouve bientĂŽt que les moyens employĂ©s pour l’établir font entiĂšrement Ă©trangers Ă  la Nature , que les bases de ce mĂ©chanisme croulent auffi-tĂŽt qu’on veut en Ă©prouver la force, que les parties nĂ©cestĂ ires pour former cet Ă©difice ne saur oient ĂȘtre mises sous les sens , & que tout ce qu’on avoit imaginĂ© pouvoir les reprĂ©senter n’étoit en aucune maniĂšre ce qu’on avoit cru qu’elles Ă©toient, mais seulement des ĂȘtres Ă©trangers au phĂ©nomĂšne qui ne jouoient aucun rĂŽle dans la gĂ©nĂ©ration, ou du moins qui pouvoient parfaitement en a 4 Vin Ebauche ĂȘtre Ă©cartĂ©s fans l’empĂȘcher de rĂ©ussir. Je ne crois pas qu’il y ait aucun systĂšme qui ait Ă©tĂ© plus fortement attaquĂ© & plus fondement renversĂ© que celui-ci. MM. Bonnet & Spallan- z ani l’ont difĂ­ĂŹpĂ© au point de n’en laister aucune trace ; par-tout ils lui ont opposĂ© la Nature & ses formules ; toujours une foule de faits fe font rĂ©unis pour faire voir son incohĂ©rence pour dĂ©tacher chacune de ses parties , qui, malgrĂ© leur importance pour l’existence du systĂšme , ne pouvoient subsister ni physiquement, ni mĂ©taphysiquement ensemble , & ne pouvoient former , par consĂ©quent, un tout harmonique. Mais quand un examen mĂ©thodique & des observations tranchantes n’au- roient pas proscrit ce systĂšme, la raison feule auroit dĂ» arrĂȘter ceux qui auroient Ă©tĂ© engagĂ©s Ă  le recevoir. Je fais bien qu’en Physique la raison doit juger feulement les observations & les expĂ©riences , en tirer les consĂ©quences les plus immĂ©diates , & s’amufer ensuite des idĂ©es qu’elle prĂ©sente , sans croire trop Ă  leur soliditĂ© mais quand un DE L 5 H I S T 0 I R E , &c. IX phĂ©nomĂšne soupçonnĂ© choqueroit absolument les premiers principes du jugement , quand il rĂ©pugneroit Ă  ces idĂ©es gĂ©nĂ©rales qu’on se sait des choses, Ă  ces loix que la Nature paroĂźt suivre avec constance ; il me semble qu’on doit alors suspendre ses soupçons, arrĂȘter son imagination, tourner le fait prĂ©tendu de tous les cĂŽtĂ©s, & s’assurer s’il n’est pas davantage le phĂ©nomĂšne de l’ObĂ­ervateur que celui de la Nature. Ainsi , par exemple, un fƓtus quelconque , soit animal, soit vĂ©gĂ©tal, est un ĂȘtre organisĂ© en miniature, qui renferme toutes les parties de l’ĂȘtre qu’il est appelĂ© Ă  reprĂ©senter ; c’est ce chĂȘne orgueilleux qui balaiera les nuages, & qu’on trouve dans la gelĂ©e vĂ©gĂ©tale avec son bois, son liber , son Ă©corce, ses racines, ses branches , ses feuilles, ses fleurs , ses graines , ses trachĂ©es , ses vaisseaux ; c’est l’homme avec son cƓur, ses artĂšres , ses veines , ses viscĂšres , ses muscles, ses nerfs , ses os, ses sens. Eh bien ! cette multitude de parties disposĂ©es d’une maniĂšre unique X E B A V C H E pour produire un tout unique, qui cons- titueront son existence pendant le tems j de fa vie , dont aucune ne pourroit j ĂȘtre essentiellement dĂ©placĂ©e sans la I ruine totale de l’ĂȘtre qui en devoit rĂ©sulter, & sans l’anĂ©antiĂ­sement de tous les effets qui dĂ©voient ĂȘtre une fuite de leurs rapports avec tous les autres ĂȘtres de l’Univers ; cet ĂȘtre si Ă©tonnant par fa complication, si important dans l’Univers par ses liens avec les autres ĂȘtres ; cet ĂȘtre scra-t-il le fruit d’une action aveugle , d’une injection qui ne peut avoir son este t que dans diverses i circonstances , dont plusieurs font com- j plettement ignorĂ©es ? Certainement, si la moindre de nos machines suppose de l’inteßßigence dans celui qui l’exĂ©cute, si elle en exige une quantitĂ© encore plus grande pour les imaginer les machines organisĂ©es qui font les plus compliquĂ©es , dont nous ne pouvons comprendre l’enfemble ni destiner toutes les parties , dont nous ignorons les ressorts, & dont nous ne ne soupçonnons pas mĂȘme la plupart des opĂ©rations les machines organisĂ©es pour- DE L* HISTOIRE^ &C. XI ront-elles seules se paffer d’un ouvrier intelligent ? seront-elles seules abandonnĂ©es Ă  un mĂ©cbanisme aveugle ? & ce que nous ne pourrions croire fauteur d’une table ou d’une Ă©chelle , ima- ginerions-nous de bonne foi qu’il a pu produire la machine la plus compliquĂ©e , la plus simple dans fa complication , & la plus parfaite dans tous ses rapports ? Cette opinion peut ĂȘtre adoptĂ©e par un AthĂ©e spĂ©culatif, dont la sombre imagination ne pĂšse pas les vraisemblances & ne calcule pas les possibilitĂ©s ; il a besoin, pour amuser sa mĂ©lancolie, d’exiler le bonheur & la raison de l’Univers ; il cherche pour cela Ă  effacer fur tous les ĂȘtres créés le nom sublime de sEternel qui s’y trouve empreint, & qu’on y lit toujours avec tant de plaisirs mais je doute fort que cette hypothĂšse absurde soit jamais signĂ©e par la raison ; & je suis convaincu que l’AthĂ©e lui-mĂȘme , s'il vouloir ĂȘtre de bonne foi avec lui-mĂȘme, qui croit pourtant aux causes & aux effets dans la fĂ©rie des Ă©vĂ©nemens qui se passent sous ses yeux, & avec les- xir Ebauche quels il croĂźt avoir des rapports, l’AthĂ©e lui-mĂȘme auroĂźt-il assez d’incohĂ©rence dans ses principes pour reconnoitre fans cesse les rapports continuels & nĂ©cessaires de la cause Ă  l’effet dans le cours ordinaire de la vie, & pour imaginer ensuite que les effets les plus importuns, les plus remarquables, ceux qui portent les plus grands traits d’intelligence , de sagesse & de sublimitĂ© , sont les seuls qui n’aient aucune cause proportionnelle Ă  ce qu’ilssont? Je ne puis imaginer une pareille logique, comme je ne puis croire Ă  l’existence d’un vĂ©ritable athĂ©isme. On comprend mieux la formation des crystaux , dont les parties appliquĂ©es successivement les unes fur les autres peuvent ĂȘtre dĂ©terminĂ©es par de certains rapports Ă  s’appliquer toujours de cette maniĂšre ; mais , enfin , elles font appliquĂ©es , & leur ensemble fait une masse inerte qui ne change plus , & qui n’ossre jamais pour fa forme que la mĂȘme phase ; mais il n’y a point d’organisation , il n’y a point de vie , il n’y a point de circulation , point d’aĂ­similation , l’accroissement se de l* Histoire , &c. xni fait par juxta-position , & il n’est point produit par l’élaboration continuelle des sucs filtrĂ©s dans l’ĂȘtre lui-mĂȘme ; de forte que, quand on pourroit supposer que les rapports qui dĂ©terminent de la mĂȘme maniĂšre depuis six mille ans , la crystallisation des diffĂ©rens crystaux font arbitraires ; ce que la confiance de ces crystallifations ne permet pas d’imaginer je ne crois pas qu’on pĂ»t en conclure quelque chose pour les machines organisĂ©es. 11 falloit donc abandonner cette hypothĂšse dĂ©savouĂ©e par la Nature & condamnĂ©e par la raison ; mais l’hom- me inquiet, & occupĂ© d’un effet intĂ©- reffĂ nt, ne perd pas l’espĂ©rance d’en dĂ©couvrir la cause son courage sera rĂ©compensĂ©, & la Nature sera soumise Ă  ses efforts. Des Physiciens supposĂšrent que le fƓtus prĂ©existoit Ă  la fĂ©condation , & que la gĂ©nĂ©ration n’é- toit pas une crĂ©ation , mais le dĂ©veloppement d’uiy ĂȘtre dĂ©jĂ . existant. Tout s’explique fans difficultĂ© dans ce systĂšme , comme on sa fait voir ; mais ce systĂšme , malgrĂ© sa simplicitĂ©, xiv Ebauche offrit d’abord une difficultĂ© qu’il im- portoit de rĂ©soudre. Puisque le mĂąle & la femelle coopĂšrent Ă  la gĂ©nĂ©ration, le fƓtus primordial pouvoit exister austĂŹ bien dans l’un que dans l’autre de-lĂ  il s’est formĂ© deux opinions , qui ont eu leurs dĂ©fenseurs ; les uns ont cru que le mĂąle Ă©toit le dĂ©positaire de ces fƓtus ; les autres avoient imaginĂ© que la femelle les avoit toujours couvĂ©. Ces opinions n’étoient pas fans vraisemblance ; il falloit les vĂ©rifier. Cessions de chercher des probabilitĂ©s ; consultons la Nature , ou plutĂŽt Ă©coutons un de ses interprĂštes le plus favorisĂ©. M. l’AbbĂ© Spallanzani a prononcĂ© la loi de la Nature, dont Haller avoit dĂ©jĂ  lu les premiĂšres lignes il fait voir constamment les fƓtus dans le sein des femelles avant leur fĂ©condation , & il prouve par-lĂ  qu’elles font toujours , Ă  toute rigueur , les mĂšres de leurs petits. On ne sauroit en douter , puisque notre pĂ©nĂ©trant Observateur a prouvĂ© que les vers sperma- tiques de la liqueur sĂ©minale , qu’on regardoit comme ces fƓtus dĂ©posĂ©s de l’ Histoire , &c. XV par le mĂąle dans le sein des femelles pendant l’accouplement, ne sont point essentiels Ă  la gĂ©nĂ©ration ; M. Spallan- zani a du moins fĂ©condĂ© une foule de TĂȘtards avec une partie de la liqueur sĂ©minale d’un Crapaud & d’une Grenouille , oĂč il n’y avoit aucun de ces vers. Mais il y a plus , notre pĂ©nĂ©trant Observateur , aprĂšs avoir vu dans Tu- tĂ©rus d’une Grenouille aquatique verte tous les petits TĂȘtards ou corpuscules oviformes qui dĂ©voient y descendre de l’ovaire pour ĂȘtre fĂ©condĂ©s , a observĂ© encore dans les mĂȘmes ovaires une autre fuite de TĂȘtards ou de corpuscules oviformes beaucoup plus petits , qui ne dĂ©voient fe dĂ©velopper & descendre dans l’utĂ©rus que pendant TannĂ©e suivante. Les femelles du Crapaud terrestre puant, des Salamandres aquatiques , & divers autres amphibies lui ont offert le mĂȘme phĂ©nomĂšne. Il rĂ©sulte clairement de ce fait, que ces fƓtus existent dans le sein des femelles , au moins une annĂ©e avant leur fĂ©condation ; & il fe trouve , par consĂ©quent, xvi Ebauche trĂšs-Ă©vident que le mĂąle, par l’acte dc la fĂ©condation , ne les a pas introduit dans la femelle ; d’autant plus que, dans ces amphibies, la fĂ©condation s’accom- plit hors du corps de la femelle. La Nature ayant ainsi donnĂ© l’ex- ' clusion Ă  tous ces systĂšmes, il n’en reste plus qu’un Ă  examiner ; c'est celui de la prĂ©existence des fƓtus dans la femelle Ă  leur fĂ©condation ; c'est ce systĂšme que les Ă©tonnantes observations de M. l’Ab- bĂ© Spallanzani forcent d’adopter. II ne faut pas feulement chercher dans ses MĂ©moires le jeu Ă©blouissant d’une imagination brillante, l’explication froide de quelques phĂ©nomĂšnes , une fuite d’idĂ©es liĂ©es ensemble par force pour fonder une opinion , un ouvrage parĂ© des charmes de l’éloquence, & victorieux des idĂ©es reçues, parce qu’il est Ă©loquent. C’est une traduction naĂŻve & fidelle de quelques pages sublimes du Livre de la Nature ; c’est une fuite de faits Ă©tonnans , racontĂ©s avec simplicitĂ© , observĂ©s avec finesse, suivis avec constance , & analysĂ©s avec profondeur; c’est un enchaĂźnement d’essets prĂ©sentĂ©s DE l s Histoire , &c. xvii prĂ©sentĂ©s d’une maniĂšre fi lumineuse, dĂ©taillĂ©s avec tant de nettetĂ© , dirigĂ©s tellement vers le mĂȘme but, que chacun est forcĂ© de tirer, la mĂȘme consĂ©quence , & de reconnoĂźtre la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation dans les femelles comme une loi de la Nature pour tous les ĂȘtres qui ont fourni les matĂ©riaux de ces observations. Mais je reviens Ă  ce sujet important. Pour faire sentir le prix des dĂ©couvertes de M. l’AbbĂ© Spallanzani , il faut avoir approfondi davantage l’opinion de la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation dans les femelles ; tout comme pour intĂ©resser les Lecteurs h ces recherches , il convient de leur dire que cette opinion compte les hommes les plus cĂ©lĂšbres parmi ses DĂ©fenseurs les Malpighi , les Bourguet , les SwAMMERDAM, leS ChEITNE , & fur- tout M. Bonnet qui s’étoit assurĂ© de cette vĂ©ritĂ© par la force de son gĂ©nie , & qui avoir annonces les dĂ©couvertes de Haller & de M. Spallanzani long-tems avant qu’elles fussent faites. Rien ne fera plus propre Ă  dĂ©cider b xviii Ebauche les suffrages des amis de la vĂ©ritĂ© que les ConsidĂ©rations fur les corps organisĂ©s , oĂč M. Bonnet emploie toutes les ressources do la logique & de l’ana- lyse pour Ă©tablir la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation si on lit ensuite les beaux MĂ©moires de Haller fur les Ɠufs couvĂ©s , & ceux de M. l’AbbĂ© Spallanzani que j’offre ici au Public, on aura presque une opinion dĂ©montrĂ©e avec toute la rigueur qu’on peut donner Ă  la dĂ©monstration d’une vĂ©ritĂ© physique. Les fƓtus des corps organisĂ©s prĂ©existent Ă  la fĂ©condation , & ils prĂ©existent dans les femelles. La gĂ©nĂ©ration est donc seulement un dĂ©veloppement du tout organique existant en miniature dans l’Ɠuf, dans le fƓtus, ou dans la graine. Haller avoit prouvĂ© que le fƓtus appartenois Ă  la femelle , en montrant que la membrane qui revĂȘt intĂ©rieurement le jaune de l’Ɠuf est une continuation de celle qui recouvre l’intestin grĂȘle du Poulet, & qui fe prolonge fur l’estomac & la bouche. Il avoit fait voir de mĂȘme que la membrane externe du de i? Histoire , &c. xix jaune est un Ă©panouistement de la membrane externe de l’intestin qui se lie au mĂ©sentĂšre , &c. Mais le jaune a ses artĂšres & ses veines qui communiquent avec les veines & les artĂšres mĂ©sen- tĂ©riques du Poulet le mĂȘme sang qui circule dans les uns , circule auíßÏ dans les autres ; il vient de la mĂȘme source , qui est le cƓur du Poulet ; i^est poussĂ© par la mĂȘme force, qui est l’impulsion donnĂ©e au cƓur ; il entretient la vie de l’un, & empĂȘche la destruction de l’au- tre pour le rendre utile au premier. Le jaune est donc uiĂŹe portion essentielle du Poulet dans l’Ɠuf, puisqu’il forme avec lui un mĂȘme svstĂȘme de vaisseaux ainsi, puisque ce jaune existe dans l’Ɠuf qui n’a pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©, comme dans celui qui a Ă©tĂ© fĂ©condĂ© , il faut nĂ©cessairement qu’il y soit avec ce systĂšme de vaisseaux qui Punit au Poulet aprĂšs la fĂ©condation. Mais si ce systĂšme de vaisseaux existe dans le jaune, existe- roit-il fans le Poulet qui en est le but ou plutĂŽt le prolongement ? Ces membranes du jaune qui forment les intestins du Poulet existeroient-elles fans le b 2 xx Ebauche Poulet dont elles font une partie essentielle ? Je nf arrĂȘtĂ©. Je dirai feulement que ces phĂ©nomĂšnes frappĂšrent tellement Haller , qu’ils le forcĂšrent de renoncer Ă  l’opinion qu’il avoit embrassĂ©e fur la gĂ©nĂ©ration , quoiqu’elle fĂ»t diamĂ©tralement opposĂ©e Ă  celle de la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation dans les femelles. Enfin ,Ti l’on considĂšre le Poulet dans l’Ɠuf comme dans un berceau oĂč il repose jusques Ă  ce qu’il soit fĂ©condĂ©, peut-on imaginer qu’il y soit fans les parties qui constituent essentiellement son existence ? Si cela pouvois ĂȘtre , ce seroit autre chose qu’un Poulet, & aucune force de la Nature ne pourroit en faire sortir un Poulet. Mais Ă­ĂŹ l’on admet une feule partie du Poulet, on est forcĂ© d’admettre toutes les autres comme des consĂ©quences rigoureuses. Les observations de Haller font voir clairement l’estomac & les intestins du Poulet comme un prolongement des membranes du jaune ; mais on ne peut reconnoĂźtre leur existence fans supposer celle du foie, des vaisseaux lactĂ©s , des de l*Histoire, &c. xxi veines , des artĂšres , du cƓur, des os, des muscles , des nerfs , qui ne font pas, Ă  la vĂ©ritĂ©, fous une forme solide, comme nous l’obfervons dans le Poulet dĂ©veloppĂ© , mais dont la soliditĂ© est dans une proportion relative Ă  celle que chacune de ses parties aura dans son Ă©tat de perfection. Les expĂ©riences de M. l’AbbĂ© Spal- xanz ani rĂ©pandent encore plus de jour fur ce sujet. IĂ­ fait voir nettement que les TĂȘtards de§ Grenouilles , des Crapauds & des Salamandres , qu’on avoir cru mal-Ă -propos des Ɠufs , font feulement & entiĂšrement des fƓtus exif- tans fous une forme plus petite dans les ovaires des femelles avant leur descente dans l’utĂ©rus , & par consĂ©quent long-tems avant qu’ils soient fĂ©condĂ©s. II montre , par la plus rigoureuse analyse , que ces fƓtus non-fĂ©condĂ©s qui existent dans les ovaires font parfaitement semblables Ă  ceux qui ont Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s ; en forte qu’ils ne diffĂšrent que par le changement que la fĂ©condation y opĂšre de maniĂšre que les premiers , comme les seconds , ont b 3 xxn E B A U C H E toutes les parties essentielles aux TĂȘtards , ou plutĂŽt qu’ils font, les uns & les autres, de parfaits TĂȘtards, & qu’ils renferment par consĂ©quent fous cette forme de TĂȘtards toutes les parties de la Grenouille ou d u Crapaud , ou de la Salamandre, comme la Chenille dans l’Ɠuf enferme avec elle toutes les parties du Papillon. Ce n’est pas tout encore ; notre pĂ©nĂ©trant Observateur ne dĂ©montre pas feulement que les TĂȘtards de Grenouilles , de Crapauds & de Salamandres prĂ©existent Ă  la fĂ©condation, il fait voir encore que l’amnios & le cordon ombilical prĂ©existent auĂ­ĂŻĂŹ avec eux. Enfin, il a pu prouver que le plus grand dĂ©veloppement de ces fƓtus a lieu d’abord aprĂšs la fĂ©condation , mais qu’on en observe un trĂšs-fensible pendant VannĂ©e qui doit prĂ©cĂ©der la fĂ©condation. 11 n’y a plus de doute fur ces expĂ©riences. M. l’AbbĂ© Spallanzani les a tous prĂ©venus , & il a par consĂ©quent Ă©tabli fans rĂ©pliquĂ© la prĂ©existence des fƓtus de ces animaux dans les femelles Ă  la fĂ©condation il s’est de l*Histoire, &c. xxiii prĂ©valu pour cela trĂšs-habilement d’une circonstance qui lui Ă©toit bien favorable. Il s’étoit assurĂ© que la fĂ©condation des TĂȘtards s’opĂ©roit hors du corps des femelles ; il avoir vu que le mĂąle , accouplĂ© avec la femelle , arrosoir feulement les fƓtus qui fortoient de l’utĂ©rus avec la liqueur sĂ©minale, & que les fƓtus sortis de f utĂ©rus , qui n’avoient point reçu cet arrofement, ne fe dĂ©veloppoient point, & pĂ©riĂ­foient comme ceux dont les femelles accou- choient fans accouplement cette expĂ©rience capitale fut faite d’une maniĂšre tranchante. Les fƓtus, attachĂ©s sĂ©parĂ©ment au mĂȘme cordon , sortent l’un aprĂšs l’autre de l’utĂ©rus de la femelle , & elle en accouche quelquefois' avant I’accouplement. En coupant donc une pĂĄrtie de ce cordon lorfqu’il for- toir de l’utĂ©rus avant l'accouplement, en coupant ensuite une partie semblable du mĂȘme cordon sortie du corps de la femelle aprĂšs l’accouplement, & en plaçant ces deux parties d u cordon avec leur fƓtus dans une eau semblable & dans des circonstances qui Ă©toient b 4 Xxiv Ebauche les mĂȘmes, on pouvoit aisĂ©ment savoir quelle seroit la portion qui recevroit la vie ; c’est ce que fit l’AbbĂ© Spallan- zani. Aussi, malgrĂ© la ressemblance parfaite qu’il y avoit Ă  rous Ă©gards entre ces fƓtus , quoiqu’ils ne diffĂ©rassent que par la fĂ©condation , il n’y eut jamais que la partie fĂ©condĂ©e qui donna des TĂȘtards vivans , & produisant ensuite des Grenouilles ou des Crapauds , l’autre partie se corrompoit toujours , & pĂ©rissent bientĂŽt aprĂšs. Quoique cette preuve fĂ»t fans rĂ©pliquĂ© , M. l’AbbĂ© Spallanzani voulut encore la rendre plus saillante en opĂ©rant sur les fƓtus de ces amphibies, avec la liqueur sĂ©minale des mĂąles qu’il tiroit des vĂ©sicules spermatiques, ce que les mĂąles opĂ©roient par l’accouplement. II forma l’audacieux projet des fĂ©condations artificielles, queMAL- pighi & d’autres avoient inutilement cherchĂ© Ă  rĂ©aliser mais , plus heureux que ces Naturalistes , il vit la Nature soumise Ă  sa dextĂ©ritĂ© ; &, pour la premiĂšre fois , plusieurs Crapauds , plusieurs Grenouilles & plusieurs Sala- de i?H istoire , &c. xxv mandres virent le jour fans le devoir Ă  un mĂąle qui eĂ»t coopĂ©rĂ© Ă  le leur donner. On comprend aisĂ©ment que notre Naturaliste chercha, de nouveau, plusieurs fois quel Ă©toit le fort des foetus qui n’étoient pa§ fĂ©condĂ©s. Mais il observa constamment que les fƓtus fĂ©condĂ©s , soit artificiellement, soit par l’accouplement, Ă©toient les seuls qui fe dĂ©veloppassent ; tandis que les fƓtus de la mĂȘme mĂšre & du mĂȘme cordon , qui n’avoient pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s , pĂ©rissaient tous infailliblement. En faisant ces expĂ©riences, vraiment originales & Ă©tonnantes, notre pĂ©nĂ©trant AbbĂ© voulut connoĂźtre l’énergie prolifique de la liqueur sĂ©minale de ces amphibies. II fit donc plusieurs tentatives dans ce but, en cherchant Ă  diminuer faction de la liqueur sĂ©minale par un mĂ©lange plus ou moins grand avec seau , ou en f employant dans des quantitĂ©s extrĂȘmement petites. La fĂ©condation des fƓtus s’opĂ©roit Ă©galement bien lorfqu’ils Ă©toient feulement touchĂ©s en un point par la liqueur sĂ©minale , comme lorfqu’ils y Ă©toient xxvi Ebauche plongĂ©s cette goutte imperceptible ^ dont le diamĂštre n’étoit pas plus grand que la pointe d’une Ă©pingle qu’elle cou- vroit, avoit la mĂȘme vertu fĂ©condante qu’une autre portion de cette liqueur beaucoup plus considĂ©rable , & elle confervoit toute fa vertu quoiqu’elle traversĂąt une masse mucilagineufe assez considĂ©rable. Enfin , trois grains de la liqueur sĂ©minale d’un Crapaud ou d’une Grenouille conservĂšrent toute leur puiĂ­lance , quoiqu’ils eussent Ă©tĂ© mĂȘlĂ©s dans une livre & demie d’eau ; & cette petite quantitĂ© de liqueur sĂ©minale ne perdit pas toute son efficace dans vingt-deux livres. Si, dans le premier cas , tous les TĂȘtards plongĂ©s dans seau furent fĂ©condĂ©s ; dans le second il n’y en eut que quelques-uns. Mais ce n’est point une portion de cette eau qui a acquis cette vertu fĂ©condante, c’est toute la masse de seau. II y a plus, des fĂ©condations prodigieusement nombreuses, & frĂ©quemment rĂ©pĂ©tĂ©es dans la mĂȘme eau fpermatifĂ©e , ne lui ont pas fait perdre son Ă©nergie fĂ©condante. Ces expĂ©riences auroient pu faire DE L* H I S T O I R E , &C. XXVII croire que la vapeur spermatique Ă©toit la cause de la fĂ©condation ; mais M. Spallanzani a dĂ©montrĂ© que la partie matĂ©rielle de la liqueur sĂ©minale pouvoit seule produire la fĂ©condation. Enfin , ce savant Naturaliste a fĂ©condĂ© artificiellement avec le mĂȘme succĂšs les Ɠufs d’un Papillon de Ver- Ă -soie il a plus fait, il est parvenu Ă  fĂ©conder artificiellement une Chienne avec la liqueur spermatique d’un Chien. La Chienne est accouchĂ©e heureusement de plusieurs petits Chiens , aprĂšs avoir Ă©tĂ© tenue fous la clĂ© jusques Ă  ce que fa grossesse fĂ»t bien dĂ©cidĂ©e cette expĂ©rience a Ă©tĂ© rĂ©pĂ©tĂ©e avec le mĂȘme succĂšs par un Professeur de Pise. Je m’arrĂȘte. On ne peut s’empĂȘcher de se livrer Ă  l’étonnement & Ă  l’ad- miration , quand on voit ainsi le gĂ©nie maĂźtriser la Nature , en dĂ©voiler les secrets, & nous enrichir de ses formules. Qui approchera de fang-froid de son propre berceau , que M. Spal- lanzanĂ­ nous montre aussi ancien que la terre ! Qui contemplera fans ravissement la vive lumiĂšre qu’il rĂ©pand xxviii Ebauche sur la matiĂšre de physique la plus obscure & la plus digne de la curiositĂ© de l'homme! Je fuis certain que tous ceux qui liront l’ouvrage dont je dessine ici quelques traits , me pardonneront aisĂ©ment mon enthousiasme ; & en partageant mes plaisirs , applaudiront Ă  mes expressions. II y a peu de dĂ©couvertes plus propres Ă  faire penser ; il y a peu de faits qui aient autant repoussĂ© les bornes de nos connoissances. Je veux me livrer Ă  quelques-unes des idĂ©es qu’ils me fournissent, & esquisser par leur moyen une histoire de l’homme , des animaux & des plantes avant qu’ils aient Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s. Quoique ce plan paroisiĂš absurde au premier coup-d’Ɠil, j’espĂšre le rendre vraisemblable en l’exĂ©cutant ; & s’il renferme de grandes difficultĂ©s pour le remplir , je ne crains pas de les affronter, parce que je fuis soutenu par MM. Bonnet & Spallanzani. Je pourrois m’ĂȘtre trompĂ© ; mais les erreurs qu’on dĂ©couvrira dans mon ouvrage feront sĂ»rement? celles que j’aurois ajoutĂ©es aux idĂ©es solides de DE Û HI S T 01 RE , &c. XXIX mes Guides , & que j’aurois mal-Ă - propos dĂ©duites de leurs rĂ©flexions & de leurs dĂ©couvertes. II n’y a point d’hommes, d’animaux, de plantes , d’animalcules d’infusion qui n’aient existĂ©, je dirai presque vĂ©cu depuis six mille ans , & qui, depuis ce tems-lĂ  , n’aient Ă©prouvĂ© un dĂ©veloppement successif dans le sein des femelles oĂč ils Ă©toient dĂ©posĂ©s. Puisque les fƓtus prĂ©existent Ă  la fĂ©condation , il est Ă©vident que ces fƓtus ne font pas un effet de la fĂ©condation elle-mĂȘme ; il est Ă©vident qu’ils Ă©toient dĂ©jĂ  créés avec tous leurs organes , & qu’ils subsistoient de cette maniĂšre avant que nos sens pussent les discerner mais quelle-fera la cause de leur crĂ©ation ? quelle en sera l’époque ? Ces questions , qui paroissent d’abord nous perdre dans les labyrintes de la MĂ©taphysique , me semblent faciles Ă  rĂ©soudre par de simples raisonnemens. ^'impossibilitĂ© d’une fuite infinie d’ĂȘtres finis dĂ©termine nĂ©cessairement l’existence d’un Etre nĂ©cessaire ; la fuite infinie des hommes, des animaux, des xxx Ebauche animalcules des infusions , des plantes seroit une contradiction manifeste ainsi puisqu’il y a des suites finies d’ĂȘtres finis dans le monde , telles que celles que les hommes , les animaux , les animalcules des infusions prĂ©sentent , il faut qu’il y ait nĂ©cessairement un Etre nĂ©cessaire qui soit la cause des fuites finies formĂ©es par'les ĂȘtres organisĂ©s. On ne peut fe refuser Ă  cette consĂ©quence , Ă  moins de digĂ©rer qu’il y a des effets fans cause , des hommes fans leur pĂšre, ou des plantes fans la graine qui devoit leur donner le jour. Il rĂ©sulte donc de-lĂ  nĂ©cessairement que cet Etre nĂ©cessaire , qui est la cause de ces suites finies d’ĂȘtres finis , est la cause des ĂȘtres qui font les Ă©lĂ©mens des termes de ces fuites, comme il est celle de tous les moyens par lesquels ils doivent fe multiplier. Mais, comme cette multiplication s’opĂšre par le dĂ©veloppement des fƓtus prĂ©existans Ă  la fĂ©condation , il est clair que l’Etre nĂ©cessaire est la cause de l’existence des fƓtus des animaux & des plantes. Je n’entre pas dans de plus grands dĂ©tails pour de l’Histoire, &c. xxxi Ă©tablir cette vĂ©ritĂ© capitale, que le raisonnement prĂ©cĂ©dent me parent rendre sensible mais on sentira bien qu’il fe- roit facile de la pousser davantage, ou du moins de la prĂ©senter sous des points de vue differens. Quant au moment de la crĂ©ation de ces fƓtus qui doivent peupler la terre d’hommes , d’animaux, d’animalcules & de plantes pendant toute fa durĂ©e , je ne puis la fixer qu’au moment de la crĂ©ation, L’Historien sacrĂ© nous apprend que Dieu cessa de crĂ©er Ă  la fin du sixiĂšme jour. D'expĂ©rience de tous les siĂšcles nous apprend que Dieu ne crĂ©e rien de nouveau ; & comme les observations nous apprennent que les fƓtus prĂ©existent Ă  la fĂ©condation dans les femelles & les graines, elles nous apprennent auĂ­fi que ces fƓtus font des parties essentielles dans les femelles & dans les graines ; de forte que les graines & les femelles , au moment de la crĂ©ation , dĂ©voient avoir ces parties qui leur Ă©toient essentielles , ces fƓtus au dĂ©veloppement defquels elles dĂ©voient contribuer. Mais, comme les xxxii Ebauche fƓtus femelles dĂ©voient aprĂšs leur dĂ©veloppement servir Ă  la multiplication de l’espĂšce, il falloit auĂ­li que ces fƓtus semelles continssent au-dedans d’eux les fƓtus mĂąles & femelles qui dĂ©voient servir Ă  cette multiplication par ĂŹeur multiplication , & ainsi de suite jusques Ă  la fin du monde ; car on ne peut fe dissimuler que , fans tous ces fƓtus , la premiĂšre femelle de chaque animal, la premiĂšre graine de chaque plante eussent Ă©tĂ© des femelles & des graines inutiles pour la fuite des siĂšcles , & par consĂ©quent manquĂ©es. Outre cela , comme Dieu gouverne l’Univers par des loix gĂ©nĂ©rales, il a subordonnĂ© tous les effets Ă  ces loix, & combinĂ© tous leurs rapports pour les produire & les conserver. Mais , comme dĂ©volution ouĂŻe dĂ©veloppement des ĂȘtres organisĂ©s paroĂźt une loi gĂ©nĂ©ral e de la Naturte , il est clair qu’elle doit s’exercer fur tous les ĂȘtres qui font susceptibles d’en Ă©prouver les effets ; mais ils ne peuvent Ă©prouver cette influence qu’en tant qu’ils font faits pour la recevoir d’une maniĂšre conforme au plan DE L> H I S T O I R E , &c. XXXIII plan gĂ©nĂ©ral de l’Univers. Et comme ils ne peuvent avoir Ă©tĂ© plutĂŽt soumis Ă  cette loi qu’en subissant son influence dĂšs le premier moment de leur existence, ils doivent par consĂ©quent avoir Ă©tĂ© faits pour se dĂ©velopper dĂšs le moment de la crĂ©ation, d’une maniĂšre propre Ă  peupler la terre d’ĂȘtres organisĂ©s. II falloit donc que les fƓtus qui prĂ©existent Ă  la fĂ©condation dans les femelles fussent créés avec elles pour subir ce dĂ©veloppement successif; car, comme il peut y avoir eu dĂšs le premier jour de la crĂ©ation de nouveaux ĂȘtres dĂ©veloppĂ©s par la fĂ©condation , il falloit qu’il y eĂ»t dĂšs le premier jour de la crĂ©ation des fƓtus Ă  dĂ©velopper ; & la loi des dĂ©veĂźoppemens , qui est essentielle Ă  l’exiĂ­tence des corps organisĂ©s, se sera exĂ©cutĂ©e dĂšs-lors comme elle s'exĂ©- cute aujourd’hui. Eh quelle seroit l’origine de ces ĂȘtres infiniment petits , qui font en mĂȘme rems fi prodigieusement composĂ©s dans leur petitesse , & dont la composition devient d’autant plus merveilleuse que leur petitesse est plus incomprĂ©hensi- c xxxiv Ebauche ble ; car ces fƓtus n’existent pas dc toute Ă©ternitĂ©, puifqu’ils font finis & successifs, ces fƓtus ne font pas l’ou- vrage du hasard , qui n’est qu'u n mot, ou la refiource dc l’ignorance, ou l’afyle de l’athĂ©ifme qui n’a jamais rĂ©flĂ©chi, puisque ces fƓtus font des ĂȘtres trĂšs- compofĂ©s , dont la composition est dĂ©terminĂ©e , & puifqu’ils ont une foule de rapports nĂ©cessaires avec les ĂȘtres de l’Univers ? Il faut donc lire fur chacun d’eux le nom sublime de l’Ancien des jours qui les a fait,; il-faut y recon- noĂźtre la toute-puissance & la fa geste du Tout-Puistant & du seul Sage qui les a façonnĂ© dans leur petitesse, avec la mĂȘme main qui a placĂ© les soleils dans l’efpace , qui a lancĂ© les planĂštes & les comĂštes pour les faire tourner autour d’eux, & qui a donnĂ© le branle Ă  ce mouvement universel qui fait la vie des astres, des animaux , des animalcules , des plantes & de leurs fƓtus depuis leur crĂ©ation. Certainement, h moins qu’on ne puisse prouver qu’un ĂȘtre fini peut ĂȘtre la cause de fa propre existence, que la matiĂšre inerte est la DE 1? H J S T 0 1 RE , &c. XXXV source de la vie & de l’intelligence , on ne pourra jamais faire croire Ă  la raison que les fƓtus des hommes , des animaux & des plantes, prĂ©exiĂ­lans Ă  la fĂ©condation dans les femelles , se sont créés cux-mĂȘmes avec tous leurs rapports , avec tous les alimens divers qui dĂ©voient les nourrir dans leurs difFĂ©rens Ă©tats , avec la liqueur sĂ©minale qui dĂ©voient les dĂ©velopper , avec tous les phĂ©nomĂšnes de l’Univcrs auxquels ils font plus ou moins immĂ©diatement liĂ©s. Admirons donc l’Etre des ĂȘtres qui, au moment de la crĂ©ation des ĂȘtres organisĂ©s , crĂ©a avec eux toutes leurs gĂ©nĂ©rations pendant la durĂ©e de la planĂšte oĂč ils doivent habiter. BĂ©nissons cette Providence Ă©ternelle qui a conservĂ© ces Ă©lĂ©mens des ĂȘtres organisĂ©s pendant toute la fuite des ĂȘtres , & qui les protĂšge contre les accidens qui leS menace toujours. Suivons cet Ɠil toujours ouvert 3u seul Bon qui couve ces ĂȘtres par ses regards hienfaifans , & qi i amĂšne leur dĂ©veloppement pour le tems oĂč ils doivent briller fur le théùtre du monde. A cette vue je m’élĂšve juf- c z xxxvi Ebauche ques Ă  l’Eternel architecte & lĂ©gislateur des mondes & de tous les ĂȘtres qu’ils ont renfermĂ©, qu’ils enserrent dans leur vaste enceinte & qu’ils rempliront pendant la fuite des siĂšcles. Je travaille Ă  m’approcher de lui par mes efforts pour connoĂźtre fes plans sublimes, ses perfections adorables , & fur-tout pour pĂ©nĂ©trer cette sagesse & cette bontĂ© adorable qui se manifestent avec tant d’éclat dans. le gouvernement du monde, dans la fĂ©licitĂ© de l’Univers & dans celle des individus. Mais quand on rĂ©flĂ©chit Ă  la ressemblance constante & parfaite des ĂȘtres organisĂ©s de la mĂȘme espĂšce, non-seu- lement existans avec nous & que nous voyons se dĂ©velopper, mais encore qui nous ont prĂ©cĂ©dĂ© & qui ont fait une partie de l’Univers depuis l’existence de la terre ,* on ne peut douter que cette ressemblance constante entre tous les individus de la mĂȘme espĂšce, & pendant toute la durĂ©e -du monde , ne soit un effet des loix du CrĂ©ateur car pour- roit-on imaginer qu’une ressemblance aussi grande , aussi permanente , aussi de l* Histoire, &c. xxxvii longue que la durĂ©e de la terre, ne fĂ»t pas l’eĂ­fet d’une loi statuĂ©e Ă  son origine, ou le produit d’une disposition faite pour tous les tems de son existence ? A quel moyen plus propre pour remplir ce but que celui que la Nature elle- mĂȘme nous montre employĂ© par la Souveraine Sagesse ! Tous les ĂȘtres qui dĂ©voient exister furent créés dĂšs le commencement avec tous leurs organes , avec leur forme ils Ă©toient incomparablement plus en petit, h l’enfant qui vient de naĂźtre, au petit chĂȘne qui fort du gland , ce que cet enfant est Ă  l’homme & ce petit chĂȘne Ă  celui qui donnera une ombre prĂ©cieuse aux troupeaux ; dĂšs-lors on comprend que cette ressemblance entre tous les ĂȘtres de la mĂȘme espĂšce n’est plus abandonnĂ©e au hasard. Chaque individu a tous ses membres , tous fes organes, tous fes traits ; & chaque individu , ayant la facultĂ© qu’il aura toujours de s’aĂ­similer par la nourriture les alimens qu’il aura Ă©laborĂ© , & de croĂźtre par cette assimilation jusques Ă  un certain point, chaque individu fe fera toujours xxxvm Ebauche depuis le moment de la crĂ©ation dĂ©veloppĂ© peu-Ă -peu , & fans changer de forme aura seulement acquis plus de volume. 11 est Ă©tonnant que cette idĂ©e, qui dcvoit fe prĂ©senter d’abord Ă  l’ef- prit , n’ait pas d’abord frappĂ© par fa grande probabilitĂ©, & qu’elle n’ait pas fait chercher plutĂŽt les preuves de fa vĂ©ritĂ© que la Nature prĂ©sente Ă  Haller & Ă  M. l’AbbĂ© SuailanzanĂź , & que M. Bonnet avoit pressenties avant qu’elles eussent Ă©fĂ© dĂ©couvertes. Je ne veux plus faire qu’une considĂ©ration les fƓtus font des machines organisĂ©es existans depuis six mille ans ; elles ont eu fans-doute depuis la crĂ©ation le mouvement nĂ©cessaire Ă  leur conservation & Ă  la circulation des fluides nĂ©cessaires Ă  leur nutrition , Ă  leur accroissement , Ă  leur vie. Qui leur a donnĂ© ce mouvement ? Si l’on pouvoit imaginer un instant oĂč il n’y eut ni mouvement ni moteur ; je le demande , oĂč feroit la cause du mouvement qu’on observe dans FUnivers? oĂč rĂ©sideroit le principe des forces en gĂ©nĂ©ral & des forces motrices en par- de L y H istoire, &c. xxxix ticulier ? Je n’entre pas dans cette discussion de mĂ©taphysique, mais j’en vois clairement la chaĂźne des raifonnemens & la soliditĂ© de leurs rĂ©sultats Mens agitat molem ; l’ESPRIT INFINI , le CrĂ©ateur de l’univers , le Tout- Puissant, leTout-Sage, leTout-Bon , PEternel. 11 faut observer avant d’aller plus loin , que les fƓtus doivent avoir leur sexe chez tous les ĂȘtres organisĂ©s qui en ont, qu’ils doivent ĂȘtre de mĂȘme hermaphrodites dans tous les fƓtus des ĂȘtres organisĂ©s oĂč l’on observe cette association des deux sexes dans le mĂȘme individu. Je fais bien qu’on ne peut pas dĂ©montrer ceci par des faits ; mais il me semble qu’on le dĂ©duit facilement des observations. Spallan- zani , ayant dĂ©montrĂ© que les fƓtus des Grenouilles , des Crapauds & des Salamandres Ă©toient parfaitement semblables avant la fĂ©condation Ă  ceux qui avoient Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s , dĂ©montre auĂ­lĂŹ qu’ils doivent ĂȘtre de sexes diffĂ©rens car la fĂ©condation , n’aĂźtĂ©rant point leur forme , leurs organes & leur cons- c 4 xl Ebauche titution , les laisse tels qu’ils Ă©toient avant la fĂ©condation , Ă  l’exception des mouvemens vitaux qu’ils font observer d’une maniĂšre sensible ; de sorte que , comme ils sont maies & femelles aprĂšs la fĂ©condation , il faut qu’ils le soient de mĂȘme avant. J’eil dirai autant des ĂȘtres organisĂ©s qui font hermaphrodites leurs fƓtus doivent l’ĂȘtre pareillement, & l’on n’en doutera plus si l’on pense que chaque fƓtus a Ă©tĂ© de tout tems en miniature avant la fĂ©condation ce qu’il doit ĂȘtre aprĂšs qu’il aura Ă©tĂ© fĂ©condĂ© ; c’est une machine organisĂ©e , parfaite Ă  tous Ă©gards dans fa petiteíßÚ , qui ne peut ĂȘtre modifiĂ©e que par un dĂ©veloppement, mais qui ne fauroit l’ĂȘtre par un changement ou une addition d’organes essentiels , Ă  moins qu’il n’y ait des circonstances particuliĂšres propres Ă  produire les monstruositĂ©s qu’on observe quelquefois. Quel spectacle que celui de tous ces fƓtus mĂąles & femelles qui fe dĂ©veloppent successivement depuis la crĂ©ation des ĂȘtres organisĂ©s. Je fais bien que l’imagination en est accablĂ©e ; mais de l*Histoire , &c„ xlĂŻ faut-il rejeter une vĂ©ritĂ© parce que rimagination n’a pas plus d’intelli- gence ? Il n’en fera pas moins vrai qu’un animalcule microscopique , appelĂ© , montre plusieurs gĂ©nĂ©rations emboĂźtĂ©es les unes dans les autres ; il n’en est pas moins vrai qu’on a vu dans l’oignon de hyacinthe la fleur qui devoir orner nos jardins dans quatre ans ; il n’en est pas moins vrai que la petite graine de Tonneau renferme dans fa coque Ă©troite cet arbre immense qui vĂ©gĂ©tera pendant des siĂšcles avec toutes les branches , les feuilles , les fleurs, les graines qu’il aura pendant tous ces siĂšcles ; il n’en est pas moins vrai que notre imagination fe brise toujours contre mille obstacles que la raison sait surmonter. Ces rĂ©flexions ne rĂ©solvent point un problĂšme intĂ©ressant sur cette matiĂšre. Les fƓtus des ĂȘtres organisĂ©s sont-ifs dissĂ©minĂ©s dans toutes les parties de la terre & de Tespace qui l’environne ĂŹ ou bien ont-ils toujours Ă©tĂ© logĂ©s danS le sein des femelles & emboĂźtĂ©s jusques Ă  un certain point les uns dans les au- xlii Ebauche tres ? Tout ce que j’ai dit jusques Ă  prĂ©sent fubsisteroit avec la double solution de cette question curieuse mais il me semble qu'o n peut aller encore plus loin, & prendre un parti fur ce sujet ; voici du moins les raisons propres Ă  dĂ©terminer dans ce choix, & Ă  ï’établir quand on l'a fait. J’observerai d’abord que les difficultĂ©s de l’imagination contre les fƓtus dissĂ©minĂ©s par-tout, font aussi nombreuses & auffi fortes que contre les fƓtus logĂ©s dans le sein des femelles & pfĂ©existans Ă  leur fĂ©condation ; puis- qu’ils doivent avoir le mĂȘme Ăąge dans les deux cas , que leur petitesse n'est guĂšre moins grande ; de forte qu’à cet Ă©gard on ne gagne rien. Dans le systĂšme de la dissĂ©mination, je ne vois pas trop comment les fƓtus peuvent ĂȘtre nourris avant qu’ils trouvent un berceau qui leur conviennent ; comment ils font alors placĂ©s dans le lieu le plus propre Ă  leur dĂ©veloppement , entĂ©s fur la femelle qui doit les faire vivre ; & comment fe forme le cordon ombilical qui les unit Ă  elle de l* Histoire, &c. xliii outre cela , comment une branche de prunier, entĂ©e sur un amandier, don- ne-t-elle un prunier & des prunes, fans donner jamais des amandes. Si les fƓtus Ă© toi en t dissĂ©minĂ©s , il semble que les fƓtus de l’amandier tombant fur la branche du prunier nourrie par l’amandier pourroit y trouver une nourriture propre Ă  dĂ©velopper des amandes & des amandiers ; de forte que , puisque la branche du prunier donne toujours des prunes , il faut qu’elle ne puisse dĂ©velopper que les fƓtus qu’elle renferme , qui font tous des fƓtus de prunes , & non des fƓtus d’amandes , qu’elle pourroit auĂ­lĂŹ bien recevoir que ceux de prunes , si tous les fƓtus Ă  dĂ©velopper dans la branche de prunier n’y Ă©toient pas rigoureusement enfermĂ©s. Si le terme d 'emboĂźtement qu’on emploie pour reprĂ©senter la fucceĂ­sion des fƓtus des ĂȘtres organisĂ©s renfermĂ©s dans les femelles n’exprime pas clairement ce qu’on veut peindre par ce mot, il ne faut pas juger la chose par le signe certainement, ce mot Ebauche & emboĂźtement n’a jamais signifiĂ© un encaissement semblable Ă  celui que reprĂ©sente une suite de boĂźtes placĂ©es les unes dans les autres. Mais on entend , par exemple , qu’une graine d’ormcau contient Tonneau auquel elle doit donner le jour avec toutes ses branches , ses graines , &c. ; alors . chacune de ses graines contient un autre ormeau avec ses branches & ses graines, dont chacune rĂ©pĂšte en plus petit le mĂȘme phĂ©nomĂšne j'en dis autant des boutons pour les branches , & des fƓtus d’animaux pour les races successives qu’ils doivent avoir. Toutes les preuves qui Ă©tablissent la prodigieuse divisibilitĂ© de la matiĂšre servent de preuves Ă  T emboĂźtement des fƓtus dans le sens fous lequel je T ai peint. Divers faits'concourent Ă  montrer cet emboĂźtement. Outre ceux que j'ai dĂ©jĂ  rapportĂ©s , il suffit de montrer le papillon encaissĂ© dans la chenille , les fleurs du marronnier & leurs marrons ployĂ©s dans le bouton , T arbre enveloppĂ© dans la graine, les dents cachĂ©es DE L* H 1 S T 0 I R E , &C. XLV dans la gencive des fƓtus de l’homme & des animaux. Quoi qu’il en soit, en voilĂ  je crois suffisamment , si ce n’est pas pour Moscrire entiĂšrement la dissĂ©mination des fƓtus , du moins pour rendre plus probable leur emboĂźtement c’est ce'que je m’étois proposĂ© de faire voir. Nous avons donc tous vĂ©cu depuis six mille ans avec les animaux, les animalcules & les plantes, qui sont nos contemporains. OuĂŻ, nous avons tous vĂ©cu , & nous avons vĂ©cu Ă  toute rigueur car , si un principe vital ne nous eĂ»t pas animĂ© depuis la crĂ©ation de la terre, qui est le moment de la nĂŽtre , certainement nous aurions cessĂ© d’ĂȘtre , & nous ne serions plus. Nous avons , Ă  la vĂ©ritĂ© , vĂ©cu sous une forme invisible ; notre vie Ă©toit alors bien diffĂ©rente de celle que nous avons, peut-ĂȘtre mĂȘme Ă©toit-elle encore beaucoup moins animĂ©e que celle du foetus qui vient d’ĂȘtre fĂ©condĂ© , ou plutĂŽt de celle du fƓtus qui est fur le point de l’ĂȘtre; mais nous n’en avons pas moins vĂ©cu , puisque nous nous sommes dĂ©veloppĂ©s. xlvi Ebauche Je ne cloute pas que des intelligences qui auroient des sens beaucoup plus dĂ©licats que les nĂŽtres ne pussent tracer les diffĂ©rentes phafe»de tous les dĂ©ve- loppemens que nous avons Ă©prouvĂ© pendant le tems de notre longue existence. La fille d’Eve , de qui descend sĂ»rement mon Lecteur, renfermoit une fuite de fƓtus moins considĂ©rable que fa mĂšre qui les contenoit tous ; de forte que , dans le mĂȘme lieu , ils pouvoient occuper un espace plus grand , puif- qu’ils Ă©toient dĂ©jĂ  en moindre nombre. J'en dis autant de chacune de ses descendantes jusques Ă  celle qui vous a donnĂ© le jour de forte que , successivement de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration , l’efpace destinĂ© au dĂ©pĂŽt des fƓtus augmentant Ă  mesure que leur nombre diminuoit, ils ont pu prendre un accroissement successif & proportionnel Ă  la place qusiĂźs occupoient , & qui dĂ©terminoit le moment de la possibilitĂ© de leur naissance dĂšs que les occasions de naĂźtre ou de fe dĂ©velopper davantage pourroient agir ; en forte que l’in- tenĂ­ĂŹtĂ© de leur vie, si je puis parler ainsi, DE Z,’ HI S T 0 I R E , &C. XLVlĂź est proportionnelle Ă  leur dĂ©veloppement. Ainsi donc , puisque ces fƓtus font créés dĂšs le commencement du monde , comme je l’ai dit , puisque ces fƓtus ont vĂ©cu , & nous ne pouvons en douter , car nous sommes formĂ©s par ces fƓtus eux-mĂȘmes qui ont pris tout leur dĂ©veloppement actuel, puisque depuis la crĂ©ation ils ont eu la possibilitĂ© de fe dĂ©velopper en ayant la place nĂ©cessaire pour ce dĂ©veloppement , il faut nĂ©cessairement qu’ils fe soient toujours dĂ©veloppĂ©s ; car il n’.y a point de vie fans dĂ©veloppement. Il est vrai que ce dĂ©veloppement a Ă©tĂ© singuliĂšrement lent; mais cela n’em- pĂȘche pas qu’il n’ait Ă©tĂ© rĂ©el & proportionnĂ© aux moyens que les fƓtus avoientpour fe dĂ©velopper , ou Ă  l’ef- pace qui leur Ă©toit assignĂ©. Si ces fƓtus fe font dĂ©veloppĂ©s, il faut qu’ils fe soient nourris ; f u n est une fuite nĂ©cessaire de l’autre. Mais oĂč est l’aliment convenable pour ces infinimens petits ? oĂč est le fluide assez subtil pour s’assimiler avec eux ? Dans les laboratoires de la Nature nous nc xlvhi Ebauche connoissons rien qui puisse remplir ce but. Nous savons que les derniĂšres ramifications de nos vaifleaux Ă©chappent aux efforts de sart pour les ap- percevoir , & nous pouvons supposer que les derniers calibres de ces vaisseaux dans les mĂšres font en proportion avec les vaisseaux les plus larges des fƓtus les plus grands qu’elles nourrissent , en y portant la nourriture dont ils ont besoin ; d’autant plus que la quantitĂ© de cette nourriture ne peut jamais ĂȘtre bien considĂ©rable ensuite il seroit possible que les fƓtus les plus grands prĂ©parassent les alimens convenables aux septus d'u n ordre plus petit, & ai n fi de fuite en dĂ©croissant jusques au dernier fƓtus qui se dĂ©veloppera & qui fera nourri par I’avant-dernier fƓtus Ă  dĂ©velopper qui le contient. Ces idĂ©es-lĂ  ne font point invraisemblables. On fait combien est considĂ©rable la masse du sang qui se porte dans les parties de la gĂ©nĂ©ration des femelles la multitude des fluides qui s’y prĂ©parent, le nombre immense des vaisseaux qu’on y observe ; tout cela ne de L 1 Histoire , &c. xlix ne permet-il pas de croire qu’on y trouve les filtres de ce fluide subtil que je soupçonne servir de nourriture aux fƓtus invisibles ? Et ce qui m’afFermit dans cette opinion , c’est que le cordon ombilical & l’amnios prĂ©existent Ă  la fĂ©condation dans les fƓtus , & que ces deux parties font probablement trĂšs- eĂ­Ăźentielles Ă  leur nourriture. Mais il y a plus , M. PAbbĂ© Spallanzani a observĂ© que les TĂȘtards font attachĂ©s aux ovaires, avant la fĂ©condation par un pĂ©dicule qui est peut-ĂȘtre le cordon ombilical parle moyen d u quel ces fƓtus font nourris , & qui est fans doute le moyen de l’accroiffement q u'ils reçoivent pendant TannĂ©e qui prĂ©cĂšde leur naissance austi ils fe dĂ©tachent des ovaires dĂšs qu’ils doivent ĂȘtre fĂ©condĂ©s, parce que le fƓtus trouve alors dans fes enveloppes les alimens nĂ©cessaires Ă  son Ă©tat, & le mucus dont il s’enveloppe dans les canaux des Ɠufs. Ainsi, puisque les fƓtus avant la fĂ©condation font attachĂ©s aux ovaires , il faut que ces attaches soient formĂ©es par un appareil de vaisseaux qui sert Ă  la circulation d l Ebauche nĂ©cessaire des fluides du fƓtus le plus grand avec ceux de la femelle ; vraisemblablement il y a auĂ­lĂŹ un appareil de vaisseaux semblable qui lie ce grand fƓtus avec ceux d’un ordre infĂ©rieur , & ainsi de fuite. Et pourquoi ce cordon ombilical dans des fƓtus qui ne font pas nourris par leur mĂšre aprĂšs la fĂ©condation , si ce n’étoit pour les nourrir avant la fĂ©condation de la mĂȘme maniĂšre qu’ils le font aprĂšs ? Ces idĂ©es font assorties avec ce que nous connoissons de l’économie animale , puisqu’elles font faire Ă  la Nature pour les fƓtus invisibles ce que nous lui voyons faire pour les fƓtus fĂ©condĂ©s ; mais , cependant, il faut bien fe persuader que, quoique ces idĂ©es soient vraisemblables , elles ne font pas la vĂ©ritĂ© , puifqu’elles font le fruit de l’analogie qui est souvent trompeuse , & qu’elles ne font point fondĂ©es fur des expĂ©riences directes. Cependant ces idĂ©es ne font pas destituĂ©es de toute espĂšce de fondement; les Grenouilles & les Crapauds insinuent la fuite des fƓtus dont j’ai parlĂ©. Si l’on ouvre une de i?H istoire y & c. u femelle dans le rems de les amours , on trouvĂ© clairement dans Ă­es ovaires deux fortes de fƓtus ; les uns assez gros, qui continuent Ă  grossir & qui tombent dans l'utĂ©rus quand ils ont pris toute leur grosseur ; les autres, beaucoup plus petits , qui relient dans les ovaires & qui fe mĂ»rissent pendant TannĂ©e qui s’écoule entre leurs amours. Ces ani- o maux accouchent des premiers fans accouplement, & les derniers restent clans le sein des femelles poury prendre Taccroissement qui leur est nĂ©cessaire , afin de pouvoir ctre fĂ©condĂ©s quand ils auront traversĂ© les canaux des Ɠufs , quand ils feront descendus dans T utĂ©rus, & mĂȘme quand ils feront hors du corps de la femelle. Les premiers font parfaits , en tant qu’ils ont reçu tout Taccroissement nĂ©cessaire pour ĂȘtre fĂ©condĂ©s ; la mĂšre les a nourris dans son sein pour cela mais les derniers , qui ont encore besoin de cette nourriture, restent dans les ovaires oĂč ils font attachĂ©s par ce pĂ©dicule dont j’ai parlĂ© ; il sert peut-ĂȘtre Ă  filtrer les sucs nourriciers que la mĂšre doit leur donner d a lii Ebauche pour les mettre en Ă©tat au bout d’unc annĂ©e d’ĂȘtre Ă  leur tour fĂ©condĂ©s. Audi pendant que ces derniers augmentent en volume & en masse , les autres fƓtus qui doivent ĂȘtre fĂ©condĂ©s pendant la troisiĂšme annĂ©e commencent Ă  leur tour Ă  devenir visibles; ce qui, comme je le difois , ne peut arriver que parce que ces fƓtus dans le sein de leur mĂšre font nourris & se dĂ©veloppent ce qui ne peut arriver encore que parce que ces fƓtus forment dĂ©jĂ  des touts organisĂ©s avec leurs vaisseaux & leurs organes , dans lesquels il fe passe en petit ce qui s’opĂšre plus en grand dans Ăźes ĂȘtres organisĂ©s qui ont acquis tout leur dĂ©veloppement. Mais ce que j’ai dit pour les TĂȘtards de Crapauds & de Grenouilles n’est pas moins vrai pour les fƓtus des oiseaux ; car l'on fait que les Ɠufs croissent dans les femelles des oiseaux qui ont conservĂ© la plus scrupuleuse virginitĂ© ; le fƓtus renfermĂ© dans l’Ɠuf a donc crĂ» avec lui , il est parvenu au point oĂč il auroit Ă©tĂ© s’il avoit Ă©tĂ© fĂ©condĂ©, & si l’incubation avoit pu le dĂ©velopper. de ^Histoire , &c. lui 11 falloit donc que ces fƓtus prĂ©existassent Ă  la fĂ©condation , qu’ils fustent susceptibles d’accroistement , & par consĂ©quent de nutrition ; qu’ils eussent les organes nĂ©cesiaires pour cela , comme je l’ai prouvĂ© pour les TĂȘtards. On peut faire une objection trĂšs- forte contre cette thĂ©orie. Si le fƓtus se dĂ©veloppe un peu avant la fĂ©condation , pourquoi ne se dĂ©veloppe-t-il pas entiĂšrement ; & s’il s’en dĂ©veloppe quelques-uns , pourquoi ne se dĂ©ve- Ioppent-ils pas tous Ă©galement ? Cette objection , qui semble d’abord trĂšs- raisonnable, perd beaucoup de sa force quand on l’examine avec rĂ©flexion. Les fƓtus ne peuvent se dĂ©velopper que proportionnellement Ă  la nature & Ă  la quantitĂ© des sucs qu’ils peuvent s’aĂ­fi- rniler ; de forte que, s’ils ne peuvent recevoir que les sucs propres Ă  les dĂ©velopper au point oĂč ils fe trouvent, il ne faut pas s’étonner s’ils ne Ă­e dĂ©veloppent pas davantage ; comme les hommes , lĂ©s animaux & les plantes ne peuvent se dĂ©velopper par la nourriture qu’ils prennent ou qu’ils peuvent Ăą 3 lĂźv Ebauche prendre que d’une quantitĂ© dĂ©terminĂ©e au-delĂ  de laquelle ils ne vont pas, mais en-deçà de laquelle ils relient souvent s’ils ne peuvent se procurer toute la nourriture qui leur cil nĂ©cessaire , ou si d’autres causes s'opp osent Ă  leur accroissement ; tels font souvent les animaux & les plantes expatriĂ©s ; tels font les animaux Ă  qui l’on retranche une partie de leur nourriture nĂ©cessaire , sur-tout dans leurs jeunes annĂ©es. Et fĂź les animaux se ressentent de cette privation d’alimens Ou font modifiĂ©s alors d’une maniĂšre sensible par les alimens qu’on leur donne , Ă  combien plus forte raison ne le seront pas davantage par ces moyens les fƓtus qui font d’une texture plus dĂ©licate , & Ă  qui leur grande simplicitĂ© rend si nĂ©cessaire une nourriture particuliĂšre. La cause du dĂ©veloppement des fƓtus non-fĂ©condĂ©s & des fƓtus fĂ©condĂ©s est la mĂȘme , elle ne varie que par l’intensitĂ© ; une nourriture plus forte , des organes plus Ă©nergiques feront toute la diffĂ©rence de la cause ; une assimilation plus considĂ©rable , une ex te n- de L*-Histoire, &c. lv sion plus grande, une soliditĂ© plus remarquable , l’opacitĂ© qui en rĂ©sulte feront toute la diĂ­Ăźerence des effets ainsi tout se pasiera dans les fƓtus non-fĂ©- condĂ©s comme dans les fƓtus fĂ©condĂ©s; avec la diffĂ©rence que la cause qui produit le dĂ©veloppement, & le dĂ©veloppement lui-mĂȘme , feront beaucoup moins sensibles dans les premiers que dans les derniers ; & si les fƓtus non- fĂ©condĂ©s ne fe dĂ©veloppent pas entiĂšrement , c’est parce qu'il n’y a pas une nourriture suffisante , ou des alimens propres Ă  en Ă©tendre davantage les mailles , ou parce que les vaisseaux des fƓtus n’ont pas une Ă©nergie suffisante pour Ă©laborer toute la nourriture qu’ils reçoivent & pour fe l’approprier. Ceci apprend encore pourquoi tous les fƓtus ne fe dĂ©veloppent pas Ă©galement; c’est parce qu’ils ne reçoivent pas tous la mĂȘme nourriture les plus avancĂ©s font nourris immĂ©diatement par la mĂšre , ils croissent proportionnellement Ă  la nature de l’aliment qu’ils reçoivent & qu’ils peuvent s’affimiler fans passer cette borne. Il est clair que d 4. l vi Ebauche les fƓtus qui font nourris aux dĂ©pens de celui-lĂ  reçoivent une nourriture moins substantielle que celle dont s’est dĂ©jĂ  nourri le fƓtus qui doit servir de mĂšre aux fƓtus qu’il alimente aux dĂ©pens des sucs qu’il a Ă©laborĂ© , comme il a Ă©tĂ© lui-mĂȘme nourri par fa mĂšre toute dĂ©veloppĂ©e ; mais nous avons dit que l’accroisscment Ă©toit proportionne! Ă  la nature ou Ă  la quantitĂ© de la nourriture. Si ce n’est pas Ă  l’irri- tabilitĂ© des organes qui peut ĂȘtre excitĂ©e par la nourriture qu’ils Ă©laborent ; donc ces seconds fƓtus qui tirent leur nourriture du prĂ©cĂ©dent fƓtus doivent avoir un accroissement proportionnel Ă  ce genre d’alimens qu’ils en tirent, & il doit ĂȘtre limitĂ© par les bornes que la nature de cet aliment doit leur donner. Mais comment admettre cette fuite de fƓtus invisibles ? Comme on est forcĂ© d’admettre l’existence du Poulet dans l’Ɠuf, quoiqu’on ne puisse pas le distinguer dans les premiers tems de l’incubation ; comme on croit Ă  l’exif- tence de son cƓur, qu’on apperçoit seulement au bout de quelques heures , & DE L* H 1 S T O I RE , &C. LVII des autres viscĂšres qui se dĂ©veloppent peu Ă  peu ; comme on croit aux jambes des Crapauds & des Grenouilles cachĂ©es fous l’enveloppe du TĂȘtard, quoi- qu’on ne puiĂ­Ă­Ăš les distinguer ; comme on croit aux ailes , Ă  la trompe & aux jambes du Papillon dans la Chenille, quoiqu’elles soient masquĂ©es d’une maniĂšre Ă  ne pouvoir les soupçonner sans, la dissection ; enfin , comme on croit Ă  l’exiĂ­tence des dents renfermĂ©es dans les alvĂ©oles des fƓtus & des enfans , quoiqu’on ne les puisse pas voir. II est vrai que l’Ɠuf, le TĂȘtard & la Chenille offrent quelque chose aux sens qu’ils peuvent saisir & sur quoi ils peuvent se reposer ; mais ne sera-ce pas la mĂȘme chose pour la raison, si on lui donne les causes de FinvisibilitĂ© des fƓtus qu’elle fait devoir exister ? . On ne peut distinguer les corps trans- parens lorsqu’ils se prĂ©sentent aux sens d’une certaine maniĂšre. Quand la transparence est parfaite , c’eĂ­t cette transparence mĂȘme qui empĂȘche d’apper- cevoir d’abord le Poulet dans l’Ɠuf fĂ©condĂ© , c’est cette transparence qui l v m Ebauche ne permet de voir ses parties diffĂ©rentes que successivement & Ă  mesure qu’elles perdent leur transparence ainsi , si les fƓtus existent avec cette transparence , il est clair qu’on ne peut les observer ; & pouvons-nous en douter, puisque les fƓtus fĂ©condĂ©s du Poulet ont cette transparence qui les rend invisibles. Cependant, parce que les fƓtus font transparens , je ne saurois en conclure qu’ils soient sous une forme fluide ; parce qu’un fluide ne sauroit ĂȘtre un corps organisĂ© , & que les fƓtus font Ă  tous Ă©gards organisĂ©s comme les corps auxquels ils donneront le jour par leur dĂ©veloppement. Quanta la figure des fƓtus , je croi- rois avec l’AbbĂ© Spallanzani qu’elle doit ĂȘtre sphĂ©rique , parce qu’elle renferme la plus grande quantitĂ© de matiĂšre fous le moindre volume. Cette Ă©norme petitesse des fƓtus Ă©toit sans-doute convenable. PremiĂšrement, elle Ă©toit trĂšs-nĂ©cestaire pour les femelles , dans TĂ©tĂąt aĂ©tuel, qui portent fans s’en douter toutes les gĂ©nĂ©rations qui doivent sortir d’elles ; secondement, D E l’ HI S T'O 1 R E , &c. LIX c’est dans l’analogie des fonctions de l’économie animale de subtiliser les fluides en les faisant circuler dans des vaisseaux dont le calibre diminue , & on le remarque sur-tout dans les fƓtus qui font fĂ©condĂ©s ; enfin il falloit bien que ces fƓtus l'e dĂ©veloppassent, mais il ne falloit pas que leur dĂ©veloppement nuisĂźt Ă  celui des femelles qui les nour- rissoient. On ne peut s’empĂȘcher de reconnoĂźtre en mĂȘme tems que la prodigieuse petitesse des fƓtus les garantit de mille accidens. Ne feroit-il pas possible que les sucs viciĂ©s parles maladies des mĂšres fussent trop grossiers pour pĂ©nĂ©trer dans les petits vaisseaux des fƓtus ? On remarquera peut-ĂȘtre que ces fƓtus , que je crois pleins de vie , font destituĂ©s de toute espĂšce de mouvement. Cela est vrai, s’il s’agit d’un mouvement apparent. Mais qui doutera de leur mouvement, aprĂšs avoir compris qu’ils peuvent croĂźtre & qu’ils font pleins de vie ; d’ailleurs f absence des mouvemens apparens ne prouvent pas qu’il n’y a point de mouvemens lx Ebauche internes. Que de Cataleptiques qUÍ vivent fans paroĂźtre se mouvoir. Les Loirs pendant l’hiver ne vivent-ils pas fans mouvement extĂ©rieur ? Le Poulet fĂ©condĂ© dans l’Ɠuf ne vit-il pas pendant plusieurs mois fans donner aucune apparence de mouvement quand il n’a pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ© ? Ne fait-on pas que le RotifĂšre mis Ă  sec peut vivre fans mouvement pendant vingt annĂ©es , & la reprendre auĂ­si-tĂŽt qu’il sent l'si timiditĂ© ? La circulation des humeurs peut ĂȘtre si lente qu’ellesuffit pour empĂȘcher les fƓtus & divers animaux de mourir; mais elle n’est pas suffisante pour lui faire donner des preuves de vie. Le fƓtus est prĂȘt Ă  fe dĂ©velopper, une nouvelle vie l’attend ; comment pourra-t-il la recevoir? 11 ne s’agit pas, il est vrai , de former l’ĂȘtre que la mĂšre doit mettre au jour ; il ne faut pas mĂȘme lui donner la vie, mais il faut hĂąter son dĂ©veloppement , le mettre en Ă©tat de recevoir peut-ĂȘtre dans une heure un accroissement infiniment plus grand que celui qu’il a reçu pendant six mille ans. Enfin, il faut qu’il ait les de l’Histoire, &c. lxi facultĂ©s nĂ©cessaires pour prendre peu Ă  peu tout l’accroissement dont il est susceptible. OĂč sera le ressort qui donnera une nouvelle Ă©nergie Ă  cette machine dĂ©jĂ  montĂ©e & en mouvement? comment toutes ses forces pourront- elles se dĂ©ployer de maniĂšre Ă  produire tout leur esset ? La liqueur sĂ©minale du mĂąle & un certain degrĂ© de chaleur le produiront auĂ­Ă­i-tĂŽt qu’elle aura touchĂ© le fƓtus par un point infiniment petit, comme les expĂ©riences de l’AbbĂ© Spallanzani le prouvent pour les TĂȘtards des Grenouilles & des Crapauds ; ou du moins aussi-tĂŽt qu’une trĂšs-perite quantitĂ© de cette liqueur sĂ©minale sera arrivĂ©e Ă  ce fƓtus , comme la fĂ©condation artificielle de la Chienne ne permet pas d’en douter. 11 paroĂźt dĂ©montrĂ© que le contact immĂ©diat de la liqueur sĂ©minale du mĂąle avec le fƓtus est indispensable- ment nĂ©cessaire pour opĂ©rer son dĂ©veloppement , puisque les expĂ©riences de l’AbbĂ© Spallanzani dĂ©montrent fans rĂ©pliquĂ© que la vapeur de cette liqueur est absolument inutile pour la fĂ©e on- Ebauche dation des TĂȘtards qu’on y expose aussi prĂšs qu’il est possible fans contact il paroi t mĂȘme que la partie Ă©paisse de la liqueur sĂ©minale est la seule qui soit fĂ©condante , puisque seau commune qu’on a mĂȘlĂ©e avec cette liqueur perd toute son Ă©nergie fĂ©condante austĂŹ-tĂŽt qu’elle a Ă©tĂ© filtrĂ©e plusieurs fois , parce que la partie Ă©paisse de la liqueur sĂ©minale est alors restĂ©e fur le filtre. II n’y avoit donc plus qu’à dĂ©couvrir comment la liqueur sĂ©minale peut pĂ©nĂ©trer le fƓtus , & agir fur lui d’une maniĂšre propre Ă  lui donner la vie. M. l’AbbĂ© Spallanzani, Ă  qui rien n’échappe , a dĂ©couvert que l’enve- loppc des fƓtus de Crapauds & de Grenouilles Ă©toit percĂ©e de mille pores, qui servent sans doute d’ouvertures au travers desquellesla liqueur sĂ©minale peut parvenir jusques Ă  saisi mal vivant. Quelle est donc faction de la liqueur sĂ©minale sur le fƓtus quand elle fa pĂ©nĂ©trĂ© ? Si l’on considĂšre les effets produits , on ne doutera point de la maniĂšre d’agir de la cause. M. f AbbĂ© Spallanzani a vu que les battemcns DE L y HI S T O I RE , &c. LXIII da cƓur dans les TĂȘtards prĂ©cĂ©doient beaucoup l’apparence du mouvement dans les autres viscĂšres, le dĂ©veloppement de leurs organes & celui de l’animal. 11 faut donc que la liqueur sĂ©minale agiĂ­se d’abord sur le cƓur ; mais, quoiqu’elle montre son effet sur le cƓur, ce n'est pas parce que le cƓur seul en a Ă©tĂ© touchĂ©, mais c’est parce que le cƓur seul en a Ă©tĂ© affectĂ© , & qu’il Ă©toit le seul organe assez irritable pour en recevoir des impressions remarquables aussi on ne peut douter que MM. Haller & Bonnet n’aient saisi la vĂ©ritĂ© , quand ils ont cru que la liqueur sĂ©minale Ă©toit un {simulant qui augmenroit l'irritabilitĂ© du cƓur , & qui, en Ă©branlant plus fortement ce grand ressort de toute la machine, communiquoit son mouvement Ă  toutes les parties ; c’esi sans-doute aussi en excitant cette irritabilitĂ© que la chaleur aide si puissamment le dĂ©veloppement des TĂȘtards fĂ©condĂ©s , comme M. SpĂ llanzani l’a observĂ© c’est ainsi que les Ɠufs des insectes & des oiseaux ont besoin de la chaleur pour Ă©clore, lxiv Ebauche soit parce que la chaleur augmente l’énergie de la liqueur sĂ©minale en favorisant l’évaporation des parties aqueuses , soit en mettant le muscle dans des circonstances plus convenables pour ĂȘtre irritĂ©es. Quoi qu’il en soit , le froid suspend beaucoup le dĂ©veloppement des TĂȘtards & des Ɠufs ; & l’on fait que c’est seulement quand les organes de la gĂ©nĂ©ration des plantes ont Ă©tĂ© Ă©chauffĂ©s par le soleil que la gĂ©nĂ©ration peut s’y opĂ©rer. Mais ce qui dĂ©montre la nĂ©cessitĂ© de la chaleur pour donner Ă  la liqueur sĂ©minale sa vertu fĂ©condante ; c’est que, si l’on emploie cette liqueur mise pendant un quart-d’heure dans un lieu oĂč elle Ă©prou- veroit le froid de la glace , elle ne fĂ©condera aucun TĂȘtard pendant qu’elle est froide , tandis qu’elle fera fĂ©condante aprĂšs avoir Ă©prouvĂ© ce froid pendant une demi-heure, pourvu qu’on lui laiffe reprendre la tempĂ©rature de l’air durant le mois de Mai. Il rĂ©sulte clairement de-lĂč que les fƓtus pĂ©riroient s’ils n’étoient pas Ă©chauffĂ©s , & l’expĂ©rience justifie ce rĂ©sultat. DE Z,’ H I S T O I RE , &c. LXV rĂ©sultat. Ausii la Providence a pourvu Ă  cela en plaçant les fƓtus dans le sein de leurs mĂšres oĂč ils Ă©prouvent une chaleur convenable , ou bien en leur donnant une nouvelle vie par Pincuba- tion naturelle ou artificielle qui la leur conserve quand ils l’ĂČnt reçue par la fĂ©condation, comme on Pobferve dans les Ɠufs des oiseaux ; ou bien en leur communiquant cette chaleur par le moyen de la tempĂ©rature de la saison qui agit sur eux, & qui produit le mĂȘme efiĂšt que l’incubation , comme on l’ob- serve dans les Ɠufs des insectes & dans les TĂȘtards qui Ă©closent Ă  un degrĂ© donnĂ© de la chaleur de Pair. 11 me semble avoir ainsi dĂ©montrĂ© Pinfiuence de la chaleur sur la fĂ©condation , & sur la conservation de la vie du fƓtus fĂ©condĂ©. II me paroxt clairement que la chaleur agit alors comme un moyen de dilatation qui favorise faction de la liqueur sĂ©minale par l’ou- verture des pores du fƓtus , comme un moyen d’évaporation qui le dĂ©bar- raiĂŻe d’une partie fluide nuisible Ă  l’irri- Ă­abilitĂ© qu’il doit avoir ; enfin , comme LXVI E B A V C H E un moyen d’irritabilitĂ© qui contribue Ă  le faire naĂźtre & Ă  l’entretenir c'est sans-doute pour cela que la liqueur sĂ©minale elle-mĂȘme doit -avoir un degrĂ© de chaleur suffisant pour ĂȘtre prolifique. Enfin , il faut donner au fƓtus l’ac- croissement qu’il doit avoir , & dĂ©velopper ses parties avec cette constance qui assure Ă  tous les individus d’une espĂšce la plus grande ressemblance. Quel est le moyen qui est employĂ© par la Nature ? Quel est l’aliment qu’elle prĂ©pare aux fƓtus ? Ici les expĂ©riences cessent de nous Ă©clairer ; mais la multitude des faits connus permet d’établir des opinions qui paroissent remplacer la vĂ©ritĂ© , si elles ne font pas la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme. M. Bonnet , par une analyse rigoureuse , par un examen approfondi de ces faits, est parvenu Ă  faire voir que la liqueur sĂ©minale devoit ĂȘtre la premiĂšre nourriture du fƓtus qu’elle avoit fĂ©condĂ© , & qu’elle Ă©toit la premiĂšre cause de la conservation de fa nouvelle vie aprĂšs en avoir Ă©tĂ© l’origine. II donne une foule de preuves frappantes pro- DE l’ HI S T O 1 R E , &C. LXVIt prĂ©s Ă  Ă©tablir cette opinion , & il les prĂ©sente avec cette sĂ©vĂ©ritĂ© de logique qui caractĂ©rise ses ouvrages & qui entraĂźne ses Lecteurs. 11 fait voir le fƓtus dĂ©veloppĂ© par Faction de la liqueur sĂ©minale sur lui ; mais il montre en mĂȘme te m s que ce dĂ©veloppement ne peut ĂȘtre produit que par la nutrition , & il demande si la liqueur sĂ©minale ne renfermeroit pas les principes nourriciers du fƓtus qu’elle a dĂ©veloppĂ©? II applique ses principes Ă  la ressemblance des enfans avec leur pĂšre, aux monstres & aux mulets. Son analyse , pour expliquer par ce moyen la formation du Mulet, meparoĂźt d’une trĂšs-grandeforce pour appuyer ses idĂ©es. Si l’on prend un Mulet formĂ© par l'accouplement de l’Ane & de la Jument , il est Ă©vident que le fƓtus contenu dans l’ovaire de la Jument est un Cheval en miniature qui devoit avoir les oreilles , le larynx & la queue du Cheval mais , aprĂšs la fĂ©condation , tout cela est changĂ©; ces parties se rapprochent beaucoup de celles de FAne, & s’éloignent des parties semblables du Cheval. II a donc e i lxviii Ebauche fallu que les Ă©lĂ©mens de la liqueur sĂ©minale de l’Ane , qui rĂ©pondent Ă  ces parties du fƓtus , continssent plus de particules propres Ă  favoriser le dĂ©veloppement des oreilles & du larynx que n’en contient celles du Cheval ; tandis que , d’un autre cĂŽtĂ© , elle a moins de parties pour dĂ©velopper la queue , d’oĂč rĂ©sulte l’aĂźongement des oreilles , un larynx nouveau & l’obli- tĂ©ration de la queue. M. Bonnet conclut que la liqueur sĂ©minale du mĂąle pĂ©nĂštre le fƓtus , puifqu’elle le modifie dans des rapports avec le mĂąle ; d’oĂč il rĂ©sulte que la liqueur sĂ©minale renferme des parties correspondantes Ă  diffĂ©rentes parties du mĂąle , puisqu’elle donne au fƓtus fĂ©condĂ© des traits de ressemblance avec le mĂąle fĂ©condateur. II y avoir donc dans la liqueur sĂ©minale de l’Ane des molĂ©cules correspondantes aux oreilles & aux larynx qui ne font pas dans la liqueur sĂ©minale du Cheval, & celle- ci auroit des molĂ©cules rĂ©latives Ă  la queue qu’on ne trouve pas dans l’autre? La liqueur sĂ©minale devient ainsi la de l’Histoire, &c. lxix nourriture des fƓtus ; elle paroĂźt lui ĂȘtre prĂ©parĂ©e par les circonstances pour son nouveau genre de vie , & elle portera dans le fƓtus avec une nouvelle vie les parties propres Ă  dĂ©velopper fur-tout les organes particuliers au mĂąle fĂ©condant. VoilĂ  un abrĂ©gĂ© de T Analyse intĂ©ressante que M. Bonnet a donnĂ© de son ouvrage dans le tome II de fes ConsidĂ©rations fur les Corps organisĂ©s , page 366 de sĂ©dition in-8°. jusques Ă  la page 411. Je souhaite que tous ceux qui voudront fe faire des idĂ©es justes fur la gĂ©nĂ©ration , ou qui seulement seroient curieux de voir ce que le gĂ©nie, la raison & l’expĂ©rience peuvent faire pour dĂ©voiler un sujet obscur , lisent les ConjĂŹdĂ©rations fur les Corps organisĂ©s , & fur-tout le morceau que j’in- dique qui en est un trĂšs-beau tableau. Ils y apprendront Ă  estimer davantage l’efpĂšce humaine ; ils y dĂ©couvriront en quoi consiste la vraie philosophie , & ils sentiront les obligations que notre siĂšcle & la postĂ©ritĂ© doivent au vrai Contemplateur de la Nature. o J e lxx Ebauche AprĂšs cette exposition des idĂ©es de M. Bonnet , & cette explication d u phĂ©nomĂšne de la fĂ©condation des fƓtus, je devrois finir ce sujet ; mais j’ai cru entrevoir quelques difficultĂ©s , qui ne font peut-ĂȘtre qu’apparentes, & qui ne le seront peut-ĂȘtre que pour moi. Quoiqu’il en soit, je les propose, parce que je n’ai pas pu les dissiper ; mais je les propose en annonçant leur grande foiblesse , puisqu’elles ne font pas des consĂ©quences de cette partie des ConsidĂ©rations fur les Corps organijĂ©s. Je dois avouer d’abord que les idĂ©es que j’adopte fur la nature de l’aliment du fƓtus ne font pas propres Ă  expliquer les phĂ©nomĂšnes des Mulets ; elles y laissent de l’obscuritĂ© mais, d’un autre cĂŽtĂ© , elles font une fuite des idĂ©es que j’ai fur les moyens de la conservation du fƓtus depuis six mille ans. Comme j’imagine qu’il a Ă©tĂ© toujours nourri par les sucs que lui a fourni la mĂšre qui le renfermoit, & qu’elle lui faifoit passer par le cordon ombilical, je n’ai pu concevoir qu’un nouvel aliment vĂźnt remplacer celui qui Ă©toit de i? Histoire, des expressions que mon caractĂšre m’empĂȘche de qualifier, en m’ordonnant de les repousser avec force. Je me borne Ă  prĂ©sent Ă  opposer, comme je l’ai dit, deux faits bien dĂ©montrĂ©s Ă  deux idĂ©es de M. Ingenhous. PREMIER FAIT. Je n’ai attaquĂ© nulle part M. Ingenhous, comme il me le reproche. 11 est vrai ĂŹ Ibid. p. 497. xcii RĂ©futa t j o n. que je ne pense pas comme lui fur divers sujets ; je l’aĂ­ dit franchement, Lc pourquoi ne l’aurois-je pas dit X Mais j’ai toujours soigneusement Ă©cartĂ© le nom de M. Ingenhous de tons les endroits oĂč je manifestois des idĂ©es opposĂ©es aux siennes ; je lui ai tĂ©moignĂ© publiquement de la reconnoissance &c de l’estime pour ses travaux. Cette conduite cst-elle une attaque, une guerre , comme il veut la repréí'eĂ»ter 1 Je le comprends d’autanr moins , que M. Ingenhous est forcĂ© d’avouer dans Ă­Ă©s acres remarques , que quelques-unes de Jes dĂ©couvertes y Ă©talent attaquĂ©es dans mes ouvrages avec des mĂ©nagemens & des Ă©gards que les hommes de lettres se doivent mutuellement }. SECOND FAIT. Mes Recherches fur P influence de la lumiĂšre solaire pour changer l'air fixe en air pur parurent Ă  GenĂšve dans le mois de Juillet 1783 ; je les donnai alors Ă  M. le Professeur De Saussure &c Ă  d’autres personnes elles rentĂšrment mes expĂ©riences pour montrer l’insluencc des eaux acidulĂ©es par les acides minĂ©raux Ă­k vĂ©gĂ©taux pour faire produire de Pair pur aux feuilles qu’on y expose au soleil. Ces expĂ©riences ont Ă©tĂ© faites, annoncĂ©es & publiĂ©es fans avoir eu le moindre soupçon qu’ellcs eussent ctĂ© faites par M. Ingenhous, 8Ă­ mĂȘme fans avoir pu en ĂȘtre informĂ© par M. le Chevalier Landriani, comme M. Ingenhous voudroit le faire croire dans ses remarques, quoique je lui eusse dit nettement dans ma lettre du Journal de Physique, que mes expĂ©riences fur ce sujet avoient Ă©tĂ© faites pendant l’étĂ© de 1782. Mais ce fait est capital ; il faut rĂ©tablir fans repiifue, & prouver au public que je lui ait dit la vĂ©ritĂ©. i°. M. le Chevalier Landriani , Ă©tabli Ă  Milan, avec qui j’ai heureusement une correspondance amicale Lc suivie, ne m’a jamais rien Ă©crit qui put me faire soupçonner que les feuilles exposĂ©es au soleil dans les eaux acidulĂ©es donnassent beaucoup d’air pur j’ai toutes ses lettres qui peuvent le dĂ©montrer. Mais M. le Chevalier Landriani lui-mĂȘme est parfaitement convaincu de ne m’aveir jamais rien Ă©crit i l’ermischte schriften, T. II. rĂ©futation. xciii lir ce sujet ; il reconnoĂźt n’en avoir point entendu parler avant la publication de mon ouvrage, Sc de n’en avoir jamais rien Ă©crit Ă  aucun de ses correspon- dans ; il me marque mĂȘme, Ă  l’occasion des remarques de M. Ingenhous fur ma lettre qu’il lui avoit Ă©crit, en s assurant, que dans les lettres de son ami , il n'y a pas un mot fur Varticle des eaux acidulĂ©es ; qu'il pouvoit Paflurer n'avoir r lili dit far cet article Ă  M. Senebier ; qu’il le dĂ©fait de trouver dans les lettres qu’il a Ă©crites Ă  fes amis & correspondan t , qui ne font pas en petit nombre , un seul mot fur cet article. II rĂ©sulte clairement de-lĂ  que, puisque M. le Chevalier Landkiani , qui doit m’avoir instruit des idĂ©es de M. Ingenhous , n’en a eu aucune connois- sance, ni directement ni indirectement, je ne puis en aucune maniĂšre en avoir Ă©tĂ© informĂ©. M. le Chevalier Landkiani a eu la complaisance de communiquer tout ceci avec ses dĂ©tails Ă  Son Excellence Monsieur le Comte DeWilzeck, qui daigne m’honorer de fa bienveillance. 2°. II Ă©toit impossible, par plusieurs raisons, que je fusse instruit allez de bonne heure des idĂ©es de M. Ingenhous pour pouvoir en profiter. Je le prouve en posant pour principe l’assertion mĂȘme de M. Ingenhous, qui avance que M. Landriani devoir m’avoir communiquĂ© ses idĂ©es fur l’influence des eaux acidu- lĂ©es pour faire produire de l’air pur aux feuilles qu’on y expose au soleil pendant le courant de l’étĂ© de l'an 1783. Mais i°. mes Recherches fur finfluence de la lumiĂšre solaire pour mĂ©tamorphoser l'air fixe en air pur , oĂč je traite le sujet des eaux acidifiĂ©es, Ă©toient imprimĂ©es dans le mois de Juillet 1783 , puisque je les donnois alors Ă  GenĂšve Je commencement de cet ouvrage, oĂč il s'agit particuliĂšrement des eaux ac id triĂ©es , Ă©toit imprimĂ© Ă  la fin d’Avril Sc dans les premiers jours de Mai de 1783. II falloit donc que mon ouvrage fĂ»t alors composĂ© ; que les observations 8c les expĂ©riences trĂšs-nombreuĂ­es qu’il renferme lussent faites Sc rĂ©pĂ©tĂ©es bien souvent , puisqu’elles ont, le caractĂšre singulier de bontĂ© qui leur mĂ©rite l’appro* XC 1 V RĂ©futation. bation de M. Ingenhous. Ce n’est pas rout, il lallolt que les feuilles de pĂȘcher, que j’ai fur-tout employĂ©es pour mes expĂ©riences , fussent poussĂ©es St qu’elles eussent acquis toute leur grandeur ; mais tout cela n’é- toit-il pas physiquement impossible, fi mes expĂ©riences n’avoient pas Ă©tĂ© faites pendant l’étĂ© de 1782 ? 2 0 . M. Ingfnhous prĂ©tend m’avoirfait instruire de ses dĂ©couvertes dans le courant de l’étĂ© de > 783. Je le prie d’en fixer plus scrupuleusement l’époque. Dans le courant de l’étĂ© 1783 ; est-ce au commencement ĂŹ Mais toute la partie de mon ouvrage fur les eaux aci- dulĂ©es Ă©toit imprimĂ©e Ă  la fin d’Avril 8c au commencement de Mai. Les propres expĂ©riences de M. In- cenhous n’étoient pas au moins achevĂ©es, puisqu’il les faisoit dans le courant de l’étĂ© de 1783 ; car le printems est plus tardif Ă  Vienne qu’à GenĂšve. Est-ce donc au milieu de l’étĂ© ? mais mon ouvrage Ă©toit alors achevĂ© d’imprimer. Sera-ce Ă  la fin de l’étĂ© ? mais mon ouvrage Ă©toit public depuis long-tems. II est donc Ă©vident que, quand M. Ikgenhous auroit eu l’honnĂȘtetĂ© de me faire connoĂ­tre les dĂ©couvertes, il n’y auroit eu aucun moment de l’étĂ© de 1783 dans lequel il m’eĂ»t Ă©tĂ© possible d’en profiter. 3°. Je veux aller plus loin , je veux supposer que mon livre imprimĂ© au mois de Juillet 1783 eĂ»t Ă©tĂ© entiĂšrement Ă  faire, 8c pour la forme 8c pour le fonds. Croira-t-on que le mot accidentel que prĂ©tend m’avoir fait dire , dans le courant de l'Ă©tĂ© de 1783 , m’eĂ»t donnĂ© un livre assez gros tout fait avec les expĂ©riences suivies 8c nombreuses qu’il renferme ? Croira-t-on que ce mot glissĂ© dans le courant de l’étĂ© de 1783 m’eĂ»t donnĂ© mon livre composĂ© 8c imprimĂ© dans le mois de Juillet de 1783. Croira-t-on que dans ce mois de Juillet, qui reprĂ©sente le mieux le courant de l'Ă©tĂ© de 1783 pendant lequel prĂ©- tend avoir eu la politesse de m’instniire de ses idĂ©es, j’aurois fait ces milliers d’expĂ©riences contenues dans mon livre, j’aurois composĂ© mon livre 8c je l’aurois fait imprimer je laisse Ă  M. Ingenhous Ă  tirer les consĂ©quences. 4°. Mais M. Ingenhol's oublie la vapeur qui a rĂ©- RĂ©futa t t O n. xcv ĂźnL pendant l’étĂ© de 1783 , & le passage de ma prĂ©face page xviii oĂč je dis Cette vapeur , ayant interceptĂ© plus ou moins les rayons du soleil , m'a empĂȘchĂ© de faire des expĂ©riences , & m'empĂȘche de donner des rĂ©ponses que j’aurois demandĂ©es Ă  la Nature rĂ©lativement Ă  quelques explications fur mes MĂ©moires. Si donc je ne croyois pas pouvoir faire avec exactitude des expĂ©riences rĂ©latives Ă  quelques Ă©claircissemens qii'on me demandoit, cn aurois-je entrepris de neuves 8c de dĂ©licates 1 auroient-elles rĂ©ussi avec un soleil aussi gasĂ© I auroient-elles mĂ©ritĂ© l'ap- probation de M. Ingenhous ? Aussi je ne comprends pas comment il a cru pouvoir bien faire des expĂ©riences parallĂšles aux miennes pendant le courant dt VĂ©tĂ© de 1783. 5 0 . Enfin, je ne dirai pas Ă  M. Ingenhous croyez- en les autoritĂ©s les'plus respectables; croyez M. le Professeur De Saussure qui a vu, dans mon Journal inexpĂ©riences, que j’ai recommencĂ© mes expĂ©riences fur les feuilles exposĂ©es au soleil dans les eaux acidu- lĂ©es par les acides minĂ©raux 8c vĂ©gĂ©taux le 17 Juin 1781 ; croyez-en M. De Saussure qui a vu ces expĂ©riences pendant l’étĂ© de 1782 ; croyez-en M. le Chevalier Landriani qui a vu ces expĂ©riences dans mon cabinet Ă  GenĂšve pendant le mois d’AoĂ»t 1782, 8c avec qui j’en ai beaucoup parlĂ© , comme il s'en rappelle fort bien. Je ne lui dirai pas, lisez une lettre que j’écrivois Ă  M. le Cheval er Landriani au mois de Novembre 1782 , 8c dont il a heureusement l’original, dans laquelle je lui marquois f ai Ă©bauchĂ© mon quatriĂšme volume , & il ne me reste pas grande chose Ă  faire pour le finir; ce qui suppose que mes expĂ©riences fur l’influence des eaux acidulĂ©es par tous les acides pour taire produire de l’air pur aux feuilles qu’on y expose au soleil Ă©toient faites pendant l’étĂ© de 1782, puisqu’elles forment la plus grande partie de ce quatriĂšme volume. Mais je lui dirai, croyez-en vos yeux ; lisez dans mes MĂ©moires Physico-Chymiques que je donnoĂŹs au mois d’AoĂ»t 1782 Ă  M. le Chevalier Landriani pendant son sĂ©jour Ă  GenĂšve ; lisez-y que ma dĂ©couverte sur rinfluence des eaux acidulĂ©es pour faire XCVI RĂ©futation. produire de l’air pur aux feuilles qu’ony expose au soleil Ă©toĂ­t faite alors, que je la suivois, Lc que je me propo- sois de la publier pendant TannĂ©e 1783 , comme je FaĂŻ fait. Enfin , je rapporterai le rĂ©sultat gĂ©nĂ©ral & trĂšs- important de plusieurs expĂ©riences que j'ai faites derniĂšrement ; c’est que , par le moyen de tous les autres acides , je puis faire fournir aux plantes une aussi grande quantitĂ© tsair dĂ©phlogiftiquĂ© que par le moyen de Vair fixe , comme je le prouverai dans le volume qui suivra ceux-ci , en racontant les expĂ©riences curieuses que je fais fur ce sujet. Voyez MĂ©moires Physico-Chymiques, tĂŽme III, p. zyr Ă  la fin. II rĂ©sulte donc Ă©videmment de tout ceci que je n’ai point attaquĂ© M. Ingenhous ; que j’ai eu pour lui tous les procĂ©dĂ©s que i’honnĂȘtetĂ© 8c la politesse peuvent dicter ; que je me fuis corrigĂ©, fans son secours, de l’erreur oĂč j’étois tombĂ© dans mes MĂ©moires Phy* sico-Chymiques ; que j’ai dit la vĂ©ritĂ© lorsque j’ai avancĂ© dans le Journal de Physique que j’avois fait les expĂ©riences dont il s’agit pendant l’étĂ© de 1782. Je finis pour ce moment l’honneur qui m’a dictĂ© ma dĂ©fense sur ces articles importans, m’a pressĂ© de la publier. J’aurois rempli mon but, si je me fuis justifiĂ© sans avoir Ă©tĂ© offensant. . . ' i, 1 EXPÉRIENCES WM Ă­**&ÈmÊ8k EXPÉRIENCES Pour servir Ă  f hijloire de la gĂ©nĂ©ration des Animaux & des Plantes. INTRODUCTION. Le premier Sc le second MĂ©moires de ce volume remplissent, jusques Ă  un certain point, la promesse que j’avois faite dans l’esquisse sur les reproductions animales que je publiois Ă  ModĂšne en 1768 , oĂč j’annonçois ma dĂ©couverte de la prĂ©existence du fƓtus Ă  la fĂ©condation dans une espĂšce de Grenouille je tĂąche aujourd’hui de dĂ©velopper cette dĂ©couverte de maniĂšre Ă  contenter un Lecteur curieux ; ÔC li j’ai tardĂ© li long-tems Ă  la publier , je ne l’ai pas perdu dĂ© vue j’ai pu observer , dans ce but, plusieurs autres animaux qui m’ont fourni les mĂȘmes rĂ©sultats, & qui m’ont fait prĂ©sumer avec plus de fondement, que la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation, dans les femelles, Ă©toit une des loix les plus gĂ©nĂ©rales de la Nature» A r Ex P É R r E N C E s 11. est rare, en Physique , que la recherche d’une vĂ©ritĂ© ne mĂšne pas Ă  d’autres qui se prĂ©sentent d’elles-mĂȘmes ‱, c'est ainsi que ces observations fur la prĂ©existence des fƓtus m’ont fait voir comme vivipare une classe d’animaux que tous les Naturalistes ont crue ovipare. Les fĂ©condations artificielles, que j’ai pu rĂ©aliser sur divers animaux , font le sujet de la seconde Partie ; on en voit les premiĂšres traces dans l’esquisse dont j’ai parlĂ© avec la liqueur sĂ©minale de divers animaux , j’ai fĂ©condĂ© leurs embryons , qui font nĂ©s comme si i’accouple- ment avoit prĂ©cĂ©dĂ© leur vie. La grande analogie, qu’on observe entre les vĂ©gĂ©taux 8 t les animaux, m’a engagĂ© Ă  rechercher II les embryons des plantes prĂ©existoient Ă  la fĂ©condation dans leurs ovaires, comme je l’ai dĂ©montrĂ© dans les animaux , Si je crois savoir prouvĂ© dans ma troisiĂšme Partie ; mais ces recherches m’ont fait dĂ©couvrir en mĂȘme tems, que la poussiĂšre fĂ©condante des plantes n’est pas d’une nĂ©cessitĂ© aussi absolue pour la fructification que quelques Botanistes l’imaginent. Les nouvelles analogies, que j’ai trouvĂ©es entre les animaux Si les plantes, me mettoient dans le cas d’entreprendre des fĂ©condations artificielles fur les plantes, comme je l’avois fait fur les animaux mais , quoique ces expĂ©riences aient Ă©tĂ© dĂ©jĂ  tentĂ©es avec succĂšs , je ne fais pas si elles ont Ă©tĂ© faites avec des vues vraiment philosophiques, Si pour dĂ©couvrir la maniĂšre dont s’opĂšre tous les jours cette admirable opĂ©ration dans les vĂ©gĂ©taux 3 j'avoue cependant que sur la GĂ©nĂ©ration. z des occupations d’un tout autre genre m’ont empĂȘchĂ© de les suivre, & j'ai cherchĂ© Ă  engager d'autres Naturalistes Ă  suivre ce travail en leur insinuant les moyens de le faire rĂ©ussir. Chacun rĂ©pĂšte que la gĂ©nĂ©ration est un mystĂšre , qui paroĂźt destinĂ© plutĂŽt Ă  exciter notre admiration qu’à devenir le sujet de nos recherches ; cette pensĂ©e favorise beaucoup l’inertie des paresseux. Quand l’on considĂšre le mystĂšre de la gĂ©nĂ©ration dans les te ms passĂ©s, il faut convenir qu’il Ă©toit .enveloppĂ© des tĂ©nĂšbres les plus Ă©paisses - , mais Haller St Bonnet y ont rĂ©pandu de la lumiĂšre St, quoique je fois bien Ă©loignĂ© de croire les avoir dissipĂ©es, cependant j’aime Ă  penser que j'ai diminuĂ© leur Ă©paisseur, & que j’y ai fait jaillir quelques rayons. C’eĂ­l au Lecteur Ă  juger si mes espĂ©rances font fondĂ©es , ou plutĂŽt si elles font l’esset condamnable d’un amour-propre qui m’a sĂ©duit. A ĂŻ i f XPÉKIEXCES MÉMOIRE PREMIER. PREMIERE PARTIE. De la gĂ©nĂ©ration de quelques animaux amphibies. CHAPITRE PREMIER. Histoire de la gĂ©nĂ©ration de la Grenouille verte aquatique. I. J a p p e l l e verte la Grenouille dont je vais parler, parce que la partie supĂ©rieure de son corps est teinte de cette couleur, d’une façon plus ou moins marquĂ©e , & parce qu’elle habite dans les eaux , mais sur-tout dans celles des marais oĂč croĂźt le riz, St des fossĂ©s ; je la distingue ainsi des Grenouilles qui habitent la terre St de celles qu’on trouve fur les arbres, dont je parlerai dans le Chapitre second. sur la GĂ©nĂ©ration. $ II. Le mĂąle a dans la rĂ©gion de la tĂȘte deux vessies membraneuses , qui font trĂšs-enflĂ©es quand il crie, avec une carnositĂ© au pouce des pieds antĂ©rieurs , qui devient trĂšs-sensible dans le tems de leurs amours. On ne les observe pas dans les femelles ; mais elles ont le dos St les flancs couverts de taches noires, qu’on n’observe que difficilement dans les mĂąles. I I I. Il ne faut pas confondre cette Grenouille avec celle que Roesel appelle rana viridis aquatica i ‱ II suffit de voir les belles figures qu’il en donne pour saisir la diffĂ©rence. Cette Grenouille de Roesel est plus grande que toutes les autres la nĂŽtre est plus petite ; elle en est Ă  peine le tiers , St encore celle-la n’est pas des plus grandes ; outre cela, elles ont fur l’épĂŹne du dos trois raies trĂšs-marquĂ©es d’une couleur jaune dorĂ©e , dont on n’apperçoit aucune trace dans la Grenouille que je dĂ©cris z. I V. Les amours de cette Grenouille commencent ordinairement, en Lombardie , au mois d’Avril, St finissent au mois de Mai mais ils font accĂ©lĂ©rĂ©s ou retardĂ©s par la chaleur plus ou moins grande de i’athmosphĂšre ; c’est alors que les mĂąles fatiguent flair par leurs cris en- t HiĂ­Lnatur. Ranarum, Novemb. 1758. r J’ai trouvĂ© cette diffĂ©rence encore mieux marquĂ©e en comparant ma Grenouille avec celle ds RoÂŁsel que j’ai pu avoir en vie. A 3 6 ExpĂ©riences nuyeux. Si l’on observe les Ɠufs avant qu’ils aient acquis leur maturitĂ©, comme en automne ou Ă  la fin du printems, on les trouve tous renfermĂ©s dans l’ovaire , qui est divisĂ© en deux lobes , divisĂ©s eux-mĂȘmes en lobes plus petits , enveloppĂ©s d'une membrane particuliĂšre ces Ɠufs ne font pas de la mĂȘme grandeur , les uns font trĂšs-petits St Ă  peine discernables Ă  l’Ɠil nu d, les autres font sept ou huit fois plus grands, mais tous ont la forme sphĂ©rique ; la couleur des plus petits est d’un gris livide, celle des plus grands est blanche d’un cĂŽtĂ© St noire de l'autre si l’on touche ces deux espĂšces d’Ɠufs avec la plus grande dĂ©licatesse , ils se brisent St se changent en une liqueur visqueuse St cendrĂ©e. V . L’ovaire de ces Grenouilles St de plusieurs autres paroĂźt semĂ© extĂ©rieurement de points noirĂątres, qui ont fait croire Ă  Vallisneri i St Ă  d’autres Naturalistes cĂ©lĂšbres , qu’ils Ă©toient les premiers rudimens du TĂȘtard , qui se dĂ©veloppe dans l’ceuf la cause de leur erreur a Ă©tĂ© produite par la prĂ©cipitation de leur jugement ; ils sc sont arrĂȘtĂ©s Ă  considĂ©rer ces points fur l’ovaire, fans chercher des Ă©clair- cissemens que l’intĂ©rieur pouvoir leur offrir ; mais mes expĂ©riences lĂšvent entiĂšrement l’équi- voque. i°. Si l’on dĂ©tache la membrane qui enveloppe tous les Ɠufs , St qtl’on pourroit > appeler le sac de Vovaire , ces points restent i OpĂ©rĂ© Fisico medicke , T. I. sur l a GĂ©nĂ©ration. 7 adhĂ©rens Ă  la membrane. i°. Si l’on examine, avec le plus grand foin tous les Ɠufs quand on a ĂŽtĂ© la membrane, aucun d’eux ne fera appercevoir le plus petit point noir. Enfin , en Ă©tudiant cette membrane au microscope , ces points noirs paraissent des taches noires d’une forme irrĂ©guliĂšre, qui peignent cette membrane; outre cela , l’on observe des taches semblables fur le mĂ©sentĂšre 8c le cƓur de ces Grenouilles. V I. Ceux qui observeront au printems lcsiikufs qu’ils avoient observĂ©s en automne 8c en fl&u les trouveront toujours dans l’ovaire, considĂ©rablement grossis je parle ici deC^'pĂźif' grands , §. IV ; ils les verront mĂȘme parvenus* Ă  l’état de maturitĂ© dans le tems de l’accĂŽw- plement. Ces Grenouilles s’accouplent comme celles qui ont Ă©tĂ© observĂ©es par Swammerdam 8c Roesel 1 le mĂąle monte fur le dos de la femelle , passe ses jambes antĂ©rieures fous les aisselles de celle-ci, il les dirige fous fa poitrine , de maniĂšre qu’il en croise les doigts, 8c qu’il la tient Ă©troitement liĂ©e Ă  lui jusques Ă  ce qu’elle se soit dĂ©barrassĂ©e de tous ses Ɠufs. La durĂ©e de l’accouplement a un rapport direct avec la chaleur de l’arhmosphĂšre si elle est forte, l’accouplement finit au bout de quatre ou cinq jours ; mais fi l’air est froid , il dure pendant huit ou neuf jours , 8>C mĂȘme pendant dix. J’imaginai de mettre dans de grands vases pleins d’eau les Grenouilles que je trouvois fur 1 BiblĂŹa natures , fĂ­iijr . Ranar. % ExpĂ©riences le point de s’accoupler, 8t de les garder jusques Ă  ce-quelles eussent fait leurs Ɠufs mais, quoique Vallisneri ait assurĂ© aprĂšs une feule expĂ©rience que les Grenouilles accouplĂ©es n’ac- couchoient point lorfqu’elles Ă©toient enfermĂ©es, j’ai vu plusieurs fois le contraire ; Swammer- dam St Roesel l’ont vu de mĂȘme avec moi. v i r. Mais Vallisneri observe fort bien, que les Grenouilles femelles ne pondent pas leurs Ɠufs Ă­i elles font toujours Ă©loignĂ©es des mĂąles. J’ai dit toujours, parce que j’ai trouvĂ© que Ă­ĂŹ on les sĂ©pare quand les Ɠufs font tombĂ©s dans l’utĂ©rus, ils en sortent quoique les femelles qui accouchent soient forcĂ©es Ă  rester solitaires ; mais ces Ɠufs font stĂ©riles. VIII. Si l’on veut connoĂźtre la situation des Ɠufs pendant l’accouplement , on les trouvera tous pendant les premiers jours dans l’ovaire durant les jours fuivans, ils seront en partie dans l’ovaire St dans les canaux des Ɠufs ; St vers le dernier jour, ils seront tous dans l’utĂ©rus, Ă  l’exception des plus petits,qui feront tous attachĂ©s Ă  l’ovai- re ceux qu’on trouve dans les canaux des Ɠufs St dans l’utĂ©rus font tous enveloppĂ©s dans une espĂšce de glaire visqueuse 8t tran fparente, qu’on appelle mal-Ă -propos la semence des Grenouilles. I X. Quelques nombreuses que soient les expĂ©riences que j’ai faites pour voir si les Ɠufs tirĂ©s de l’ovaire, des canaux des Ɠufs 8t de l’utĂ©rus pendant l’accouplement Ă©toient fĂ©conds, SUK LA G ÉX ÊRA T I OKI y j’avouerai franchement qu’aucune n’a rĂ©uíßÏ mais, comme ce fait est trĂšs-important, je n’avois rien nĂ©glige pour le connoĂźtre } 8Ă­ je vois dans mes journaux, que, quoique j’aie ouvert cent cinquante-fix Grenouilles femelles accouplĂ©es , & quoique j’aie placĂ© les Ɠufs dans l’eau auslĂŹ-tĂŽt que je les avois tirĂ© du sein de leur mĂšre, cependant tous ces Ɠufs ont Ă©tĂ© stĂ©riles , 8c fe putrĂ©sioient d’abord ; tandis que ceux qui Ă©toient sortis d’eux-mcmes hors de l’utĂ©rus, par l’anus de la femelle, pendant qu’clle Ă©toit accouplĂ©e, ne tardoient pas Ă  sc dĂ©velopper & Ă  donner naissance aux TĂȘtards fĂ©condĂ©s. J’ai fait plus ; comme il faut plus d’une heure pour la sortie entiĂšre des Ɠufs, je prenois le reste des Ɠufs qui Ă©toient dans l’utĂ©rus de la Grenouille , quelques momens avant la fin de l’accouchement ; je les mettois dans la mĂȘme eau oĂč sc trouvoient ceux qui avoient Ă©tĂ© produits par un accouchement naturel mais, tandis que ceux-ci donnoient bientĂŽt naissance aux TĂȘtards, les autres sc putrĂ©sioient. II rĂ©sul- toit de ces expĂ©riences cette vĂ©ritĂ© incontestable ; c’est que les Ɠufs sc fĂ©condoient hors du corps de la Grenouille, 8t non au-dedans d’elle. LinnĂ© s'est donc bien trompĂ© quand il a prononcĂ© dĂ©cisivement Nullam in rerum natura , in ullo vivente corpore jieri fƓcunda- tionern vel ovi impregnationem extra corpus matris. Artedi Ichtyologie, Pars II, p. 3 z. X. Le sentiment dc FrĂ©dĂ©ric Menzius, Professeur de LeipĂ­lc , n’est pas moins solidement ĂŹo ExpĂ©riences anĂ©anti ; il avait imaginĂ© que, pendant l’accou- plement, la liqueur sĂ©minale sortait de la proĂ©minence charnue qu’on observe au pouce du mĂąle , §. II , qu’elle entroit alors dans la poitrine , & arrivait par mille chemins inconnus dans l’ovaire , pour en fĂ©conder les Ɠufs i. X I. Mais iĂŻ la fĂ©condation se fait hors du corps de notre Grenouille , comment s’opĂ©rera-t-elle? Peut-ĂȘtre dirons-nous que le mĂąle arrĂȘte les Ɠufs avec fa liqueur sĂ©minale, Ă  mesure qu’ils sortent de lanusde la femelle 2 E X P É R I E N C E S C II APITRE II. GĂ©nĂ©ration de la Grenouille des arbres. X X. Je ne m’étendrai pcrtnt dans'ce Chapitre 8c le suivant, pour Ă©viter la rĂ©pĂ©tition de ce que Roesel a dĂ©ja dit en traitant ce sujet; je me contenterai d’y ajouter quelques observations Ă©chappĂ©es Ă  ce Naturaliste , ÂŁ>C d’éclaircir quelques Ă©quivoques ou erreurs qui se sont glissĂ©s dans son histoire de ces deux Grenouilles. Cette Grenouille est trĂšs-petite , son dos est peint d’une trĂšs-belle couleur verte ; elle gravit le tronc des arbres par le moyen d’un suc visqueux, qui sort de la partie infĂ©rieure de ses pieds , 8t qui la fixe aux corps qu’ils touchent ; elle Ă©tablit fa demeure fur les arbres pendant l’étĂ© ; dans le printems, elle descend dans les eaux croupissantes des fossĂ©s, des marais c’est-lĂ  qu’clle multiplie son espĂšce. XXI. Quoique le mĂąle, dans le tems de l'accouplement , se cramponne fortement sur sa femelle avec ses bras , ce n’est point en les passant de maniĂšre qu’ils arrivent fous .la poitrine , comme on f observe dans l’accouple- ment de la Grenouille verte aquatique, §. VI; mais il les pousse Sc les cache fous les aisselles s v r la GĂ©nĂ©ration. rl de sa femelle , 8c elle n’est point exposĂ©e aux funestes accidens qu’éprouvent les Grenouilles vertes dans l'accouplement , qui pĂ©rissent souvent avant d’avoir achevĂ© leur accouchement , portant sur leur poitrine les contusions Sc mcme les fractures occa/ionnĂ©es par la violente compression des mĂąles. XXII. L’accouplement de ces Grenouilles dure quelquefois , suivant Roesel , pendant trois jours , quelquefois il finit au bout d’une journĂ©e je ne les ai vu durer que quelques heures ; mais cela peut ĂȘtre produit par la chaleur du climat , qui rend l’accouchement plus promt. XXIII. Roesel rapporte que durant l'accouplement , la femelle unie au mĂąle se plonge souvent dans l’eau ; Sc qu’elie y reste mĂȘme enfoncĂ©e pendant un tems assez long ; qu’alors le mĂąle approche plulieurs fois l’extrĂȘmitĂ© de son corps de celui de la femelle ; Sc que le mouvement se rĂ©pĂšte avec plus de vivacitĂ© , lorsque les Ɠufs sortent. J’avoue que , malgrĂ© la plus grande attention , je n’ai jamais pu remarquer la partie qui caractĂ©rise le mĂąle, ni aucune liqueur qui s Ă©chappĂ© pour fĂ©conder les Ɠufs. XXIV. Quoique je n’aie jamais pu voir aucune protubĂ©rance , ou papille , qui reprĂ©sentĂąt le pĂ©nis ; cependant, en laissant ces Grenouilles accouplĂ©es hors de l’eau, §. XII, j’ai pu Ă©clair- B Z ExpĂ©riences cir mieux que Roesel ce point de la gĂ©nĂ©ration. Voici ce que j’ai vu. Une demi-heure avant que la femelle pondĂźt ses Ɠufs , le mĂąle s’échaustoit, allongeant autant qu’il pou- voit la partie postĂ©rieure du corps, de maniĂšre que son anus Ă©toit en contact avec celui de la femelle ; Sc , aprĂšs l’en avoir Ă©loignĂ© , il le rapprochoit d’abord ce mouvement Ă©toit plus frĂ©quent quand les Ɠufs sortoient du corps de la mĂšre , 8c il duroit pendant tout le tems de cet accouchement. X X V. Je n’aijamais pu appercevoir, alors, aucune trace de liqueur sĂ©minale ; mais en soulevant un peu la partie postĂ©rieure du mĂąle, j’cn vis sortir une liqueur transparente , qui Ă©toit la liqueur sĂ©minale de l’animal ; car , comme je me servis des petits caleçons , qui dĂ©voient empĂȘcher le mĂąle de rĂ©pandre fa liqueur fur les Ɠufs , §. XIII, les Ɠufs ne se dĂ©veloppĂšrent pas , Sc les caleçons furent baignĂ©s de la liqueur sĂ©minale , comme cela arriva pour la Grenouille verte , §. XIII. XXVI. On a vu que les Ɠufs prĂ©tendus de cette Grenouille ne font jamais fĂ©condĂ©s que lorsqu’ils sortent du sein de leur mĂšre. Cela arrive-t-il de mĂȘme pour les Grenouilles des arbres ? J’ai trouvĂ© une diffĂ©rence ; les Ɠufs de l’utĂ©rus, les plus voisins de l’anus , font quelquefois fĂ©condĂ©s , quoiqu’ils ne soient pas encore hors du corps de la femelle ce phĂ©nomĂšne singulier mĂ©rite une attention particuliĂšre Roesel s v r la GĂ©nĂ©ration. r z observe, avec justesse, que les Ɠufs de notre Grenouille descendent dans l’utĂ©rus avant l’ac- couplement ; inais Ă­i l’on tire alors les Ɠufs hors du corps de la Grenouille, Sc qu’on les place dans l’eau pour les faire Ă©clore , il n’en Ă©clot aucun. II arrive la mĂȘme chose aprĂšs l’accouplement, li la Grenouille n’a pas commencĂ© d’accoucher ; mais, au contraire , dĂšs que les Ɠufs commencent Ă  sortir par J’anus ; Ă­i l'on ouvre la Grenouille qui accouche , Sc qu’on mette ses Ɠufs dans l’eau , avec la prĂ©caution de sĂ©parer , dans un vase particulier, les Ɠufs les plus prĂšs de l’anus , on verra Ă©clore quelques-uns de ces Ɠufs , tandis que tous les autres pĂ©riront ce qui annonce clairement que la liqueur sĂ©minale s’inlinue un peu dans les parties intĂ©rieures de l’anus, ou qu’elle y est injectĂ©e par le mĂąle ; ou , comme il me paroĂźt plus probable , parce que les Ɠufs fĂ©condĂ©s extĂ©rieurement, Sc qui font les plus prĂšs de l’anus, rentrent dans le corps de la Grenouille, quand l’Observateur la prend pour l’ouvrir , Sc quand elle cesse d’en faire sortir d’autres hors de l’utĂ©rus. XXVII. Comme cette Grenouille est trĂšs-petite , ses Ɠufs font aussi trĂšs-petits , un des hĂ©misphĂšres est peint en jaune , l’autre en noir; ĂŽt quand on les tire des canaux des Ɠufs ou de l’utĂ©rus, ils font encroĂ»tĂ©s de cette glu visqueuse , qui a Ă©chappĂ©, je ne sais pourquoi, Ă  l’ceil de Roesel , puisqu’il assure qu’on ne B 4 14 ExpĂ©riences l’observe que dans les Ɠufs qui ont Ă©tĂ© pendant douze heures plongĂ©s dans l’eau. XXVIII. Chaque Ɠuf est donc enveloppĂ© dans une petite sphĂšre mucilagineuse , comme on la volt dans les numĂ©ros i , z , 3 , figure V , planche 1. Les petites sphĂšres, comme les Ɠufs qu’elles renferment, subissent dans l’eau ces changemens ; la petite sphĂšre croĂźt en vo- ‱ lume , de mĂȘme que l’Ɠuf, St ils s’alongenc en mĂȘme tems pendant que l’Ɠuf s’alonge il heurte une membrane circulaire, placĂ©e au- dedans de la sphĂšre glutineuse ; il l’oblige Ă  se fendre en deux par un cĂŽtĂ© , &C Ă  mesure que l’Ɠuf s’alonge la fente s’accroĂźtj enfin, la membrane reste sĂ©parĂ©e, $Ă­ se prĂ©sente comme deux segmens de sphĂšres, ou deux calottes. Alors on commence Ă  appercevoir une seconde membrane circulaire , beaucoup plus subtile, ÔC qui est moins propre Ă  frapper la vue ; si l’on rompt cette membrane , on la trouve pleine de liqueur elle est le vĂ©ritable amnios du TĂȘtard , comme on le voit ensuite plus clairement. Pendant que les deux calottes, en se sĂ©parant entr’elles, ou restant seulement unies dans un petit nombre de points, sontaustĂŹ sĂ©parĂ©es de l’amnios, elles ne s’étcndent plus; mais la membrane de l’amnios devient, non-feu- lement plus Ă©paisse & plus sensible, elle s’étend encore assez pour devenir plusieurs fois plus grande ; l’Ɠuf reçoit aussi cet accroissement, & il le fait Ă©prouver graduellement Ă  la mem- Sun la GĂ©xĂ©ratiok! 1 $ brane qu’il Ă©tire , suivant les grosseurs qu’il prend lui-mĂȘme. XXIX. Quand lc TĂȘtard s’est alongĂ©, une de ses extrĂ©mitĂ©s grossit , $C l’autre devient plus mince ; il arrive alors que pendant l'observation suivie des changemens de cet Ɠuf, l’Observateur voit l’Ɠuf lui-mĂȘme commencer Ă  se mouvoir , tournant lentement sur lui-mĂȘme comme un dĂ©vidoir ; & peu-Ă -peu se contournant au point de faire toucher ses deux extrĂ©mitĂ©s , les Ă©loignant ensuite l’une de l’autre pour revenir Ă  sa premiĂšre position. Cette nouveautĂ© en prĂ©cĂšde une autre ; bientĂŽt on voit paroĂźtre sur la pointe de l’extrĂȘmitĂ© , qui s’est grossie , deux proĂ©minences , qui rappellent Ă  l’esprit les deux petits boutons dont se sert le TĂȘtard pour s’a- marrer aux corps, §. XV; plus haut s'Ă©lĂšvent deux petites tumeurs qui annoncent les yeux ; 8c deux jours aprĂšs, ces deux soupçons font changĂ©s en rĂ©alitĂ© on comprend que je fus de nouveau obligĂ© de substituer Ă  l’idĂ©e fausse d’un Ɠuf, l’idĂ©e plus vraie d’un TĂȘtard. Si le Lecteur jette les yeux fur le numĂ©ro 4 de la figure V, il verra une petite sphĂšre mucilagi- neuse , la membrane qu’clle renferme , bc au milieu , le TĂȘtard qui se dĂ©veloppe les numĂ©ros 1 , 2 , 3 de la figure VI, reprĂ©sentent la membrane qui se partage peu-Ă -peu en deux segmens ; le numĂ©ro 4 montre les deux segments entiĂšrement ouverts , laissant en libertĂ© le TĂȘtard courbĂ© en arc dans le numĂ©ro 6 on apperçoit l’amnios plein de liqueur dans le ExpĂ©riences cercle pointillĂ© S , St l'on y voir nager le TĂ©-2 tard. Les deux calottes font encore plus ouvertes dans la figure VII ; les deux arnnios font trĂšs-vifibles, 8t l’un d’eux fe trouve dĂ©jĂ  sĂ©parĂ© des calottes. XXX. Ces TĂȘtards prĂ©existent-ils Ă  la fĂ©condation, comme ceux de la Grenouille aquatique, §. XIX ? Pour rĂ©soudre cette question, il falloit entreprendre une rigoureuse comparaison j les ceufs prĂ©tendus fĂ©condĂ©s par le mĂąle, St ceux qui certainement ne l’avoient pas Ă©tĂ© , St qui croient descendus dans l'utĂ©rtir avant l’ac- couplement, §. XXVI ; j’ai suivi cette comparaison avec la circonspection la plus scrupuleuse, §. XVIII j St je puis assurer avoir trouvĂ© la plus exacte ressemblance entre ces deux espĂšces d’Ɠufs ce qui me force encore Ă  re- connoĂźtre que, dans cette espĂšce de Grenouille, les foetus prĂ©existent dans la femelle avant la fĂ©condation. XXXI. Ces fƓtus de Grenouilles continuent Ă  Ă­Ăš dĂ©velopper pendant leur prison dans l’amnios, oĂč ils restent plus long-tems que les TĂȘtards de la Grenouille aquatique verte ; ils n’en sortent , pour l’ordinaire , qu’au bout de six ou sept jours ; St l’on commence alors Ă  dĂ©couvrir les Ă©lĂ©mens des nageoires ; d’abord ils nagent lentement fur l’eau , mais ils acquiĂšrent de la vitesse avec des forces. La figure VIII reprĂ©sente ces TĂȘtards sortis de l’amnios, St grossis svr la GĂ©xĂ©ratiox. ry par le microscope ; on apperçoit leurs nageoires au-dessous de la tĂȘte A A. XXXII. Si je compare mes observations avec celles de Roesel , je les trouve disscrentes. Voici le sommaire de ses rĂ©sultats fur la gĂ©nĂ©ration de la Grenouille des arbres. XXXIII. D’abord les Ɠufs fĂ©condĂ©s croissent en volume ; puis on commence Ă  dĂ©couvrir les TĂȘtards , qui semblent n’avoir alors qu’un ventre, quoiqu’on distingue nettement leurs tĂȘtes Sc leurs queues. Chaque TĂȘtard nage dans un blanc d’Ɠuf , qui est cette petite sphĂšre muci- lagineuse qui enveloppe le TĂȘtard, §. XXVIII ; son ventre est sur-tout formĂ© par le jaune , que cet Auteur appelle Yccuf dc Grenouille. II place Ă  la queue deux vĂ©sicules, qui ne font que les deux calottes dont j'ai parlĂ©, §. XXVIII ; & ces vĂ©sicules se sĂ©parent ensuite, en se pia- çant l’une Ă  la tĂȘte, I’autre Ă  la queue. Roesel conjecture que le TĂȘtard, mis alors en mouvement , prend fa nourriture par le moyen de la vĂ©sicule de la tĂȘte ; mais il avoue qu’il ignore l’usage de la vĂ©sicule de la queue. XXXIV. Quoiqu’il soit vrai que le TĂȘtard , dans ses premiers accroissemens , ait un ventre assez gros ; il est cependant faux , ou du moins c’est trĂšs-improprement qu’on dit, que le ventre du 1 Ă©turd est en trĂšs-grande partie formĂ© par le jaune , ' puisque le jaune supposĂ© n’est que le TĂȘtard lui-mĂȘme, §. XXIX tout com- r 8 ExpĂ©riences me il seroit impropre de dire que le ventre d’ua animal fut formĂ© par ranimai lui-mĂȘme. XXXV. La description donnĂ©e par le Naturaliste Allemand de l’apparition des deux vĂ©sicules, annonce , s'il m’est permis de le dire , bien peu d’attention dans l’Obfervateur ; ou plutĂŽt elle seroit croire que l’Observateur n’a pas suivi ce fait, Sc qu’il l’a peint par sauts ; car , avec un peu de foin Sc de constance, on ap- perçoit bientĂŽt une petite sphĂšre que les chocs du TĂȘtard sĂ©parent en deux calottes; ou, comme dit l’Auteur, en deux vĂ©sicules, qui ne parodient point Tune aprĂšs l’autre, mais qui existent ensemble , §. XXVIII. XXXVI. Si Roesel avoit pris ces vĂ©sicules avec de petites pinces, il auroit bientĂŽt vu qu’elles ne servoient pas Ă  la nourriture du TĂȘtard ; mais qu'on peut les enlever, fans lui nuste, au moment oĂč elles parodient, c’est-Ă -dire , au moment oĂč elles se sĂ©parent en deux. XXXVII. Mais l’amnios est une partie tellement essentielle Ă  cet animal, qu’on ne peut l’en priver dans ces premiers tems fans lui ĂŽter la vie , §. XXVIII, XXXI comme Roesel n’en parle pas , il est bien sĂ»r qu’il ne l’a pas connu ; car, quoique l’on trouve cette membrane dans toutes les espĂšces de Grenouilles Òc de Crapauds qui naissent, il n’en dit pas le plus petit mot dans leur histoire , quoique Swammerdam l’eĂ»t observĂ©e , & que l’Observateur de Nu- SUR LA GÉX ÉRAT1 OS. lCf iremherg se flatte de marcher sur les traces du fameux Observateur hollandais. XXXVIII. Roesel avoit bien remarquĂ© une qualitĂ© accidentelle des TĂȘtards qui pĂ©rissent dans l’am- nios, oĂč comme il dit des Ɠufs infĂ©conds ; c’est de perdre leur forme, 6c d’en prendre une quelquefois alongĂ©e, quelquefois en forme de poire , quelquefois oblongue,, quelquefois Ă©troite dans le milieu , 6c de semblables on voit quatre de ces TĂȘtards qui ont pĂ©ri, peints dans la figure V, aux lettres A B C D. XXXIX. Les TĂȘtards de cette espĂšce de Grenouille ne naissent que lorsqu’on en prend un grand soin il faut les tenir, non-seulement dans l’eau pure , mais encore dans celle oĂč ils ont Ă©tĂ© pris 6c accouchĂ©s, ce font les eaux des fossĂ©s, des petits marais, §. XX ; cette prĂ©caution n'a pas Ă©tĂ© absolument nĂ©cessaire pour la naissance des autres Grenouilles 6Ă­ des autres Crapauds ; l’eau de puits m’a toujours paru leur suffire. 3 ° ExpĂ©riences CHAPITRE III. GĂ©nĂ©ration du Crapaud , appelĂ© par Roesel Bufo terrejlris dorso tuberculis exasperato oculis rubris. X L. C^vJoicjue Roesel , cn parlant de cet horri- ble animal, n’en déíigne qu’une espĂšce , je suis fort portĂ© Ă  croire qu’i! y en a deux dans nos pays, au moins si on les juge par leur figure extĂ©rieure. Ils diffĂšrent, non-sculement par la couleur ; car il y a des Crapauds dont le dos ĂŽĂ­ les cĂŽtĂ©s font peints d’une couleur cendrĂ©e avec des tubercules peu colorĂ©s , tandis que d’autres font d’un verd clair, avec des tubercules qui roussissent dans l’obscuritĂ© malgrĂ© leur diversitĂ© spĂ©cifique , je parlerai de ces animaux dans ce Chapitre comme s’iis ne faisoient qu’une espĂšce, parce que je n’ai pas observĂ© la moindre diffĂ©rence dans leur gĂ©nĂ©ration. X L I. Ce Crapaud est de toutes les Grenouilles & Crapauds que je comtois, celui qui ressent le premier les influences de l’amour on en trouve qui font accouplĂ©s dans les premiers jours de Mars, & quelquefois dans les derniers de FĂ©vrier , quand les neiges LC en volume , s’essi- lant dans une extrĂ©mitĂ© qui forme la queue du TĂȘtard , s'arrondissant dans l’autre qui se montre comme une tĂȘte ;>ar les yeux, la bouche Sc les nageoires , qui y poussent; enfin , ces petits corps s’animent, sortent de l’amnios ÔC nagent dans les eaux en un mot, ils font voir tout ce que j'ai dit des fƓtus des Gre- 0 nouilles SĂ­ des Crapauds , qui avoient aussi comme eux la forme d'Ɠufs on observe toutes ces phales dans nos petits Crapauds durant l’espacc au moins de trois jours, Ă  cause de la chaleur de la saison ; dans les autres Crapauds ÔC Grenouilles il finit un tems plus long, parce qu’ils naissent dans une saison plus froide. L X X I I. J’analysai ces corpuscules animĂ©s pendant leurs phases, avec la plus vigilante attention , soit Ă  l’intĂ©rieur, soit Ă l’exrĂ©rieur, ÔC je les confrontai avec l’intĂ©rieur Sc l’extĂ©rieur de ceux qui demeurent dans l’utĂ©rus ou dans les canaux des Ɠufs ; li l’on excepte la diffĂ©rente grandeur qu’ils avoient pour leur grosseur, je ne savois pas apper- cevoir la plus petite diffĂ©rence ; la ressemblance des uns Sc des autres me faifoit tirer la mĂȘme conclusion que les prĂ©cĂ©dentes ; c’est que , comme ces petits corps, hors du corps de la mĂšre , font de vrais TĂȘtards , ceux qu’il renferme en sont aussi ; SC la posture de ces animaux est alors telle , qu’ils forment un angle avec leurs corps, dont l’ouverture est produite par l’union des deux tĂȘtes. La position est quelquefois diffĂ©rente quelques mĂąles, au lieu de placer leurs tĂȘtes fur celles des femelles, ne D 4 55 ExfĂ©r i b x c e s font qu’unir museau Ă  museau , de maniĂšre que les deux corps du mĂąle & de la femelle font trĂšs-voiĂ­ĂŹns ; en forte que sangle formĂ© par les deux tĂȘtes Sc par les deux museaux est trĂšs-aigu alors le mĂąle hĂ©risse cette saillie dentĂ©e St membraneuse q u'il a sur le dos , §. LXXVII ; il la remue avec force , la tord Ă  droite Sc Ă  gauche comme un cheval ardent agite fa criniĂšre ; il remue fortement fa queue , la plie tortueusement sur elle-mĂȘme , Sc dans ses mouvemens bat avec douceur les lianes de la femelle qui est immobile. Quelquefoisie mĂąle, pour conserver cette position St donner des coups de queue Ă  la femelle, s’amarre avec les doigts des pieds antĂ©rieurs Ă  l’herbe des fossĂ©s St Ă  tout ce qui peut lui servir d’appni, il reste ainsi avec sa compagne engouffrĂ© sous l’eau. Pendant qu’il remue la queue avec lĂ©gĂ©retĂ©, il s’échappe par l’ouverture de l’anus , qui est plus dilatĂ© qu’à l’ordinaire , un jet abondant de liqueur sĂ©minale qui se mĂȘle avec seau , 8c qui arrive avec elle jusques Ă  l’anus de la femelle, qui paroĂźt aussi alors plus gonflĂ© 8c plus ouvert. Dans cette importante opĂ©ration , l'anus du mĂąle ne touche pas celui de la femelle ; au contraire, il en est toujours plus ou moins Ă©loignĂ© , 8c l’on n’ap- perçoit rien qui caractĂ©rise son sexe. AprĂšs avoir lancĂ© ce jet de liqueur, le mĂąle se repose quelques minutes ; quelquefois il s’éloigne de la femelle pour revenir Ă  elle 8c renouvelles ses tortillemens de queue avec les jets de semence ; j’ai vu ces alternatives durer plus dune heure pendant ces momens, on peut les prendre , les SUR T, A G É N Ê RA T I ON. 57 mettre sur la main sans qu’ils s’en apperçoivent. Pendant que le mĂąle s’agite ainsi dans les doigts , il laisse Ă©chapper quelques petites gouttes de liqueur sĂ©minale , dont la couleur est trĂšs-blan- che Sc qui ressemble Ă  un lait trĂšs-Ă©pais. L X X X I. Ces faits curieux que j’ai observĂ©s le premier , ci’abord dans les lieux habitĂ©s par les Salamandres, dans les Ă©tangs & les viviers, 8c que j’ai vĂ©rifiĂ© ensuite dans de petits vaisseaux pleins d eau semblables Ă  ceux oĂč je suivois la gĂ©nĂ©ration des Grenouilles , les deux espĂšces de Salamandres dĂ©crites dans le §. LXXVII m’ont fourni les mĂȘmes phĂ©nomĂšnes ; de forte qu’il est certain qu’il y a dans ces deux cas une fĂ©condation produite fans aucun accouplement; Sc je puis assurer que, quoique j'aie observĂ© des milliers de Salamandres pendant leurs amours, pour les diffĂ©rentes expĂ©riences dont elles me fournissoient les sujets, je n’en ai point vu qui fussent accouplĂ©es. Mais, comme quand il s’agit d’exceptions Ă  des loix qui’on a cru gĂ©nĂ©rales, il faut apporter le plus grand scrupule pour Ă©viter l’erreur, j’ai voulu me dĂ©livrer d’un soupçon j’ai Ă©tĂ© plusieurs fois tĂ©moin de l’accouplement des petits LĂ©zards dans les mois d’Avril 8c de Mai , qui ne dure qu’un moment. Dans les jours les plus sereins, Sc dans les lieux les mieux exposĂ©s au soleil, le mĂąle poursuit la femelle ; Lc, aprĂšs savoir atteinte , il s'accouple avec elle mais cette union est instantanĂ©e,. Sc leur sĂ©paration est extrĂȘmement promte. Nos Salamandres, qu’on 5S ExpĂ©riences appelle des LĂ©zards d'eau , parcs qu’ils leur ressemblent beaucoup,ne s’accoupleroient-elles point instantanĂ©ment? Je n’ai rien nĂ©gligĂ© pour Ă©claircir ce fait, St je me fuis assurĂ© qu’il n’y avoit point d’accouplement j’ai mĂȘme vu constamment que les parties fexuelles-tlu mĂąle Ă©toient toujours Ă©loignĂ©es de celles de la femelle par une distance de quelques lignes ; d’oĂč il rĂ©sulte que la fĂ©condation n’est point produite par un accouplement, mais par la liqueur sĂ©minale du mĂąle lancĂ©e dans seau, qui arrive par ce moyen Ă  l’anus, St de-lĂ  dans le corps de la femelle. L X X X I 1 . Je fis ces observations en 1766 St 1767 , & je les annonçai dans mon Prodrome fur les reproductions animales , publiĂ© en 1768. Je dĂŹĂ­ois Les Naturalistes ignorent si les Sala- » mandrcs s’accouplent comme la plupart des » animaux , ou comme les Grenouilles St les n Crapauds. Cette recherche , qui intĂ©resse lĂŹ » fort la gĂ©nĂ©ration , m’a occasionnĂ© bien des » travaux que je raconterai dans mon livre». J’étois persuadĂ© que mes observations Ă©toient neuves ; St j’aurois toujours cette persuasion , si je n’avois pas lu dans le Dictionnaire d’Histoire naturelle de Bomare, Ă  l’article Salamandre aquatique , dans sĂ©dition de 1775 , c’est-Ă -dire sept ans aprĂšs la publication de mon Prodrome, que M. De Mours s’écoit occupĂ© du mĂȘme sujet, sans savoir si ses observations font antĂ©^- rieures ou postĂ©rieures aux miennes, parce qu’on laisse ignorer si ces expĂ©riences font dans SV R LA G É N Ê RA T I 0 X. 59 n livre Ă  part ou communiquĂ©es au Compilateur du Dicti mnaire. Mais j’avoue que , quoiqu'o u voie avec peine d’autres personnes suivre les mĂȘmes recherches que celles dont on s’oe- cupe, cependant j’ai eu un trĂČs-grand plailir de trouver dans les observations du Naturaliste fran- çois la confirmation des miennes. Le sommaire de ses observations se rĂ©duit Ă  ceci AprĂšs diffĂ©rens jeux du mĂąle avec la femelle, tendant Ă  lui barrer le chemin , Ă  se courber dans l’eau, Ă  se soulever avec la creste ou la saillie du dos Ă©levĂ©e, il ouvre l’anus, comprime avec force ses testicules , bat fa compagne avec la queue , 8Ă­ , aprĂšs avoir comprimĂ© plus fortement ses testicules , il lance la liqueur sĂ©minale sans ĂȘtre en contact avec la femelle la liqueur se rĂ©pand sur ses cĂŽtĂ©s aprĂšs avoir blanchi lĂ©gĂšrement l'eau. Le mĂąle tombe alors comme Ă©tant assoupi ; mais , bientĂŽt aprĂšs Ă©veillĂ© , il recommence ses jeux accompagnĂ©s de rĂ©mission de la semence & de la sĂ©paration du couple. Ces observations confirment les miennes, en montrant qti’il n-’y a point de vĂ©ritable accouplement dans les Salamandres quelles que soient les diffĂ©rences qu’il peut y avoir entre les autres observations de M. De Mours 8c celles que j’ai racontĂ©es §. LXXX. La rĂ©pĂ©tition de rĂ©mission de la semence peut dĂ©pendre beaucoup de la diversitĂ© du tempĂ©rament, de l’ñge Òc de la vigueur de ces animaux. L X X X I I I. J’ai supposĂ© dans le paragraphe LXXXI , que la fĂ©condation s’opĂ©roit par ces jets de €o ExpĂ©riences semence que le mĂąle rĂ©pand prĂšs de la femelle i je veux en donner la preuve ; mais on la comprendra mieux quand j’aurai dit quelque chose sur les ovaires, les canaux des Ɠufs ĂŽt les Ɠuf* de ces animaux. Quand on a ouvert l’abdomen d’une Salamandre femelle , on voie, dans chaque saison de TannĂ©e , deux ovaires qui renferment une multitude de petits Ɠufs, d’une couleur blanche- jaunĂ»trc plus petits que le millet fans coque ; ils ne flottent pas dans la cavitĂ© des ovaires, mais ils adhĂšrent Ă  leurs parois les Ɠufs, Ă  Tapproche du printems, grossissent insensiblement j L>C quand ils sont parvenus Ă  leur maturitĂ©, ce qui arrive dans la saison de leurs amours , ils descendent dans les canaux des Ɠufs, oĂč deux petits tuyaux blancs, qui s’étendent depuis les bras jufqu’à la racine de la queue ; TĂ©pine du dos les sĂ©pare. Ils sont tous les deux formĂ©s par une foule de petits plis, qui les rendent quatre fois plus longs que la Salamandre, lorsqu’on les Ă©tend en ligne droite. L X X X I V. Pendant le tems des amours des Salamandres , les canaux des Ɠufs sont plus ou moins remplis d’Ɠufs , placĂ©s Ă  la file , 8c sur tout vens cette partie du tube qui s’im- plante prĂšs de Tanus ; alors , si Ton presse lĂ©gĂšrement avec le doigt le ventre des femelles , ou seulement par leurs simples contorsions dans les mains, les Ɠufs RĂ©chappent par Tanus , Ă -peu-prĂšs comme, j’ai dit que s’cchappe la liqueur sĂ©minale du mĂąle dans les mĂȘmes cir- stĂ­ R LA GeUERATIOX. 6t constances, §. LXXX. Les Ɠufs, en sortant de l’ovaire 8c en entrant dans les canaux des Ɠufs , deviennent toujours plus grands , ÔC se couvrent dune glu Ă©paisse, comme cela arrive dans les Grenouilles 8c les Crapauds ; mais la glu de ces deux espĂšces d’animaux est plus abondante 8c plus visqueuse, lorsque le mĂąle a lancĂ© la liqueur sĂ©minale , 6c lors- qu’il a pĂ©nĂ©trĂ© l’anus de la femelle ; Ă  cause de son voiĂ­ĂŹnage , la portion d’Ɠufs la plus prĂȘte Ă  ĂȘtre pondue, est fĂ©condĂ©e, 8c le reste des Ɠufs, placĂ©s dans les canaux des Ɠufs , est absolument infĂ©cond. Je l’ai dĂ©montrĂ© de cette maniĂšre. Quand les mĂąles commençoient Ă  poursuivre les femelles , je tenois celles-ci isolĂ©es dans des vases d’eau, elles pondoient les Ɠufs, mais ils Ă©toient stĂ©riles; je les laissai avec les mĂąles, qui lançoient plusieurs fois leur liqueur sĂ©minale ensuite j’isolai ces femelles ; 8c je voyois alors que les premiers Ɠufs pondus, au nombre de cinq ou lĂźx , donnoient des petits au bout de quelque tems ; mais cela n’arrivoit pas aux autres Ɠufs pondus ensuite. AprĂšs ces jeux amoureux , j’ouvris une femelle , j’en tirai les Ɠufs hors de leurs canaux; je les mettois dans l’eau, en plaçant dans un lieu particulier ceux que j’avois trouvĂ© prĂšs de l’anus ; les premiers donnoient naissance Ă  des petits, tous les autres Ă©toient stĂ©riles. Quoique ces preuves fussent tranchantes, je leur en ajouterai une autre. L’espĂšce de Salamandre qui a la petite rais 6% ExpĂ©riences dorĂ©e sur le dos , §. LXXVII, au lieu de pondre ses Ɠufs dĂ©tachĂ©s comme l’autre , les pond par cordons , longs quelquefois de deux pouces, 8c contenant une dixaine d’Ɠufs; aprĂšs que le mĂąle avoit frayĂ© avec une semelle , j’ouvrois le ventre de la femelle , je tirois les oeufs hors des canaux des Ɠufs ; ils Ă©toient liĂ©s ensemble par le moyen de la glu 8c formoient deux cordons, qui faisoient un angle en s’unissant vers l’anus ; je mettois ces petits cordons dans l’eau , je marquai avec un fil la portion qui avoit Ă©tĂ© la premiĂšre accouchĂ©e. Les Ɠufs qui se trouvoient Ă  ce bout 8c dans le voisinage , Ă©toient fĂ©conds ; jnais tous les autres pĂ©rissoient. L X X X V. Mais ces Ɠufs, que j'ai prouvĂ© n’avoir pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s , font fĂ©condĂ©s ensuite. A mesure que les Ɠufs les plus prĂšs de l’anus en sortent, ceux qui en sont les plus Ă©loignĂ©s descendent, parviennent dans le lieu oĂč ils font fĂ©condĂ©s comme les autres , 8c arrivent comme cela aux derniers; tous les Ɠufs mĂ»rs se dĂ©tachent ensuite des ovaires, entrent dans les canaux des Ɠufs, 8c font tĂŽt ou tard fĂ©condĂ©s. J’en ai eu une preuve tranchante, en tenant compte des accouchemens successifs des Ɠufs que je voyois tous naĂźtre ; d’oĂč il faut conclure que les mĂąles n’abandonnent pas si vĂźte les femelles. Mes observations mont appris que les amours de ces animaux durent quelquefois vingt jours, quelquefois trente, 8c mĂȘme davantage , jusqu’à-ce-que les femelles aient s v R la GĂ©nĂ©ration. 6z pondu tous leurs Ɠufs parvenus Ă  leur maturitĂ©. Tant qu’il en reste dans les canaux des Ɠufs, les mĂąles ne cessent ni leurs caresses, ni rĂ©mission de leur semence, ni leurs alternatives de repos , §‱ EXXX. Mais je n’ai parlĂ© que des Ɠufs parvenus Ă  leur maturitĂ© ; car , aprĂšs la saison des amours, on trouve encore un trĂšs-grand nombre d’Ɠufs trĂšs-petits dans les ovaires. L X X X V I. M. De Bomare dit dans l’endroit que j’ai citĂ©,'§. LXXXII, que les Salamandres aquatiques se dĂ©barrassent de leurs Ɠufs en les tirant de l’anus avec la bouche 8c les pieds, parce qu’à mesure qo’ils sortent, ils sont collĂ©s fous la queue. II est certain qu’il n’y a rien de plus fabuleux que ce rĂ©cit ; si l’Auteur avoir consultĂ© la Nature au lieu des livres des Naturalistes, 8c qu',1 eĂ»t observĂ© les allures des Salamandres , il auroit vu mille fois les Ɠufs sortir 8c se dĂ©tacher de l’anus, fans l’aide de la bouche -8c des pieds de ces animaux, fans mĂȘme qu’i!s paroissent en vouloir faire le moindre usage ; il auroit mĂȘme vu que nos Salamandres , bien bin de suivre 1’usage des Ecrevisses d’eau douce , qui aprĂšs la ponte de leurs Ɠufs, les tiennent attachĂ©s fous leur queue, & se dĂ©barrassent de leurs Ɠufs,de maniĂšre qu’en sortant du sein de la mĂšre , ils gagnent le fond des eaux ; mais quoique j’aie observĂ© des milliers de Salamandres dans des vases pleins d’eau , je n’en ai vu aucune qui eĂ»t ses Ɠufs adhĂ©rens 6 4 EĂŻmriĂźnceĂ­ Ă  sa queue en changeant l’eau des vase4 , je trouvois toujours ces Ɠufs collĂ©s dans leur fond ; & j’ai vu la mĂȘme chose avec les Salamandres qui vivotent en pleine libertĂ©. J’ajoutcrai encore que M. De Bomare se trompe en comparant le cri des Salamandres aquatiques Ă  celui des Grenouilles ; car les Salamandres font absolument muettes. Seulement, lorsqu’elles viennent Ă  fleur d’eau pour respirer un nouvel air , elles font entendre une espĂšce de sifflement, qu’on ne sauroit distinguer Ă  quatre pas d’elles. L X X X V I I. Mais parlons de la naissance des Salamandres , ou plutĂŽt de leur dĂ©veloppement, ce fera la seconde partie de leur histoire, qui n’est pas la moins intĂ©ressante. Qu’arrive-t-il auxƓufs accouchĂ©s? Quand on les met dans l’eau , ils gagnent le fond Ă­i la saison est chaude on apperçoit bientĂŽt sur la glu qui les environne quelques bulles d’air tres- petites d’abord , mais qui grossissent peu aprĂšs, & qui entraĂźnent avec elles l’Ɠuf fur la surface de l’eau. Ces bulles crĂšvent 8t s’évanouĂŻssent, alors les Ɠufs qu’elles soutenoient retombent au fond de l’eau , d’oĂč ils ne remontent plus , Ă©tant encore amarrĂ©s au terrain par la glu qui les environne. En les observant avec soin, on volt bientĂŽt leur forme changer ; d’abord aprĂšs l’accouchement ils ressemblent Ă  une petite sphĂšre alongĂ©e , qui s’alonge bientĂŽt encore aprĂšs , & qui prend la forme d’un rein ou du testicule d’an poulet, la courbe de l’Ɠuf continue sur la GĂ©nĂ©ration. 6 j tĂŹnue Ă  s’accroĂźtre comme son volume ; mais avec cette circonstance, qu’un des bouts grossit beaucoup , tandis que l'autre 'amincit enfin, il acquiert un volume double de celui qu’il avoir alors ; il ne paroĂźt plus acquĂ©rir de la grosseur, mais il s’alonge feulement de jour en jour dune maniĂšre propre Ă  Ă©tonner l’Ob- servateur; 8t le sujet de l’étonnement pourroit- il ĂȘtre plus grand ? l’oeuf ainfi alongĂ© se meut de tems en tems avec vitesse, il reste ensuite en repos ; 8c comme ce mouvement ou ce repos ne paraissent avoir aucune cause extĂ©rieure , l’idĂ©e de l’animalitĂ© s’offre d’elle-mĂȘme Ă  l'esprit; l’on volt aussi bientĂŽt cet Ɠuf comme une petite Salamandre, masquĂ©e , Ă  la vĂ©ritĂ© ; mais ayant dĂ©jĂ  dĂ©couvert que les Ɠufs de Grenouilles 8c de Crapauds n’étoient que des TĂȘtards pareillement fous le masque , cette idĂ©e prend toujours une plu*grande force. Si l’on fuit cet Ɠuf, mobile par lui-mĂȘme, on le verra prendre peu-Ă -peu les apparences d’une petite Salamandre ; la queue se montre bien formĂ©e , on y dĂ©couvre un commencement de vertĂšbres, les petites nageoires oĂč circule le sang, deux petits boutons latĂ©raux au-dessous , qui font soupçonner les rudimens des bras ; la forme de la tĂȘte , du museau, des yeux , placĂ©s aux cĂŽtĂ©s de la tĂȘte , 8c qui paraissent deux trĂšs-petites tumeurs. En suivant cette observation avec une lentille , on apperçoit bientĂŽt que la petite Salamandre n’est plus circonscrite par la glu , mais par un petit cercle intĂ©rieur, qui n’est que la cir- E C6 ExpĂ©riences confĂ©rence , ou le limbe de l’amnios, plein de liqueur, oĂč repose la Salamandre. Sa couleur eĂ­V blanche dans la partie infĂ©rieure du corps, lĂ©gĂšrement jaune dans la supĂ©rieure , avec de petites taches noires. Le numĂ©ro i de la figure XVI dans la planche 3 , reprĂ©sente au naturel un Ɠuf de Salamandre enveloppĂ© de sa glu ; les numĂ©ros r , 3,4, Z dĂ©signent le mĂȘme Ɠuf, dĂ©pouillĂ© de fa glu , qui se courbe peu-Ă -peu en s’alongeant ; les numĂ©ros 6,7 font voir le petit corps soupçonnĂ© un Ɠuf, qui, par un dĂ©veloppement ultĂ©rieur, a pris la vĂ©ritable ressemblance d’une petite Salamandre ; elle est un peu grandie par la lentille. La lettre O , figure XVII, reprĂ©sente la mĂȘme Salamandre , enfermĂ©e par l’amnios , & observĂ©e avec une lentille plus forte. L X X X V I I I. Tandis quĂ­ les Salamandres font dans l’amnios, elles ne font jamais disposĂ©es en ligne droite , mais elles y font courbĂ©es de maniĂšre que la queue s’approche de la tĂȘte, comme dans la figure XVI , numĂ©ros 6,7, SĂ­ dans la figure XVII , lettres D, E cela doit ĂȘtre ainsi , puisque le diamĂštre de l’amnios est beaucoup moins long que les Salamandres. Pendant qu’elles sĂ©journent dans cette prison, elles y changent de place avec une incroyable agiletĂ© , en transportant leur tĂȘte lĂ  oĂč Ă©toit la queue , 5 c la queue lĂ  oĂč Ă©toit la tĂȘte; cela arrive , non-seulement lorsqu’elles reçoivent rimpresiion de quelque corps , mais lorsqu’elles font dans un parfait repos tant SOR LA GÊKÈRATIbR. 6j qu’elles trouvent des alimens dans l’amnios , elles y prennent de l’accroissement ; mais bientĂŽt il ne peut plus les contenir, alors elles le rompent par des chocs rĂ©itĂ©rĂ©s qu’elles lui font Ă©prouver , & elles en sortent pour nager dans l’eau par le moyen des vibrations rapides de leurs queues. Je les ai vu quitter plusieurs fois leurs enveloppes ce qui me rappelle le papillon , qui fort de fa coque aprĂšs avoir perdu la forme de chrysalide. ‱ Dans les figures XVII, XVIII, XIX, on Voit trois Salamandres Ă  peine sorties de leur enveloppe 5 il y en a deux vues par Je dos dans les figures XVII Sc XIX, dans la figure XVIII on la voit par le cĂŽtĂ©. Dans cette figure il y a deux autres Salamandres dĂ©gagĂ©es de leurs liens , Sc nageant dans l’eau comme celles des figures XVII SĂ­ XIX ; elles montrent les Ă©lĂ©mens de leurs jambes antĂ©rieures, fous la forme de deux petits moignons , marquĂ©s par la lettre C C Ă  la figure XVII ; la lettre A , dans la mĂȘme figure , montre une des enveloppes en faisant leur analyse, aprĂšs la sortie des Salamandres , elles ont extĂ©rieurement un petit rĂ©sidu de glu , Li intĂ©rieurement elles semblent un peu calleuses par la membrane de l’amnios, qui est singuliĂšrement fine Lc transparente , mais lĂ©gĂšrement visqueuse, parce qu’elle est couverte de la-liqueur transparente qu’elle renfermoit. L X X X I X. J’ai tenu compte du tems nĂ©cessaire pour changer l’Ɠuf prĂ©tendu en Salamandre, & j’ai E 2 68 ExpĂ©riences trouvĂ© qu’il falloit sept jours, plus ou moins. 11 en faut encore trois ou quatre aux petites Salamandres pour se dĂ©gager des liens de l’amnios & de la glu , & pour pouvoir nager. II est plus difficile de faire naĂźtre ces petites Salamandres que les TĂȘtards j car, quoique ces fƓtus de Salamandres , faussement crus des Ɠufs , soient mis dans l’eau au moment qu’ils font accouchĂ©s , 8t que l’eau soit tirĂ©e des lieux mĂȘmes oĂč les mĂšres avoient placĂ©s leurs petits ; il y en a cependant peu qui naissent , Ă­i l’on n’a pas l'attention d’en changer l’eau trĂšs-souvent; 8t mĂȘme, alors, toutes choses Ă©tant Ă©gales, il se dĂ©veloppe beaucoup moins de Salamandres que de TĂȘtards. X C. Cette difficultĂ© qu’on Ă©prouve pour faire naĂźtre les Salamandres ne se fait plus sentir pour les conserver, quand elles font nĂ©es alors elles croissent & se dĂ©veloppent ; toutes les eaux de puits, de pluie , de fleuves, de lacs leur conviennent, pourvu qu'elles soient pures. S’il y a quelques petites plantes, comme des lentilles de marais, dans l’eau oĂč les Salamandres nagent, elles se mettent autour 8t la mordillent avec leur petite bouche , choisiĂ­lĂ nt les particules qui font les plus propres pour les nourrir. Les Salamandres en se dĂ©veloppant dĂ©veloppent aussi leurs bras, §. LXXXVIII ; ils prennent une forme pointue dans leur dĂ©veloppement , & se replient vers la partie postĂ©rieure du corps, comme on le volt dans les deux petites Salamandres , placĂ©es dans la s v k la GĂ©nĂ©ration. 6- partie basse de la figure XIX ; mais Ă­ur-tout dans celle de la figure XX, qui est aggrandie par le verre ; les deux petits bras font donc ces deux cĂŽnes, correspondons aux lettres C D, au-dessous defquels, vers la rĂ©gion de la tĂȘte, on volt les nageoires rameuses j ils paroisse m comme deux petits faisceaux dc nageoires plus petites E F ; prĂšs des yeux, ces nageoires plus petites tardent plus Ă  paroĂźtre que les grandes. En continuant Ă  tenir dans l’eau ces petites Salamandres , on voit au bout d’une semaine , aprĂšs qu’elles font sorties de l’am- nios , pointer trois autres petits cĂŽnes , qui font peu Ă©loignĂ©s de l’extrĂȘmitĂ© des deux premiers ; 8Ă­ l’on voit bientĂŽt que tous ces petits cĂŽnes font les doigts des mains des Salamandres , dont ces animaux commencent dĂ©ja Ă  se servir ; les membres antĂ©rieurs paraissent d’abord comme deux cĂŽnes ; les postĂ©rieurs se prĂ©sentent ainsi quinze & mĂȘme quelquefois vingt-quatre jours aprĂšs que les Salamandres font sorties de leur enveloppe ; la Nature fait pointer les doigts des pieds comme ceux des mains, 8c alors la Salamandre peut cheminer fur le fond de l’eau ou fur la terre, quand elle y est placĂ©e. Les TĂȘtards perdent leurs nageoires peu de jours aprĂšs leur naissance ; les Salamandres , au contraire , les conservent long - tems ; je leur en ai vu au mois d’AoĂ»t. X C I. Mais ces petits corps ronds, qu’on appelle vulgairement des ceufs, sont-ils de vrais fƓtus? E Z 70 ExpÊnitNczs Peut-ĂȘtre ne sont-ils tels que lorsqu’ils font sortis du corps de la mĂšre , 8c lorsqu’ils ont Ă©tĂ© baignĂ©s par la liqueur sĂ©minale du mĂąle ; peut-ĂȘtre aulßÏ sont-ils tels dans les canaux des Ɠufs, oĂč nous sommes sĂ»rs que la liqueur sĂ©minale ne peut pas arriver. Je me flatte d’avoir les preuves les plus fortes que ces corps font de vrais animaux, mĂȘme lorsqu’on les trouve Ă  la tĂȘte des canaux des Ɠufs, quoi- qu’en les tirant alors du corps de la mĂšre, ils ne se dĂ©veloppent pas 8c ne naissent pas, parce qu’ils n'ont pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s par la liqueur sĂ©minale du mĂąle. On en sera sĂ»rement convaincu , quand on saura que j’ai rĂ©pĂ©tĂ©, entre les corpuscules fĂ©condĂ©s Sc non-fĂ©condĂ©s, cette comparaison rigoureuse 8c minucieuse que j’ai faite pour les TĂȘtards des Crapauds 8c des Grenouilles , dont je parle dans le paragraphe XVIII, soit pour les parties internes, soit pour les externes, dans les corpuscules fĂ©condĂ©s 8Ă­ non-fĂ©condĂ©s , fans remarquer la plus lĂ©gĂšre diffĂ©rence ce qui me fait conclure encore que ces animaux sont dĂ©ja des fƓtus dans les femelles avant que les mĂąles les aient fĂ©condĂ©s. X C I I. J’ai parlĂ© des deux espĂšces de Salamandres, dĂ©crites §. LXXVII , 8c que j’ai examinĂ©es sĂ©parĂ©ment, comme si elles n’étoient qu’une feule 8c unique , parce qu’elles m’ont fourni les mĂȘmes rĂ©sultats rĂ©lativement Ă  la gĂ©nĂ©ration. J’ajouterai que ces rĂ©sultats ont Ă©tĂ© encore semblables dans d’autres espĂšces de SUR LA GÉRÉ R ATI OU. 7 * Salamandres aquatiques , longues d’un fort pouce 8Ă­ demi, 8t qui avoient environ deux lignes de diamĂštre, leur couleur Ă©toit un fond cendrĂ© , piquetĂ© de noir ; je les ai observĂ©es trois ans aprĂšs les autres , dont je viens de parler. ' J’ai rapportĂ© tous ces faits fur la gĂ©nĂ©ration t la suivante ; F 4 88 ExpĂ©riences mais je n’ai vu feulement que trois fois des fƓtus dans la cavitĂ© du thorax ou de l’abdomen. J’aiparlĂ© de deux, au paragraphe LXVII, 8c je parlerai d’une troisiĂšme au paragraphe CXXIÍ. Je fuis donc trĂšs-portĂ© Ă  croire que les fƓtus passent immĂ©diatement des ovaires dans les canaux des Ɠufs ; 8c ceux qu’on trouve dans le thorax ou l’abdomen y arrivent, ou parce qu’ils n’ont pu pĂ©nĂ©trer dans le canal des Ɠufs, ou parce qu’il y a eu quelque dĂ©chirure, comme je l’inĂ­inue au paragraphe LXVII. Mais que le Lecteur impartial dĂ©cide. HuitiĂšme RĂ©flexion. C I I. Les fƓtus des Crapauds Sc des Grenouilles, aprĂšs avoir traversĂ© le long 8c tortueux canal des Ɠufs, fe rassemblent tous dans l’utĂ©rus, d’oĂč ils entrent dans le rectum , 8c sortent par l’anus. Dans une espĂšce de Crapaud cette sortie paroĂźt aidĂ©e par le mĂąle , qui semble recueillir les fƓtus. Quand il est accouplĂ© & qu’il ferre avec ses mains la poitrine de fa femelle , il attend avec impatience la sortiexlu cordon qui unit tous les fƓtus ; car cette espĂšce de Crapaud n’accouche que d’un seul Ă  la fois dĂšs que ce cordon commence Ă  paroĂźtre , il le saisit avec les doigts des pieds ; il tire dehors les premiers Ɠufs, 8c ensuite successivement les autres avec les parties du cordon auquel ils font attachĂ©s. Jusques Ă  ce que l’accouchement soit fini le mĂąle est si attentif Ă  son travail, qu’il se laisse sur la GĂ©nĂ©ration* 89 prendre 8c porter sur la main ; Sc si la peur le lui fait suspendre , il le reprend bientĂŽt avec une nouvelle ardeur. M. De Mours a fait par hasard cette observation sur le Crapaud terrestre de la petite espĂšce, comme il k dit Iui-mĂȘme ; mais il n’a eu aucun soupçon que le mĂąle arrosĂąt les Ɠufs avec fa semence, pendant qu’il accouchoit sa femelle avec laquelle il Ă©toit accouplĂ© 1 . II est fĂącheux que l’Observateur françois n’ait pas mieux caractĂ©risĂ© l’espĂšce de Crapaud, qui est certainement diffĂ©rente de celle du Crapaud dont j’ai Ă©bauchĂ© l’histoire. Je n’ai jamais vu de Crapaud accoucheur, quoique je Taie souvent vu fĂ©condant les fƓtus. Roesel dit aussi n’avoir rien observĂ© de semblable. M. De Mours auroit dĂ» voir si les Ɠufs se seroient dĂ©veloppĂ©s , pour s’assurer s’ils avoient Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s une observation si intĂ©ressante mĂ©ritoit bien d’ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©e , 8c elle me paroissoit plus propre Ă  irriter la curiositĂ© du Philosophe qu’à la satisfaire. NeuviĂšme RĂ©flexion. C I I I. L’expĂ©rience journaliĂšre apprend que la fĂ©condation F'une multitude indĂ©finie d’animaux s'opĂšre dans le sein des femelles ceci paroissoit une loi gĂ©nĂ©rale de la Nature , & on l’a regardĂ©e comme telle pendant un tems trĂšs-long. 1 Mcm. de l’Acad. Royale des Sc. annĂ©e 1751. 9» E x p Ă­ r i e u c e s Mais comme les raiĂ­ĂČnnemens analogiques ne se sont pas toujours trouvĂ©s justes, 8c que plusieurs loix qu’on croyois gĂ©nĂ©rales ont eu des exceptions inattendues , celle-ci est dans ce nombre. Swammerdam est le premier qui a fait voir la fĂ©condation opĂ©rĂ©e hors du corps d’une Grenouille femelle. Roesel a Ă©tendu cette dĂ©couverte Ă  quelques autres amphibies ; SC j’ai eu le plaisir de voir cette fĂ©condation extĂ©rieure dans d autres espĂšces de Grenouilles Sc de Crapauds. J’ai vu fans voile le liquide fĂ©condant sortir du mĂąle , tomber sur les fƓtus au moment oĂč ils Ă©toient hors du sein de leur mĂšre ; Chap. I , II , III Sc IV. C I V. Mais dans le genre des Grenouilles 8c des Crapauds, il y a bien d’autres espĂšces que celles qui ont Ă©tĂ© observĂ©es qui se fĂ©condent extĂ©rieurement. En ouvrant quelque Nomenclateur moderne , par exemple LinnĂ©us , on en voit une foule , soit en Europe , soit d’exotiques. Que penscrons-nous donc de leur fĂ©condation , s’il est permis de conjecturer ? On pourra conclure qu’ils se fĂ©condent comme ceux qui ont Ă©tĂ© observĂ©s. Mais oĂč est la certitude que l’ex- pĂ©rience feule peut offrir ? Entre toutes ces espĂšces, il en est une qui mĂ©rite sur-tout l’at- tention du Physicien observateur ; c’est le Crapaud de Surinam , appelĂ© par les habitans du pays Pipa ou Pipai , Sc qui a la propriĂ©tĂ© de donner naissance Ă  ses petits par le dos i. i Pipa Rana digitis antĂŹcis muticis quadrĂŹ- dentatis pofleris ungmculatk ; Linn. syst. nat. T. I. SUR LA GĂ©rĂ©ratior. yr La cĂ©lĂšbre Sibylle MĂ©rian , qui eut sur la fin du ĂŹĂšcle passĂ© le courage hĂ©roĂŻque de quitter la Hollande pour observer les insectes de l’AmĂ©- rique , est la premiĂšre qui a fait connoĂźtre cet animal inconnu il a Ă©tĂ© observĂ© ensuite par Kuysch , Fouets & Baker , 8Ă­ leurs descriptions ont fait connoĂźtre la bontĂ© de la premiĂšre ; ils ont fait voir, comme cette illustre Demoiselle , le dos de ce Crapaud couvert de petites cellules, qui renfermoient chacune un petit Crapaud. J’ai observĂ© ce phĂ©nomĂšne Ă  l’institut de Bologne ; mais je l’ai observĂ© plus facilement encore en 1779 , Ă  GenĂšve , avec mes amis Bonnet , Senebier , Abraham & Jean Trembley. Ce Crapaud , conservĂ© depuis long-tems dans l’esprit de vin, me fournit l’occasion de faire Ă  mon aise plusieurs observations , fur-tout d’examiner les fameuses cellules dorsales qui Ă©toient nombreuses &. qui contenoient leurs propres fƓtus. Ces observations, avec plusieurs autres faites par aprĂšs mon dĂ©part, sont imprimĂ©es dans le Journal de Physique ; &, comme on dĂ©couvre dans ce MĂ©moire le savoir 8Ă­ le discernement de son Auteur, on n’y trouve pas moins son impartialitĂ© pour ses opinions car ce Contemplateur de la Nature , ayant niĂ© dans ses corps organisĂ©s les cellules dont j’ai parlĂ©, fur la description qu'un Professeur cĂ©lĂšbre de Leyde lui avoit fait de ce Crapaud , non-seulement il reconnoĂ­t l’existence de ces cellules dans ce MĂ©moire, mais il les dĂ©crit d’une maniĂšre Ă  ne plus laisser leur existence douteuse. II termine 9 r, ExpĂ©riences cet Ă©crit diffĂ©rentes questions trĂšs- propres Ă  Ă©claircir l’histoire naturelle de ce surprenant animal de Surinam , qui Ă©toit jusques Ă  prĂ©sent obscure Sc tronquĂ©e. On pense bien que le Philosophe Genevois n’a pas omis ce qui regarde la maniĂšre dont se fait la fĂ©condation ; mais toutes ces questions-ne peuvent se rĂ©soudre que sur les lieux oĂč le Pipai vit 8t se multiplie nous ne pouvons pas lui faire adopter l’Europe pour fa patrie , comme "Walusneri fit de l’afriquain CamĂ©lĂ©on un animal citoyen d’Italie. C V. La fĂ©condation ne se fait pas seulement hors du corps parmi les Grenouilles & les Crapauds, on croit qu’elle a lieu Ă©galement de cette maniĂšre parmi les poissons Ă  Ă©cailles. Quand la femelle a pondu ses Ɠufs , le mĂąle qui les fuit Ă  la trace les fĂ©conde en les baignant avec fa liqueur sĂ©minale. II n’y a point dans ces animaux de vĂ©ritable accouplement ; & si, dans le tems de leurs amours, les mĂąles Rapprochent des femelles , s’ils parodient se frotter leur ventre l’un contre l’autre , il n’y a point cependant d’accouplement, mais le mĂąle rĂ©pand fa liqueur fur les Ɠufs qui sortent alors hors de la femelle ; c’est l’opinion de M. le Comte De Buffon mais, comme il l’avance fans aucun doute, on croiroit qu’il en donne les meilleures preuves. II s’appuie cependant fur l’opinion populaire rĂ©pandue jusques au tems de Swammerdam cependant on n’a encore aucune observation solide sur ce sujet ; aussi ne faut-il pas s’étonner li les autres Naturalistes s'Ă©loignent svk la GĂ©nĂ©ra tiox. 93 de cette idĂ©e, 8c si Hallfr croĂźt en particulier que les poissons Ă  Ă©cailles s'accouplent vĂ©ritablement. II donne plusieurs preuves de son opinion, que je passe fous silence pour Ă©viter les longueurs, 8t que chacun pourra voir dans fa grande physiologie. Cependant, quoique l’opinion d’HALLER soit bien prĂ©fĂ©rable aux assertions de M. le Comte De Buffon , j’avoue que je ne Ă­Ă urois les trouver dĂ©cisives, parce qu’il n’y a pas cette chaĂźne de faits nĂ©cessaires pour rĂ©soudre le problĂšme. Mais le sentiment de LinnĂ©us seroit bien bizarre ; il pensoit que les femelles des Poissons Ă  Ă©cailles couroient aprĂšs la semence Ă©jaculĂ©e par le mĂąle, qu’elles la mangeoient 8c qu’elles Ă©toient fĂ©condĂ©s 1 . Du tems de Vallisneri il y eut un MĂ©decin romain qui croyois & qui Ă©crivoit que les femelles des Pigeons , des Moineaux 8c de plusieurs autres oiseaux se fĂ©condaient par la bouche. Le sens-commun seul montroit l’absurditĂ© de cette opinion , que je ne veux pas faire connoĂźtre davantage. II est vrai qu’on a vu les femelles des Poissons avaler le frai des mĂąles ; mais elles l’avaloient comme un aliment SĂ­ non comme un moyen de fĂ©condation , damant plus que les mĂąles eux-mĂȘmes savaient aussi avec la mĂȘme voracitĂ© au reste, si les Poissons mĂąles 8c femelles mangent le frai, ils ne mangent pas moins leurs Ɠufs. C V I. ' Il rĂ©sulte de tout ceci, qu’on ignore com- 1 Sponsal. Plant. 94 ExpĂ©riences ment se fait la fĂ©condation des Poissons ; St il ne faut pas s’en Ă©tonner , l’élĂ©ment qu’ils habitent est bien moins accessible Ă  l’Observateur que la terre SĂ­ l’air. En mĂ©ditant souvent sur ce secret de la Nature , il m’est souvent venu dans l’esprit une idĂ©e que mes autres occupations ne m’ont pas permis de rĂ©aliser, St que je veux faire connoĂźtre au Lecteur. On a pu se procurer facilement dans toutes les parties de l’Europe le Poisson dorĂ© de la Chine i on en trouve un grand nombre en Italie dans les jardins ; la beautĂ© des couleurs qui peignent ces Poissons les a introduit dans les appartemens, oĂč on les conserve fort bien dans des vases pleins d’eau. Ces Poissons fraient plusieurs fois dans TannĂ©e ; ÔC , comme ils font familiers , ils ne craignent pas mĂȘme alors les curieux. On m’a dĂ©jĂ  compris une attention scrupuleuse Ă  ces animaux pendant leurs amours fera connoĂźtre s’ils s’ac- couplent, s'ils lancent la liqueur sĂ©minale sur les Ɠufs , ou s’ils se fĂ©condent par quelqu’autre moyen ; St, au cas que la fĂ©condation se fĂźt hors du corps de la mĂšre par Tarrosement des Ɠufs avec la liqueur sĂ©minale du mĂąle , cet arrosement ne fuiroit pas l’Ɠil del’Observareur, parce que cette liqueur est blanche , St que seau oĂč ces Poissons nagent doit ĂȘtre limpide. Je ne parle pas des moyens pour connoĂźtre si les Ɠufs font fĂ©condĂ©s, St comment ils le font il me semble que ce que j’ai dit sur la gĂ©nĂ©ration de nos amphibies est suffisant pour un Lecteur instruit. . i Cyprinus auratus penna ani gemina caudtt transverfa bifurca ; Linn. Ă­yst. nat. T. I. svr la GĂ©nĂ©ration. 95 C V I I. Mais fi l’on n’a pu pĂ©nĂ©trer le secret de la gĂ©nĂ©ration des Poissons , on a dĂ©couvert derniĂšrement celui de la gĂ©nĂ©ration des Abeilles. Si les observations ingĂ©nieuses font sĂ»res 1 , les Ɠufs de ces insectes font fĂ©condĂ©s aprĂšs leur ponte. On fait que la reine les dĂ©pose dans des cellules ; l’Obfervateur anglois a vu ces Ɠufs accompagnĂ©s d’une liqueur blanchĂątre que les mĂąles y infirment par la partis postĂ©rieure de leur corps, 8t qui les rend feulement fĂ©conds ; mais, quand cette liqueur vient Ă  manquer, il est certain que les Ɠufs n’éclofent pas. Cet Auteur disposa les choses de maniĂšre qu’un rayon resta fans bourdons, en recevant pourtant les Abeilles ouvriĂšres avec la reine celle-ci y dĂ©posa ses Ɠufs dans les cellules ; & , comme il n’y eut point la liqueur sĂ©minale des mĂąles, il n’y eut aucun des Ɠufs qui fĂ»t fĂ©condĂ©. M. Debraw varia ainsi l’expĂ©rience ; il partagea un rayon non-fĂ©condĂ© en deux parties, dont l’une fut renfermĂ©e fous une cloche de verre, avec la reine accompagnĂ©e de ouvriĂšres, mais fans mĂąles lĂ  il n’y eut aucun Ɠuf qui pĂ»t Ă©clore , on les vit pourtant Ă©clore dans une autre cloche de verre oĂč l’on avoit enfermĂ© un rayon avec la reine , des mouches ouvriĂšres ÔC des bourbons ; il n’y a aucun doute que la liqueur blanche ne soit la liqueur sĂ©minale 1 Transact. philos. T. LXVIL 96 ExpĂ©riences des mĂąles rĂ©pandue dans les cellules oĂč il y avot des Ɠufs, puisqu’en dissĂ©quaift ces mĂąles l’Auteur trouva cette liqueur dans ce qu’on croit leurs vaisseaux spermatiques. I. paroĂźt donc nettement que Swammerdam S c RĂ©aumur se sont bien trompĂ©s fur les Abeilles le premier croyois que les Ɠufs de la reine Ă©toient fĂ©condĂ©s par la vapeur des mĂąles qu’elle absorboit ; & le second, sĂ©duit par des apparences, croyoit qu’il y avoit un vĂ©ritable accouplement. Le soupçon dc Maraldi se trouve conĂ rmĂ©. II avoit cru , dans ses observations fur les Abeilles , que la fĂ©condation des Ɠufs s’opĂ©roit aprĂšs leur ponte par la liqueur blanche don j’ai parlĂ©, quoiqu’il ne fĂ»t pas allĂ© plus loin. Si l’on rĂ©unit tout ce que j’ai dit fur les fĂ©condations extĂ©rieures, on verra qu’il y a fort peu d’animaux chez lesquels on soit sĂ»r qu’elle se fasse de cette maniĂšre , qu’il n’y a mĂȘme que les Crapauds, les Grenouilles ĂŽc les Abeilles. II eft vraisemblable que la vigilance des Observateurs trouvera cette propriĂ©tĂ© en d’autres espĂšces il y a un si grand nombre de dĂ©couvertes qui ont Ă©tĂ© Ă©tendues Ă  un trĂšs-giand nombre de sujets, quoiqu’elles parussent d’abord resserrĂ©es Ă  un seul. DixiĂšme RĂ©flexion. C V I I 1. La singularitĂ© de la fĂ©condation des Salamandres exige quelques rĂ©flexions. Ces petits fƓtus, ces Ɠufs supposĂ©s, ne font que de petites s v r la GĂ©nĂ©ration. 97 petites Salamandres qui ne se ont pas encore dĂ©veloppĂ©es §. LXXXV1I, 8c qui font fĂ©condĂ©es dans le sein de leur mĂšre, non par l’accou- plement, que l’organisationdu mĂąle rend ĂŹmpĂŽs- Ă­ible , mais par la liqueur sĂ©minale qu’il lance dans l’eau 8i qui pĂ©nĂštre bientĂŽt dans le corps de la femelle par l’ouvcrture destinĂ©e Ă  cet usage ; ce qui offre une nouvelle singularitĂ©. Les meilleurs Anatomistes Sc Physiologistes croient que la fĂ©condation des animaux se fait dans les ovaires. Mais il n'en est pas de mĂŽme pour les Salamandres, la liqueur sĂ©minale se prĂ©sente Ă  'embouchure des canaux des Ɠufs dans l’utĂ©rus ; mais elle ne peut aller plus avant, les fƓtus lui en ferment l’entrĂ©e , cette liqueur ne baigne que les fƓtus les plus prĂšs de sortir quand ils font dehors, il en vient d’autres qui s'imprĂšgnent Ă  leur tour de la liqueur sĂ©minale lancĂ©e par le mĂąle ; Ă c c’est ainĂ­i que tous ces fƓtus fe fĂ©condent successivement. II faut se rappeler ce que j’ai dit dans les Paragraphes LXXX— LXXXV. OnziĂšme RĂ©flexion. C I X. Quoique le sujet principal de ce traitĂ© soit la gĂ©nĂ©ration, je ne l’ai cependant considĂ©rĂ©e que dans quelques amphibies dont je voulois faire l’histoire Ă  prĂ©sent je puis Ă©largir mes idĂ©es en me servant de mes expĂ©riences comme de faits qui en seront les fondemens 8 i qui m’empĂȘcheront d'Ă©lever un Ă©difice ruineux ; mais il faut dire auparavant un mot des plus cj% ExpĂ©riences fameux systĂšmes fur la gĂ©nĂ©ration. Ils se rĂ©duisent Ă  deux ; l’un explique mĂ©chaniquement la formation des ĂȘtres organisĂ©s , l’autre les suppose faits prĂ©existans Sc n’attendant que la fĂ©condation pour se dĂ©velopper. Ce second systĂšme a donnĂ© naissance Ă  deux partis diffĂ©rens. Quelques Naturalistes croient que les ĂȘtres animĂ©s prĂ©existent dans la mĂšre, Sc d’autres dans le pĂšre. Chacun fait que le premier systĂšme porte le nom d 'EpigĂ©nĂšse , qu’il est trĂšs-ancien , Sc que M. le Comte de Buffon l’a ranimĂ© par son Ă©loquence Sc ses fameuses molĂ©cules organiques ; mais chacun fait aussi de quelle maniĂšre il a Ă©tĂ© attaquĂ© par Haller dans fa Physiologie, Sc dans un livre intitulĂ© RĂ©flexions fur le fyflĂ©me de la gĂ©nĂ©ration de M. de Buffos. Les argu- mens de M. Bonnet ne font pas moins terrassons contre lui dans les corps organisĂ©s ; mais les raisons de ces deux Philosophes, quoique trĂšs-fortes, ne font pas tranchantes ; parce qu’ils rĂ©examinent point l’existence ou la nullitĂ© des molĂ©cules organiques , bases du systĂšme. J’ai cru devoir entrer dans ce dĂ©tail , 8c je crois avoir montrĂ© que ce systĂšme est l’ouvrage d’une imagination brillante , qui peint les choses de maniĂšre Ă  prĂ©senter sombre pour la rĂ©alitĂ© , Sc Ă  la faire saisir par ceux qu’il sĂ©duit mes Opuscules de PhylĂŹque vĂ©gĂ©tale Sc animale me paraissent dĂ©montrer cela. Mes nouvelles observations font une nouvelle dĂ©monstration contre le Naturaliste françois. II prĂ©tend que le fƓtus dans les animaux ne prĂ©existe pas Ă  la fĂ©condation , mais qu’il se SUR LA GĂĄSÉRATlOS* ÇCf forme par la rĂ©union des molĂ©cules organiques, rĂ©pandues dans la semence du mĂąle ĂŽc de la femelle qui se fait dans l’utĂ©rus ces molĂ©cules, par de certains rapports, crĂ©ent les corps organisĂ©s. II est clair que mes observations fur les Crapauds, les Grenouilles A les Salamandres font diamĂ©tralement opposĂ©es Ă  cette thĂ©orie, puisqu’elles dĂ©montrent l'existencc des fƓtus dans les femelles de ces animaux avant leur fĂ©condation , &. une existence bien antĂ©rieure Ă  l’acte qui les anima , comme il paroĂźt dans les paragraphes XVIII , XIX , XXX , LIV , LV, LVI , LVII, LXXII ÂŁc XCI ; il ne paroĂźt pas moins probable qu’il en est de mĂȘme dans les autres animaux. 11 est vrai que tous les animaux qui ont Ă©tĂ© les objets de mes expĂ©riences font Ă  sang froid, Sc qu’on pourroit douter s’il en est de mĂȘme pour les animaux Ă  sang chaud mais il me semble que le doute s’évanouit quand les faits font semblables. Je parle de la dĂ©couverte lumineuse de Haller , qui a fait voir dans les oiseaux les fƓtus prĂ©exis- tans Ă  la fĂ©condation. La notoriĂ©tĂ© de cette expĂ©rience m’empĂȘche d’en parler. De forte que si l’on trouve des exemples de la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation dans les femelles parmi les animaux Ă  sang chaud Lc Ă  sang froid , je ne vois pas pourquoi on ne peut pas en dire autant des autres animaux, au moins jusques Ă  ce que l’on ait des faits contraires. C X. Mes observations fournissent de nouvelles consĂ©quences ; les Naturalistes qui croient la G z ioo ExpĂ©riences prĂ©existence des fƓtus, font divisĂ©s ; les uns veulent qu’ils existent dans la mĂšre , ÔC les autres dans le pĂšre ; les derniers trouvent les fƓtus dans les petits vers de la liqueur sĂ©minale , qui passent dans la femelle au moyen de l’accouplement. Mais , que cette opinion est fausse ! j’ai dit, au §. VIII, que dans la Grenouille verte aquatique , lorsque les corpuscules oviformes , ou les fƓtus en maturitĂ© font descendus dans l’utĂ©rus, il en restoit dans les ovaires qui Ă©toient plus petits , ÔC que ceux-ci scrvoient pour la propagation de Tes- pĂšce dans TannĂ©e suivante ; j’ai fait observer la mĂȘme chose dans les Paragraphes LXVI 6c LXXXV pour le Crapaud terrestre puant ÔC les Salamandres aquatiques ; j’ai observĂ© encore cela dans d’autres amphibies; de forte qu’on peut dire au moins avec sĂ»retĂ©, que les fƓtus font dans les ovaires des femelles au moins une annĂ©e avant qu’ils fervent Ă  la gĂ©nĂ©ration. Tant il est peu vraisemblable que ces fƓtus soient passĂ©s pendant T accouplement du mĂąle dans la femelle. II faut rĂ©pondre Ă  une question qu’on doit faire ; suivant les observations des Naturalistes il est certain que ces diverses espĂšces d’am- phibies se reproduisent dans la seconde annĂ©e de leur vie ; 6c il est trĂšs-probable qu’ils continuent Ă  se reproduire tant qu’ils pondent pendant une fuite assez longue d’annĂ©es. Roesel au moins croit que cela s’étend Ă  dix ans , 6c mĂȘme davantage pour les Grenouilles ; c’est fort vraisemblable qu’il en soit de mĂȘme if t 7 r la GĂȘnera t r o n.. roi pour les Crapauds. Supposons donc qu’ils fa multiplient neuf ans consĂ©cutifs, les fcimelles accouchent de neuf ordres de fƓtus. S. l’on examine ces femelles dĂšs leur premiĂšre ainnĂ©e, on ne trouve aucun fƓtus dans les ovaires, ils parodient feulement clans lg seconde InnĂ©e, alors on dĂ©couvre un double ordre de fƓtus , ceux qui font en rqaturitĂ© , & qui doivent naĂźtre cette annĂ©e , avec ceux qui ne l'on t pas acquise , Sc qui doivent naĂźtre TannĂ©e suivante ; pendant cette troisiĂšme annĂ©e on dĂ©couvre alors le troisiĂšme ordre, pendant la quatriĂšme on apperçoit le quatriĂšme ordre , Sc ainsi de suite , chaque annĂ©e produit un nouvel ordre. Eh bien donc ! ces ordres, qui parodient pendant la seconde annĂ©e Sc les suivantes dans les ovaires, prĂ©existent - i!s_ dĂ©jĂ  sous une forme invisible? ne demandent-ils que du tems pour ĂȘtre apperçus ? ou bien se forment-ils rĂ©ellement pendant chaque annĂ©e ? 11 ne me paroĂźt pas difficile de rĂ©pondre que , puisqu’il y a de semblables formations d’ĂȘtres organisĂ©s dans le rĂšgne vĂ©gĂ©tal 8c animal , quoique puissent dire les EpigĂ©néíistes modernes ; Sc puisque la nature est pleine de ces dĂ©veloppemens organiques, comme plusieurs Philosophes justement cĂ©lĂšbres l'on fait voir il est trĂšs-naturel de croire que ces diffĂ©- rens ordres de fƓtus , qui parodient annuellement dans les ovaires, ne font pas formĂ©s successivement, mais qu’ïls coexistoient dĂšs le commencement avec la mĂšre, qu’ils se sont seulement Li successivement dĂ©veloppas, ÔC qu’ils G 3 ioz ExpĂ©riences sont devenus visibles, en s’appropriant les sucs de la mĂšre. Ce dĂ©veloppement, qu’on observe dans les ovaires de nos amphibies, se remarque dans leurs membres; les TĂȘtards Ă©toientd’abord fans jambes , celles-ci ne paroissent que lorsque 1’animal prend toutes les marques caractĂ©ristiques de son espĂšce. Dirons-nous donc que ces jambes n’cxistoient pas, 8t qu’elles se font formĂ©es quand les TĂȘtards se sont mĂ©tamorphosĂ©s ? n’est-il pas plus philosophique de voir ces membres coexistans avec les TĂȘtards, quoique leur petitesse extrĂȘme les dĂ©robĂąt Ăąnes yeux ? & si l’on est forcĂ© de penser ainsi pour les membres du TĂȘtard , pourquoi ne le pen- feroit on pas pour les fƓtus? DoufiĂšme RĂ©flexion. C X I. L’idee de M. Gautier , fur la gĂ©nĂ©ratioa des Grenouilles, est si singuliĂšre, que je pour- rois peut-ĂȘtre la passer fous silence ; mais je ne veux pas me le permettre, parce que je croirois manquer Ă  la sincĂ©ritĂ© du Philosophe. Dans un livre qui porte ce titre Observations fur l’Histoire naturelle & la Physique, M. Gautier , aprĂšs avoir parlĂ© de certains petits vers qu’il a vu dans une vessie renfermĂ©e dans l’ab- domen des mĂąles de Grenouilles, ajoute que ces vers font les vrais artisans de la gĂ©nĂ©ration ; mais voici ses paroles La Grenouille mĂąle montĂ©e & fortement attachĂ©e sur la femelle , attend les inflans que les Ɠufs s'Ă©coulent de la femelle , s e K LA GÉSÉKAT 10 H. 1*3 il jette alors ses embryons , tels que je les ai apperçus , ils s attachent aux Ɠufs , Ă­> s’en nourrissent pendant quelques jours , jusqu’à-ce quils soient en Ă©tat de se nourrir d'alimens plus grojjiers. Ces embryons conservent la mĂȘme figure quils aì’oient dans la vĂ©sicule du pĂšre ; pendant l'espace d'environ un mois , tems auquel ils quittent* cette figure, comme font les vers-Ă -soie dans le cocon , ils dĂ©veloppent leurs pattes postĂ©rieures , quils Ă©cartent enfin j ce font ces pattes , qui , unies dans Vembryon , font la queue du TĂȘtard , embryon de la Grenouille. Le livre a paru cn 1751 , 8c j’ai eu la commoditĂ© d’en Ă©tudier les dĂ©couvertes. J’ai d’abord cherchĂ© la vessie renfermant les petits vers dans l’abdomen des Grenouilles mĂąles, ÔC j’ai bientĂŽt vu, par la description donnĂ©e , que c’étoit celle de surine ; j’y ai trouvĂ© les petits vers, ils font de la grosseur d’un bon fil, ils ont une couleur blanche , un peu jaune , fans anneaux, de la longueur d’une ligne 8Ă­ demi, ayant un mouvement presque continuel, St attachĂ©s par leur extrĂ©mitĂ© Ă  la vessie. Nous sommes d’accord jufqu’ici avec M. Gautier ; mais ces vers ne peuvent ĂȘtre regardĂ©s comme des fƓtus de Grenouilles , i°. parce qu’on trouve ces vers dans la vessie des femelles comme dans celle des mĂąles ; tandis qu’ils ne devroient ĂȘtre que dans la veflĂŹe des derniers z°. on ne trouve pas ces vers dans la vessie de toutes les Grenouilles accouplĂ©es, comme j’ai pu le voir dans la foule des Grenouilles G 4 104 E X P É n J E N C E s que j’ai ouvertes. z°. J’ai peut-ĂȘtre trouvĂ© vingt de ces vers dans la vessie des Grenouilles mĂąles accouplĂ©es, 8c j’ai trouvĂ© plus de mille fƓtus dans les femelles, de mĂȘme que Swammer-. dam. 4 0 . AprĂšs la fĂ©condation, le mĂąle ne devroit plus avoir de vers ; mais je n’ai pas troiri'Ă© que le nombre en diminuĂąt. 5 0 . Ces vers restant attachĂ©s aux fƓtus des Grenouilles 8c s’en nourrissant , je devois les voir comme lui, puifqu’ils pouvoient se distinguer Ă  l’ceil ; mais je puis dire que je ne les ai jamais ap- perçu , quoique je les aie cherchĂ© avec soin. 6°. Enfin, ces petits vers ne concourrent pas Ă  la gĂ©nĂ©ration, puisque j’ai fĂ©condĂ© leurs fƓtus artificiellement avec la liqueur spermatique des mĂąles , oĂč il n’y avoit aucun ver, comme on le verra dans mes recherches suivantes. Telles sont les raisons qui me font rejeter l’opinion de M. Gautier. Je ne dirai pas que ceci soit une fiction , j aime plutĂŽt Ă  penser qu’une fausse apparence l’a trompĂ© ; ce qui pouvoir lui arriver d’autant plus facilement, qu’il ne connoistĂČit pas les choses les plus communes, comme on aura pu le juger par le morceau que j’ai rapportĂ© , 8c su r-tout par la phrase qui le termine , oĂč il forme la queue du'TĂ©tard avec ses jambes postĂ©rieures. Le croira-t on? l’Auteur ne craint pas de dire dans son livre que les femelles des Grenouilles n’ont point d’utĂ©rus, que toutes les Grenouilles ont la langue attachĂ©e au bord antĂ©rieur du palais, que les testicules des mĂąles sont les reins , St diverses autres choses, que les svr t* GĂ©nĂ©ration. io$ plus grands novices en Anatomie ne diroient point. AuĂ­Ti Rot- sel juge l’Auteur de cette maniĂšre Non solum itaque ajjcrere audeo p arum in anatomia ranarum prosecijse Gau- tierum , st d adderc etiam non ambigo easdem ranas eumdern vix habere cognitas. CHAPITRE VII. Examen de quelques autres objections faites contre le syjlĂ©me de lu prĂ©existence des fƓtus dans les femelles. Ï-/E Docteur Pirri, MĂ©decin & Philosophe, dans un bon ouvrage fur la thĂ©orie de la putrĂ©faction , qu’il a derniĂšrement publiĂ©, se dĂ©clare partisan du systĂšme de M. le Comte de Buffon, sur la gĂ©nĂ©ration , 8t il a mis Ă  la tĂȘte de son ouvrage des considĂ©rations fur la reproduction des corps organisĂ©s, oĂč il cherche Ă  affoiblir les argumens les plus forts en faveur de la prĂ©existence des germes ; il attaque d’abord la dĂ©couverte de Haller fur le poulet, St celle que j'ai faite fur les Grenouilles , dont j’ai parlĂ© dans mon Prodrome fur les Reproductions animales. Parlons de fa double attaque. Dans la page 7 de son livre , il dit Le » savant AbbĂ© Spallanzani , dont le nom » doit ĂȘtre cher Ă  l’Italie , nous apprend un v fait rrĂšs-intĂ©ressant St trĂšs-propre Ă  confir- io de vie , ceux qui n’avoient pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s » Ă©toient en lĂ©thargie St immobiles. J’ai transcrit les paroles du MĂ©decin pour faire voir combien peu elles s’accordent avec ce que j’ai dit dans mon Prodrome fur ma dĂ©couverte ; aussi, afin que le Lecteur puisse mieux juger entre nous , je rapporterai de mĂȘme ce que j’ai dit aprĂšs avoir montrĂ© la parfaite ressemblance des Ɠufs de Grenouilles fĂ©condĂ©s , avec ceux qui ne l’étoicnt pas ; Sc aprĂšs avoir prouvĂ© que ceux-ci ne se dĂ©ve- loppoient pas, j’ajoute , page 51 II n’en » est pas de mĂȘme des Ɠufs fĂ©condĂ©s, qui y> sont d’abord ronds , qui s’alongent ensuite , » mais fans augmenter en masse , puis ils » s’accroissent visiblement. La surface de l’hc- n misphĂšre blanchĂątre se ternit lĂ©gĂšrement ; » St l’on apperçoit sur l’autre hĂ©misphĂšre, qui » est noir, un sillon longitudinal, terminĂ© par 5 V R LA GÊKÊRATIOH. 107 » deux saillies, qui s’étendent en lignes droites » fur le plus grand diamĂštre de l’Ɠuf alongĂ© » Ă  mesure qu’il s’agrandit , la membrane in- » tĂ©rieure se dilate , 6c la quantitĂ© d u liquide » qu’elle contient s’augmente ; le petit sillon » 6c les faillies s'alongent beaucoup plus, peu » aprĂšs ils s’échappent par un cĂŽtĂ© de l’Ɠuf, qui paroĂźt encore fous la forme d’un petit » globe alongĂ© ; mais il a dans un cĂŽtĂ© de » l’alongement une espĂšce de petit appendice. » Cependant , la partie opposĂ©e , celle qui » correspond Ă  l’hĂ©misphĂšre blanchĂątre, 5c qui » conserve la mĂȘme couleur, se gonfle , tandis » que l’hĂ©miĂ­phĂšre noir se courbe , le petit » appendice s’alonge alors ; mais sur-tout aprĂšs w un tems un peu plus long, on voit que ce » petit appendice est la queue du TĂȘtard , la » courbure qui s’est formĂ©e , lĂ  oĂč Ă©toit Thé— misphĂ©re noir, est son dos ; le gonflement n de la partie opposĂ©e est son ventre ; la partie » opposĂ©e Ă  la queue prend la forme de la » tĂȘte du TĂȘtard on dĂ©couvre dans fa partie » antĂ©rieure la forme des yeux un peu formĂ©s ; on dĂ©couvre les deux proĂ©minences, ou petits » boutons, dont il se sert pour s’attacher aux » corps 6c se reposer , le commencement de » l’ouverture de la bouche , 6c , enfin , les » deux nageoires, oĂč l’on voit couler le sang. » Le TĂȘtard, dans ces premiers momens, » ne donne aucun signe de vie par le mou- » vement, quoiqu’on le tourmente avec une » aiguille , ou en l’exposant aux rayons du » soleil, rassemblĂ©s par une lentille.... io 8 ExpĂ©riences » Tels font les phĂ©nomĂšnes observĂ©s gra- » duellement dans les Ɠufs fĂ©condĂ©s -, d’oĂč il » paroĂźt clairement qu’ils ne font pas des Ɠufs » qui donnent naissance aux TĂȘtards, mais les » TĂȘtards eux-mĂȘmes concentrĂ©s & rĂ©duits. » II est donc prouvĂ© que les TĂȘtards prĂ©- » existent Ă  la fĂ©condation ; mais je dĂ©montre » cette vĂ©ritĂ© d’unc maniĂšre plus claire , par » ce moyen les Ɠufs non fĂ©condĂ©s ne diste- » rem absolument point des Ɠufs fĂ©condĂ©s , » mais les Ɠufs fĂ©condĂ©s font les TĂȘtards mĂȘ- » mes concentres Si rĂ©duits donc on doit dire » la mĂȘme chose des Ɠufs non fĂ©condĂ©s j donc » les TĂȘtards prĂ©existent Ă  la fĂ©condation , 8c » pour fe dĂ©velopper ils n’ont besoin que de » la liqueur fĂ©condante du mĂąle ». En comparant ce passage avec celui de M. Pirri , il est aisĂ© de voir que lorsque ce dernier a voulu faire f extrait de mon ouvrage, il ne savoir pas fous les yeux. PremiĂšrement, il commence par me faire employer un instrument dont je ne parle pas , ÔC dont je ne me fuis servi que pour Ă©tudier les parties antĂ©rieures de l’Ɠuf des Grenouilles^ car, pour les extĂ©rieures , elles sent assez grandes pour les observer avec les yeux ; SĂ­ quand je me ferois servi de microscope , je puis me flatter de n’avoir pas couru le risque que fait craindre le MĂ©decin romain. II est vrai que le microscope est une source d’erreurs , soit lors qu’il est mauvais , soit quand l’Observateur n’est pas expĂ©rimentĂ© mais il est vrai aussi que cet instrument est la source des plus belles dĂ©couvertes faites dans s v r la GĂ©nĂ©ration. 109 l’Histoire naturelle 8c physique ; si l’on met- toit cela en doute , on pourroit passer pour manquer de sens commun. M. Pirri dit en second lieu'; que 'f ai trouvĂ© les Ɠufs tant pondus & fĂ©condĂ©s que non-fĂ©- condĂ©s dans VutĂ©rus , pleins Ă©galement d’un TĂȘtard. Ces paroles peignent ma dĂ©couverte fous des couleurs diffĂ©rentes de celles que je lui ai donnĂ©; je n’ai jamais dit que les TĂȘtards existent Ă©galement dans les oeufs fĂ©condĂ©s 8c non-fĂ©condĂ©s mais j’ai dit que les uns 8c les autres ne font que les TĂȘtards eux-mĂȘmes ; l’expreslion de M. Pirri suppose des Ɠufs, la mienne les exclut. En troisiĂšme lieu , le TĂȘtard que j’ai dĂ©couvert Ă©toit , suivant cet Ecrivain , repliĂ© avec fa queue fur fa tĂȘte , dijlinguĂ© par fa couleur noirĂątre. Quant Ă  la couleur , je n’ai pas dit qu’elle fĂ»t noirĂątre , mais qu’un hĂ©misphĂšre du TĂȘtard arrondi Ă©toit noir, 8c l’autre obscurĂ©ment blanc ; je n’ai jamais dit que la queue de cet animal fut repliĂ©e fur fa tĂȘte , mais qu’elle paroiffoit comme un petit appendice, Lc qu’elle s’alon- geoit Ă  mesure que le TĂȘtard croiffoit ce qu’on observe dans les TĂȘtards fĂ©condĂ©s , mais ce qui n’arrive pas dans ceux qui ne l’ont pas Ă©tĂ© , puisque ceux-ci n’ont point de queue , quoique M. Pirri imagine que je leur en donne une. En quatriĂšme lieu, M. Pirri me fait dire que les Ɠufs fĂ©condĂ©s montrĂšrent le TĂȘtard en vie if en mouvement , & qu il Ă©toit immobile & en lĂ©thargie dans les Ɠufs non-fĂ©condĂ©s. Je lia ExpĂ©riences n’ai pourtant jamais parlĂ© de la lĂ©thargie des TĂȘtards non-fĂ©condĂ©s, 8c bien loin de parler du mouvement des TĂȘtards d’abord aprĂšs leur fĂ©condation , je dis prĂ©cisĂ©ment le contraire , comme on peut le voir dans le passage que j’ai citĂ© de mon Prodrome. C X I I. Je veux discutera prĂ©sent les objections de M. Pirri } quoiqu’elles soient diffĂ©rentes, elles peuvent se rĂ©duire Ă  deux , dont Tune est la suivante. Ma dĂ©couverte, sur la prĂ©existence des TĂȘtards Ă  la fĂ©condation , repose sur un fait que je supposai certain , parce 'qu’il Ă©toit appuyĂ© de l’observation du cĂ©lĂšbre Swam- merdam , qui a fait voir que la fĂ©condation se fait dans les Grenouilles hors du corps, 8C qu’à mesure que les Ɠufs sortent de l’anus, la semence du mĂąle les fĂ©conde ; le MĂ©decin romain rĂ©pand des doutes fur cette supposition, 8c il s’appuie sor Roesel ; mais il faut l’é- couter. Qui nous assure que les Ɠufs des » Grenouilles ne soient pas fĂ©condĂ©s quand » ils sont pondus. Si Roesel lui-mĂȘme croit n la chose incertaine 8c prĂ©tend avoir vu un » accouplement rĂ©el, qui lui soit croire que la » semence du mĂąle pĂ©nĂštre dans l’utĂ©rus. Quand je composois mon ouvrage je n’i- gnorois pas les incertitudes de Roesel ; mais en bonne logique elles ne pouvoient Ă©nerver la force d’un fait positif, que Roesel lui-mĂȘme avoir connu ; car, lorsqu’il parle de cette conjonction momentanĂ©e, il ne doute pas de l'ob- scrvation de Swammerdam , que M. Pirri SUR LA GÊXÈRATIOX. m jne devoit pas ignorer ; 6c non-seiu!ement Roesel n’en douce pas, mais il confirme ce fair dans une autre partie de son ouvrage ; en parlant de la,Grenouille verte, il dit que le mĂąle arrose de sa semence les Ɠufs pondus par la femelle , dans le moment oĂč ils sortent de sanus. Simulac autem fcemella ova sua per anum emittit masculus fuo femme , id quod ipfe domi mcƓ non folum vidi sed iteratis etiam vicibus fieri non fine admi- ratione observavi T. Pour rendre plus sensible cette fĂ©condation hors du corps de la mĂšre, il reprĂ©sente au naturel le mĂąle accouplĂ© avec la femelle , les Ɠufs qui en sortent, & la semence du mĂąle qui les arrose, comme on le voir dans la figure i , planche XIII. M. Pirri ne devoit pas dissimuler cette importante observation , ou plutĂŽt s’épargner cette objection ; s’il lui relie pourtant quelques doutes, il n’a qu’à lire mes quatre premiers Chapitres. C X I I I. Mais passons Ă  une nouvelle objection; en parlant de la prĂ©existence du TĂȘtard Ă  la fĂ©condation, j’entends par TĂȘtard l’embryon de la Grenouille, ou la Grenouille masquĂ©e sous l’apparence du TĂȘtard ; M. PiĂŹiri veut que la Grenouille & le TĂȘtard soient deux animaux diffĂ©rens , & il en conclut que ce fait ne » sauroit ĂȘtre un argument victorieux contre » l’EpigĂ©nĂšse , puisque l’AbbĂ© Spallanzani » ne peut s’en servir sans ĂȘtre tombĂ© dans une i Hist. ran. p. 56. riz ExpĂ©riences » erreur incroyable pour lui ; il a confondu n l’apparence du TĂȘtard avec celle de la Gre- » nouille , 8t il a fait l’équivoque de croire » que la Grenouille 8c le TĂȘtard ne formoient » qu’un seul animal w. J’ai bien cru que mon ouvrage sur les Reproductions animales pouvoir ĂȘtre sujet Ă  des erreurs, mais jamais Ă  celle qu’on me reproche ici, puisque je fuis fondĂ© fur l’autoritĂ© de S w am- merdam , de Vallisneri , de Roesel , 8c de tant d’autres qui ont parlĂ© de la Grenouille, & qui s’accordent Ă  regarder la Grenouille 8c le TĂȘtard comme un seul animal. On fait que plusieurs insectes passent par l’état de ver , de nymphe 8C d’animal volant ; mais on fait aussi que ces trois animaux font le mĂȘme fous trois formes diffĂ©rentes ; de forte que l’animal volant exissoit fous les enveloppes du ver 8c de la nymphe, d’oĂč il s’est comportement dĂ©veloppĂ©. Le TĂȘtard est Ă  la Grenouille, ce que la nymphe est Ă  l’animal volant, suivant les observations de Swammerdam , qui a trouvĂ© la Grenouille fous l’écorce du TĂȘtard , comme le Papillon fous celle de la nymphe. PĂ©tois donc fondĂ© Ă  croire que le TĂȘtard Sc la Grenouille Ă©toient le mĂȘme ĂȘtre ; Tailleurs, ma supposition Ă©toit fondĂ©e fur des faits , celle de M. Pirri Ă©toit gratuite , mais la rĂ©putation de M. Pirri m’a fait entreprendre un examen particulier de ces observations de Swammerdam , fur l’identitĂ© du TĂȘtard 8c de la Grenouille. II falloir donc montrer que l’or- ganifation intĂ©rieure du TĂȘtard Ă©toit celle de SUR LÀ GÉNÉRATIOK. itZ la Grenouille. Si l'on trouve le mĂȘme systĂšme d’artĂšres , de veines , de nerfs, de muscles ; /ĂŹ le cƓur, le foie, le poumon , 8c les autres viscĂšres font les mĂȘmes ; ĂŹ le cerveau est le mĂȘme ; lĂŹ la moelle Ă©piniĂšrc est la mĂȘme ; enfin, si les organes des sens 8c la disposition des os ne varient point i! n’y a point de doute que ces deux animaux n'en fassent qu'un seul sous une forme diffĂ©rente. C X 1 V. J’entrepris cet examen peu de teins aprĂšs avoir vu le Livre de M. PĂ­rri , dans le prin- tems de 1777. Cette saison Ă©toit trĂšs-favorable pour ces observations, que je fis fur la Grenouille verte aquatique, dont je parle dans le Chapitre quatriĂšme. Pour Ă©viter les longueurs, je donnerai feulement les rĂ©sultats de mes observations commencĂ©es dans le moment oĂč les TĂȘtards peuvent s’observer intĂ©rieurement , ÂŁ>i en les suivant jnsqu’à-ce qu’ils aient pris la forme de Grenouille. DĂšs le vingt-sixiĂšme jour, aprĂšs la naissance des TĂȘtards, on dĂ©- couvroit au travers des tĂ©gumens de l'abdomen leurs intestins tournĂ©s en spirale , les battemens du cƓur Ă©toient trĂšs-senlĂŹbles dans la rĂ©gion du thorax ; en ouvrant ces deux cavitĂ©s les intestins laissoient voir leur mĂ©sentĂšre , qui ressemblait Ă  une toile d’araignee par sa finesse ĂŽc la facilitĂ© de le rompre on y apperce- voit ramper de trĂšs-petits filets ronges, que la lentille montrait , chrome les artĂšres 2 >C les veines ; les reins , les deux poumons vafeu- leux, le foie, Ă©toient trĂšs-vilĂŹbles y la vĂ©licula Ii U 4 ExpĂ©riences du fiel Ă©toit attachĂ©e Ă  ce dernier viscĂšre , elle Ă©toit pleine d’une liqueur transparente 6c sans amertume. Le cƓur fait comme un cĂŽne avoit son oreillette ÔC son ventricule vers la partie supĂ©rieure , on voyoit l’aorte qui s’y implantoit , &C se divisoit en deux rameaux ; on voyoit de mĂȘme l’aorte descendante 6c la veine-cavc , de mĂȘme que leurs principaux rameaux ; les vertĂšbres du dos 6c des lombes, le crĂąne, paraissaient n’avoir aucune consistance osseuse ; la moelle 6Ă­ le cerveau , qu’ils renferment , rcssembloient Ă  une gelĂ©e ; les nerfs du corps paroissoient de mĂȘme gĂ©latineux , 6c l’on distinguoit ceux qui sortoient des vertĂšbres dorsales on obfervoit extĂ©rieurement les trous des narines ; l’iris de l’Ɠil est d’une couleur jaune dorĂ©e ; quand on ĂŽte l’Ɠil de son orbite, 6c qu’on l’ouvre, on y trouve l’humeur vitrĂ©e, rhumeur aqueuse, la lentille crystalline , qui a dĂ©jĂ  assez de consistance 6c de transparence. Les ouĂŻes, qu’on observe dans les plus jeunes TĂȘtards, ne se voient plus qu’intĂ©rieurement fous la peau du thorax. Tous ces organes paraissent les mĂȘmes au trente - sixiĂšme jour , avec cette diffĂ©rence , qu’ils font plus grands L plus solides ; la liqueur de la vĂ©sicule du fiel est transparente, mais elle devient amĂšre; les vaisseaux artĂ©riels 6c veineux se teignent lĂ©gĂšrement en rouge ; le crĂąne 6c les vertĂšbres deviennent cartilagineux ; le cerveau , la moelle Ă©pini*re 6C les nerfs ne font plus si gĂ©latineux. Au quarantiĂšme jour, toutes ces parties font SUR LA G É S Ê K A T I O N. 115 plus fortes & mieux dĂ©veloppĂ©es, l’amertume de la bile augmente ; on voit les rudimens des jambes postĂ©rieures on devine les antĂ©rieures, mais elles font enveloppĂ©es fous les tĂ©gumens du thorax. Quinze ou vingt jours aptes, quelquefois plutĂŽt ou plus tard dans les TĂȘtards de la mente mĂšre , on voit paroĂźtre les jambes antĂ©rieures , leur organisation est la mĂȘme , elle ne varie pas dans les jours fuivans, quand les jambes font dĂ©veloppĂ©es , quand la queue s’accourcit SĂ­ fe perd , 8c quand ils prennent la forme d’une Grenouille. La Grenouille est parfaite au bout de quatre- tfngt jours, ou environ , 8Ă­ elle ne diffĂšre plus des autres que par la grosseur ; mais son organisation est la mĂȘme que celle du TĂȘtard, elle a les mĂȘmes organes, les mĂȘmes viscĂšres, les mĂȘmes artĂšres , les mĂȘmes veines 8c nerfs , les os ont la mĂȘme configuration j’abrĂšge pour Ă©viter une prolixitĂ© fastidieuse ; l’identitĂ© du TĂȘtard & de la Grenouille est donc entiĂšre ; mais lĂŹ M. PiRRi conserve encore quelque doute , parce que la Grenouille n’a ni nageoires , ni queue comme le TĂȘtard , ĂŽc qu’elle a quatre jambes , que le TĂȘtard n’a pas ; je lui rappellerai que le poulet dans l’Ɠuf a la forme d’un ver, avec une grosse tĂȘte Sc une longue queue , que son cƓur ressemble Ă  un denti-anneau , que l’incubation lui donne des ailes 8t des jambes , Ôt qu'en sortant de l’Ɠuf, il perd le cordon ombilical cependant, je ne crois pas que personne ait pensĂ© que le II Ăź 1X6 E X P É R 1 E iV C E S poulet dans l’Ɠuf & la poule soient deux animaux diffĂ©rons ; mais jc crois ma rĂ©ponse suffisante. C X V. M. Pirri attaque la dĂ©couverte de Haller je souhaitois savoir ce quVn pensoir mon ancien ami ce grand Physiologiste ; je lui envoyai donc le livre de M. Pirri , mais il Ă©toit trop malade pour pouvoir m’écrirc son opinion ; peu avant fa mort il m’écrivit ce peu de paroles Je vous abandonne ce Monsieur Pirri , il est » en bonnes mains, vous saurez aise z dĂ©fendre » la bonne cause de la nature. 11 est toujours » tĂ©mĂ©raire d’attaquer des expĂ©riences par des » raisonnemens ». Haller me chargeoit ainsi de fa dĂ©fense , 5 c je l’aurois prise d’abord, fi, en comparant la dĂ©couverte de ce grand homme avec l’objectĂŹon , je n’avois pas trouvĂ© que , si je ne devois pas la nĂ©gliger , au moins je pouvois la suspendre , sans blesser l’oppo- sant ; je crus donc convenable d’engager cet ingĂ©nieux Physicien Ă  Ă©tudier avec plus d’atten- tion la dĂ©couverte de Haller , qu’il me pa- roissoit n’avoir pas approfondie comme elle mĂ©ritoit, comme on s’en appercevra en comparant la peinture de la dĂ©couverte avec celle qu'en fait l’extrait. Haller s’exprime ainsi dans la Section XIII, p. 187 de ses Observations furie Poulet; le jaune de l’Ɠuf est une continuation des » intestins du fƓtus, la membrane interne du » jaune est une continuation de la membrane » interne de l’intestin grĂȘle de la membrane sur la GĂ©nĂ©ration. 117 » interne de l’estomac, du pharinx avec la peau » 8c lepiderme ; la membrane externe du jaune » est la membrane externe de l’intestin , elle » se continue avec le mĂ©sentĂšre , le pĂ©ritoine ; »> l’enveloppe qui couvre le jaune , dans les » derniers jours de l’incubation , est la peau » mĂȘme du fƓtus ». Ensuite il conclut Si » le jaune est contenu avec la peau , il est vĂ©- » ritablement une partie du fƓtus ; mais le » jaune a existĂ© dans la mĂšre indĂ©pendamment » de la fĂ©condation , donc le fƓtus doit aussi » avoir existĂ© avec lui ». Ce grand homme rĂ©pĂšte la mĂȘme chose en des termes plus prĂ©cis dans fa PhyĂ­iologie , lib. XXIX , sect. II. Denique direcla demons- tratio adcjl , quĂą oflendas certe in avibus pul- lum in matre fuijje. Pulli enim intejlinum continuatur cum vitelli involucro , & adeo intejlini interior membrana cum epidermide , animait , exterior cum cutc denique cum involucro vitelli eadem ejl. Voici les paroles mĂȘmes de M. Pirri Parce que Haller a prouvĂ© que la mem- » brane du jaune , prĂ©existente dans l’Ɠuf fĂ©- » condĂ©, se transforme par Incubation dans » l’intestin grĂȘle du Poulet ; il dĂ©duit que cette » membrane devoir prĂ©exister absolument dans » l’Ɠuf avant fa fĂ©condation ». Je souhaite que le Phylicien romain dĂ©cide lui-mĂȘme Ă­i la copie est conforme Ă  l’original ; il est vrai qu’il ajoute Ă  ceci un fait de Haller qu’il essaie de rĂ©futer. Mais il est vrai aussi que le second fait n’a pas paru Ă  Haller de la H z n8 ExpĂ©riences mĂȘme importance que le premier , ni aussi propre Ă  persuader ; ce qui mĂ©ritoit detre remarquĂ©. Je suis fĂąchĂ© d’avoir Ă©tĂ© forcĂ© de rectifier ces inexactitudes d’un homme que j’estime, &C avec qui jc me fuis liĂ© depuis la publication de son livre ; mais , en traitant ces matiĂšres, je ne pouvois leviter ; je reconnois aussi que ces inexactitudes ont Ă©tĂ© fessier de la rapiditĂ© de son travail, qui ne lui a pas permis de considĂ©rer ces objets comme ils le mĂ©ritoient. Aussi, jc le prie d’examiner de nouveau ces faits avec plus de loisir , d’y joindre les preuves qu’il trouvera dans cet ouvrage 8c je ne doute pas qu’il ne reconnoisse la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation. C X V I. AprĂšs ces critiques de Haller 8c de moi, notre Auteur , fans attaquer directement le systĂšme de l’emboĂźtement, dĂ©fendu par M. Bonnet , dit qu’ìl n’en est pas persuadĂ© cela n’est pas Ă©tonnant, M. Pirri s’est dĂ©clarĂ© EpigĂ©nĂ©liste ; mais j’ai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© de trouver dans son livre , Ă  la page zr. , un passage du Philosophe de GenĂšve , qui semble en contradiction avec lui , puisqu’il paroĂźtroit attaquer le systcme de i’emboĂźtement mais ce qui m’a fur-tout surpris , c’est que M. Pirri dit , Ă  la page 77 de fa thĂ©orie de la putrĂ©faction , que le systĂšme du dĂ©veloppement des corps est, suivant l’aveu de M. Bonnet lui- mĂȘme , dĂ©duit de faits assez Ă©quivoques 8c d’observations qui ne conduisent pas directe- sur la GĂ©nĂ©ration. 119 ment Ă  ces consĂ©quences. AprĂšs avoir lu cela, je lecrivis sur-le-champ Ă  M. Bonnet, pour savoir de lui-mĂȘme comment il concilioit ces contradictions apparentes , 8 c j’y joignis un extrait de la maniĂšre de penser de M. Pirri sur ma dĂ©couverte &Ă­ sur les molĂ©cules organiques de M. de Buffon. Je ne tardai pas de recevoir de mon illustre ami une rĂ©ponse, qu’il me pria de rendre publique , Sc que je transcris ici. GcnthodprĂšs de GenĂšve le 29 Nov. 1777. Je ne connoissois point cet ouvrage de M. Philippe Pirri i, dont vous me donnez une courte notice , qui me surprend beaucoup. Comment, je vous prie, s’est-il trouve dans lc dix-huitiĂšine siĂšcle un Ecrivain qui ait osĂ© soutenir, que le TĂȘtard St la Grenouille font deux animaux essentiellement diffĂ©rens ? Cet Ecrivain n’avoit donc jamais lu Swammerdam ! Mais peut-on traiter des Grenouilles fans avoir lu Swammerdam, ou au moins fans lavoir consultĂ©? Son compatriote, l’illustre Valisnieri, qu’il a sans doute feuilletĂ© , n etoit-il pas suffisant pour le convaincre de la faussetĂ© de sa propre opinion? J’avoue que je ne comprends rien Ă  cette assertion si Ă©trange de M. Pirri. Appa- C 1 TraitĂ© de la putrĂ©faction, prĂ©cĂ©dĂ© de quelques considĂ©rations fur la reproduction des corps organisĂ©s. Rome 1776. H 4 IlO EXPERIENCES remment que quelqu’intĂ©rĂȘt secret l’a jetĂ© dans Terreur. Cette opinion singuliĂšre n’exigeoit pas toute la peine que vous avez prise pour la rĂ©futer je m’asture qu’il n'est aucun Naturaliste qui ne vous en eĂ»t bien volontiers dispensĂ©. Vous m'apprenez que M. Pirri m’attaque indirectement, Sc qu’il dit que mes ConsidĂ©rations sur les corps organisĂ©s ne l'ont jamais persuadĂ© de la prĂ©exijlence des Germes. Je ne suis point du tout Ă©tonnĂ© qu’un Physicien, qui croit que le TĂȘtard St la Grenouille sont deux animaux essentiellement dissĂ©rens , n’ait point Ă©tĂ© satisfait de mes preuves en faveur de la prĂ©existence des germes. Ce qui m’étonneroit beaucoup, ce seroit qu’un tel Physicien eĂ»t Ă©tĂ© satisfait de ces preuves. Votre EpigĂ©néíiste est bien fait pour surprendre les Naturalistes qui n’ont pas assez rĂ©flĂ©chi fur Tinfluence des opinions d’un cĂŽtĂ© il avoue que vous avez bien dĂ©montrĂ© que les molĂ©cules organiques de M. de Buffon font de vĂ©ritables Animalcules ; Sc de Tautre , il soutient qu’il existe nĂ©anmoins de vraies molĂ©cules organiques , mais qtie leur extrĂȘme petitesse dĂ©robe Ă  notre vue. Cependant, s’il n’a pu les apper- cevoir, comment a-t-il pu s’assurer de leur existence ? Vous me dites , que , Jclon lui , cette exijlence est prouvĂ©e par les consĂ©quences. II faudroit donc que je connusse ces consĂ©quences pour juger de leur valeur. JVlais ce que vous me rapportez de cet Auteur, ne me porte pas Ă  prĂ©sumer favorablement de sa logique. Un dĂ©faut de logique est une chose trĂšs-par- I 2 I svn la GĂ©nĂ©ration. donnable ce qui ne l'est pas au mĂȘme degrĂ©, c'est un manque d’exactitude ou de fidĂ©litĂ© dans les citations des Auteurs. Quand, pour combattre l 'emboĂźtement , M. PiRRi mutile un passage de mes Corps organisĂ©s , il fait une chose cju’on peut lĂ©gitimement lui reprocher, & qui f'eroit seule douter de la bontĂ© de sa cause , Ă­ĂŹ l’on devoit en juger par son procĂ©dĂ©. Jc n’ignore n pas, dit-il, les preuves gĂ©omĂ©triques de la » diviĂ­ibilitĂ© de la matiĂšre Ă  l’infini. Mais, je n fais aussi que ce font autant de surprises qu’on » voudroit faire Ă  notre esprit , au prĂ©judice » de la raison , comme l’avouc avec une ingc- » nuitĂ© philosophique M. Bonnet , dans l’ar- » ticle 127 de ses Corps organisĂ©s , oĂč , Ă  » propos de l’emboĂźtement, il s’exprime ainsi » La divistbilitĂ© de la matiĂšre Ă  l'infini , par la- » quelle on prĂ©tendroitsoutenir cet emboĂźtement , » est une vĂ©ritĂ© gĂ©omĂ©trique sf une erreur physique. Tout corps est nĂ©cessairement fini, toutes ,1 ses parties font nĂ©cessairement dĂ©terminĂ©es » . Qui ne croiroit, Ă  la lecture de ce passage de mes Corps organisĂ©s , que je combats moi-mĂȘme l’emboĂźtement ? Et pourtant, c’est dans ce mĂȘme passage que je tĂąche de prouver la possibilitĂ© de l’emboĂźtement. Pour essayer de persuader Ă  ses Lecteurs que je pense comme lui sur ce sujet, il dĂ©tache lelĂŹement quatre lignes de mon article , supprime tout le reste , 8c applaudit Ă  mon ingĂ©nuitĂ© philosophique. J’ai regret de ne pouvoir applaudir aussi Ă  la candeur philosophique de M. Pirri mais la vĂ©ritĂ© est , qu’il me fait dire prĂ©cisĂ©ment le contraire m ExpĂ©riences de c'e que j’ai souhaitĂ© de prouver. J’avois dit L’hypothĂšse de remboĂźtement a sa probabi- » litĂ© ; mais il ne faut pas supposer un emboĂź- » tement Ă  l’infini , ce qui seroit absurde. La » diviĂ­ibilitĂ© de la matiĂšre Ă  l’infini, par laquelle » on prĂ©tendrait soutenir cet emboĂźtement, » est une vĂ©ritĂ© gĂ©omĂ©trique 8c une erreur » physique, 8cc. ». Je continuois ainsi Nous » ignorons absolument quels font les derniers » termes de la division de la matiĂšre ; 8t c’est » cette ignorance mĂȘme qui doit nous empĂȘcher » de regarder comme impossible l'enveloppe- » ment des germes les uns dans les autres. Nous » n’avons qu a ouvrir les yeux 8c Ă  promener nos » regards autour de nous, pour voir que la mari tiĂšre a Ă©tĂ© prodigieusement divisĂ©e. L’échelle » des Etres corporels est l’echelle de cette divi- » sion. Combien la Moisissure est-elle contenue n de fois dans le Cedre, la Mitte dans l’ElĂ©- » phant, la Puced’eau dans la Baleine, un grain » de fable dans le Globe de la terre, un globule » de lumiĂšre dans le Soleil ! On nous prouve » qu’une once d’or peut ĂȘtre assez soudivisĂ©e par » l’art humain, pour former un fil de 80 ou ioo » lieues de longueur on nous montre au micros- » cope des Animaux dont plusieurs milliers n’éga- » lent pas ensemble la grosseur du plus petit grain » de poussiĂšre on fait cent observations de mĂȘ- » me genre, 8c nous traiterions d’absurde la » thĂ©orie des enveloppemens, 8cc. »! II y a plus encore j’étois revenu Ă  l’emboĂźtement , de la maniĂ©rĂ© la plus directe , dans l’art. 342., 8c j’y avois transcrit un long passage du savant SVR LA GENERATION, I2J Bourguet, pour infirmer les calculs par lesquels le cĂ©lĂšbre Hartsoeker vouloir Ă©craser l’imagĂŹnation. Comment donc M. Pirri n’a-t-il pas compris , qu’un manque de bonne foi, qu’il Ă©toit si facile de dĂ©couvrir, dĂ©crĂ©diteroir son propre ouvrage ? Je fuis bien plus surpris encore, d’un autre passage de cet Auteur, que vous me transcrivez, 8c oĂč il ose avancer en termes exprĂšs Que VĂ©volution ou le dĂ©veloppement des germes eft , de l'aveu de M. Bonnet , un syflĂȘme tirĂ© des faits les plus Ă©quivoques & des observations les plus inconsĂ©quentes. Cette assertion si prĂ©cise & pourtant Ă­i fausse ne sautoir en imposer qu’à ceux qui ne m’ont jamais lu ; car, quel est celui de mes Lecteurs , qui ignore que j’ai toujours regardĂ© l’ Ă©volution ou le dĂ©veloppement des germes , comme fondĂ© fur les faits les moins Ă©quivoques & fur les observations les plus consĂ©quentes ? Tons mes Ă©crits font pleins de la doctrine de rĂ©volution des germes il n’est aucun Auteur , fans exception , qui s’en soit plus occupĂ© que moi, Lc qui ait tĂąchĂ© de letablir fur de meilleures preuves. II me paroĂźt moralement impossible que M. Pirri ait pu se mĂ©prendre un instant fur une chose aussi Ă©vidente, Lc puisque , malgrĂ© une telle Ă©vidence, il ose mettre dans ma bouche un aveu iĂŹ contraire Ă  tout ce qu’il connoĂźt de ma maniĂ©rĂ© de penser sur le sujet dont il s’agit, je me crois fondĂ© Ă  en conclure que son Ă©crit ne lui a point Ă©tĂ© dictĂ© par l’amour pur & dĂ©sintĂ©ressĂ© du vrai. Mais en voilĂ  dĂ©jĂ  trop fur un Auteur assez peu !fZ4 E X P E R I E N C E S jaloux de l’estime du public, pour s’expofer volontairement au reproche si grave &C si bien fondĂ© de rĂ©ticence Sc de mauvaise foi. Si vous m’en croyez vous ne direz qu’un mot de son Ă©crit le rĂ©futer en dĂ©tail, ce scroit lui donner une cĂ©lĂ©britĂ© q u'il ne mĂ©rite pas. Les crystal- lifations 8t les prĂ©cipitĂ©s chymiques auxquels recourt l’EpigĂ©nĂ©lĂŹsle , pour rendre raison de la formation du fƓtus, sont des explications usĂ©es, dont la faussetĂ© est prouvĂ©e par les observations des meilleurs Physiciens. J? Ăź ++' ,++ ♩ s v r la GĂ©nĂ©ration. 115 ♩ !* MÉMOIRE SECOND. De la fĂ©condation artificielle obtenue dans quelques animaux. CHAPITRE PREMIER. FĂ©condation artificielle du Crapaud terrestre Ă  yeux roux &‱ Ă  tubercules dorsaux. C X V I I I. JVÏalpighi imagina le premier d’essayer la fĂ©condation des animaux par le moyen de l'arr; il tira les Ɠufs des ovaires d’un Papillon de ver-Ă -foie, il les baigna avec la liqueur fĂ©condante du mĂąle ; il est vrai que cette expĂ©rience ne rĂ©ussit pas, les Ɠufs restĂšrent stĂ©riles. Bibiena voulut rĂ©pĂ©ter l’expĂ©rience, la varier, mais il ne fut pas plus heureux 1 cependant, parce que cette idĂ©e avoit Ă©tĂ© fans succĂšs pour les Ɠufs de Papillon , on ne devoit pas croire 1 Act. acad. Bon. T. V, pars 1. j ExpĂ©riences qu’elle seroit sans succĂšs dans les animaux dont la fĂ©condation se fait hors du corps, comme les Crapauds &C les Grenouilles. DĂšs que je commençai en 1767 Ă  communiquer Ă  mon ami M. Charles Bonnet mes premiĂšres observations fur la prĂ©existence des germes dans les Grenouilles, il m’exhorta , dans fa rĂ©ponse, Ă  tenter la fĂ©condation artificielle de ces amphibies ; comme je compris l’importance de ces expĂ©riences pour la Physique animale , Sc fur-tout pour la gĂ©nĂ©ration , je me proposai dĂšs-lors de les faire ; ayant mĂȘme publiĂ© en 1768 mon Prodrome fur les reproductions animales, je n’y dissimulai pas ce projet, que je n’ai pu effectuer qu’au printems de 1777 , Sc sur-tout en 1780 dans ces deux faisons j’ai pu satisfaire ma curiositĂ© ; les animaux, qui m’ont fourni les objets de mes recherches, font ceux dont j’ai parlĂ© dans les cinq premiers Chapitres du MĂ©moire prĂ©cĂ©dent. C X I X. Le Crapaud terrestre , Ă  yeux roux 8c Ă  tubercules dorsaux , Ă©tant un de ces amphibies qui s’accouplent d’abord au printems , il fut aussi celui qui me fournit le premier les sujets de mes expĂ©riences fur la fĂ©condation artificielle. J’ai dit que la femelle accouplĂ©e se dĂ©charge lentement par l’anus de deux cordons tranfparens 8c visqueux pleins de globules noirs, qui font les petits TĂȘtards que le mĂąle arrose de semence Sc fĂ©conde , quand ils sortent du corps, §. XLV , XLIX, L, LI, LVÍI. Puis sur la GĂ©nĂ©ration. izj donc que les TĂȘtards, en sortant du corps, font propres Ă  ĂȘtre fĂ©condĂ©s, j’eiĂźayai de les fĂ©conder alors pĂĄr ce moyen. Ayant dĂ©tachĂ© un Crapaud mĂąle accouplĂ© , de fa femelle , lorfqu’elle Ă©toit fur le point d’accoucher de fes TĂȘtards , comme je m’en apperçus par le gonflement du ventre , je la mis solitaire dans un vase plein d’eau , oĂč quelques heures aprĂšs elle commença Ă  faire pa- roĂźtrehors de son corps deux cordons visqueux; quand ils eurent la longueur d’un pied, je les coupai prĂšs de l’anus ; j’en laissai un dans le vase , St je pris l’autre pour le baigner avec la semence du mĂąle. Je tirai cette liqueur du mĂąle mĂȘme arrachĂ© Ă  sa femelle. Quand on a ouvert l’abdomen, il est aisĂ© Ă  un Anatomiste de trouver les vĂ©sicules sĂ©minales , qui , dans cette espĂšce d’animaux , sont au-dessous des testicules St embrassent une partie des reins , ils font remplis de liqueur sĂ©minale dans le tems de l’accouplement ; ayant donc percĂ© d’abord ces vĂ©sicules , St en ayant tirĂ© la liqueur sĂ©minale , qui Ă©toit transparente comme l’eau , que je mis dans un cryslal de montre , j’en baignai le morceau de cordon avec un pinceau ; St comme la quantitĂ© de la semence, qui Ă©galoit Ă  peine le poids de deux grains, ne pouvoit suffire qu’à humecter les deux tiers du cordon , je me bornai Ă  cette partie , que ü’humectai dans l’air, St que je plaçai ensuite dans un vase plein d’eau , semblable Ă  celui oĂč j’avois mis l’autre cordon non-fĂ©condĂ©. Je fis cette expĂ©rience le 16 de Mars, la saison IzS E XPÉRI2NCES Ă©toic froide , peu propre au dĂ©veloppement des TĂȘtards ; de forte qu’il me fallut plus de rems pour savoir l’issue de mon expĂ©rience, qui m’intĂ©rcssoit fi fort. Pendant les cinq premiers jours, j’obfervai ces cordons plusieurs fois chaque jour , fans y appercevoir aucune diffĂ©rence sensible; le mucus s etoit agrandi dans tous les deux, ils avoient conservĂ© leur figure orbiculaire ; mais le sixiĂšme jour je me flattai que mon expĂ©rience ne scroit pas inutile, plusieurs TĂȘtards, contenus dans les deux tiers du cordon humectĂ© par le pinceau , plongĂ© dans la liqueur sĂ©minale du Crapaud , com- mençoient Ă  s’alonger , tandis que les TĂȘtards de l’autrc tiers du cordon conservĂšrent leur rondeur , de mĂȘme que ceux de l’autre vase que je n’avois pas touchĂ© y le septiĂšme jour mes espĂ©rances s’accrurent, St l’alongement des TĂȘtard? s’augmenta ; ils augmentĂšrent cn grosseur , St cet alongement comme la grossepr continuĂšrent de croĂźtre pendant les jours sui- vans de forte qu’il ne me resta plus de doute fur le dĂ©veloppement des TĂȘtards Sc le succĂšs de la fĂ©condation artificielle ; au onziĂšme jour, les TĂȘtards se mouvoient dans l’amnios ; au treiziĂšme , ils en Ă©toient sortis, ils nageoienf librement dans seau au contraire , les TĂȘtards non-fĂ©condĂ©s Ă©toient restĂ©s comme ils Ă©toient, ils commencĂšrent mĂȘme Ă  se corrompre Ă  la surface , St ils se poudrent tout-Ă -fait j’étois donc parvenu Ă  donner artificiellement la vie Ă  cette espĂšce d’animaux, en imitant la Nature danĂŻ su r la GĂ©nĂ©ration. iry dans les moyens quelle emploie pour multiplier ces amphibies. On se peindra aisĂ©ment le plaisir que j’éprouvai en considĂ©rant un succĂšs si peu attendu ; 8Ă­ l’on ne doutera pas que je n’aie souvent rĂ©pĂ©tĂ© 8c variĂ© cette expĂ©rience, pour en tirer les utiles consĂ©quences qui pourroientj convenir Ă  ce sujet. C X X. Tous les TĂȘtards des deux tiers du cordon fĂ©condĂ© ne naquirent pas ; j’cn comptai 113 en vie , 8t 63 qui ne se dĂ©veloppĂšrent pas j’imaginai donc que ces derniers n’avoient peut-ĂȘtre pas Ă©tĂ© touchĂ©s par la liqueur sĂ©minale , dont j’eus une quantitĂ© Ă­i petite ; je me proposai de rĂ©pĂ©ter l’expĂ©rience sur un autre morceau de cordon, au moment oĂč il lbrtiroit de l’anus de la femelle, sĂ©parĂ©e du mĂąle depuis quelques heures. Ce morceau Ă©toit long de cinq pouces, 8c je pus le baigner entiĂšrement de la liqueur sĂ©minale , ayant tirĂ© toute celle qui Ă©toit dans les vĂ©sicules sĂ©minales du mĂąle que j’avois ĂŽtĂ© Ă  cette femelle, de mĂȘme que celle que me fournit un autre mĂąle ; 8t je dois avertir ici, que pour trouver les vĂ©sicules sĂ©minales pleines de semence , il faut les ouvrir quand les mĂąles font accouplĂ©s , la quantitĂ© est alors environ de deux grains , 8c quelquefois prĂšs de trois. Au contraire , lorsque les mĂąles ne font pas accouplĂ©s, ils n’ont point de liqueur sĂ©minale , oĂč ils en ont trĂšs- peu ; les vĂ©sicules elles-mĂȘmes font alors si flasques , qu’on peut Ă  peine les dĂ©couvrir. Je trouvai que la plus grande partie des TĂ©- I 13 ° ' ExpĂ©riences tards de ce cordon , que j’avois fĂ©condĂ©s avec abondance , setoit dĂ©veloppĂ©e ; la saison Ă©tant plus avancĂ©e, Sc par consĂ©quent, moins froide que dans ma premiĂšre expĂ©rience , §. CXIX ; les TĂȘtards s’alongĂšrent au bout du cinquiĂšme jour; dans le dixiĂšme, ils donnĂšrent des lignes de vis , 8c dans le onziĂšme ils nageoient ; il y en eut 107 de dĂ©veloppĂ©s , 8c 8 qui ne naquirent pas, ou parce qu’ils ne furent pas fĂ©condĂ©s , ou parce qu’ils Ă©toient en mauvais Ă©tat; j’avois observĂ© , dans les fĂ©condations naturelles, qu’cntrc un grand nombre dc TĂȘtards qui nailsoient, il y en avoir toujours quelques-uns qui ne se dĂ©veloppoient pas. C X X I. Ces deux fĂ©condations artificielles furent opĂ©rĂ©es fur les cordons sortis de la femelle & tombĂ©s dans l’eau ; j’avois imitĂ© la fĂ©condation naturelle des Crapauds SĂ­ des Grenouilles , qui se fait dans cet Ă©lĂ©ment ; mais mes observations m’avoient fait remarquer que cette fĂ©condation rĂ©ussit dans un lieu sec, quand on force ces animaux accouplĂ©s Ă  y rester ; c’est par ce moyen que j ai dĂ©couvert comment s’opĂšre la fĂ©condation naturelle, §. XLVII, XLVIII , XLIX il me sembloit donc que la fĂ©condation artificielle pouvoit aussi s’exĂ©cuter de cette maniĂšre , mais je voulus m’en assurer par une expĂ©rience je mis donc une femelle de Crapaud dans un lieu sec , elle accoucha des deux cordons, j’en pris un, que je mis dans l’eau, aprĂšs savoir baignĂ© dans la liqueur sĂ©minale du mĂąle ; ÔC sur la GĂ©nĂ©ration. 13 i je plaçai Ă  cĂŽtĂ© un autre morceau du cordon non-fĂ©condĂ© ; au bout de douze jours, tous les TĂȘtards de ce morceau Ă©toient Ă  demi- pourris, tandis que les autres nageoient dans l’eau. Je fus attentif Ă  rechercher si les TĂȘtards, fĂ©condĂ©s artificiellement, naissoient plus tard que ceux qui Ă©toient fĂ©condĂ©s naturellement. J’avois deux Crapauds accouplĂ©s , je 1 aillai sortir une portion du cordon , que le mĂąle humecta de sa semence ; alors jc les sĂ©parai & je coupai les deux cordons trĂšs-prĂšs de l’anus de la femelle ; ensuite j’attendis qu’elle accouchĂąt d’une autre portion de cordon , que je coupai au bout d’un quart-d’heure, 8c que j’humectai avec la semence ĂŽtĂ©e des vĂ©sicules du mĂȘme mĂąle, que j’avois enlevĂ© Ă  cette femelle. Je plaçai cette portion du cordon , fĂ©condĂ©e artificiellement, Ă  cĂŽtĂ© de la portion fĂ©condĂ©e naturellement , dans le mĂȘme vase plein d’eau ; mais les TĂȘtards de ces deux portions du cordon se dĂ©veloppĂšrent, RanimĂšrent SĂ­ naquirent dans le mĂȘme tems ; cette expĂ©rience se confirma dans les Grenouilles & les Crapauds. C X X I I. Nous avons imitĂ© jufqu’à prĂ©sent la Nature en fĂ©condant artificiellement les TĂȘtards lors- qu’ils sortent du sein de leur mĂšre , comme ils sont fĂ©condĂ©s dans l’accouplement naturel. Qu’arrivera-t-il en tentant cette fĂ©condation dans le corps ? nous savons que les TĂȘtards font d’abord renfermĂ©s dans les ovaires, qu’ils rzr ExpĂ©riences passent ensuite dans les canaux des Ɠufs, qu’ils descendent enfin dans l’utĂ©rus ; seront-ils propres Ă  se dĂ©velopper , quand ils auront Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s dans ces trois circonstances ? Je commençai Ă  rĂ©soudre ces questions en m’occu- pant des TĂȘtards renfermĂ©s dans l’utĂ©rus. Cet organe est divisĂ© en deux cellules par une membrane , ces cellules font remplies de TĂȘtards ; quand ils font sortis des canaux des Ɠufs, ils y font enveloppĂ©s dans leurs cordons glu- tineux, ĂŽt ce cordon est ployĂ© comme le fil en pelotton ; mais il est facile Ă  dĂ©vuider; on le tire entier bors de l’utĂ©rus , en le tenant lĂ©gĂšrement attachĂ© avec la pointe d’une mollette ; ayant donc ouvert l’abdomen de plusieurs femelles accouplĂ©es, lorsque je savois que leur utĂ©rus Ă©toit rempli de ce cordon en pelotton , ce qui se trouve toujours ainsi quand il commence Ă  sortir par l’anus alors j'en tirai une partie par l’anus, je la baignai avec la semence du mĂąle , je la mis dans l’eau d’un vase , & je plaçai dans le mĂȘme tems, ĂŽĂ­ dans un autre vase , le reste de ces cordons qui Ă©toient dans l’utĂ©rus ; mais ceux-ci ne naissoient jamais, tandis que ceux que j’avois fĂ©condĂ© naissoient toujours. Les TĂȘtards , descendus dans l’utĂ©rus, ont donc acquis cette maturitĂ© nĂ©cessaire pour la fĂ©condation. Pendant ces expĂ©riences , il m’arriva un accident qui mĂ©rite d’ĂȘtre rapportĂ© ; ayant observĂ© plulĂŹeurs fois au microscope la semence de ces Crapauds , j’y trouvai une foule de vers spermatiques, qui font oblongs comme S V R LA GeRERATIOR. 135 ceux des Grenouilles, & qui, dans leur mouvement progressif, ont un petit tremblement & tordent lĂ©gĂšrement leur corps ; mais deux fois je vis cette semence sans vers , & ayant baignĂ© des TĂȘtards , tirĂ©s de l’utĂ©rus , avec cette semence sans vers , ils furent aussi bien fĂ©condĂ©s que ceux qui avoient Ă©tĂ© baignĂ©s avec cette semence chargĂ©e de vers spermatiques. C X X I I I. Je tentai ensuite ces expĂ©riences fur les TĂȘtards renfermĂ©s dans les canaux des Ɠufs, & qui y font tandis que les femelles font accouplĂ©es voici le succĂšs de ces expĂ©riences. Quand les TĂȘtards se trouvĂšrent le plus au large , dans lc voisinage de l’utĂ©rus , plusieurs de ceux que je baignai dans la semence du Crapaud mĂąle , se dĂ©veloppĂšrent ; mais ceux qui furent plus prĂšs des ovaires, dans la partie la plus Ă©troite des canaux des Ɠufs, qui est vers le cƓur, ceux-lĂ  ne se dĂ©veloppĂšrent pas, quand je les eus baignĂ© avec la semence du mĂąle ; il me semble que je puis expliquer cette diffĂ©rence la glu qui lie ensemble les TĂȘtards , 8c qui forme les deux longs cordons , se prolonge dans ces canaux tandis que les TĂȘtards les traversent, de maniĂšre qu’en y entrant ils sont entiĂšrement privĂ©s de la glu ; d’oĂč il rĂ©sulte que les TĂȘtards, qui auront voyagĂ© le plus long-tems dans ces canaux, ou qui seront les plus prĂȘts Ă  entrer dans l’utĂ©rus, se trouveront aussi enveloppĂ©s d’une plus grande quantitĂ© de glu. Cette glu , comme je l’ai dit, a Ă©tĂ© destinĂ©e par la nature pour nour- I 3 *34 ExpĂ©riences rir les TĂȘtard*. Ceux donc qui seront couverts d’une suffisante dose de glu , ou qui seront voisins de l’utĂ©rus - ne seront pas inutilement baignĂ©s par la semence , comme ceux qui n’ont point cette glu , ou qui en ont trĂšs- peu, Sc qui pĂ©riroient par dĂ©faut de nourriture, quand ils auroient Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s mais j’ai Ă©tĂ© encore mieux convaincu de la nĂ©cessitĂ© de cette glu pour le premier dĂ©veloppement des TĂȘtards , parce que tous ceux que j’en dĂ©pouillai entiĂšrement pĂ©rissaient, quoiqu’ils fussent baignĂ©s par la semence du mĂąle , SĂ­ il n’y avoit qu’un petit nombre qui naquissent, lorsque je leur ĂŽtai une partie de la glu en ouvrant une femelle accouplĂ©e , je trouvai tous ces TĂȘtards dans l’abdomen ; ils Ă©toient noirs comme lorfqu’ils font mĂ»rs ; mais ils Ă©toient fans glu , parce qu’ils n’avoient pas traversĂ© les canaux des Ɠufs. Ces fƓtus, baignĂ©s de la semence du mĂąle , ne se dĂ©veloppĂšrent point. C X X I V. Par la mĂȘme raison, les TĂȘtards tirĂ©s des ovaires ne dĂ©voient pas naĂźtre aprĂšs avoir Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s artificiellement. Les ovaires font formĂ©s par deux grands lobes, composĂ©s dĂ©plus petits ; ils font tous remplis de petits TĂȘtards, qui y sĂ©journent jusqu'’au moment oĂč les mĂšres doivent propager l’espĂšce ; ils se dĂ©tachent alors des petits pĂ©dicules auxquels ils font attachĂ©s dans l’ovaire. Je pris donc plusieurs de ces TĂȘtards, qui Ă©toient fur le point de se dĂ©tacher des ovaires, je les arrosai de la liqueur sĂ©minale du mĂąle , mais toujours inu- sur la GĂ©nĂ©ration. 135 tilement. Cette expĂ©rience me fit naĂźtre tine singuliĂšre idĂ©e. J’avois vu que quelques femelles de Crapauds Sc de Grenouilles, pendant qu’el- les Ă©toient accouplĂ©es, Ă©toient sujettes Ă  avoir l’abdomen crevĂ© lĂ  oĂč les ovaires fe trouvent, que, quoiqu’clles soient dans cet Ă©tat fĂącheux, elles ne meurent pas d’abord, mais qu’elles peuvent encore accoucher des deux cordons, Sc que les TĂȘtards naissent fort bien , quand ils ont Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s artificiellement ou naturellement ; il est seulement nĂ©cessaire de tenir ces Grenouilles au sec, parce que l’eau, en entrant dans l’abdomen , les feroit pĂ©rir avant l’accouplement. Qu’arriveroit-il, me difois-je, si, ouvrant l’abdomen d’une Grenouille , je faisois parvenir la liqueur sĂ©minale dans les ovaires ; les TĂȘtards qui sortiroient ensuite par l’anus , aprĂšs avoir traversĂ© les canaux des Ɠufs Sc l’utĂ©rus, fe dĂ©velopperoient-ils? Quoique je n’elpĂ©rasse rien de cette expĂ©rience, je voulus la tenter. Je fis donc un trou Ă  1 abdomen de deux femelles , j’y injectai , fur les ovaires de chacune d’elles , une grosse goutte de semence par le moyen d’un petit tube insĂ©rĂ© dans le trou ; je fis une lĂ©gĂšre ouverture Ă  la membrane qui enveloppoit l’ovaire, Sc j’y introduisis par cette ouverture une nouvelle goutte de semence , afin qu’elle touchĂąt immĂ©diatement les TĂȘtards. Un de ces deux Crapauds pĂ©rit cinq heures aprĂšs l'opĂ©ration avec les TĂȘtards dans les ovaires ; mais l’autre accoucha d’une partie , Sc ils furent bien enveloppĂ©s de leur glu , comme s’ils avoient Ă©tĂ© I 4 r ;6 ExpĂ©riences accouchĂ©s pendant la santĂ© de leur mĂšre. Je gardai avec grand soin ces TĂȘtards dans Feau , mais aucun ne naquit ce qui me fit voir combien cette glu nourriciĂšre Ă©toit nĂ©cessaire pour ces petits ĂȘtres , puisqu’ils pĂ©rissent aprĂšs avoir Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s , quoiqu’ils soient ensuite enveloppĂ©s dans la glu. C X X V. Je n’-avois plus de doutes fur les fĂ©condations artificielles, rĂ©pĂ©tĂ©es si souvent avec succĂšs ; mais j'imaginai de tenter cette fĂ©condation avec le suc exprimĂ© des testicules , ce qui ne me parut pas improbable , puisque les testicules font les organes oĂč la semence se forme , s’élabore Sc devient propre Ă  la gĂ©nĂ©ration ; la petitesse de ces corps ne me per- mettoit pas d’avoir ce suc bien pur il ne me restoit donc qu’à les couper en morceaux 5c Ă  en exprimer le suc , afin de m’en servir pour la fĂ©condation. Les deux testicules dans le Crapaud terrestre , Ă  yeux roux 5Ă­ Ă  tubercules dorsaux, font fur la partie supĂ©rieure des reins; leur couleur extĂ©rieure est jaune, leur forme ovale, ils sont un peu plus gros par un bout que par l’autre , ils ressemblent Ă  ceux des petits coqs ; dans le terris de la gĂ©nĂ©ration ils font entiĂšrement mois , pleins d’une liqueur assez dense , 5c lĂ©gĂšrement visqueuse ayant rassemblĂ© une portion de cette liqueur dans un verre de montre , j’en baignai , avec un pinceau , une centaine de TĂȘtards en partie tirĂ©s de l’utĂ©rus, 5c en partie prĂšs deceuxquiĂ©toient naturellement accouchĂ©s; le succĂšs ne pouvoit svr la GĂ©nĂ©ration» 137 ĂȘtre plus heureux, ils naquirent fort bien ; SC en rĂ©pĂ©tant cette expĂ©rience, elle me rĂ©ussit toujours. Je comparai la vertu fĂ©condatrice de la semence avec celle de la liqueur des testicules ; & je trouvai quftles TĂȘtards, fĂ©condĂ©s par toutes deux , naissoient Ă©galement vĂźte , mais que le suc des testicules en faisoit naĂźtre un plus petit nombre , fans connoĂźtre Ă­i cela provenoit d’un dĂ©faut d’activitĂ© ou d’épaisseur qui lui ĂŽtoit le pouvoir de se rĂ©pandre sur les TĂȘtards comme la semence. C X X V I. E n composant ce Chapitre, dans le mois de Mai de TannĂ©e 1780, un PĂȘcheur m’ap- porta une espĂšce de Crapaud , dont je n’ai pas dĂ©crit la gĂ©nĂ©ration, parce que je ne le connoiĂ­ĂŹĂČis pas ; mais je crois qu’il convient pourtant d’en donner une courte notice. Ce Crapaud est plus petit que le Crapaud terrestre puant ; il a les couleurs de celui-ci, mais il est un peu plus blanc fous le ventre ces deux Crapauds font cependant deux espĂšces diffĂ©rentes par la diffĂ©rence de leur organisation Sc de leurs mƓurs ; le Crapaud puant a la peau du dos comme le chagrin , fa forme est alongĂ©e , 8c en marchant il s’élance comme les Grenouilles ; Tautre a la peau lisse, son corps est ramoncelĂ©, Sc il ne va que par petits sauts. Te premier, en parlant du mĂąle, a un cri qui ressemble au sifflement de Thomme, le second a un cri obscur ; ce qui prouve que Torgane de la voix est diffĂ©rent. Les parties de la gĂ©nĂ©ration font aussi diffĂ©rentes dans les rz8 ExpĂ©riences femelles. Les Crapauds puans accouchent de deux cordons qui tombent de l’anus ; mais ces derniers Crapauds n’accouchent que d’un seul, l’odeur des premiers est fi puante qu’ils en ont hĂ©ritĂ© leur nom ; les autres ont une odeur qui ressemble Ă  celle de l’ail. Enfin, le mĂąle du Crapaud puant, accouplĂ© avec fa femelle , la tient embrassĂ©e avec les mains au travers du thorax, 6c l’autre, en embrassant fa femelle , passe ses mains fous l’abdomen ; ainsi ce Crapaud ne peut fe confondre ni avec le Crapaud terrestre Ă  yeux roux 6c Ă  tubercules dorsaux , ni avec le Bufo igneus de Roesel , parce que ce dernier a la partie infĂ©rieure du corps peinte de taches dorĂ©es, couleur de feu, dont on ne trouve aucune trace dans l’autre dont je parle. Le premier que j’eus Ă©toit accouplĂ© avec fa femelle , qui accouchoit de son cordon par l’anus ; j’eus le spectacle de M. Demours , §. Cil placĂ© sur la paume de ma main, ce couple amoureux Ă©prouva bien d’abord quelque frayeur, mais bientĂŽt aprĂšs la femelle continua son accouchement, comme l’Obfervateur François l’avoit vu ; jĂš ne vis pourtant pas, comme lui, le mĂąle faire les fonctions d’accoucheur en tirant le cordon hors de l’anus avec les doigts postĂ©rieurs des pieds ; mais j’obfervai bien ce qu’il ne vit pas je vis clairement le mĂąle arroser de sa semence le cordon Ă  mesure qu’il sortoit de l’anus de la femelle ; 8c je prolongeai ce spectacle pendant treize minutes, au bout desquelles j’ouvris le mĂąle 6t la femelle pour les expĂ©riences suivantes. svr la GĂ©nĂ©ration, izy Ayant ouvert I’utĂ©rus de la femelle, j’en tirai le reste du cordon , dont la longueur Ă©toit environ d’une aune ; je le partageai en quatre portions , j’en laissai une fans -la toucher , l’au- tre fut baignĂ©e avec la liqueur fĂ©miqgle trouvĂ©e dans les vĂ©sicules fpermatiques du mĂąle ; la troisiĂšme fut humectĂ©e avec le suc exprimĂ© des testicules, 8t la quatriĂšme avec deux gouttes de cette semence , dont le mĂąle avoit fĂ©condĂ© le cordon lorsqu’il sortoit de l’anus de la femelle , je l’avois recueilli dans un cryf tal de montre. Ces quatre portions furent mises dans des vases sĂ©parĂ©s 8c pleins d’eau ; dans un cinquiĂšme vase je mis le cordon qui avoit Ă©tĂ© fĂ©condĂ© par le mĂąle les rĂ©sultats furent parallĂšles Ă  ce que j’avois dĂ©jĂ  observĂ©, Ă  i’excgption de la partie du cordon qui n’avoĂźt Ă©tĂ© touchĂ©e ni par la semence ni par le suc des testicules ; les trois autres , au bout de trois jours , firent voir des TĂȘtards animĂ©s 8c nĂ©s. II restoit encore Ă  faire voir que la fĂ©condation fe fait hors du corps de la mĂšre dans cette espĂšce de Crapauds , 8Ă­ que leurs TĂȘtards peuvent fe fĂ©conder artificiellement mais, ayant eu quatre couples de ces Crapauds, j’eus le plaisir de voir confirmer encore la vĂ©ritĂ© de ces deux faits, & je me servis des deux autres couples pour des expĂ©riences dont je parlerai ensuite. C X X V I I. Je finirai ce chapitre par une petite digression sur la maniĂšre dont fe multiplient ces amphibies. Quand le cordon , dont j’ai parlĂ© §. CXXVI, r 40 ExpĂ©riences se trouve dans les canaux des Ɠufs, ou qu’il est descendu dans l’utĂ©rus, il est intĂ©rieurement rempli de globules noirs , qui, lorsqu’ils font observĂ©s soigneflfement au-dedans 8c au-dĂ©bets, ont tous les caractĂšres des autres TĂȘtards de Crapauds dont j ai parlĂ©, quand ils sĂ©journent dans les canaux des Ɠufs ou dans l’utĂ©rus. Mais si, au lieu de considĂ©rer ces globules dans ces deux Ă©tats, on les observe d’abord aprĂšs qu’ils ont Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s, on voit qu’ils ne diffĂšrent point de ceux qui n’ont pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s , soit Ă  l’extĂ©rieur, soit dans l’inrĂ©rieur ; feulement ensuite les petits globes noirs non-fĂ©condĂ©s blanchissent ; ils se rident Ă  la surface ; ils se fendent en plusieurs endroits ; ils se dissolvent peu-Ă -peu dans ü’eau qu’ils salissent, 8c enfin ils disparoissenr. Les petits globes fĂ©condas changent aussi au bout d’un jour, mais d’une maniĂšre diffĂ©rente fur la surface de chacun s’im- priment deux sillons ou lignes courbes liĂ©es ensemble , de maniĂšre qu’elles font un angle ; au-dessous de sangle il se forme une saillie 5 dans le mĂȘme te ms le petit globe noir s’enfle , s’alonge, 8c s’amincit en pointe. Quelques heures aprĂšs les petits globes alongĂ©s ont encore changĂ© les deux lignes qui forment sangle sont plus creuses , la saillie est plus vive, la pointe est plus alongĂ©e ; on trouve encore vers les deux cĂŽtĂ©s des deux lignes deux trĂšs-petits gonstemens qui ne paroissoient pas d’abord ; un jour ensuite, ou quelque tems encore aprĂšs, on dĂ©couvre ces parties qui se dĂ©veloppent ; la cavitĂ© des deux lignes est la bouche du TĂȘtard, su R la GĂ©nĂ©ration. 141 dont il commence mĂȘme Ă  se servir, la saillie est la sommitĂ© du dos , la pointe est la queue , les deux gonflemens font les nageoires, 8c ces parties viennent encore plus sensibles quand le TĂȘtard commence Ă  s'en servir pour nager. La mĂȘme loi donc de la Nature , qui prĂ©side Ă  rĂ©volution des amphibies dont j’ai parlĂ©, dirige celle de ce nouveau Crapaud le fƓtus appartient Ă  la mĂšre., 8c la liqueur sĂ©minale du mĂąle ne sert qu’à ranimer 8c Ă  le dĂ©velopper. CHAPITRE II. FĂ©condation artificielle de la Salamandre aquatique & du Crapaud terrefire puant. C X X V I I 1 . T iA fĂ©condation naturelle des Salamandres aquatiques ne se fait pas hors du corps, comme celle des Grenouilles 8c des Crapauds , mais dans le corps de la mĂšre , §. LXXX, LXXXI, LXXXIV je ne pouvois pas chercher Ă  fĂ©conder les fƓtus, quand ils font accouchĂ©s par la mĂšre , mais il me falloit chercher un autre moyen. Ces Salamandres n’ont point d'utĂ©rus; les fƓtus, en sortant des ovaires 8c entrant dans les canaux des Ɠufs, parviennent en les suivant Ă  l'intestin rectum , 8c sortent par l’anus j c’est par cette ouverture que la semence Ă©ja- culĂ©e par le mĂąle s’inlinue dans les canaux 141 ExpĂ©riences des Ɠufs, 8c fĂ©conde les fƓtus qui font les plus prĂȘts de sortir du rectum je l’ai dĂ©montrĂ© §. LXXXIV , j’ai fait voir que les fƓtus plus Ă©loignĂ©s, ou hors du rectum , ou qui font plus Ă©levĂ©s dans lei canaux des Ɠufs, ne font pas fĂ©condĂ©s il faut qu’ils descendent plus bas, 8c qu’ils prennent la place de ceux qui ont Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s, 8c qui font alors accouchĂ©s. C’étoit donc les fƓtus contenus dans la partie supĂ©rieure des canaux des Ɠufs que je devois baigner avec la liqueur sĂ©minale du mĂąle, comme je Ăźe fis, mais fans succĂšs. Je suivis cette mĂ©thode. Ayant ouvert les canaux des Ɠufs de la femelle dans leur longueur, 8c dans le mĂȘme tems les vaisseaux dĂ©fĂšrens du mĂąle , j’en tirai la liqueur sĂ©minale blanche comme le lait, 8c j’en baignai les fƓtus les plus Ă©loignĂ©s de l’anus , que je plaçai ensuite dans Peau. Comme les fƓtus naturellement accouchĂ©s , ils gagnoient le fond de Peau , oĂč la glu , dont ils Ă©toient couverts, les tenoit attachĂ©s, fans qu’il en naquit jamais un seul. Peu-Ă -peu cette glu disparoissoit, les fƓtus se brisoient 8c se dissolvoient. Je ne rapporterai pas ici la multitude des rĂ©pĂ©titions de cette expĂ©rience , que j’ai faite en la variant de mille maniĂšres pour la dose de la semence , soit en touchant lĂ©gĂšrement les fƓtus avec cette semence , soit en les baignant lĂ©gĂšrement, soit en les imprĂ©gnant fortement ; mais je n’en fus pas plus heureux. Je dirai seulement qu’ayant craint que , dans la place que les fƓtus occupoient dans les canaux des Ɠufs, ils ne fussent pas Ăźv r la GĂ©nĂ©ration. 14; assez enveloppĂ©s de glu pour ĂȘtre fĂ©condĂ©s, comme il arrive aux TĂȘtards des Crapauds, lorsqu’on les tire de la partie la plus Ă©levĂ©e des canaux des Ɠufs, §. CXXill ; 8c craignant d’un autre cĂŽtĂ© qu’en les prenant plus bas ils n’eussent dĂ©jĂ  ctĂ© fĂ©condĂ©s par le mĂąle ; j’eus recours Ă  un autre moyen , propre Ă  prĂ©venir mes scrupules. Pavois, dans le mois d’Avril, sept -Saiamandres femelles que j’avois gardĂ©es pendant l’hiver dan; des vases pleins d’eau fans avoir eu jamais aucune sociĂ©tĂ© avec aucun mĂąle , elles commençoient nĂ©anmoins Ă  accoucher de leurs fƓtus, quipĂ©rissolent tous, parce qu’ils n’étoient pas fĂ©condĂ©s. Je pensai donc de fĂ©conder ces fƓtus sortant du corps des femelles , alors ils dĂ©voient avoir toute leur glu, Sc sĂ»rement alors ils n’étoient pas fĂ©condĂ©s. J’ai remarquĂ© que ces animaux, dans la saison de leurs amours, accouchent de leurs fƓtus l’on presse un peu avec les doigts la partie infĂ©rieure de leur corps ; si l’on presse de mĂȘme les mĂąles , ils dĂ©chargent leur semence par l’anus, §. LXXX Sc LXXXIV. Je fis subir cette opĂ©ration Ă  mes Salamandres vierges ; Ă  mesure que les fƓtus sortoient, je les baignois de liqueur sĂ©minale , que je faisois sortir de quelques mĂąles rassemblĂ©s pour cela mais, malgrĂ© cet expĂ©dient, je n’ai pas vu naĂźtre un seul de ces fƓtus que je gardois si soigneusement dans l’eau. C X X I X. J’etois dĂ©couragĂ© par l’inutilitĂ© de toutes ces tentatives j’allois abandonner cette entre- 144 ExpĂ©riences prise, que je croyois impossible , quand je rĂ©flĂ©chis que j’oubliois une circonstance importante. J’ai dit que le mĂąle rĂ©pandoit fa semence dans l’eau , Sc que c’étoit seulement lorsqu’elle avoit Ă©tĂ© dans ce fluide qu’elle pĂ©nĂ©troit dans la femelle & arrivoit aux fƓtus contenus dans les canaux des Ɠufs, qui Ă©toient dans le voisinage du rectum, §. LXXX 8c LXXXI. II est clair que la semence alors n’est pas pure , mais qu’elle est mĂȘlĂ©e plus ou moins avec l’eau c’est ce qui me fit soupçonner que la semence ĂĄu maie de la Salamandre, dans son Ă©tat de puretĂ© , n’étoit pas propre Ă  la fĂ©condation ; mais qu’il falloit l’étendre dans l’eau. Ayant donc pressĂ© avec les doigts le ventre des sept Salamandres vierges dont j’ai parlĂ© §. CXXVIII, j’en fis sortir sans efforts vingt-sept fƓtus que je baignai avec l’eau oĂč j’avois dissous une suffisante quantitĂ© de semence il y en eut dix- sept qui pĂ©rirent ; mais dix se dĂ©veloppĂšrent, Sc Ă©prouvĂšrent tous les changemens qu’on observe dans les plus naturellement fĂ©condĂ©s, je les ai dĂ©crits dans les §. LXXVII, LXXVIII Sc LXXIX. Par le moyen de cette circonstance, j’imitois la Nature , Sc j’opĂ©rai la fĂ©condation artificielle que jecherchois, Scque je confirmai ensuite par plusieurs expĂ©riences parallĂšles, quoique je perdisse toujours un grand nombre de fƓtus qui ne se dĂ©veloppoient pas ; ce qui ne doit pas Ă©tonner , puisque j’ai observĂ© la mĂȘme chose 'dans la fĂ©condation naturelle, §. LXXXIX. Le suc exprimĂ© des testicules, quand il Ă©toit mĂȘlĂ© s W R LA GÉNÉ RATIO ff. 14 $ mĂȘlĂ© avcc l’eau , Ă©toit Ă©galement propre Ă  la fĂ©condation des foetus, dont il naissoic toujours Ă -peu-prĂšs un tiers, comme de ceux que je baignois avec la semence. Cette raretĂ© des fƓtus qui nailsoient ainĂ­i par la fĂ©condation artificielle , me fit contenter dc ce premier essai, afin de pouvoir prolonges {fies fĂ©condations artificielles furies autres animaux, Sc en particulier fur le Crapaud puant, qui remplit en trĂšs-bonne partie mes deĂ­irs. C X X X. En parlant de la fĂ©condation artificielle du Crapaud terrestre Ă  yeux roux Sc Ă  tubercules dorsaux, j’ai dit qu’elle s’opĂ©roit non-feulement fur les TĂȘtards sortis du corps de la mĂšre, mais encore fur ceux qui font dans l’utĂ©rus ou presque au fond des canaux des Ɠufs. Cette fĂ©condation s’opĂšre ou avcc la liqueur sĂ©minale ou avec le suc des testicules. J’ai rĂ©pĂ©tĂ© toutes ces expĂ©riences fur le Crapaud puant, Sc je puis assurer que les rĂ©sultats ont ctĂ© les mĂȘmes. Mais la grande quantitĂ© de ces animaux que me procuroient les PĂȘcheurs, la multitude des TĂȘtards qu on trouve dans leur utĂ©rus, la facilitĂ© de les fĂ©conder, rĂ©engagĂšrent Ă  donner une plus grande soliditĂ© Ă  ces recherches en rĂ©pĂ©tant ces expĂ©riences. Faire naĂźtra diverses espĂšces d’amphibies fans le concours du mĂąle, Ă©toit une expĂ©rience capitale, qui demandoit d’ĂȘtre variĂ©e H qui promettoit des dĂ©couvertes importantes. Je me proposois de voir ce qui ariiveroit en Ă©cartant la Nature de fa maniĂšre ordinaire d’agir ; pour cela i°. je cherchai Ă  altĂ©rer la K 146 ExpĂ©riences liqueur sĂ©minale Sc le suc des testicules ; 2 0 . je tentai de produire des changemens analogues dans les TĂȘtards que je voulois fĂ©conder; il me sembla que cette double recherche devoit ĂȘtre instructive. Dans les expĂ©riences que j’ai rapportĂ©es, je me servois, pour fĂ©conder les TĂȘtards , de la semence ou du suc des testicules tirĂ© de l’animal vivant. J’obligeĂąi l’animal Ă  rester couchĂ© fur le dos, en fixant ses mains Sc ses pieds fur une planche avec de petits clous ; 8c ayant ouvert le ventre, je cherchai les vĂ©sicules spermatiques, qui le prĂ©sentent Ă  i’Ɠil, quand on a enlevĂ© les intestins, fous la forme de deux petites vĂ©sicules Ă  droite 8c Ă  gauche de la vessie , qu’il est bon d’ouvrir pour en faire sortir l’urine, afin de voir mieux ces vĂ©sicules j par cette prĂ©paration on dĂ©couvre les testicules, qui font d’une couleur livide 8c qui reposent sur les reins alors je tirai sur-le-champ la semence des vĂ©sicules spermatiques , ou le suc des testicules, suivant la nature des expĂ©riences que je voulois faire , 8c j’en baignai les TĂȘtards .que je voulois fĂ©conder. Je voulus savoir ce qui arriveroit en me servant de cette liqueur sĂ©minale aprĂšs un tems plus ou moins long, qui se seroit Ă©coulĂ© depuis la mort de Tanimal. Je crois avoir indiquĂ© dans un de mes ouvrages un moyen de donner sur-le-champ la mort aux Crapauds, aux Grenouilles Ă c Ă  d’autres animaux d’une vie trĂšs-dure j’insinue un stilet dans les vertĂšbres cervicales. La destruction d’une partie de la moelle Ă©piniĂšre les tue d’abord aprĂšs une convulsion $ au lieu qu’en svk la GĂ©nĂ©ration. 147 leur coupant la tĂȘte ils vivent fort long-tems. AprĂšs avoir tuĂ© un Crapaud terrestre puant de cette maniĂšre , je l’ouvris a u bout de trois heures je trouvai les vĂ©sicules sĂ©minales un peu astaiĂ­lĂ©es ; elles ne contenoient pas autant de liqueur sĂ©minale que lorsque ranimai vivant est accouplĂ© je baignai avec cette semence quelques TĂȘtards qui Ă©toient encore dans l’utĂ©- rus, St j’ai toujours employĂ© les TĂȘtards exis tans dans ce lieu pour les expĂ©riences suivantes. Ces TĂȘtards se dĂ©veloppĂšrent fort bien, St il parut que la semence n’avoit pas soulsert de son sĂ©jour de trois heures dans le cadavre ; j’obscrvai la mĂȘme chose avec un Crapaud qui resta mort pendant cinq heures St demie ; avec cette diffĂ©rence , c*est que, comme la liqueur sĂ©minale Ă©toit en fort petite quantitĂ© , le nombre des TĂȘtards fĂ©condĂ©s fut trĂšs-petit. Au bout de sept heures aprĂšs la mort du Crapaud, les vĂ©sicules sĂ©minales furent tellement rĂ©duites, qu’à peine je pus y trouver une quantitĂ© sensible de semence, qui fit Ă©clore encore les TĂȘtards qui en furent humectĂ©s. C X X X I. Les consĂ©quences immĂ©diates de ces deux faits sont ; 1 °. que la semence diminue peu Ă  peu dans les Crapauds tuĂ©s, St se perd finalement , ce qui est conforme aux loix de l’économie organique ; 2 0 . que la mĂȘme liqueur sĂ©minale, en diminuant en quantitĂ© , ne perd pas fa vertu fĂ©condante , au moins dans l’intervalle de sept heures ; mais cette vertu fĂ©condatrice se con- serve-t-elle, dans la semence des Crapauds tuĂ©s, K 2 148 ExpĂ©riences au-delĂ  de sept heures? Je ne pouvois le savoir par les moyens que j’ai employĂ© je pensai donc Ă  retirer la liqueur sĂ©minale hors de ses vĂ©sicules , & Ă  la garder ainsi dans un petit vase ou dans un petit tube pour en faire usage quand je le souhaiterons. Je recueillis donc la liqueur sĂ©minale de trois Crapauds, que je mis dans un petit tube de verre, fermĂ© avec de la cire Ă  cacheter pour Ă©viter l’évaporation , Sc je baignai avec elle plusieurs TĂȘtards six heures ne nuisirent point Ă  la vertu fĂ©condatrice de cette semence ; mais, dĂšs la septiĂšme heure, elle me parut avoir souffert il n’y eut que les deux tiers des TĂȘtards, qui en furent baignĂ©s, qui se dĂ©veloppĂšrent. Au bout de huit heures elle souffrit encore davantage ; mais neuf heures de sĂ©jour dans le petit tube lui ĂŽtĂšrent entiĂšrement son Ă©nergie car, aprĂšs en avoir baignĂ© soixante- cinq TĂȘtards, il n’en naquit pas un seul. Cependant cette mesure n’est ni prĂ©cise ni gĂ©nĂ©rale ; elle me paroĂźt dĂ©pendre fur-tout de la tempĂ©rature de l’air si elle est trop chaude , la liqueur sĂ©minale perd sa propriĂ©tĂ© fĂ©condante lorsqu’elle est tirĂ©e du corps de l’animal dans un espace de tems plus petit que six heures 8c demie ; mais si la tempĂ©rature est fraĂźche, elle conserve cette propriĂ©tĂ© au-delĂ  de onze heures, comme je l’ai observĂ© dans le mois de Mai de l’annĂ©e 1780 , pendant lequel on a Ă©prouvĂ© Ă  Paris ces variations subites Sc considĂ©rables dans la chaleur de l’air. Je dirai, de plus, qu’ayant remarquĂ© que le froid fevo- risoit la conservation de la vertu fĂ©condante StfR LA G ÈXÌKATIOK. Uty dans la semence, je pensai de lui faire Ă©prouver un froid plus grand dans une glaciĂšre au bout de vingt-cinq heures elle y conserva cette vertu; mais la nature de la semence fait comprendre aisĂ©ment pourquoi la chaleur lui devient li nuisible la semence, comme les autres substances animales, est sujette Ă  la putrĂ©faction , que la chaleur accĂ©lĂšre Sc que le froid retarde. J’ai traitĂ© ce sujet dans mes Opuscules de Physique animale 8c vĂ©gĂ©tale, lorsque j’ai montrĂ© que la chaleur tuoit les vers spermatiques de la semence tirĂ©e du corps de diffĂ©rens animaux , & y dĂ©veloppoit en la corrompant d’autres animalcules tels que ceux des influions ; mais cette putrĂ©faction dans la semence des Crapauds est , de mĂȘme , plus ou moins promte suivant l’intenfitĂ© de la chaleur, 8Ă­ c’est sans doute pour cela qu’elle devient plutĂŽt stĂ©rile quand l’athmosphĂšre qui l’environne est chaud. J’ai dit qu’une forte chaleur ĂŽtoit, au bout de lix heures & demie , la vertu fĂ©condante Ă  la semence des Crapauds le thermomĂštre me fit voir cette chaleur dĂ©lĂŹgnĂ©e par le dix-huitiĂšme degrĂ© ; mais je cherchai ce qui arriveroit, si, au lieu de tenir cette semence pendant six heures ĂŽt demie exposĂ©e Ă  une chaleur de dix-huit degrĂ©s , je lui en faisois Ă©prouver une de trente degrĂ©s, 8i mĂȘme de trente-deux pendant deux minutes cette chaleur ne nuisoit pas Ă  la vertu fĂ©condante de la liqueur sĂ©minale , mais une chaleur de trente-cinq degrĂ©s la lui faisoir perdre entiĂšrement, K Z rzo ExpĂ©rience? C X X X I I. A l'Ă©gard des expĂ©riences faites fur le suc des testicules des Crapauds aprĂšs leur mort, je laissai d’abord les testicules dans le corps de f animal tuĂ©, pendant un certain tems, comme je fis pour la liqueur sĂ©minale ; mais les rĂ©sultats furent bien dissĂ©rens. On a vu qu’au bout de sept heures la semence avoir presque disparu dans les vĂ©sicules sĂ©minales ; cependant, au bout de dix-huit heures , les testicules du mĂȘme individu conservĂšrent abondamment leur suc, 8Ă­ il fut propre Ă  fĂ©conder les TĂȘtards ; mais, au bout d’un jour, le suc des testicules d’un Crapaud fut entiĂšrement stĂ©rile. Ayant rĂ©pĂ©tĂ© cette expĂ©rience fur d’autres sujets, je vis que la stĂ©rilitĂ© de ce suc avoir des rapports directs avec la chaleur de l’athmosphĂšre, ou avec le principe de la putrĂ©faction qui le gĂątoit. Dans un degrĂ© de chaleur un peu fort de l’athmos- phĂšre, ce suc perdoit sa fĂ©conditĂ© au bout de neuf ou dix heures; ÔC au bout de trente-quatre heures de sĂ©jour dans une glaciĂšre , il Ă©toit encore trĂšs-propre Ă  la fĂ©condation. Mais en comparant ces expĂ©riences avec celles du paragraphe prĂ©cĂ©dent, il en rĂ©sulte qu’à Ă©galitĂ© de tempĂ©rature, le suc des testicules conserve plus long-tems fa facultĂ© fĂ©condante que la liqueur sĂ©minale. Se pourriroit-il plus tard, comme Ă©tant enfermĂ© dans les testicules ĂŹ Je le soupçonnerois, quoique je n’aie pas fait des expĂ©riences directes dans ce but. i5* s v r la GĂ©nĂ©ration. C X X X I I I. Si les testicules de nos Crapauds font tirĂ©s du corps de ranimai St exposĂ©s Ă  l’air, ils fe rident St fe dessĂšchent avant de fe pourrir. J’ai voulu voir Ă­ĂŹ , pendant ce dessĂšchement, ils devenoient stĂ©riles ; j’ai trouvĂ© qu’ils ne per- doient pas leur facultĂ© fĂ©condante. Tant qu’il reste une petite partie de ce suc, il conserve sa propriĂ©tĂ© de fĂ©conder les TĂȘtards. Les testicules dessĂ©chĂ©s deviennent durs, ils prennent la ressemblance dune peau subtile Sc raccornie il est vrai qu’en les mettant dans l’eau ils reprennent bientĂŽt leur premiĂšre forme, St en les pressant ils paraissent pleins de suc, mais il est inutile pour la fĂ©condation ; ce qui n’est pas Ă©tonnant, puifqu’aprĂšs la dessication , la plus grande partie de ce suc , St peut-ĂȘtre celle qui est la plus efficace , s’est Ă©vaporĂ©e. Cette stĂ©rilitĂ© , opĂ©rĂ©e dans le suc des testicules par la putrĂ©faction ou le dessĂšchement, est encore produite par un excĂšs de chaleur les testicules exposĂ©s pendant quelques minutes, ou dans l’eau, ou dans l’air, rĂ©chauffĂ©s Ă  35 0 perdent la propriĂ©tĂ© de fĂ©conder les TĂȘtards. En combinant ces faits avec les prĂ©ccdens, §. CXXX St CXXXI, il paraĂźt que les mĂȘmes causes rendent la liqueur sĂ©minale St le suc des testicules stĂ©riles ; ce qui devoir ĂȘtre, puisque la liqueur sĂ©minale est en bonne partie le suc des testicules, dans lequel aussi j’ai presque toujours trouvĂ© les petits vers fpermatiques ce qui donne Ă  entendre pourquoi les TĂȘtards baignĂ©s avec le suc des testicules des Crapauds K 4 içs ExpĂ©riences tenus long-tems en solitude n croient presque jamais fĂ©condĂ©s, non-seulement parce que la liqueur sĂ©minale Ă©toit en trĂšs-petite quantitĂ©, mais encore parce qu’elle n’étoitpas aussi bonne. 11 Ă©toit inutile de baigner les TĂȘtards avec le soc des testicules de ces petits Crapauds qui n etoient pas propres Ă  la gĂ©nĂ©ration 8t qui ne s’accouploient pas ; cette liqueur dans les animaux inhabiles Ă  la gĂ©nĂ©ration n’est pas plus fĂ©conde. C X X X I V. Dans toutes les fĂ©condations artificielles que j’ai dĂ©crites, j’ai toujours employĂ© la liqueur sĂ©minale pure des diftĂ©rens amphibies, de mĂȘme que le soc des testicules pur fans le mĂȘler en aucune maniĂšre. J’ai cherchĂ© avec rĂ©flexion ce qui arriveroic dans les fĂ©condations, si je mĂȘlois ces liqueurs secondantes avec difĂ­erens corps. La trĂšs-petite diffĂ©rence, qui se trouve entre le suc des testicules 8c la liqueur sĂ©minale, me fit croire que l’union de ces deux substances n’altĂ©reroit point la fĂ©condation qu’on tenterait avec le mĂ©lange, comme l’expĂ©rience le prouva plusieurs fois. Quoique l’eau soit un fluide trĂšs-diffĂ©rent de cĂ©s deux liqueurs fĂ©condantes , il me sembloit de mĂȘme qu’il ne devoir pas empĂȘcher les fĂ©condations artificielles damant plus que, dans -les fĂ©condations naturelles de ces amphibies, la liqueur sĂ©minale du mĂąle Ă©toit lancĂ©e dans l’eau, & qn’elle ne tomboit fur les TĂȘtards qu'aprĂšs avoir Ă©tĂ© mĂȘlĂ©e dans l’eau. La fĂ©condation ne opĂšre dans les Salamandres que lorsque la SUR LA GÉXÉRATĂŻOX. 153 5 semence elt mĂȘlĂ©e dans l’eau, §. CXXIX ^ Sc en effet ce fluide ne pouvoir mieux seconder la facultĂ© fĂ©condante de la liqueur sĂ©minale des Crapauds pour dĂ©velopper les TĂȘtards de leur espĂšce mais je m’arrĂȘte ici pour m’occupĂ©r ailleurs des rĂ©flexions que ce sujet prĂ©sente. Je veux dire encore quelque chose des expĂ©riences que j’ai faites avec d’autres liqueurs. En ouvrant les vĂ©sicules sĂ©minales des Crapauds mĂąles, il arrivoit souvent que la liqueur sĂ©minale , transparente comme í’eau que j’en tirois, Ă©toit tdfchĂ©e du sang Ă©chappĂ© par Couverture faite Ă  l’abdomen. J’ai fait un mĂ©lange de ce sang avec cette semence, & j’en ai baignĂ© deux fois une masse de TĂȘtards, mais la fĂ©condation sc fit aussi bien qu’avec la semence seule je dirai mĂȘme que le sang mĂȘlĂ© avec la semence se caille , 8c qu’on peut l’en ĂŽter de maniĂšre que la semence reste parfaitement pure. Je fis passer quelques-uns de ces caillots de sang tirĂ©s de cette semence ; ils fĂ©condĂšrent fort bien les TĂȘtards avec les petites particules de semence qui restoient adhĂ©rentes Ă  ces caillots. Les autres humeurs de nos Crapauds, soit mĂąles, soit femelles, comme la bile, la salive, les liqueurs tirĂ©es du foie , des poumons, des reins , l’urine elle-mĂȘme , qu’on croit brĂ»lante 8 >C vĂ©nĂ©neuse , n’ont point changĂ© les propriĂ©tĂ©s fĂ©condantes de la semence. L’urine humaine n’a pas mĂȘme nui Ă  cette semence, quand elle n’entroit dans le mĂ©lange que pour une moitiĂ© ; les TĂȘtards qui en Ă©toient baignĂ©s sc dĂ©veloppoient pour la plus grande T54 ExpĂ©riences partie, mais le nombre des TĂȘtards dĂ©veloppĂ©s diminuoit si l’on augmentoit la dose de surine , 6c il n’en naiĂ­soit point si la dose Ă©toit double. Le vinaigre employĂ© comme surine pro- duisoit les mĂȘmes effets. La salive humaine Ă©toit tout-Ă -fait innocente, Ă  moins qu’elle ne fĂ»t employĂ©e Ă  trĂšs-grande dose. Mais peut-ĂȘtre demandera-t-on si la liqueur sĂ©minale s’incorporoit avec les substances qu’on lui joignoit, ou plutĂŽt si les parties de la semence stottoient Ă­euĂ­ement dances fluides fans s’y dissoudre, comme l’huile dans seau, alors la fĂ©condation ne seroit plus surprenante. Je puis rĂ©pondre que le mĂ©lange Ă©toit du premier genre , ÔC je suivois les Ă©vĂ©nemens , non-seule- ment Ă  sceil nud, mais encore armĂ© d’un verre. La semence unie Ă  seau faisoit un fluide homogĂšne, qu’on auroit pris pour seau pure ; en la mĂȘlant avec le vinaigre noir, le mĂ©lange . Ă©toit un peu noir ; 8c avec le blanc , il conservent sa transparence dans les deux cas le vinaigre avoit perdu son piquant, ce qui prou- voit sintimitĂ© du mĂ©lange ; on observe la mĂȘme chose pour surine. Je rĂ©pĂ©tai ces expĂ©riences fur le suc des testicules , 6c il ne me parut pas que les mĂ©langes nuisissent Ă  fa facultĂ© fĂ©condante ; 6c comme ce suc bleuissoit un peu les fluides avec lesquels je le mĂȘlois, je ne pouvois douter de la rĂ©alitĂ© du mĂ©lange. II paroĂźt donc encore, Ă  ce nouvel Ă©gard, que le suc des testicules ressemble beaucoup Ă  la liqueur sĂ©minale. Je ne dis rien Ăźt’R la GĂ©nĂ©ration 155 ici sur les fĂ©condations obtenues , malgrĂ© la prodigieuse raretĂ© des parties du fluide Inondant dans le mĂ©lange fĂ©condateur. C X X X V. Je vais faire connoĂźtre Ă  prĂ©sent les diffĂ©rentes circonstances oĂč j'ai placĂ© les TĂȘtards avant de les fĂ©conder. AprĂšs avoir tuĂ© des femelles de la maniĂšre dĂ©crite dans le Paragraphe CXXX , je laissai les TĂȘtards dans l’utĂ©rus pendant un tems dĂ©terminĂ© , afin de savoir au bout de quel tems ces TĂȘtards pouvoient rester dans l’utĂ©rus d’un cadavre , en conservant le pouvoir d’ĂȘtre fĂ©condĂ©s & de naĂźtre. Huit heures RapportĂšrent aucun changement sensible Ă  leur naissance douze heures ne produisirent encore aucun effet fur eux ; mais, au bout de treize ou quatorze heures, ces TĂȘtards commencĂšrent Ă  souffrir beaucoup de ce sĂ©jour. AprĂšs avoir fĂ©condĂ© deux cent TĂȘtards, il en pĂ©rit plus de quatre- vingt Ă  la seiziĂšme heure du sĂ©jour de ces TĂȘtards dans l’utĂ©rus de leur mĂšre morte, il y eut trois TĂȘtards morts ; 8t je donne ce nombre , parce qu’il m’est arrivĂ© d’en compter ce nombre dans un quatriĂšme Crapaud tuĂ©, quoi- qu’ils n'eussent pas fait le mĂȘme sĂ©jour dans le sein du cadavre. Ce qui confirme la maxime des Philosophes les plus exercĂ©s, qui croient la rĂ©pĂ©tition des expĂ©riences pour la confirmation d' vĂ©ritĂ© physique, non-seulement avantageuse , mais nĂ©cessaire. Le froncement qu’avoient Ă©prouvĂ© les trois premiers TĂȘtards , leur mucilage qui sâ€Ă©toit 156 ExpĂ©riences Ă©paissi, un commencement de pourriture qui frappait le nez, Ă©taient des indices trop sĂ»rs pour croire que ces TĂȘtards se dĂ©velopperoient aprĂšs ĂĄvoir Ă©tĂ© baignĂ©s par la liqueur sĂ©minale ; mais je pouvois au moins soupçonner qu’en rĂ©pĂ©tant les expĂ©riences dans un tems moins chaud que celui oĂč je fis celles-ci, oĂč le thermomĂštre montait Ă  sombre Ă  vingt ĂŽc vingt- deux degrĂ©s , les TĂȘtards pourraient se conserver sains dans l’utĂ©rus. J’eus recours Ă  unĂȘ glaciĂšre, dont je m’étois dĂ©jĂ  servi pour conserver les deux liqueurs prolifiques , §. CXXX1 & CXXXII. Je tins pendant quarante-une heures dans cette athmosphĂšre froide deux Crapauds morts ; les TĂȘtards que je retirai de leur utĂ©rus, Sc que je mouillai avec la liqueur sĂ©minale , se dĂ©veloppĂšrent fort bien. C X X X V I. Je n’ai point eu le tems d’examiner ce qui arriverait Ă  des TĂȘtards baignĂ©s dans diverses liqueurs. Je n’ai essayĂ© que sseau ; 8c comme c’est le fluide dans lequel les mĂšres vivent , Sc oĂč leurs TĂȘtards prennent, la vie , il semble qu’elle devait leur ĂȘtre peu nuisible. Ayant laissĂ© pendant quatre heures les TĂȘtards tirĂ©s de l’utĂ©rus d’un Crapaud vivant, j’cn baignai quelques-uns avec la liqueur sĂ©minale , j’en baignai d’autres avec le suc des testicules ; mais au bout de quelques jours ils pourrirent tous, Sc la pourriture ne tarda pas Ă  se faire remarquer dans d’autres TĂȘtards fĂ©condĂ©s, qui ne sĂ©journĂšrent dans seau que pendant trois heures, de mĂȘme que dans ceux qui n’y restĂšrent que deux heures , 8Ă­ sur la GĂ©nĂ©ration. 157 mĂȘme une. Ce phĂ©nomĂšne imprĂ©vu excita ma curiositĂ©, pour savoir combien de tems pouvoient rester dans seau ces TĂȘtards fans pĂ©rir aprĂšs la fĂ©condation les bornes de ce sĂ©jour furent seulement de treize minutes, au-delĂ  duquel la plupart des TĂȘtards pĂ©rissoient aprĂšs la fĂ©condation ; comme je l’ai vu une centaine de fois. Mais comment seau produit-elle un si grand effet dans un tems si court ? tandis qu’on peut les conserver dans un lieu sec ou dans l’utĂ©rus de leur mĂšre morte pendant plusieurs heures fans qu’ils en soient moins bien fĂ©condĂ©s. Pour Ă©clairer ces difficultĂ©s, il falloit observer soigneusement ce qui arrivoit aux TĂȘtards, ou au mucilage qui les enveloppe , pendant qu’ils font dans seau. J’ai dĂ©jĂ  dit souvent que les TĂȘtards & leur mucilage Ă©toient formĂ©s par deux cordons cylindriques trĂšs-longs, dont la femelle accouche ces cordons aussi-tĂŽt qu’ils touchent l’eau vont Ă  fond; mais quelques heures aprĂšs, s’il fait chaud , ils surnagent St restent toujours Ă  fleur d’eau ; ce qui n’arrive que parce que, s’étant gonflĂ©s, ils font devenus plus lĂ©gers ; 8t les sens font voir l’augmentation de leur volume, que la mesure exacte des cordons, prise avant leur immersion , dĂ©montre quand ils surnagent aprĂšs elle ; cet accroissement de volume ne peut ĂȘtre produit que par seau, qui pĂ©nĂštre dans ce mucilage des cordons, qui les dilate , les augmente St les force Ă  occuper un espace plus grand , puisque les cordons laissĂ©s Ă  sec n’aug- mentent point en diamĂštre sensiblement , St que ceux qui ont Ă©tĂ© dans seau en laissent Ă©chapper assez quand on les presse. II rĂ©sulte donc i-;8 ExpĂ©riences do-lĂ  que leau peut empĂȘcher la fĂ©condation, parcc que la semence pour fĂ©conder lesTĂ©tards, devant traverser le mucilage qui les entoure pour arriver jusques Ă  eux, soit en s’insinuant par les pores ou par d’autres voies faites Ă  cet usage ; peut-ĂȘtre alors ces portes de communication, qui font ouvertes quand les cordons font secs, laisseront un libre passage Ă  la semence au travers du mucilage, St elle passera jusques aux TĂȘtards. Mais Ă­i ces portes font fermĂ©es, ce qui arrivera quand elles seront remplies d’eau, aprĂšs un certain sĂ©jour des cordons dans l’eau , alors au bout d’un certain tems d’immersion la semence ne pourra plus pĂ©nĂ©trer jusques aux TĂȘtards ni les fĂ©conder. C X X X V I I. Cet obstacle , dans la fĂ©condation naturelle des Crapauds, a Ă©tĂ© prĂ©vu par la Nature , les mĂąles des Grenouilles St des Crapauds accouplĂ©s lancent leur Ă­cmence sur le mucilage qui renferme les TĂȘtards pendant qu’ils font dans l’eau , mais ce n’est que quelques instans aprĂšs l’accouchement j St j’ai vu que les mĂąles baignent les TĂȘtards de leur semence Ă  mesure qu’ils sortent de l’anus , de maniĂšre qu’ils ne reçoivent alors l’impression de l’eau qu’aprĂšs avoir reçu celle de la semence. Et comme Ă­ĂŹ ces mĂąles prĂ©voioient l’inutilitĂ© de leurs efforts pour fĂ©conder les TĂȘtards qui ont sĂ©journĂ© pendant quelque tems dans l’eau , ils ne veulent jamais les baigner avec leur semence. Je laissai solitaires quelques femelles qui accouchaient ; quand elles avoient donnĂ© le jour Ă  une certaine quantitĂ© de leurs cordons, je leur s v r la GĂ©nĂ©ration, 159 donnai pour compagnes des Crapauds mĂąles, qui ne tardoient pas Ă  s’accoupler avec elles, ils fĂ©condoient les TĂȘtards qui sortoient de l’anus de la femelle ; mais ils laissoient les autres fans les toucher. J’ai dit que ces Crapauds sembloient prĂ©voir ce qui arriveroit ; mais il est bien clair que je n’ai pas prĂ©tendu que ces amphibies distinguassent les TĂȘtards propres Ă  ĂȘtre fĂ©condĂ©s de ceux qui ne letoient pas la maniĂšre dont ils s’accouplent les dĂ©termine Ă  fĂ©conder seulement les TĂȘtards les plus prĂšs de Tamis en sortant de la femelle , qui sont alors fur le point d’entrer dans Teau, de forte que fans le lavoir ils remplissent le vƓu de la Nature , qui est la propagation de TefpĂšce d’oĂč il rĂ©sulte que , quoique la fĂ©condation des Crapauds, des Grenouilles, 8c peut-ĂȘtre des Poissons , suivant Topinion vulgaire, se fasse hors du corps de la mĂšre cependant, les fƓtus ne font pas fĂ©condĂ©s , lorfqu’ils font fur le fond de Teau, comme je l’ai vu dans toutes les espĂšces de Grenouilles &C de Crapauds dont j’ai parlĂ© ; car, ayant mis dans des vases pleins d’eau plusieurs portions de cordons, tirĂ©s de TutĂ©rus avec des mĂąles , je n’en ai jamais vu un seul fe dĂ©velopper, quoique les vĂ©sicules sĂ©minales de ces mĂąles fussent pleines de semence , St quoique je les eusse sĂ©parĂ© d’une femelle pendant Taccouplement je pouvois donc en infĂ©rer qu’il ne s’étoit pas alors fĂ©pandu une goutte de semence, puisque cette goutte, comme je le prouverai, Ă©toit suffisante pour faire naĂźtre plusieurs TĂȘtards. ExpĂ©riences 160 CHAPITRE III. FĂ©condation artificielle dans la Grenouille des arbres & dans la Grenouille aquatique. C X X X V I I I. Si je n’ai pu faire qu’un petit nombre inexpĂ©riences relativement Ă  la fĂ©condation artificielle de la Salamandre aquatique , je n’en ai pas fait davantage pour la Grenouille des arbres, non - seulement Ă  cause de la difficultĂ© qu’on Ă©prouve pour le dĂ©veloppement de leurs fƓtus, comme on l’a vu au Paragraphe CXXIX , mais encore Ă  cause de la raretĂ© de ces animaux; je n'en ai pu avoir que quatre pendant que je faisois ces expĂ©riences. Je puis donc seulement assurer le Lecteur, que j’ai vĂ©rifiĂ© sur quatre Grenouilles des arbres accouplĂ©es, la fĂ©condation artificielle opĂ©rĂ©e par le moyen de la liqueur sĂ©minale St le suc des testicules. C’est pour cela que je passe aux Grenouilles vertes aquatiques , qui font trĂšs-nombreuses dans les campagnes de Pavie , elles m’ont fourni tous les moyens de faire toutes les expĂ©riences que j’ai voulu. Mais avant d’aller plus loin , je veux dĂ©crire les parties de la gĂ©nĂ©ration des mĂąles , ayant dĂ©jĂ  fait con- noĂźtre dans le premier MĂ©moire celles des femelles. Quand SU K LA G EX E RA TI 0 X. l6j Quand on ouvre l’abdomen , & quand on ĂŽte du milieu les intestins , on voir la vessie , les vĂ©sicules spermatiques 6c les testicules la premiĂšre est trĂšs-voiiine de l’anus, elle semble divisĂ©e en deux lobes Ă©gaux, quoiqu’elle n’offre qu’une feule cavitĂ©, comme il paroĂźt par surine , qui sort toute d’un lobe ; mais il peut communiquer avec l’autre par un trou li la vessie est pleine d’urine, les vĂ©sicules spermatiques font en partie couvertes ; mais si surine est vuidĂ©e , ces vĂ©sicules sautent aux yeux. Elles font situĂ©es un peu plus haut que la vessie; elles font composĂ©es d’une membrane trĂšs- mince, au travers de laquelle on voit la semence , qui est limpide comme seau , dans la partie supĂ©rieure ; elles ont chacune un appendice assez long, qui s’implante dans les Ă©pi- dydimes des testicules, que nous appellerons vaisseaux dĂ©fĂ©rens. On a observĂ© quelquefois dans les Salamandres aquatiques quatre testicules ; 8c j’ai trouvĂ© cette observation trĂšs- vraie , mais je n’ai point vu cela dans les Salamandres Sc les Grenouilles notre Grenouille en a deux , qui ont la couleur du jaune d’Ɠuf; ils font extĂ©rieurement grainĂ©s Ă -peu-prĂšs comme les testicules des Crapauds, 8c on les voit remplis de sucs ce qui arrive fur-tout quand les mĂąles font accouplĂ©s, alors les vĂ©sicules sĂ©minales regorgent de semence , comme je sai remarquĂ© H. CXX. C X X X I X. J’employai ces deux liqueurs pour mes fĂ©condations artiĂ­icielies, dans mes premiĂšres L 1 6z ExpĂ©riences expĂ©riences-, je fĂ©condai des TĂȘtards fraĂźchement tirĂ©s des femelles en vie , avec ces sucs tirĂ©s des mĂąles en vie ; ensuite je variai ces expĂ©riences avec des liqueurs vieilles, 8c qui n’étoient pas loin de se putrĂ©fier, ou bien avec des TĂȘtards dans diffĂ©rentes circonstances enfin , je mĂȘlai ces liqueurs avec d’autrcs substances Ă©trangĂšres ; les rĂ©sultats de ces expĂ©riences furent, pour ce qui est essentiel, parallĂšles Ă  ceux que j’ai racontĂ©s avec les variations que j’ai remarquĂ©es je me bornerai Ă  faire observer celles-ci ; les deux liqueurs prolifiques de la Grenouille verte aquatique ont, toutes choses Tailleurs Ă©gales , conservĂ© plus long - tems leur qualitĂ© fĂ©condante hors du Corps de ranimai , que celle des Crapauds mais secondement, elles ont pu rĂ©sister moins long-tems Ă  une chaleur subite une chaleur de 3z degrĂ©s, pendant peu de minutes, n'ĂŽ- toit pas la fĂ©conditĂ© Ă  la liqueur sĂ©minale des Crapauds, mais elle l’îtoit Ă  celle des Grenouilles dans les expĂ©riences que j’ai faites ; troisiĂšmement , la liqueur sĂ©minale de cette Grenouille conserve sa vertu prolifique plus long-tems que celle des Crapauds, quoiqu’elie soit mĂȘlĂ©e avec une plus grande dose d’urine humaine que la seconde. Enfin , les TĂȘtards de cette Grenouille conservent moins long-tems leur facultĂ© d’ĂȘtre fĂ©condĂ©s, lorsqu’ils restent dans l’utĂ©rus de quelques-unes de ces Grenouilles mortes, que les TĂȘtards des Crapauds. C X L. Mais je veux amuser la curiositĂ© par de su R LjI GĂ©nĂ©ration. i 6 z .nouvelles expĂ©riences. Pour obtenir la fĂ©condation des Crapauds, ou des Salamandres , ou des Grenouilles, je baignai avec la liqueur prolifique , par le moyen d’un pinceau, le mucilage qui enveloppoit les fƓtus, ou bien en plaçant cette liqueur dans un verre de montre, j’y plongeai le fƓtus le mucilage qui le couvroit ; il en Ă©toit ainĂ­ĂŹ entiĂšrement humectĂ©. Mais, est-il nĂ©cessaire pour la fĂ©condation que ces fƓtus soient ainsi environnĂ©s de liqueur prolifique? Je ne pouvois le savoir que par l’expĂ©- rience, & l’expĂ©ricnce Ă©toit importante. Dans les Grenouilles, le mucilage qui enveloppe les TĂȘtards n’est point moulĂ© en longs cordons , comme ceux du Crapaud Ă  yeux roux, ou du Crapaud puant, §. XLV, LXVI1I, mais il est arrondi en petites sphĂšres, qui renferment au- dedans d’elles un TĂȘtard. Ces sphĂšres, tirĂ©es de l’utĂ©rus, peuvent aisĂ©ment se sĂ©parer ; j’en pris quelques-unes, que je sĂ©parai Sc que je baignai entiĂšrement de semence ; j’en baignai d’autres Ă  moitiĂ©, d’autres Ă  un tiers de leur surface ; ensuite je les mis dans l’eau presque tous ces TĂȘtards naquirent ; ce qui me fit comprendre qu’il fuffifoit pour les fĂ©conder de baigner seulement avec la semence une partie de leur mucilage ; les TĂȘtards de cette Grenouille ont un hĂ©misphĂšre blanc , &. l’autre noir , §. XIV , ils se fĂ©condent Ă©galement, soit en fĂ©condant la partie du mucilage , qui correspond Ă  ü’hĂ©mifphĂšre blanc ou Ă  rhĂ©misphĂšre noir en gĂ©nĂ©ral, il est indiffĂ©rent quelle que soit la partie de ces petites sphĂšres que touche L i 164 E x p Ă­ Ăź i Ă­ f t Ă­ la liqueur sĂ©minale, les TĂȘtards en font Ă©galement fĂ©condĂ©s. J’ai dit que la plus petite partie des sphĂšres, que j’avois baignĂ©es de liqueur , Ă©toit environ le tiers de leur surface mes recherches ne se sont pas bornĂ©es-lĂ  ; j’ai diminuĂ© de plus en plus le petit espace des sphĂšres, baignĂ© par la liqueur sĂ©minale , jusques-lĂ  qu’il n’y eut que la surface de ces sphĂšres , couverte par la pointe d’une plume Ă  Ă©crire , mĂȘme d’une aiguille mouillĂ©e de la liqueur sĂ©minale , qui en fut imprĂ©gnĂ©e par un feu! attouchement ; cependant , quoique la quantitĂ© de la liqueur sĂ©minale fut ft petite , la fĂ©condation n’en fut pas moins opĂ©rĂ©e avec la mĂȘme promtitude que celle des sphĂšres baignĂ©es entiĂšrement de semence. Je fus curieux de voir encore lĂŻ cette gouttelette de liqueur spermatique , qui fĂ©condoit les TĂȘtards renfermĂ©s dans les petites sphĂšres qu’on en avoit touchĂ© , en fĂ©conderait d'autres qui leur feraient contiguĂ«s. Je plaçai pour cela, dans douze verres de montre pleins d’eau , vingt-quatre de ces petites sphĂšres , tirĂ©es de l’utĂ©rus d’une Grenouille ; de forte qu’il y eut deux de ces petites sphĂšres dans chaque verre de montre elles Ă©toient placĂ©es de maniĂšre qu’elles se touchoient, Sc quelles Ă©toient attachĂ©es ensemble par leur glu naturelle. Ensuite , avec la pointe d’une aiguille , baignĂ©e de la semence du mĂąle , je touchai une des sphĂšres dans chacun de ces verres , de forte qu’il y en eĂ»t une qui ne fut point touchĂ©e ; mais comme il y eĂ»t vingt- tun la GĂ©nĂ©ration. 165 ideux TĂȘtards qui naquirent, il faut croire que chaque gouttelette spermatique avoit fĂ©condĂ© deux TĂȘtards. Je rĂ©pĂ©tai cette expĂ©rience avec le mĂ©me succĂšs , je la variai mĂȘme en augmentant le nombre des TĂȘtards. Dans le premier cas, le nombre des TĂȘtards nĂ©s fut toujours pour l’ordinaire double de celui des TĂȘtards fĂ©condĂ©s par l’attouchemcnt de la semence dans le second il le fut toujours ; 8C mĂȘme, comme Ă  chaque petite sphĂšre touchĂ©e par la semence , j'en laissai quelquefois deux autres unies , souvent les TĂȘtards de ces deux sphĂšres se dĂ©veloppoient. II faut donc en conclure que la liqueur spermatique de la Grenouille verte aquatique est; si Ă©nergique, qu’une gouttelette d’une prodigieuse petitesse suflit pour fĂ©conder pluĂ­ieurs Crapauds. C X L I. En rĂ©flĂ©chissant fur cette expĂ©rience Ă©tonnante , il me parut que la petite gouttelette spermatique ne pouvoit avoir fĂ©condĂ© les TĂȘtards qu’aprĂšs avoir traversĂ© une portion des petites sphĂšres mucilagineufes ; de forte qu’il Ă©toit curieux de savoir ce qu’il seroit arrivĂ© en augmentant du double l’épaisseur de ce mucilage , 8Ă­ en conservant la petite portion de la semence je plaçai donc de petites sphĂšres solitaires dans des verres de montre ; avec les pointes trĂšs-fines de deux trĂšs-dĂ©licates pinces , j’îtai la glu de chaque sphĂšre ; de sorte que , sans aucune rupture , je vins Ă  former un fil visqueux d’un pouce environ de longueur ; je tins ce fil tendu horizontale 3 i 66 ' lement, 8 je touchai ton extrĂ©mitĂ© unĂ© fols avec la pointe d’une aiguille mouillĂ©e de semence ; ayant ainsi disposĂ© les choses, j’atterĂ­- dis 1c succĂšs. Plusieurs fois les 'TĂȘtards pĂ©rirent , mais souvent ils se dĂ©veloppĂšrent ; SC dans ce cas , il falloir dire que la petite gouttelette spermatique avoir traversĂ© l’épaiiseur du tĂŹl visqueux, puisque , comme il Ă©toit horizontal , il ne pouvoir avoir descendu dans la longueur de fa surface. InexpĂ©rience suivante correspond Ă  celle-ci. Je plaçai dans le fond d’un tube cylindrique de verre, hermĂ©tiquement fermĂ© St tenu perpendiculairement , un nombre donnĂ© de sphĂšres glutineuses, par exemple, une cinquantaine ou environ ; fur ces petites sphĂšres, je plaçai un lit de glu , enlevĂ© Ă  de petites sphĂšres semblables ; cette glu pouvoir avoir un pouce d’épaisseur , resortoit du tube St descendoit jusqu’au centre , de maniĂšre qu’il formoit un entonnoir, qui avoir son sommet au centre ; je laissai tomber une goutte plus ou moins petite de liqueur sĂ©minale sur ce sommet, 8Ă­ aprĂšs qu’elle s’étoit perdue , ce qui arrivoit trĂšs-vĂźte , j otois la glu , St je plaçois les petites sphĂšres dans l’eau ; lorsque la petite goutte de liqueur sĂ©minale n’é- toit pas ii petite, tous les TĂȘtards naissoient presque , autrement leur nombre Ă©toit trĂšs- petit. Je rĂ©pĂ©tai l’expĂ©rience avec cette feule diffĂ©rence , que je substituai le blanc d’Ɠuf de Poule Ă  la glu dont j'ai parlĂ©, mais alors aucun des TĂȘtards ne se dĂ©veloppa. Et mĂȘme SUR LA GÈtĂ­Ăš RATIOS 1 . \6f une portion de blanc d’ceuf s’étant attachĂ©e Ă  Ja glu des petites sphĂšres, la putrĂ©faction du blanc d’cenf, qui arriva bientĂŽt Ăąpres, se communiqua bien vite aux petites sphĂšres 6c aux TĂȘtards. Les deux premiĂšres expĂ©riences de Ce Paragraphe font connoĂźtre la grande activitĂ© de la semence des Grenouilles, puisqu’étant rĂ©duite Ă  une quantitĂ© trĂšs - petite, Ă  un seul point, elle s’inĂ­ĂŹnue , Sc traverse la glu des sphĂšres fans perdre fa vertu fĂ©condante , soit que ce passage s’opĂšre par les pores de la glu , au travers desquels elle passe librement, soit que la semence soit aspirĂ©e par de petits syphons imperceptibles, destinĂ©s par la Nature Ă  ĂȘtre de petits tubes capillaires , propres Ă  boire avidement 6c Ă  transmettre la semence jusque dans le corps des TĂȘtards le blanc d’Ɠuf, qui doit servir de nourriture au Poulet, si diffĂ©rent du TĂȘtard , doit diffĂ©rer de la glu qui nourrit le TĂȘtard ; d’oĂč l’on peut comprendre pourquoi la semence de Grenouille trouve un passage an travers de la glu , qu’elle ne trouve pas au travers du blanc d’Ɠuf. C X I. Mats i’étonnement ne finit pas ici. J’ai montrĂ© dans le paragraphe CXXXIV, que la liqueur sĂ©minale ne perd pas la facultĂ© de dĂ©velopper les TĂȘtards, quoiqu’elle soit mĂȘlĂ©e avec Peau. Je me proposois de pousser cette expĂ©rience ; en voici les rĂ©sultats je combinai donc Peau LC animant toute la petite machine animale ; mais je puis fournir plusieurs exemples dans le rĂšgne animal iox?55 _ est Ă©gale Ă  115x4 — — , c’est le volume de 3 gr. de semence avant de les mettre dans l’eau. En supposant la semence Ă©galement rĂ©pandue dans l’eau, le volume de l’eau avec la semence qu’on y a mis, 8c le volume d u petit globule mĂȘlĂ© avec la semence seront proportionnels au poids de toute la semence, 8c au poids de la semence mĂȘlĂ©e avec seau ; de sorte que le poids de la semence Ă©tant trois grains, par la rĂšgle de trois on trouve le poids de la semence rĂ©pandue dans le petit globule d’eau Ă©gal Ă  d'un grain, *> 994 ? 687 ,yoo Dans les corps homogĂšnes les poids font proportionnels au volume ; ayant le poids 8c le volume du tout, celui de la semence seule 8c de la semence mĂȘlĂ©e au globule d’eau, par une rĂšgle de trois, on aura le volume de semence contenu dans le globule d’eau trĂšs-proche de d’uneligne cubique. 1 ,007. ,120,420 En comparant Ă  prĂ©sent le volume du TĂȘtard avec celui de la liqueur sĂ©minale contenue dans le petit globule d’eau qui touche le TĂȘtard, on a, que le premier est au second comme 1,064,777,777; 1. SUlt LA GÉNÉUAtlOĂŹt. it$ animal , qui rendent cetre supposition trĂšs- raifonnable, urte trĂšs-petite goutte du venin d’une VipĂšre , versĂ©e dans une plaie , enlĂšve l’irritabilitĂ© avec la sensibilitĂ© au systĂšme musculaire 8Ă­ nerveux , St donne la mort Ă  l’animal petit ou grand quel qu'il soit, au Passereau , au Chien , Ă  sHomme , au Cheval , au BƓuf. Qu’on considĂšre pour un moment la proportion entre le volume de cette goutte vĂ©nimeuse ĂŽc celui des animaux qu'il tue , en parlant surtout d’un Cheval ĂŽt d’un BƓuf ; alors on trouvera peut-ĂȘtre moins Ă©tonnant que la petite portion de semence donne la vie Ă  des TĂȘtards si petits, puisque cette petite goutte de venin tue des animaux beaucoup plus gros mais nous avons des faits plus prochains , plus directs, mieux prouvans en faveur de faction de cette petite patrie de semence pour donner la vie , & produire une trĂšs sensible irritabilitĂ© sur le cƓur. Un grain de styrax , mis sur le feu , remplit une chambre de son odeur; il y a donc dans toutes les parties de cette chambre des particules rĂ©pandues de ce grain, qui, malgrĂ© leur prodigieuse tĂ©nuitĂ© , peuvent cependant agir sur les nerfs du nez , & y produire la sensation de l’odorat , qui sera quelquefois si grande fur les femmes , qu’elle les fera Ă©ter- nuer. Si donc des particules aussi subtiles affectent si fort l’odorat , faut-il s’étonner si quelques particules de semence astectent le cƓur des TĂȘtards Ă  leur maniĂšre, qui est naturellement si irritable , 8Ă­ qui Test beaucoup plus que le nĂŽtre- N i94 " ExpĂ©riences SeptiĂšme RĂ©flexion. C L V I I. * ' Cette petite portion de liqueur sĂ©minale, qui anime les TĂȘtards, a cependant ses limites dans son Ă©nergie. J’ai remarquĂ© expressĂ©ment que souvent elle pouvoitles fĂ©conder, CLV ; d’oĂč je voulois faire conclure qu’elle ne le faifoit pas toujours , 6>C que j’en touchois quelquefois en vain ces TĂȘtards mais j’en ai eu une preuve plus dĂ©cisive ; ayant mis fur un verre poli une goutte de cette semence, je Tobligeai Ă  parcourir une partie de la surface avec la pointe d’une aiguille, 6c Ă  en former un filet trĂšs-subtil & presque invisible de la longueur d’un pouce. Je pris ensuite plusieurs petites sphĂšres rnuci- lagineuses , Ă  qui je faisois toucher ce filet , la moitiĂ© aux unes, le tiers aux autres, ou bien le quart ; les TĂȘtards des petites sphĂšres , qui n’avoient essuyĂ© qu’une moitiĂ© de ce filet, ne pĂ©rissoient pas tous , quelques-uns se dĂ©velop- poienr, mais aucun de ceux qui avoient Ă©tĂ© touchĂ©s par le tiers ou le quart de ce filet ne se dĂ©veloppĂšrent. Cette expĂ©rience est confortante avec celle du paragraphe CXLIII, oĂč je dis que si , au lieu de mĂȘler trois grains de semence dans dix-huit onces d’eau , on les mĂȘle avec deux livres ou avec trois, le nombre des TĂȘtards qui se dĂ©veloppe Ă©toit plus petit, &C qu’il diminuoit toujours en raison de 1 augmentation de seau. II est donc Ă©vident que la liqueur sĂ©minale ne peut ĂȘtre Ă©nergique que sur LA GĂȘnĂ© ratio U. 194 iorsqu’elle est employĂ©e dans une certaine quantitĂ© ; 8Ă­ que Ă­ĂŹ on la diminue , elle celle d’ĂȘtre fĂ©condante, parce qu’elle c estĂ© fans doute de pouvoir imprimer au cƓur le mouvement nĂ©cessaire pour l’animer. Au reste , je crois que la quantitĂ© de la sc- mence fĂ©condante est toujours pour ces animaux incroyablement petite , 8Ă­ presque relis que je l’ai dĂ©terminĂ©e au paragraphe CLV ; de sorte que la quantitĂ© excĂ©dente est inutile * en effet, la fĂ©condation Ă©tant une opĂ©ration indivisible li l’excĂ©dent de la semence favorisent cette fĂ©condation , elle ne pourroit lĂ© faire qu’en hĂątant l’animation d u TĂȘtard Sc son dĂ©veloppement ; ce qui seroit produit est raison du nombre plus grand des particules spermatiques, qui dĂ©termineraient le cƓur Ă  vibrer avec plus de force ; mais cela est contraire aux faits, qui mont appris que les TĂȘtards naissoient Ă©galement vĂźte , soit lorsqii’ilS avoient Ă©tĂ© baignĂ©s dans la semence, soit lors- qu’ils en avoient Ă©tĂ© touchĂ©s-en un seul point par une quantitĂ© infiniment petite , §. CXLIV. Ainsi je ne vois pas Ă  quoi servirait cet excĂšs de liqueur sĂ©minale , qui me paraĂźt inutile ; ĂŽc l’on comprendra comment une particule de semence Ă­i petite peut Ă­ustĂŹre Ă  la fĂ©condation , quand on considĂ©rera la prodigieuse petitesse du calibre des vaisseaux dans les TĂȘtards, par oĂč doit pĂ©nĂ©trer la liqueur sĂ©minale , elle rend inutile cet excĂšs de liqueur sĂ©minale qui ne saurait s’y insinuer. N * - xpĂł ExpĂ©riences HuitiĂšme RĂ©flexion. C L V I I I. Mais il sc prĂ©sente ici une question que chacun se sera faite. Puisqu’une trĂšs-petite quantitĂ© de semence sustĂŹt pour faire naĂźtre ntrs amphibies, n’en peut-on pas dire la mĂȘrrĂ­Ăš chose pour la naissance d’un poisson, d’un oiseau , d’un quadrupĂšde , d’un homme ? Ou ne peut-on pas dire plus gĂ©nĂ©ralement, que cette trĂšs-petite quantitĂ© de semence, employĂ©e par la Nature pour le dĂ©veloppement de nos amphibies,est employĂ©e avec la mĂȘme Ă©conomie pour tous les autres animaux ? Cette question, qui est trĂšs-intĂ©ressante, est plus propre Ă  exciter notre curiositĂ© que nous ne sommes en Ă©tat de la rĂ©soudre , parce que les faits nĂ©cessaires manquent absolument. Je vois la chose possible, mĂȘme probable , par l’exemple que j’ai mis fous les yeux ; mais j’ignore si cela se passe ainsi. Le fondement de mon ignorance repose sur la multitude des moyens que la Nature emploie pour remplir les mĂȘmes vues. Et pourquoi n’emploieroit-elle pas diffĂ©rentes doses de liqueur sĂ©minale pour fĂ©conder les animaux suivant la diffĂ©rente nature de leur espĂšce ? Pour savoir quelque chose sur ce sujet, il faut comparer ce qui s’observe dans nos amphibies avec ce qu'on peut observer dans les diffĂ©rentes espĂšces d’animaux ; comme, par exemple , dans quelqu’insecte, quelque poisson, quelqu’oiseau, quelque quadrupĂšde ; alors on pourra se faire SUR LA GÉNÉRATIOS. 197 des idĂ©es plus justes fur ce sujet , mais c’est ce que nous ignorons. Nous n’avons fur les fĂ©condations artificielles, autant que j’ai pu le savoir, que deux exemples , celui de M. Jacobi, insĂ©rĂ© dans les MĂ©moires de Berlin T. XX , 8c le mien mais je puis dire , fans faire tort Ă  ce Naturaliste , que fa dĂ©couverte ne fournit aucune consĂ©quence philosophique , linon qu’il a fĂ©condĂ© artificiellement deux Poissons qu’il observoit. C’étoit des Saumons 8c des Truites. AprĂšs avoir fait tomber dans l’eau les Ɠufs de ces deux Poissons, parvenus Ă  leur maturitĂ©, mais non fĂ©condĂ©s , il versa sur eux la liqueur sĂ©minale , tirĂ©e des laites des mĂąles, jusqu’à-ce que seau eĂ»t commençé de blanchir ; alors au bout de cinq semaines les Poissons commencĂšrent de naĂźtre. Tel est l’extrait du MĂ©moire de M. Jacobi ; 8c l’on peut dire qu’il Ă©claire peu ce sujet il auroit fallu qu’il dĂ©terminĂąt la quantitĂ© de la liqueur sĂ©minale nĂ©cessaire Ă  la fĂ©condation ; mais il s’est arrĂȘte lĂ  oĂč le Philosophe-Naturaliste auroit commencĂ© ses recherches. Les fĂ©condations naturelles ne nous instruisent pas plus que les artificielles pour en juger, il suffit d’avoir une lĂ©gĂšre connoissance de la gĂ©nĂ©ration de l’homme 8c des animaux ; Sc je ne vois d’autres ressources pour obtenir ce but que la rĂ©pĂ©tition, fur les autres espĂšces d’ani- maux, des expĂ©riences que j’ai faites le premier fur les amphibies dont j’ai parlĂ© ces expĂ©riences , en rĂ©solvant ce problĂšme, Ă©claire - roient sĂ»rement divers points du rĂšgne animal. N Z iy8 ExpĂ©riences Mes recherches se sont bornĂ©es aux animaux dont la fĂ©condation se fait sĂ»rement hors du corps. Mais j’invite les Naturalistes Ă  tourner leurs recherches 8c leur sagacitĂ© aux autres classes bien plus nombreuses d’animaux, dont la fĂ©condation se fait dans le corps de la mĂšre , &. qui font, comme chacun fait, ovipares ou vivipares. AprĂšs s’ĂȘtre assurĂ© que quelques sexuelles des premiers font vierges, il faudroit choisir le tems oĂč elles pondent leurs Ɠufs, & alors essayer avec la semence du mĂąle sur les Ɠufs quelques-unes des expĂ©riences que j'ai racontĂ©es dans ce MĂ©moire. II ne me paroĂźtroit pas mĂȘme difficile de les appliquer aux animaux vivipares par des moyens fans doute dissĂ©rens, qui agiroient au-dcdans d'eux; ĂŽĂ­ je ne vois pas pourquoi l’on dĂ©sespĂ©reroit du succĂšs. Les expĂ©riences les plus difficiles en apparence ont couronnĂ© les dĂ©sirs du hardi Observateur par des succĂšs qui ont contribuĂ© Ă  la rĂ©volution heureuse qui s’est faite dans la philosophie. NeuviĂšme RĂ©flexion. C L I X. La liqueur sĂ©minale , suivant M. Bonnet, agit non-seulement comme un stimulant dans le fƓtus , mais encore comme un aliment. Voici ses preuves L’organe de la voix du Mulet, dĂ©rivant de l’accouplement d’un Ane avec une Jument, a cependant une grande ressemblance avec celui du pĂšre. Si le germe existe dans la femelle avant la fĂ©condation, il est un cheval sur la GĂ©nĂ©ration. 199 en miniature SĂ­ il n’a Ă©tĂ© ni un Mulet ni un Ane. L’organe de la voix devoir donc ĂȘtre celui d’un Cheval. II faut donc que la liqueur sĂ©minale ait modifiĂ© l’organe de la voix du germe , St l’ait mis en rapport avec celui du pĂšre ; mais les parties de cet organe croulent Li se dĂ©veloppent dans ce rapport, quoique le pĂšre n’eĂ»t fourni que cette liqueur. II faut donc que cette liqueur nourrisse les parties de cet organe , Sc s’incorpore Ă  leur substance, puisque l’accroissement est l’esset naturel Sc immĂ©diat de la nutrition. La semence n’est donc pas feulement un stimulant , elle est encore un aliment 1 . Le Naturaliste Genevois, pour confirmer son opinion , se sert de l’exemple de l’accroissement de la barbe , de la crĂȘte 'des Coqs, des cornes des Cerfs, accroissement qui est certainement dĂ» Ă  l’essicace de la liqueur sĂ©minale. Haller , dans fa grande Physiologie , en traitant le mĂȘme sujet, ne s’accorde que fur un point avec M. Bonnet. 11 convient que tous les phĂ©nomĂšnes dont j’ai parlĂ© dĂ©pendent de la liqueur sĂ©minale, considĂ©rĂ©e comme un stimulant , mais non comme un aliment. Quant aux poils, aux cornes, Ă  la crĂȘte, leur dĂ©veloppement est produit par la liqueur sĂ©minale rentrĂ©e dans le sang de l’Homme , du Cert, du Coq, qui dĂ©termine le cƓur par son acrimonie alka- lescente Ă  battre plus fortement, Ă  dissoudre les sucs plus lents 8c Ă  les chasser dans les plus 1 Contemplation de la N ture, PrĂ©face. N 4 tco ExpĂ©riences petits vaisseaux oĂč se trouvent les germes des poils, des cornes,& des crctes i. Quant Ă  l’organe de la voix du Mulet, son dĂ©veloppement est produit par la force stimulante de la semence, plus Ă©nergique dans l’Ane que dans le Cheval , pour dĂ©velopper Sc Ă©tendre ses parties 2 ainli Hallek explique, par la feule force stimulante de la semence , ce que M. Bonnet croit ne pouvoir expliquer qu’en regardant la semence comme un aliment. Je me garderai bien de prononcer sur la petite diffĂ©rence qu’i! y a dans l'opinion dc ces deux grands hommes en respectant leur mĂ©rite , je me crois fait plutĂŽt pour les admirer que pour les juger ; je dirai seulement que , dans la gĂ©nĂ©ration des Crapauds Sc des Grenouilles , il me semble que la liqueur sĂ©minale ne peut ĂȘtre un aliment, Sc je prie , pour s’en convaincre , qu’on se rappelle le paragraphe CLV fur les proportions des volumes de la semence qui fĂ©conde le TĂȘtard , Sc du TĂȘtard fĂ©condĂ© qui est environ comme 1 1,064,777,777, Si le TĂȘtard Ă©toit nourri par la liqueur fĂ©condante , son accroissement ne seroit pas plus grand que le volume de la petite quantitĂ© de semence, qui est presque nulle. Outre cela , Ă­i la nutrition des TĂȘtards, dans les premiers tems de leur dĂ©-? veloppemenr, provenait de la semence , ceux-lĂ  devroient croĂźtre Sc se dĂ©velopper le plus qui seraient baignĂ©s dans une plus grande quantitĂ© 1 ElĂ©m. de Physiol. lib. XXVII, Test. III, 2 Jbid. lib. XKIX, sect. II. 201 sur la GĂ©nĂ©ration. de semence ; mars noirs savons qu’ils naissent 8c se dĂ©veloppent Ă©galement quand ils sont lĂ©gĂšrement touchĂ©s par cette liqueur , ou quand ils en font abondamment environnĂ©s, §. CXLV. Aussi, en consultant mes expĂ©riences, je ne puis voir la liqueur sĂ©minale que comme un stimulant. Cependant, quoique ces raisons soient trĂšs- fortes pour croire que la liqueur sĂ©minale soit le vrai stimulant du petit cƓur des TĂȘtards, j’ai voulu encore soumettre cette hypothĂšse Ă  cette expĂ©rience. En rĂ©flĂ©chissant que le stimulus d’un corps auroit l’énergie de ses parties, & que la chaleur est un moyen qui peut y contribuer , je pensai de rĂ©chauffer la liqueur sĂ©minale , 8c d’en baigner alors les TĂȘtards pour voir s’ils nùßtroient plutĂŽt. Je mĂȘlai donc deux. grains de semence de Grenouille dans demi-once d’eau , 8t je rĂ©chauffai jusques au 3 °° ' j’y plongeai une vingtaine de TĂȘtards ; lin moment aprĂšs je les en ĂŽtai, 8c je les mis dans une autre eau qui avoir la tempĂ©rature de l’athmosphĂšre 17 0 . Ensuite , pour faire la comparaison , je fĂ©condai autant de TĂȘtards avec la mĂȘme eau qui m’avoit servi Ă  fĂ©conder les autres , quand elle fut refroidie , 8t qu’elle eut acquis la chaleur de l’athmosphĂšre l’expĂ©rience ne fut pas fans succĂšs ; les TĂȘtards fĂ©condĂ©s dans l’eau chaude commencĂšrent Ă  se dĂ©velopper dix heures avant ceux qui avoient Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s dans l’eau froide , phĂ©nomĂšne que je ne saurois attribuer qu'Ă  la plus grande Ă©nergie, & par consĂ©quent au plus fort stimulus de la semence augmentĂ© par la chaleur. 102 . ExpĂ©riences DixiĂšme RĂ©flexion. C L X. Cette force stimulante, propre Ă  animer l’embryon , se conserve quoique la liqueur sĂ©minale ait Ă©tĂ© tirĂ©e depuis quelque tems hors de ranimai, & mĂȘme lorsqu’on la laisse pure dans un vase , comme lorsqu’on la mĂȘle avec d’autres liqueurs, §. CXXXI, CXLV ; il est Ă©tonnant qu’une goutte de liqueur sĂ©minale , perdue dans une quantitĂ© immense d’eau, n’y soit pas privĂ©e de toute son Ă©nergie, §. CXLII, CXLIII. Mais la liqueur sĂ©minale des autres animaux conscrveroit-elle son action fĂ©condante comme celle de itos amphibies ? le dĂ©faut des faits nous permet la conjecture. Peut-ĂȘtre est-ce une exception de la nature limitĂ©e Ă  ce genre d’animaux, pour lesquels la fĂ©condation se fait hors du corps , & mĂȘme dans Peau il faut donc que leur liqueur sĂ©minale puisse supporter un mĂ©lange , auquel la liqueur sĂ©minale des animaux qui sont fĂ©condĂ©s au-dedans de leur corps, n’est pas exposĂ©e ; mais il pourroit bien arriver aussi que la semence des autres animaux pĂ»t ĂȘtre mĂȘlĂ©e impunĂ©ment avec l’eau. J’ai observĂ© dans mes Opuscules de Physique animale & vĂ©gĂ©tale , que la semence de rhomme 8t des quadrupĂšdes se conserve saine pendant plusieurs heures hors des vaisseaux naturels qui la contiennent. Je confirme cette vĂ©ritĂ© en montrant les petits vers spermatiqucs pleins de vie , nageant avec sur la GĂ©nĂ©ration. ro; vivacitĂ© , pourvu que la liqueur sĂ©minale ait un certain degrĂ© de chaleur. Mais fi la semence de l’homme 6t des animaux quadrupĂšdes conserve ses propriĂ©tĂ©s pendant quelque tems, quoiqu’elle soit tirĂ©e hors du corps de l'animal, pourquoi ne conserveroit - elle pas fa force stimulante , qui elĂŹ le principe de la fĂ©condation dans les animaux ? CHAPITRE V. La fĂ©condation ejl-elle un effet de la vapeur fpermatique ? Y auroit-il d'autres liqueurs propres Ă  fĂ©conder ? Tentatives pour avoir artificiellement des Mulets par le moyen de nos amphibies. FĂ©condation artificielle obtenue dans les Papillons du Ver ĂŹ foie ÂŁ r dans les Chiens. C L X I. On 1 a long-tems disputĂ© St l’on dispute toujours pour savoir si la partie visible & grossiĂšre de la semence sert Ă  la fĂ©condation de l’homme & des animaux, ou si une partie trĂšs-subtile, une vapeur qui s’en exhale, ĂŽĂ­ qu’on appelle aura fpermatica , suffit pour cette opĂ©ration on ne peut se dissimuler que les MĂ©decins 8C les Physiologistes , qui dĂ©fendent ce dernier parti, n’y soient plus engagĂ©s par une nĂ©cessitĂ© 204 E X P É n I E N CES apparente que par des raisons ou des expĂ©riences. Ils s’appuient fur les observations de quelques Anatomistes, qui ont trouvĂ© le vagin de quelques femmes enceintes fort Ă©troit, ou parfaitement fermĂ© ; ils s’arrĂȘtent Ă  d’autres observations qui font croire que la semence ne pĂ©nĂštre pas dans l’utĂ©rus. Ils rĂ©flĂ©chissent fur l’orifice des canaux des Ɠufs ou des tubes de Faliope , iĂŹ Ă©troit qu’un stilet trĂšs-fin ne peut y entrer , Sc qui peut Ă  peine donner passage Ă  l’air ; d’oĂč ils concluent que la liqueur sĂ©minale du mĂąle , lancĂ©e dans les organes de la gĂ©nĂ©ration des femelles , ne peut arriver aux ovaires oĂč sont logĂ©s les embryons ; mais qu’ils doivent ĂȘtre fĂ©condĂ©s par la partie de la semence qui s’en Ă©vapore, Sc qu’ils appellent aura spermatica alors ils croient que cette fĂ©condation doit s'opĂ©rer par cette vapeur, qui fe communique aux ovaires par les voies de la circulation , ou par l’ouverture de l’utĂ©rus Sc des tubes. MalgrĂ© ces raisons, plusieurs autres Auteurs embrassent l'opinion contraire, & croient que la fĂ©condation s’opĂšre au moyen de la partie grossiĂšre de la semence ; ils soupçonnent donc que l’entrĂ©e du vagin Sc des tubes est Ă©largi par la chaleur produite pendant la copulation , ils confirment ce soupçon par la semence trouvĂ©e dans l’utĂ©rus Sc arrivĂ©e jufqu’aux ovaires ; Sc ils ne comptent pour rien les observations qui apprennent que souvent l’utĂ©rus des femelles est fans liqueur sĂ©minale d’abord aprĂšs l’accouplemcnr, soit parce qu’ayant trop tardĂ© Ă  vilĂŹter l’utĂ©rus s v r la GĂ©nĂ©ration. Loz aprĂšs l’accouplement, la liqueur sĂ©minale en eiĂŹ sortie, soit parce que la quantitĂ© de cette liqueur, qui pĂ©nĂštre l'utĂ©rus, est si petite qu’elle Ă©chappe Ă  la vue de l’Observatetir. Ces raisons allĂ©guĂ©es pour 6c contre ne me parodient pas trancher la question ; car il n’est pas dĂ©montrĂ© que la vapeur Ă­permatique arrive feule aux ovaires, tout comme il ne paroĂźt pas nettement que, quoique la partie grossiĂšre de la semence arrive aux ovaires, la fĂ©condation soit son ouvrage, 8t non celui de la partie vaporeuse de la semence. II importoit donc afin de dĂ©cider le procĂšs d’employer un moyen convenable pour sĂ©parer la vapeur du corps de la semence , 6c de faire ensorte que les embryons en fussent plus ou moins enveloppĂ©s ; car alors s’ils naissent, ce fera une preuve Ă©vidente que la vapeur sĂ©minale a pu les fĂ©conder ; ou bien ils ne naĂźtront pas, 6c alors il fera Ă©galement sĂ»r que la vapeur Ipermatique seule est insuffisante, 6c qu’il faut y joindre faction de la partie grossiĂšre de la semence. Cette maniĂšre de procĂ©der , qui me paroĂźt avoir Ă©tĂ© complettement ignorĂ©e , est celle que j'ai cru devoir employer. C L X I I. Le Lecteur se rappellera ce que j’ai dit pour faire voir que la liqueur sĂ©minale continue de fĂ©conder quoiqu’elle soit noyĂ©e dans une trĂšs- grande quantitĂ© d’eau. Une petite goutte d’eau de^ de ligne tirĂ©e d’un volume d’eau de dix-huit onces, dans lequel on avoit infusĂ© trois grains de semence , est trĂšs-propre Ă  fĂ©conder les ao 6 ExpĂ©riences TĂȘtards, §. CXLIV. Cette expĂ©rience scmbloit favorable Ă  l’opinion de la vapeur spermatique , qui n’est que la semence elle-mĂȘme extrĂȘmement attĂ©nuĂ©e ; mais les faits que je vais raconter dĂ©cident Ă©videmment le contraire. Pour baigner abondamment de cette vapeur spermatique les TĂȘtards, je mis dans un verre de montre un peu moins de onze grains de la liqueur sĂ©minale de plusieurs Crapauds terrestres puants. Dans un autre verre semblable , mais un peu plus petit, je plaçai vingt-lix TĂȘtards qui, par la viscositĂ© de la glu, s’attachĂšrent avec tĂ©nacitĂ© Ă  la partie concave du verre. Je plaçai le second verre sur le premier , Ôí ils restĂšrent ainsi unis pendant cinq heures dans ma chambre oĂč la chaleur Ă©toit de dix-huit degrĂ©s. La goutte de liqueur sĂ©minale Ă©toit prĂ©cisĂ©ment placĂ©e sous les TĂȘtards , qui durent ĂȘtre parfaitement baignĂ©s par la vapeur spermatique qui devoir s’élever ; d’autant plus que la distance des TĂȘtards Ă  la liqueur n’étoit tout au plus que dune ligne. Je visitai ces TĂȘtards au bout de cinq heures, 8Ă­ je les trouvai couverts d’un voile humide , qui mouilloit le doigt avec lequel on les touchoit, il n’étoit pourtant qu'une portion de la semence Ă©vaporĂ©e St diminuĂ©e d’un grain St demi. Les TĂȘtards avoient donc Ă©tĂ© baignĂ©s d’un grain St demi de vapeur spermatique ; car elle ne pouvoit pas s’étre Ă©chappĂ©e hors des crystaux , puisqu’ils s’emboĂ­toient bien tous les deux mais, malgrĂ© cela, les TĂȘtards mis d’abord dans l’eau y pĂ©rirent. su k la GĂ©nĂ©ration, 207 C L X I I I. Quoique l’expĂ©rience dĂ©truisĂźt les effets de la vapeur spermatique , cette expĂ©rience Ă©toit pourtant unique , auĂ­fi je voulus la rĂ©pĂ©ter. Un grain 8Ă­ demi de cette vapeur, en prenant l’exemple de la liqueur sĂ©minale, auroit pu fĂ©conder quelques milliers de TĂȘtards, Lc, par consĂ©quent, vingt-six; je cherchai Ă  en augmenter la dose , ÔC j’y rĂ©ussis avec les mĂȘmes moyens, en augmentant seulement la chaleur athmosphĂ©rique. Je mis donc onze grains de cette semence dans un verre de montre plus grand , & j’attachai, par le moyen de leur glu , vingt-six TĂȘtards Ă  la concavitĂ© d’un autre verre plus petit, en observant que la goutte Ă­permatique St les TĂȘtards correspondissent parfaitement, &. fussent tous les deux au milieu des verres ; je les plaçai l’un fur l’autre , comme dans l’expĂ©rience du paragraphe CLXII, 8c je les exposai au soleil sur une fenĂȘtre, en tempĂ©rant son action par une lame de verre interposĂ©e , qui empĂȘchoit que la chaleur n'excĂ©dĂąt z 5 ° Sc ne nuisĂźt Ă  la fĂ©condation, au cas quelle pĂ»t avoir lieu au bout de quatre heures les TĂȘtards Ă©toient tellement baignĂ©s de cette vapeur, qu’ils Ă©toient couverts de gouttelettes trĂšs-senĂ­ibles ; mais, malgrĂ© cela, ils n’en naquirent pas mieux. Je rĂ©pĂ©tai encore cette seconde expĂ©rience dans les mĂȘmes circonstances, non-seulement pour rĂ©assurer du rĂ©sultat, mais pour voir si le reste de cette semence, dont une partie avoit Ă©tĂ© rĂ©duite en vapeurs, avoit conservĂ© sa force 2c8 ExpĂ©riences fĂ©condante. La moitiĂ© de ces TĂȘtards, baignĂ©s par la vapeur fpermatique , pĂ©rirent dans l'eau oĂč je les mis mais l’autre moitiĂ©, que j’eus soin d’humecter avec le réíidu de la semence aprĂšs l’évaporation , rĂ©ussit bien ; tous les fĂȘtards naquirent 8t je tire deux consĂ©quences de ces faits ; l une que la vapeur fpermatique de la semence du Crapaud terrestre puant ne sauroit fĂ©conder ; l’autre que le reste de la semence , aprĂšs une Ă©vaporation trĂšs-senlible, a toute son Ă©nergie fĂ©condante. C L X I V. Ces deux consĂ©quences ont Ă©tĂ© bien confirmĂ©es par les expĂ©riences suivantes. J’ai dit dans la premiĂšre expĂ©rience , que l’espace interposĂ© entre la goutte fpermatique 8t les TĂȘtards Ă©toit d’une ligne , §. CLXII ; St j’avois mis le mĂȘme espace dans les expĂ©riences prĂ©cĂ©dentes. Je voulus encore diminuer cette distance , Si la rĂ©duire Ă  un tiers de ligne , afin que la vapeur fpermatique touchĂąt immĂ©diatement les TĂȘtards j’espĂ©roisqu’elle seroit, par ce moyen, plus Ă©nergique ; mais son activitĂ© St son Ă©nergie n’en furent pas alors moins nulles. On entend par vapeur fpermatique , cette vapeur qui s’exhale de la liqueur sĂ©minale , §. CLXII. Quelques Physiologistes ont cru que cette vapeur fĂ©conde Ă©toit formĂ©e par les particules odorantes de la semence; d’autrcs qu’elle Ă©toit formĂ©e par les parties les plus subtiles, St d’autres qu’elle Ă©toit enfin la partie spiritueuse qui s’en exhale mais, dans ces trois sens, la vapeur fpermatique n’en est pas moins inhabile s v r la GĂ©nĂ©ration. roy inhabile Ă  la fĂ©condation ; car on ne peut imaginer que Ă­i c'est une partie spiritueuse, qui a Ï’énergie fĂ©condante , elle ait pu s’échapper des verres de montre fans agir fur les TĂȘtards. Mais aĂ­ĂŹn d oter encore ce soupçon, je scellai les bords du verre de montre supĂ©rieur , dans la cavitĂ© du verre de montre infĂ©rieur, avec un ciment qui interceptoit toute communication de lm- tĂ©rieur des deux verres avec l’air extĂ©rieur ; je substituai mĂȘme au verre de montre supĂ©rieur un petit entonnoir, court, de verre, dont les bords furent cimentĂ©s Ă  la partie concave du verre infĂ©rieur, ÔC dont le sommet Ă©toit hermĂ©tiquement fermĂ© dans le col de l’entonnoir ; j’y attachai quelques TĂȘtards , ÔC je mis dans la concavitĂ© du verre de montre la goutte de semence, que j’avois Ă©tendue autant qu’il Ă©toit possible pour augmenter son Ă©vaporation la figure conique de l’entonnoir raslembloit en un point la partie Ă©vaporĂ©e , 8c ce point Ă©toit celui oĂč fe trouvoient les TĂȘtards. Je tins ce nouvel appareil exposĂ© pendant Ă­ix heures Ă  une chaleur de vingt-quatre degrĂ©s ; on voyoit au travers du verre les TĂȘtards baignĂ©s dans cette vapeur, fur-tout ceux qui Ă©toient au sommet de l’entonnoir ; mais ils n’en furent pas mieux fĂ©condĂ©s , ils pĂ©rirent tous cependant, avec le reste de cette semence , je fĂ©condai d’autres TĂȘtards, comme dans l’ex- pĂ©rience du paragraphe CLXIII. J’avois employĂ© la vapeur spermatique , produite dans des vases clos, mais je voulus voir ce qui arriveroit dans des vases ouverts, pour O 210 ExpĂ©riences prĂ©venir un scrupule produit par l’idĂ©e que le concours de l’air Ă©toit peut-ĂȘtre nĂ©cessaire Ă  la fĂ©condation ; mais la fĂ©condation ne fut pas mieux opĂ©rĂ©e que dans les expĂ©riences prĂ©cĂ©dentes. C L X V. La derniĂšre expĂ©rience de ce genre fut de recueillir quelques grains de vapeur sperma- tique, Sc d’y plonger pendant plusieurs minutes une douzaine de TĂȘtards} je touchai une autre douzaine de TĂȘtards avec le petit reste de semence qu’il y avoit eu aprĂšs {'Ă©vaporation, ÔC qui ne pefoit pas un demi-grain ; onze de ces TĂȘtards naquirent fort bien , ĂŽc aucun des douze , qui avoient Ă©tĂ© plongĂ©s dans la vapeur spermatique , ne vint au jour. La rĂ©union de ces faits, qui font si variĂ©s Sc si confonans, prouve donc Ă©videmment que la fĂ©condation du Crapaud terrestre puant n’est point produite par la vapeur spermatique , mais par la partie sensible de la semence. On prĂ©sumera bien que je n’ai pas fait ces expĂ©riences fur ce Crapaud seul, mais je les ai rĂ©pĂ©tĂ©es fur le Crapaud terrestre , Ă  yeux rouges Sc Ă  tubercules dorsaux, de mĂȘme que sur la Grenouille aquatique, telles que je les ai racontĂ©es, §. CLXII, CLXIII, CLXIV, CLXV, & j’ai eu les mĂȘmes rĂ©sultats que les prĂ©cĂ©dens je puis mĂȘme ajouter que , quoique je n aie fait que quelques-unes de ces expĂ©riences fur la Grenouille des arbres, j’ai remarquĂ© qu’elles harmonil'oient fort bien avec toutes les autres. 2i r sur la GĂ©nĂ©ration. C L X V I. Ayant trouvĂ© que le suc des testicules de nos amphibies est Ă©galement propre Ă  la fĂ©condation que la liqueur sĂ©minale , je voulus aussi faire des expĂ©riences fur fa vapeur ; Sc comme il avoir Ă©tĂ© pareillement fĂ©condant, quand il Ă©toit pur ou mĂȘlĂ© avec l’eau , je ressayai des deux maniĂšres , en suivant les procĂ©dĂ©s que j’ai dĂ©jĂ  dĂ©crit ; mais , quoique les TĂȘtards aient Ă©tĂ© baignĂ©s par cette vapeur , ils l'on t toujours Ă©tĂ© fans succĂšs de forte que j’ai conclu, que la vapeur spermatique du suc exprimĂ© des testicules n’étoit pas moins stĂ©rile que celle de la liqueur sĂ©minale. Je fis ces expĂ©riences pour la premiĂšre fois en 1777 , Sc je les communiquai Ă  M. Bonnet, comme on peut le voir dans les extraits de mes Lettres, insĂ©rĂ©s dans les importantes notes qu’il a ajoutĂ©es au troisiĂšme volume de la nouvelle Ă©dition de ses Oeuvres. J’ai rĂ©pĂ©tĂ© ces expĂ©riences en 1780 avec le mĂȘme succĂšs. II rĂ©sulte donc de tout ceci, que dans deux espĂšces de Crapauds Sc dans deux espĂšces de Grenouilles, la fĂ©condation ne s'opĂšre pas par la vapeur spermatique , mais par la partie grossiĂšre de la semence. Dirons nous cependant que c’est le procĂ©dĂ© universel de la Nature pour tous les animaux SĂ­ pour l’homme ? Le petit nombre de faits que nous avons ne mous permet pas, en bonne logique, de tirer une consĂ©quence si gĂ©nĂ©rale on petit tout au plus penser que les choses se pastent vraisemblablement ainsi , d’autant plus qu’il n’y a aucun O 2 z 1 2 ExpĂ©riences fait contraire , & le problcme sur l’influence de la vapeur'spermatique, pour la fĂ©condation, est au moins sĂ»rement dĂ©cidĂ© nĂ©gativement pour quelques espĂšces d’animaux , 8c avec une grande vraisemblance pour les autres. C L X V I I. J’ajouterai encore une rĂ©flexion on voit par ce que j’ai dit que la partie de la semence, propre Ă  la fĂ©condation , n’est pas une liqueur spiritueuse 8c volatile, qui perde ses qualitĂ©s quand elle est exposĂ©e Ă  l’air , Sc qui devienne alors un caput rnortuum , comme on l’ob serve, dans plusieurs liqueurs factices, qu’il faut scrupuleusement fermer j’ai tenu la liqueur sĂ©minale exposĂ©e Ă  l’air pendant des heures entiĂšres , Sc quoiqu’elle fut Ă©vaporĂ©e en grande partie , elle n’étoit pas stĂ©rile, ce rĂ©sidu mĂȘme Ă©toit aussi fĂ©condant que la semence elle-mĂȘme tirĂ©e de l’animal. On peut comparer ce fluide Ă  l’eau , tous les deux conservent, aprĂšs une longue Ă©vaporation , leur caractĂšre Sc leur propriĂ©tĂ©. Mais il y a cependant entr’eux une trĂšs-grande diffĂ©rence ; ÍÌ l’on rassemble la partie Ă©vaporĂ©e de l’eau , elle donne de l’eau semblable Ă  celle d’oĂč elle vient ; tandis que la vapeur de la liqueur sĂ©minale , quoiqu’elle reprenne la forme fluide , Sc ressemble d’abord Ă  la liqueur qui l’a produite , n’a cependant plus la propriĂ©tĂ© de fĂ©conder les TĂȘtards. Et 11 faut dire que ces parties, en se dĂ©tachant de la masse du fluide spermatique Sc sc sublimant , contractent quelques mauvaises qualitĂ©s, qui les rendent incapables d’irriter les sur la GĂ©nĂ©ration. zij petits cƓurs des TĂȘtards 8Ă­ de leur donner la vie cependant la petitesse de ?es parties ne nous permet pas de connoĂźtre comment se produit cette mauvaise qualitĂ© , St en quoi elle con lifte. C L X V I I I. Je dois examiner un autre problĂšme Ă©galement neuf Sc curieux il me fut proposĂ© par M. Bonnet , dans une de ses lettres oĂč il me parloir des fĂ©condations artificielles ; St, quoi- qu’il connĂ»t tout ce que l’idĂ©e avoir de bizarre, il voulut me la communiquer, afin que je la soumisse Ă  TexpĂ©rience. Je ne puis mieux faire connoĂźtre cette idĂ©e que par un extrait de la lettre qu il m’écrivit au 15 AoĂ»t 1778. Je ne » veux pas vous cacher une vision que j'ai eue » M. Senebier vous aura parlĂ© de la belle » expĂ©rience de M. Achard de Berlin. II a » cherchĂ© de substituer l’électricitĂ© Ă  la chaleur » des fours pour faire Ă©clore les Poulets ; il a » mĂȘme rĂ©ussi, au moins en partie. Si le fluĂŻde » Ă©lectrique peut dĂ©velopper le Poulet dans » l’Ɠuf, cela »c peut arriver qu’en accĂ©lĂ©rant » le cours des liquides , ou ce qui est la mĂȘme » chose , en augmentant l’irritabilitĂ© du cƓur. » Je crois avoir assez prouvĂ© que la liqueur sĂ©- minale fĂ©conde le germe en excitant d’abord » l’irritabilitĂ© du cƓur. Je voudrois donc que » vous essayassiez de substituer le fluide Ă©lec- » trique Ă  la liqueur sĂ©minale des Grenouilles » & des Crapauds pour fĂ©conder leurs Ɠufs. » Si vous rĂ©ussissiez dans une expĂ©rience aussi » nouvelle, cette fĂ©condation seroit plus arti- O 3 1Î4 E XPERIEXCES » ficielle que celles que vous avez si heurcu- » sement exĂ©cutĂ©es. Vous imaginez bien que je » ne fuis pas garant du succĂšs il n’y a pas ap- » parence que la liqueur sĂ©minale puisse ĂȘtre » remplacĂ©e par le fluide Ă©lectrique ; mais nous » avons dans le rĂšgne organique tant de choses » imprĂ©vues St neuves, qu’on ne sauroit ĂȘtre » trop rĂ©servĂ© lorsqu’il s’agit de prononcer fur » l’impossibilitĂ© d un essai quelconque , sur tout » lorsqu’il s’agit du sujet qui nous occupe. » Aurions-nous soupçonnĂ© les propriĂ©tĂ©s sur- » prenantes du Polype ? 8t aprĂšs la dĂ©couverte » du Polype , auroit-on soupçonnĂ© la reproduc- » lion de la tĂȘte des Limaçons ». C’est ce que m’écrivit le profond Contemplateur de la Nature ; mais diffĂ©rentes occupations d’un autre genre tn’empĂȘchĂšrent d’abord de suivre ces observations commencĂ©es fur les fĂ©condations artificielles , St de faire cette expĂ©rience singuliĂšre qui me fut proposĂ©e. Je ne fis celle-ci qu’avec trĂšs-peu d’espĂ©rance de rĂ©ussir , non-seulement Ă  cause des raisons allĂ©guĂ©es par mon cĂ©lĂšbre ami, mais encor^ Ă  cause de la grande disparitĂ© qu’il y avoir entre les Ɠufs de M. Achard , qui avoient Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s avant d’ĂȘtre Ă©lectrisĂ©s , St les TĂȘtards des Crapauds St des Grenouilles qui ne l’avoient pas Ă©tĂ©. Ayant donc mis fur le conducteur d’une machine Ă©lectrique un vase de mĂ©tal avec plusieurs TĂȘtards de ces deux amphibies je leur fis Ă©prouver les simples effets de l’électricitĂ© fans secousses St fans Ă©tincelles. J’électrisai ces TĂȘtards deux jours de fuite, St trois heures chaque Ăźur la GĂ©nĂ©ration. 215 jour ; mais ils pĂ©rirent tous. Je rĂ©pĂ©tai l'expĂ©- rience en prolongeant l’électricitĂ© durant quatre heures de chaque jour, 8c pendant trois jours ; mais je ne fus pas plus heureux, 8c je ne rĂ©ussis pas davantage en Ă©lectrifant de nouveaux TĂȘtards pendant trois heures durant deux jours LC demi. Au lieu de placer les TĂȘtards dans un petit vase de mĂ©tal fur le conducteur, je les attachai Ă  la pointe d’une verge de mĂ©tal qui en Ă­ĂČrtoit, parce que la vapeur Ă©lectrique eĂ­t alors plus condensĂ©e , & doit ĂȘtre par consĂ©quent plus Ă©nergique mais cette maniĂšre d’électriser, employĂ©e dix-neuf heures pendant deux jours, ne put les animer ; cependant, comme la saison Ă©toit chaude, les TĂȘtards donnoient des ignĂ©s de dĂ©veloppement dans l’espace de trois jours*. Pendant que j’électrisai des TĂȘtards non- fĂ©condĂ©s, j’en Ă©lectrilai aussi qui avoient Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s, pour voir la diffĂ©rence produite par l’électricitĂ©. Les TĂȘtards Ă©lectrisĂ©s naquirent plutĂŽt que les autres qui n'avoient pas Ă©prouvĂ© fessier de 'Ă©lectricitĂ© ; ce qui s'accorde fort bien avec ce qu’on a Ă©crit St dĂ©montrĂ© fur l’accĂ©lĂ©- ration de la vĂ©gĂ©tation produite par l’influence du fluide Ă©lectrique d’ je dois conclure, que /i l’électricitĂ© hĂąte le cours des fluides dans les TĂȘtards fĂ©condĂ©s , elle ne produit aucun effet fur ceux qui ne font pas Ă©tĂ©, parce que le choc occaĂ­ĂŹonnĂ© par ce fluide n’est ni assez doux ni assez convenable Ă  f Ă©tat des TĂȘtards dans ces premiers tnomens, ni semblable Ă  celui de la liqueur spermatique. O 4 ĂŽ ExpĂ©riences C L X I X. Avant que M. Bonnet m’eĂ»t communiquĂ© sespensees, c’est-Ă -dire , pendant que je faisois mes premiĂšres observations fur les fĂ©condations artificielles, je me flattai de dĂ©couvrir quelque liqueur qui pĂ»t remplacer la liqueur spermatique. En fĂ©condant des TĂȘtards du Crapaud terrestre Ă  yeux rouges & Ă  tubercules dorsaux , aprĂšs ' avoir Ă©prouvĂ© l’efict de la semence tirĂ©e des vĂ©sicules sĂ©minales d’un mĂąle, il me vint dans l’esprit de tenter l’aAivitĂ© de quelqu’autre fluide ou suc du mĂȘme animal. Je baignai pour cela plusieurs TĂȘtards, ies uns avec le sang, les autres avec le fiel ou le suc exprimĂ© de plusieurs viscĂšres, comme du cƓur, du foie &C du poumon. Je tins compte de ce jui se p alibi t ; j’avois mis chaque espĂšce de TĂȘtards , diffĂ©remment baignĂ©s, dans des vases sĂ©parĂ©s. Ceux qui avoient Ă©tĂ© touchĂ©s avec le sang 8t le suc tirĂ© du cƓur, naquirent. On sentira bientĂŽt quel fut mon Ă©tonnement Ă  cette vue ; mais on comprendra aussi que je n’adoptai pas cette expĂ©rience fans la rĂ©pĂ©ter. Je la refis avec un succĂšs contraire , il n’y eut aucun TĂȘtard qui se dĂ©veloppĂąt ; je rĂ©itĂ©rai plulieursfois l'expĂ©rĂŹence , mais jamais il n’y eut aucun TĂȘtard dĂ©veloppĂ© ; je conclus alors que le sang & le suc du cƓur n’avoient aucune Ă©nergie pour dĂ©velopper les TĂȘtards. Mais comment donc s'opĂ©ra la fĂ©condation de la premiĂšre expĂ©rience ce fut leste t d’une nĂ©gligence , dont je m’apperçus ensuite ; les TĂȘtards avoient Ă©tĂ© tirĂ©s de l’utĂ©rus de la Gre- sur la GĂ©nĂ©ration, iij nouille avec des pinces, dont je m’étois servi pour avoir quelques gouttes de liqueur sper- matique hors des véíicules sĂ©minales d’un mĂąle ; Sc comme j’ignorois alors l’énergie de la plus petite goutte de semence pour dĂ©velopper les TĂȘtards, je n’avois pas pris foin de les essuyer} de forte que , comme je touchois avec elles les TĂȘtards , ils furent fĂ©condĂ©s par ce seul attouchement, qui donna lieu Ă  leur naissance Sc cette explication est d’autant mieux fondĂ©e, qu’en tirant les TĂȘtards de l’utĂ©rus d’autres Grenouilles avec des pinces humectĂ©es de semence , SC nĂ©gligemment essuyĂ©es, je voyois toujours Ă©clore quelques TĂȘtards, tandis que jamais je n’en vis Ă©clore un entre plusieurs centaines , quand ils Ă©toient tirĂ©s de l’utĂ©rus avec des pinces bien essuyĂ©es , ou qui n’avoient pas servi Ă  toucher la liqueur sĂ©minale. Cet exemple fut une leçon qui me servit dans toutes mes expĂ©riences, Sc elle doit en servir Ă  tous ceux qui voudront les rĂ©pĂ©ter , ou en faire d’analogues. C L X X. AprĂšs avoir vu l’inutilitĂ© de ces sucs Sc de ces liqueurs pour fĂ©conder les TĂȘtards , je ne pensai pas d’en substituer d’autres Ă  la liqueur sĂ©minale -, seulement aprĂšs avoir vu 1’impuissance du fluide Ă©lectrique , que je soup- çonnois dĂ©jĂ  , je voulus essayer d’autres stimulons , parce que j’étois persuadĂ© que la fĂ©condation s’opĂ©roit dans le rĂšgne animal par l’ir- ritation que la liqueur sĂ©minale excite dans le cƓur des embryons. C’est dans ce but que iiS ExpĂ©riences je me servis du vinaigre & de l’esprit de vin , aftoiblis par seau Sc surine , en employant diffĂ©rentes doses de ces liqueurs ; mais au lieu de fĂ©conder les TĂȘtards par ce moyen, ils se gĂątĂšrent beaucoup plutĂŽt j’éprouvai les mĂȘmes effets en employant le jus de limon 8c de cĂ©drat, noyĂ©s dans seau. On sait que sĂ©corce du limon Sc du cĂ©drat renferme une vapeur spiritueuse Lc Ă­limulante , qui sort quand on les comprime , Sc qui s’enflamme quand on la fait jaillir vers la flamme d’une bougie ; je fis jaillir cette vapeur fur quelques TĂȘtards, de maniĂšre que leur mucilage en fut bien humectĂ© mais cette liqueur, comme les autres, fĂ»t Ă©galement impuissante pour la fĂ©condation. C L X X I. L’histoire ancienne Sc moderne du rĂšgne animal apprend que la liqueur sĂ©minale d’une espĂšce peut fĂ©conder les embryons d’une autre, en raison des ressemblances qu’il peut y avoir entre ces espĂšces , 8c que les individus qui en proviennent font appelĂ©s Mulets. Ainsi, dans les oiseaux, l’accouplement du Chardonneret Sc du Serin de Canarie , de mĂȘme que celui du Paon blanc avec le commun, Sc du Faisan avec la Poule , donnent naissance Ă  des animaux dissĂ©rens de leurs parens. Entre les quadrupĂšdes , les Mulets, provenans de l’Ane Sc de la Jument, ou du Cheval Sc de l’Anesse, font communs ; Sc M. Bourgelat ne laisse plus de doute fur la propagation rĂ©sultante de l’accouplement du Chien Sc du Loup , Sc mĂȘme, pour obtenir cette fĂ©condation, il n’est pas nĂ©- sur la GĂ©nĂ©ration, iiç cessaire que les espĂšces soient trĂšs-analogues. Les derniĂšres observations faites par un cĂ©lĂšbre Naturaliste françois ne laissent aucun doute sur la naissance des Jumarts, produits par l’accouple- ment de l’Ane Lc de la Vache , ou du Taureau avec l’Anesse & la Jument i , quoique M. DE Buffon Tait formellement niĂ©e 2. Ces expĂ©riences me faisoient espĂ©rer que j’aurois obtenu artificiellement des fĂ©condations semblables fur les embryons d’une espĂšce avec la liqueur fĂ©condante d’une autre. Dans mon Prodrome fur les Reproductions animales , je me proposois de rechercher quels seroienr les fruits de ces mariages illĂ©gitimes entre les animaux amphibies ou aquatiques qui. seroient les plus dissemblables , a fin d'Ă©claircir , par le moyen des Mulets qui en naĂźtroient, le mystĂšre de la gĂ©nĂ©ration. J’ai tentĂ© ces expĂ©riences, mais le succĂšs n’a pas Ă©tĂ© heureux. Je baignai plulĂŹeurs fois avec la liqueur sĂ©minale des Salamandres quelques embryons de Grenouilles & de Crapauds je fis la mĂȘme chose avec la liqueur sĂ©minale des Grenouilles SĂ­ des Crapauds fur les embryons des Salamandres, mais il n’y eut pas un seul des embryons qui se dĂ©veloppĂąt. J’avois, Ă  la vĂ©ritĂ©,.plus d’espĂ©rance de fĂ©conder quelques espĂšces plus voisines , comme celles des Crapauds & des Grenouilles, qui font non- 1 Collection complette des Oeuvres de Charles Bonnet , T. III. r Hist. nat. T. XIV. rzo ExpĂ©riences seulement amphibies, mais qui se ressemblent beaucoup dans les parties extĂ©rieures comme dans les intĂ©rieures , &Ă­ qui ont les mĂȘmes mƓurs , la mĂȘme maniĂšre d’agir Sl de se multiplier. Je choisis donc le Crapaud puant, qui se multiplie en mĂȘme tems que les Grenouilles; St avec la liqueur sĂ©minale du premier je baignai les TĂȘtards de la Grenouille verte aquatique St de la Grenouille des arbres , en mĂȘme tems je baignai avec la semence de ces deux Grenouilles les TĂȘtards du Crapaud puant je fis cette double expĂ©rience fur ces Grenouilles St les TĂȘtards de l’espcce du Crapaud dont j’ai parlĂ© dans le paragraphe CXXVI. Ces liqueurs sĂ©minales furent employĂ©es tantĂŽt pures 8t tantĂŽt mĂȘlĂ©es avec l’eau je voulus me servir, dans ce but, du suc des testicules ; mais, malgrĂ© les traits de ressemblance si multipliĂ©s , si sensibles , si Ă©videns qu’on observe entre ces diverses espĂšces , Tune ne put jamais fĂ©conder l’autre. Si ce genre d’expĂ©riences paroĂźt d’abord inutile pour les effets, il est cependant intĂ©ressant St instructif ; il nous apprend qu’on ne peut employer avec sĂ»retĂ© l’analogie dans ce qui regarde cette troisiĂšme espĂšce d’ĂȘtres animĂ©s. Ils paroissent provenir d’animaux qui se ressemblent fort entr’eux ; mais cette ressemblance n’est pas toujours une preuve sĂ»re de leur procrĂ©ation , comme on le voit dans nos amphibies. Dans cette branche de la physique, comme dans mille autres, on ne peut gĂ©nĂ©raliser ses idĂ©es; mais on est forcĂ© de passer d’une espĂšce Ă  l’autre, St de consulter sĂ©parĂ©ment les 211 sur la GĂ©nĂ©ration. oracles de la Nature pour savoir ses rĂ©ponses. Puisque ces mariages illĂ©gitimes font infĂ©conds, il faut nĂ©cessairement que la liqueur sĂ©minale qui doit fĂ©conder ne soit pas celle de l'espĂšce; il faut qu’elle en diffĂšre, St qu’elle ne puisse pĂ©- .nĂ©trer les embryons pour lesquels elle n’est pas faite ÔC donner le branle Ă  leurs mouvemens. Et comment pourroit-on connoĂźtre ces deux qualitĂ©s dans une semence relativement Ă  des embryons, fi ce n’est par l’cxpĂ©rience ? Au reste, comme si nos amphibies prĂ©voyoient rinutilitĂ© de leurs semences respectives, je n’en ai jamais vu aucuns accouplĂ©s les uns avec les autres, quoique pendant le tems de leurs amours je mis, par exemple, un mĂąle de Crapaud avec une femelle de son espĂšce Sc une Grenouille le mĂąle , sans faire attention Ă  la Grenouille, trouvoit bientĂŽt fa femelle ; Sc lorsque je les sĂ©parai dans leur accouplement , Sc que je plaçai le mĂąle dans un vase avec la Grenouille, aprĂšs en avoir ĂŽtĂ© la femelle du Crapaud , le mĂąle Crapaud ne s’approchoit pas de la Grenouille femelle , il cherchoit Ă  s’enfuir ; SĂ­ quand je les forçai Ă  rester plusieurs jours ensemble , jamais il n’y a eu aucune apparence d’accouplemcnt, quoique la Grenouille accouchĂąt de ses TĂȘtards, St quoique les mĂąles soient alors les plus ardens j’ai vu cette froideur du Crapaud puant pour la Grenouille des arbres Lc la Grenouille verte aquatique ; j’ai observĂ© la mĂȘme chose en mettant des mĂąles de ces deux espĂšces de Grenouilles avec des femelles du Crapaud puant. Je n’ignorois pas l’opinion nz ExpĂ©riences vulgaire de ceux qui croient que les Crapauds s’accouplent avec les Grenouilles , St que quelques personnes cessent de manger des derniĂšres pendant leurs amours mais je puis assurer que je n’ai jamais vu de pareilles unions dans la multitude immense de Crapauds St de Grenouilles que j’ai vues accouplĂ©es; St Roesel ne l’a pas mieux observĂ© en Allemagne que moi en Italie , aussi je rejette cette opinion , qui me paroĂ­t n’avoir d’autres fondemens que la crĂ©dulitĂ© SĂ­ une tradition populaire. C L X X I I. Je croyois avoir fini ce MĂ©moire, mais en relisant le paragraphe CLVIII, il me vint un fort defĂŹr de faire une nouvelle expĂ©rience. J’y invitois les Naturalistes Ă  essayer de fĂ©conder quelques-uns des animaux , soit vivipares, soit ovipares , dont la fĂ©condation s’opĂšre dans le corps c’étoit alors le mois de Juillet, j’étois dans le ModĂ©nois; St alors , comme dans plusieurs autres parties de l’Italie , c’étoit la saison des amours du Papillon du Vers-Ă -foie je voulus donc essayer lĂŹ, dans ce petit animal ailĂ© , je pouvois opĂ©rer les fĂ©condations qui m’avoient rĂ©ussi fur divers amphibies. Je con- noissois les mauvais succĂšs de Malpighi St de M. Bibiena , qui avoient voulu faire ces expĂ©riences ; cependant , comme cela ne me paroissoit pas impossible , je crus devoir le tenter encore. Les Ɠufs non-fĂ©condĂ©s du Papillon peuvent se recueillir de deux maniĂšres , ou en les rassemblant aussi-tĂŽt qu’ils sont pondus , ou en les retirant de la matrice elle- s v k la GĂ©nĂ©ra t i o n. ir; mĂȘme qui les renferme, pourvu que les femelles aient Ă©tĂ© scrupuleusement sĂ©parĂ©es des mĂąles ; la liqueur sĂ©minale se tire des parties de la gĂ©nĂ©ration. Ayant donc recueilli beaucoup d’Ɠufs non-fĂ©condĂ©s, par les deux moyens, je les touchai plusieurs fois avec la liqueur sĂ©minale, tantĂŽt en remployant abondamment, ĂŽc tantĂŽt en trcs-petite quantitĂ© ; mais je n'eus aucun succĂšs. Les femmes qui soignent les vers savent que les Ɠufs fĂ©condĂ©s de ces insectes font violets, ĂŽc que les autres restent jaunes ; les Ɠufs avoient cette couleur avant d’ĂȘtre baignĂ©s de la liqueur sĂ©minale , ÔC ils la conservĂšrent-aprĂšs ; ils perdirent leur rondeur , ils devinrent moux ÔC creux dans une extrĂ©mitĂ© , signes certains de leur stĂ©rilitĂ©. Je fis ces expĂ©riences fur cette espĂšce de Papillons de Vers-Ă -soie , dont les Ɠufs n’éclo- sent qu’au printems ; c etoit aussi l’espĂšce qui avoit Ă©tĂ© l’objet des expĂ©riences inutiles du Naturaliste Bolonois. Je voulus rĂ©pĂ©ter l’expĂ©rience fur une autre espĂšce de Papillons de Vers-Ă -soie , qu’on Ă©lĂšve en plusieurs villes de la Lombardie pour pouvoir avoir trois gĂ©nĂ©rations de ces Vers, pendant le tems qui s’écoule depuis le printems Ă  l’automne , ÔC par consĂ©quent, de leurs prĂ©cieux cocons leurs Ɠufs ne furent pas rĂ©fractaires Ă  mes efforts 6c Ă  mes foins, plusieurs de ceux que je baignai avec la liqueur sĂ©minale du mĂąle donnĂšrent naissance Ă  de petits Vers dans le tems marquĂ© ; ĂŽc je ne puis croire de mĂ©trĂ© trompĂ© , car aussutĂŽt que les 2*4 ExpĂ©riences Papillons naissoient, je plaçois d’abord les femelles fous une cloche de verre, dont je me fers avec la machine pneumatique , 8c j’en exclus les mĂąles, que la vue ou l’odeur des femelles attirĂšrent fur les bords extĂ©rieurs de la cloche , autour de laquelle ils ne cessoient de voltiger. Ce voiĂ­ĂŹnage des mĂąles auprĂšs des femelles me paroissoit nĂ©cessaire pour obtenir une quantitĂ© suffisante de liqueur sĂ©minale , St aussi-tĂŽt que les femelles prisonniĂšres commençoient Ă  pondre leurs Ɠufs , je les baignai avec la liqueur sĂ©minale du mĂąle. Ces Ɠufs d’abord jaunes commencĂšrent , aprĂšs quelques jours, Ă  bleuir 8c Ă  tirer fur le violet, 8e au bout dune semaine j’cn vis sortir les petits Vers ; tandis que les autres Ɠufs, qui n’avoient pas Ă©tĂ© baignĂ©s avec la liqueur sĂ©minale , restĂšrent jaunes , devinrent humides 8Ă­ pĂ©rirent j’ai eu, dans deux expĂ©riences diffĂ©rentes , cinquante-sept petits Vers Ă©clos des Ɠufs fĂ©condĂ©s artificiellement. C L X X I I I. Ce succĂšs m’en fit espĂ©rer d'autres ; les animaux ovipares pouvoient ĂȘtre fĂ©condĂ©s artificiellement ; j’avois rĂ©ussi Ă  fĂ©conder de cette maniĂšre quelques animaux vivipares, qui font fĂ©condĂ©s naturellement hors du corps de la femelle il me restoit donc Ă  chercher s’il Ă©toit possible de fĂ©conder artificiellement les animaux qui ne font fĂ©condĂ©s naturellement que dans le corps des femelles, 8c de chercher pour cela un animal qui fut grand, comme un Chat, un Mouton, un* Chien. Je m'occupai SUR LA G E H E R A T I 0 _ V. Ă­ 25 cupois depuis long-tems de cette idĂ©e , SĂ­ je ia fis connoĂźtre dans un article du Prospectus de l’EncyclopĂ©dic Italienne. FĂ©condation artificielle t. Dans cet article je proposois quelques vues pour fĂ©conder artificiellement les animaux SĂ­ les plantes , SĂ­ je m’exprimois ainli Ă  la fin. J’ai parlĂ© jufqu’ici des animaux » ovipares, n’y auroit-il point ds moyens pour » Ă©tendre ces fĂ©condations aux animaux vivi- » pares » ? Le Lecteur m’a compris. Dans le paragraphe CLVI 1 Í de cette dissertation , je fuis revenu fur ces idĂ©es, j’en iccommandois l’cxĂ©cution aux Naturalistes, je ne la croyois pas bien difficile aprĂšs mes succĂšs fur les Vers- Ă -foie , qui font fĂ©condĂ©s dans le sein de la femelle, St je rĂ©solus de ressayer fur une Chienne. La Chienne que je choilĂŹs Ă©toit de la race des Barbets , d’une grandeur moyenne 2 , elle avoir mis bas d’autres fois, SĂ­ je foup- çonnois qu’cllc ne tarderoit pas d’entrer en folie ; dĂšs-lors je renfermai dans une chambre , oĂč elle fut obligĂ©e de rester long teins, SĂ­ pour ĂȘtre sĂ»r des Ă©vĂ©nemens, je lui donnois moi-mĂȘme Ă  manger SĂ­ Ă  boire je tins seul la clef de la porte qui l’enfermoit ; au bout du treiziĂšme jour de cette clĂŽture , la Chienne donna des lignes Ă©videns qu’elle Ă©toit en chaleur , ce qui paroissoit par le gonflement des parties extĂ©rieures de la gĂ©nĂ©ration , SĂ­ par un 1 Sienne, 1770. 2 Canis aquaticus pi/o crifpo longo instar oris ; Likn. SyĂ­ĂŹ. nat. P n6 ExpĂ©riences Ă©coulement de sang qui en sortoit; au vingt- troisiĂšme jour , elle paroissoit deĂ­ĂŹrer ardemment l’accouplement ce fut alors que je tentai la fĂ©condation artificielle de cette maniĂšre. J’avois alors un jeune Chien de la mĂȘme espĂšce ; il me fournit, par une Ă©mission spontanĂ©e , dix-neuf grains de liqueur sĂ©minale , que j’injetĂŹtai sans dĂ©lai dans la matrice .de la Chienne , avec une petite seringue fort pointue , introduite dans l’utĂ©rus ; St , comme la chaleur naturelle de la liqueur sĂ©minale peut ĂȘtre une condition nĂ©cessaire au succĂšs de la fĂ©condation, j’eus la prĂ©caution de donner Ă  la seringue la chaleur de la liqueur sĂ©minale du Chien, qui est environ de 30 degrĂ©s du ThermomĂštre de Rhaumur. Deux jours aprĂšs cette injection, la Chienne cessa d’ĂȘtre en chaleur, St au bout de vingt jours, le ventre parut gonflĂ© ; aussi, au vingt-lĂŹxiĂšme jour, je lui rendis la libertĂ© le ventre grossissait toujours, St soixante-deux jours aprĂšs l’injection de la liqueur sĂ©minale, la Chienne mit bas trois petits fort vivaces, deux mĂąles S>t une femelle , qui, par leur forme St leur couleur , ressembloient non-seulement Ă  la mĂšre , mais aussi au mĂąle qui m’avoit fourni la liqueur sĂ©minale. Le succĂšs de cette expĂ©rience me fit un plaisir que je n’ai jamais Ă©prouvĂ© dans aucune de mes recherches philosophiques. C L X X I V. Je disois que dix-neuf grains de liqueur sĂ©minale furent injectĂ©s dans la matrice, mais ces dix-neuf grains n’y pĂ©nĂ©trĂšrent pas , Ă  peine sur la GĂ©nĂ©ration. ĂŻi-j y cn eut il treize , puifqu’il y en eut au moins Ă­ix qui restĂšrent adhĂ©rens aux parois de la seringue ; mais il n'en rĂ©sulte pas que ces treize grains furent employĂ©s Ă  la fĂ©condation. Puisque la fĂ©condation se fait dans les ovaires ; il faut que la liqueur qui y arrive ait passĂ© au travers des trompes, & il doit y en rester quelques portions qui s’attachent aux parois intĂ©rieures , de mĂȘme qu’à celles de la matrice il ne fallut donc qu’une quantitĂ© bien petite de cette liqueur sĂ©minale pour opĂ©rer cette fĂ©condation. Ce qtii confirme ce que mes expĂ©riences apprenoient , e’est que dans les grands , comme dans les petits animaux, il faut une trĂšs-petite quantitĂ© de semence pour en fĂ©conder les embryons. Cette consĂ©quence devient plus probable par les observations faites fur les oiseaux, car nous savons au’un coq fĂ©conde par un seul accouplement, tous les Ɠufs qu’une poule peut pondre dans vingt jours ; & comme il peut fustire Ă  douze ou quinze Poules, il pourroit chaque jour donner la vie Ă  trois cent Poulets 1 . Je finis par une courte rĂ©flexion ma derniĂšre dĂ©couverte me porte Ă  croire qu’on peut faire naĂźtre de grands animaux fans le concours des deux sexes, en se servaftt du moyen mĂ©canique que j’ai indiquĂ©, en profitant des circonstances favorables & en employant les prĂ©cautions qui semblent nĂ©cessaires au succĂšs de P x i Buffon , Hist. nat. ExpĂ©riences l’expĂ©rience. Je ne puis m’empĂȘcher de me livrer Ă  l’admiration que sollicitent les phĂ©nomĂšnes que je viens de dĂ©crire , ĂŽt j’aurai le plaisir de dire avec Pline Mihi intuente sape persua/it rerum Natura nihil incredibile exijli- mare de ea. js M* P fi5teivoViaQi \ ^ 4, 6Ç?;^iO^tojoĂŹ J V* rdlOtOHOĂ­OI *i zJt $ 17 R LA G^nIratioĂŹĂŻ 229' *- D E U X -* LETTRES É c RITES PAR M. B O N N E T D E GENE V E A U A U T E U R , Relatives aux deux prĂ©cĂ©dens MĂ©moires. A R G U M E N T. N t de mettre Ă  l’impression mes deux MĂ©moires fur la gĂ©nĂ©ration Sc la fĂ©condation artificielle de divers animaux, j'en avois envoyĂ© un indice analytique traduit en françois Ă  M. Charles Bonnet mon illustre ami, parce- que mes occupations ne m’avoienc pas permis d’en faire un extrait. La grande conciĂ­ĂŹon de cet Ă©crit donna lieu Ă  quelques consĂ©quences aussi utiles au public qu’à moi. Dans cet indice je me propofois seulement d’indiquer les chefs des matiĂšres, &Ă­ de faire naĂźtre le déíir d’en connoĂ­tre les dĂ©tails. Je crus que cela fatisferoit pour le moment mon ami, qui ne devoit pas ' P 3 r;o E X P É R Ăź E ĂŹĂŹ C t S tarder d’avoir l’ouvrage complet ; mais cette espĂ©rance fut trompeuse la lecture de l’indice fit souhaiter des dĂ©tails Ă  M. Bonnet ; il m’écrivit Ă  cette occasion une lettre obligeante, Ă  laquelle je rĂ©pondis dune maniĂšre qui me paroissoĂ­t propre Ă  le contenter , &c cette rĂ©ponse fut suivie d’une seconde lettre aussi hon- nĂȘtq que la premiĂšre ; c'est ce qui a donnĂ© lieu aux deux Lettres du Philosophe de GenĂšve , qui seront trĂšs-utiles a u public , non-seulement par leurs rapports immĂ©diats avec les MĂ©moires, mais encore par les rĂ©flexions , les vues 8c les mĂ©ditations philosophiques qui les remplissent, comme elles lui feront plaisir par l’élĂ©gance Ô£ les grĂąces du style qui caractĂ©risent toujours les ouvrages de leur auteur. La premiĂšre Lettre rapporte souvent les paragraphes dcl'Indice analytique, qui ne peuvent ĂȘtre entendus qu’avec des explications qu’ou trouvera dans les paragraphes numĂ©rotĂ©s de ces MĂ©moires , 8t qui font indiquĂ©s dans la Lettre ces explications feront mieux sentir le prix des raisonnemens Sc des rĂ©flexions de ce Naturaliste fur les articles qui cn font les objets. La seconde Lettre est par-tout trĂšs-claire par elle-mĂ©mo; elĂŹe est rĂ©lative aux explications que M. Bonnet m'avoir demandĂ© , j’y ai joint quelques notes pour Ă©claircir quelques endroits qui me paroissien! avoir besoin de quelques connoissances prĂ©liminaires. SUR LÀ GÉNÉRATION. Z 3 I LETTRE PREMIERE De M. Bonnet Ă  I’Auteur. A GenĂ­hod , le z$i de Novembre 1780. J'allois vous Ă©crire, mon chcr 5 c cĂ©lĂšbre Ami, lorsque j’ai reçu votre intĂ©ressante Lettre du 7 du courant, dont je vous fais mille remer- cĂźmens. II est vrai que ma santĂ© a Ă©tĂ© fort dĂ©rangĂ©e cette annĂ©e. J'ai eu pendant TĂ©tĂ© deux longues fiĂšvres catharalcs, entĂ©es Tune fur l’au- tre, qui m ont trĂšs fatiguĂ© , 6 qyi ont sur-tout fortement agi sur mes pauvres yeux. Les secousses fortes 8t frĂ©quentes de la toux y portoient le sang en trop grande abondance. Tout travail m’a Ă©tĂ© interdit pendant les mois de Juillet 7 d’AoĂ»t 8c partie de Septembre. J etois fort occupĂ© de mes nombreuses Notes fur la Contemplation quand ces maladies m’ont assailli ; ĂŽt j’en Ă©tois dĂ©jĂ  Ă  la Partie X. Je n'ai pu reprendre ce travail immĂ©diatement aprĂšs la disparition du catharre il exigeoit trop de recherches 8c d’ap- plication, 6c j’étois encore trop foible. Je me fuis donc mis Ă  revoir les divers MĂ©moires que j’ai publiĂ©s en diffĂ©rons tems, dans Je Journal de Physique de l’AbbĂ© Rozier. Cette rcviĂ­ion m’a donnĂ© lieu d’en composer de nouveaux fur les Abeilles, fur les Limaçons 6-C fur les Salamandres. lis doivent former le tome V de sĂ©dition P 4 -0 de ces moyens avec le fait dont on prĂ©sume l’exist tencc, Sc dont on voudroit Ă©tablir la certitude ? l.’Histoire de la PhyĂ­ĂŹque Sc en particulier celle de la Physiologie me fourniroient une multitude de choses qui viendraient Ă  l’appui de cette rĂ©- Ă­lexion. Voyez combien d’inventions qui ont prodigieusement enrichi ces deux sciences, dont les anciens n'auraient Ă -peu-prĂšs rien ose espĂ©rer quand il les auraient entrevues? Auroient-ils soupçonnĂ© , paj exemple , qu’on fĂ©conderait un jour artificiellement les germes de divers animaux, St qu’on rĂ©ussirait Ă  faire dĂ©velopper le poulet dans l’ceuf fans le secours d’aucune chaleur animale ni d’aucun four. Et que dirai-je de ces admirables opĂ©rations de chirurgie, de ces miracles de l’art de guĂ©rir , qu’on a peine Ă  croire , lors mĂȘme qu’on les a fous les yeux? Nous sommes de bien mauvais juges de l’impossibilitĂ© en Physique c’est que nous jugeons toujours d’aprĂšs nos idĂ©es acquises, Sc que le fond de ces idĂ©es n’a aucune proportion avec la Nature. La Nature est immense , les combinaisons possibles des ĂȘtres font presqu’infinies, & notre entendement est presque toujours trop lĂ©ger dans ses dĂ©cisions. Le sentiment de notre ignorance ou de notre mĂ©diocritĂ© devrait nous porter Ă  ne dĂ©sespĂ©rer de rien ĂŹz 6 ExpĂ©riences en Physique ; Lc on devroit se dire Ă  soi-mĂȘmej que ce qu’on ne peut dĂ©couvrir , un autre le dĂ©couvrira & le rendra visible Ă  tous les yeux. Mais c’est assez philosopher sur un sujet qui fourniroit seul un petit volume de rĂ©flexions pratiques il faut, mon cher Malpighi , que je me rapproche de I’intĂ©ressant Tableau de l'ouvrage que vous allez publier. Je me laisserai guider, comme je vous l’ai dit, par vos numĂ©ros. II. 13. Je trouve ici que vous avez imaginĂ© une expĂ©rience curieuse pour empĂȘcher la fĂ©condation dans la Grenouille verte aquatique. Vous n’inĂĄiquez pas cette expĂ©rience, 8Ă­ elle pique ma curiositĂ©. Je me prĂ©vaux donc de l’ossre amicale que vous me faites de satisfaire aux principales questions que la lecture de votre Tableau me fera naĂźtre. Vous ĂȘtes bien sĂ»r que je m’em- presserai Ă  faire usage de vos rĂ©ponses. Vous ferez l’Oracle que je consulterai, & je sais que je puis compter que ses rĂ©ponses seront plus claires 8c plus instructives que celles de l’Oracle de Del- est donc cette expĂ©rience,au moyen de laquelle vous ĂȘtes parvenu Ă  empĂȘcher la fĂ©condation dans votre Grenouille verte ? TrĂšs- probablement cette expĂ©rience vous aura valu de nouvelles lumiĂšres fur le mystĂšre de la fĂ©condation 3 car rien n’est ici isolĂ©. III. 16. Je ne dĂ©mĂȘle pas ici le sens de vos expressions ; que la fĂ©condation des Ɠufs , opĂ©rĂ©e hors du corps de la mĂšre , pĂ©nĂ©trĂ© tant soit peu au dedans d'elle. Seroit-ce que faction du sperme se propage Ă  faĂŹde de la liqueur gĂ©latineuse qui enveloppe les Ɠufs ? Mais je ne dois pas chercher Ă  vous deviner. suk la GĂ©nĂ©ration, rzy IV. 59. J’AIME Ă  savoir que vous avef trĂšs- lien vu la circulation Au sang dans les 1 Ă©tards , lors-mĂȘme qu ils ne se donnaient encore aucun mouvement. Ils’exĂ©cute, fans doute, biend’au- tres mouvemens intestins dans nos germes, avant qu’ils se soient assez dĂ©veloppĂ©s pour mouvoir leurs trĂšs-petits membres. Si les germes font renfermĂ©s originairement les uns dans les autres, s’ils croissent les uns par les autres, il a dĂ» s’y opĂ©rer une multitude de mouvemens intestins dĂšs les premiers temps de la crĂ©ation. Mais l’admirable spectacle de ces mouvemens organiques n’est fait que pour ces Intelligences supĂ©rieures, dont l’Ɠil perçant pĂ©nĂštre les ressorts les plus cachĂ©s de la machine de notre Monde. On a beaucoup parlĂ© de l’ emboĂźtement des germes ce mot est impropre les germes ne font pas de petites boĂźtes insĂ©rĂ©es les unes dans les autres ils Ă©toient des parties intĂ©grantes des premiers Touts organisĂ©s sortis immĂ©diatement des mains du CrĂ©ateur. J’ai insistĂ© lĂ - dessus dans une de mes nouvelles notes fur la Contemplation. II importe de fixer exactement le sens des termes. V. 75 , 76. Vous vous ĂȘtes donc convaincu, que les Ɠufs des Poissons Ă  Ă©cailles perdent la facultĂ© de produire lorsqu ils se dessĂšchent. Vous avez vu la mĂȘme chose dans les prĂ©tendus Ɠufs du TĂȘtard; 8c vous en concluez, quĂ© l’explica- tion qu’on avoir donnĂ©e du repeuplement des viviers dessĂ©chĂ©s est fausse. Je m’étois donc trompĂ©, Art. CCCXVIÎI des ConfĂŹdĂ©rationsfur les Corps organisĂ©s, lorsque j’avois imaginĂ© d’ap- r;8 EXPERIENCES pliqucr aux Ɠufs des poissons, ce que mon illustre ami, M. Trembley , avoit observĂ© sur ceux des polypes Ă  panache , qui, conservĂ©s au sec pendant plusieurs mois, ne perdent point leur facultĂ© prolifique. J’ajoutois nĂ©anmoins une invitation aux Naturalistes au sujet des Ɠufs des poissons ; je disois Ce seroit une expĂ©rience v curieuse Ă  tenter, que celle de garder au sec » les Ɠufs de diverses espĂšces de poissons, 8 t » de les rĂ©pandre ensuite dans des lieux conve- » nables St appropriĂ©s. On s’assureroit par ce » moyen trĂšs-simple, s’ils peuvent servir ainsi Ă  perpĂ©tuer l’espĂšce. La Nature n’a pas Ă©tĂ© » assujettie Ă  une prĂ©cision extrĂȘme il est dans » fa maniĂšre d’opĂ©rer, une certaine latitude » que le Physicien doit Ă©tudier, 8 t que l’expĂ©- » rience lui dĂ©couvre ». Vous avez donc rĂ©pondu Ă  mon invitation, St vos tentatives n’ont point Ă©tĂ© favorables Ă  ma conjecture. Comme vous ne m’indiquez pas la maniĂšre dont vous avez procĂ©dĂ©, je ne puis juger si elle exclut les cas naturels les plus communs dans les Ă©tangs 8Ă­ les viviers. 11 y a ici bien des petites circonstances qui peuvent faire varier beaucoup les rĂ©sultats. Vous devinez assez ce que j’ai dans l’cs- prit. Je n’en suis pas moins portĂ© Ă  croire Ă  la faussetĂ© de ma petite conjecture. VI. 80. Etrange maniĂšre dont le mĂąle de la Salamandre aquatique fĂ©conde la femelle sans s'accoupler avec elle. Jc n’ai jamais vu l’accouple- ment des Salamandres , St j’en fuis trĂšs-curieux. Veuillez donc me dire ce que cet accouplement offre d 'Ă©trange ! Mon cerveau est disposĂ© depuis sur la GĂ©nĂ©ration. 239 long-tems Ă  admettre les choses les plus Ă©tranges. II s’y est accoutumĂ© Ă  force de voir des prodiges. C’en font assurĂ©ment de trĂšs-grands, que les reproductions des membres de la Salamandre , qui m’ont tant occupĂ© depuis quelques annĂ©es, fit qui m’occupent encore. J’aurois vu apparemment l’accouplement de cet amphibie st j’avois renfermĂ© dans le mĂȘme vase des individus de l’un fit de l’autre sexe mais je n’a»ois pour but dans mes recherches que ces belles reproductions organiques, que je voulois contempler de mes propres yeux. Vil. 84, 85. Vous traitez dans ces articles de la fĂ©condation naturelle des Ɠufs de la Salamandre. Je l’ignore absolument, fit vous m’o- bligerez de m’en dire un mot. VIII. 96. Quelle est la prĂ©voyance des amphibies pour la multiplication de l'esp'ece. Rien n’intĂ©resse plus ma curiositĂ© dans l’étude des animaux, que leur prĂ©voyance. Ce n’est pas que nous ne nous abusions souvent surcette prĂ©voyance, fit que nous ne nous en formions des idĂ©es qui ne font point du tout philosophiques. Je l’ai assez dit dans la Contemplation fit ailleurs. Nous avons une merveilleuse facilitĂ© Ă  prĂȘter aux animaux notre propre prĂ©voyance fit jus- qu’à nos propres raisonnemens. Si les animaux pouvoient juger de nous, ils nous rabaisseroien* Ă  leur niveau ; car ils nous feroient sentir fit agir comme eux. On a donnĂ© sur cette matiĂšre dans des extrĂȘmes les plus opposĂ©s. J’ai cherchĂ© le milieu, St il me semble que je l’ai rencontrĂ©. Vous ĂȘtes bien en droit d’en juger. *40 ExpĂ©riences IX. 97 , 98 , 99. Je trouve encore ici quelque chose qui tient Ă  l’industrie des animaux, Sc je m’y arrĂȘte avec d’autant plus de plaisir qu’il y est question des amours du Crapaud , auxquels j’ai consacrĂ© un Chapitre dans la Contemplation. Vous recherchez dans ces articles ; pourquoiles mĂąles des Grenouilles & ceux des Crapauds tiennent leur femelle fi long-temps fj fi Ă©troitement embrassĂ©e. J’avois bien prĂ©sumĂ© que de si longs embrassemens avoient une fin secrette , mais je n’avois lĂ - dessus aucune observation qui pĂ»t m’é- clairer sur cette fin. J’attcnds de votre amitiĂ© i’instruction que je dĂ©sirĂ©. Je soupçonnerois que ces embrassemens tendent Ă  faciliter la descente des Ɠufs ou des TĂȘtards de l’ovaire dans les trompes, de celles-ci dans la matrice; 8 Ă­ encore peut-ĂȘtre, Ă  aidera l’cxpulĂ­ĂŹon des embryons. Vous me donnez par tout dans votre Tableau des Ă©nigmes Ă  deviner. Je hasarde mon mot sans espĂ©rer qu’il soit celui de la Nature. X. 101. ININTÉRESSANTE observation de M. Demours sur les amours du Crapaud, dont j’avois fait usage, vous auroit-elle donc offert qqelque rĂ©flexion critique? L’Observateur s’en seroit-il laissĂ© imposer? II Ă©toit pourtant bien placĂ©. XI. 105 , 106. Vous ne me paroissez pas ici disposĂ© Ă  adhĂ©rer Ă  ce qu’on a dĂ©bitĂ© sur la fĂ©condation des Ɠufs des poissons Ă  Ă©cailles. Vous parlez d'incertitudes fur quoi portent ces incertitudes? RĂ©voquez-vous en doute que le mĂąle rĂ©pande ses laites furies uvesĂŹ ou, rĂ©voquez-vous en doute qu’il frotte Ă  plusieurs reprises le ventre sur la GĂ©nĂ©ration. 141 trc de sa femelle ? ou les deux ensemble vous paroissent-ils Ă©galement incertains ? Je vous dirai bien que ma croyance fur ces deux points n’é- toit rien moins que ferme. Je ne trouvois nulle part des observations assez dĂ©cisives. On s’éton- ne quelquefois de voir les Naturalistes demeurer lĂŹjong-tems St Ă­i tranquillement dans le doute fur des points trĂšs-intĂ©relfiins, St n’essayer point de s’en tirer par des observations ou des expĂ©riences assez faciles. J.'esprit, de fa nature si actif, est pourtant quelquefois trĂšs-paresseux. Un petit procĂ©dĂ©, un petit appareil lui coĂ»te autant Ă  imaginer qu’un voyage Ă  faire. II n’y a qu’un Observateur tel que vous , qui est toujours en haleine, dont l’efprit ne soit jamais paresseux St combine toujours. Vous nous avez dĂ©couvert plus de vĂ©ritĂ©s en cinq ou six ans, que des AcadĂ©mies entiĂšres en un demi-siĂšcle. Et pourtant je n’en ai pas Ă©tĂ© le moins du monde surpris ; parce que je fais combien le champ oĂč vous moissonnez est riche, St que je con - nois le moissonneur. Quand, en 1765, vous me demandĂątes obligeamment Ă  quelles recherches d’Histoire naturelle je delĂŹrois que vous vous appliquassiez de prĂ©fĂ©rence ; je prĂ©vis facilement dĂšs-lors combien la science vousdevroit un jour. Votre premier Ă©crit fur les animalcules des infusions me confirma bientĂŽt mon espĂšce de prĂ©diction ; St vos intĂ©ressantes lettres siir les merveilleuses reproductions du Ver-dc-terre , du Limaçon Sc de la Salamandre en furent de nouvelles confirmations encore. J’ai contemplĂ© ainsi du fond de ma retraite avec un plaisir toujours Q ‱ 24r ExPÍRIEHCMS nouveau, les pas de gĂ©ant que vous n’avez celle de faire dans la belle carriĂšre oĂč vous Ă©tiez entrĂ©, 8t que vous continuez Ă  parcourir avec tant de distinction Sc de succĂšs. XII. io8. L’énoncĂ© de cet article m’apprend que la fĂ©condation des Salamandres diffĂšre de celle des autrestinimaux ; mais il ne m’apprend point en quoi gĂźt cette diffĂ©rence. Les modifications des grandes loix de la Nature font ce qui excite le plus l’attention du Naturaliste Philosophe. Elles le frappent damant plus,qu'elles mettent dans un plus grand jour l’immenfe fĂ©conditĂ© des voies du CrĂ©ateur, 8c. la variĂ©tĂ© prefqu’infinie des moyens subordonnĂ©s, par lesquels fa Sagesse prĂ©pare les premiers dĂ©veloppement des ĂȘtres vivans. L’économie de notre monde ne comportoit pas que toutes les gĂ©nĂ©rations y co-existassent ensemble dans leur Ă©tat de plein dĂ©veloppement. Notre globe n’auroit pu ni les contenir ni les nourrir toutes. Elles ont donc Ă©tĂ© renfermĂ©es les unes dans les autres, suivant une progression toujours dĂ©croissante, Sc qui va se perdre dans l’abĂźme de l'infinirnent petit. Les gĂ©nĂ©rations se dĂ©veloppent donc les unes par les autres, St leur accroissement se fait dans une proportion relative Ă  Tordre des dĂ©gradations. C’est ainsi que les gĂ©nĂ©rations fluent lentement dans une nuit impĂ©nĂ©trable, 8c qu’el- les arrivent enfin Ă  ce terme qui sĂ©pare Tinvisible du visible, Sc oĂč, Ă  Taide de la fĂ©condation, elles s’élĂšvent graduellement Ă  toute la perfection propre Ă  TespĂšce. Mais, parce que les ĂȘtres vivans ont Ă©tĂ© prodigieusement diversifiĂ©s, les su r la GĂ©nĂ©ration. 24$ Ă­oix qui prĂ©sident Ă  leurs dĂ©veloppemens ne l’ont pas Ă©tĂ© moins. De-lĂ  rĂ©sulte une foule de variĂ©tĂ©s dans les formes qu’ils revĂȘtent fucceTivement St dans la maniĂšre St les effets de la fĂ©condation. Le tableau de ces phases St de ces variĂ©tĂ©s constitue la partie le plus intĂ©ressante de l'Histoire de la gĂ©nĂ©ration. XIII. rr;, 124. Il fuit donc de vos nombreuses expĂ©riences Cur la fĂ©condation artificielle , qu’on ne sauroit l’opĂ©rer dans les germes logĂ©s encore dans l’ovaire , ni dans ceux qu’on tire de la partie supĂ©rieure des trompes. Je crois en dĂ©couvrir la raison. Le sperme agit ici comme stimulant. Or, il y a un certain rapport originel entre la force sectette, qui opĂšre l’irritabilitĂ© ou la contraction de la fibre musculaire, St letat - actuel de cette fibre. Si elle n’a pas pris encore le degrĂ© de consistance nĂ©cessaire , elle ne fera pas en rapport avec la maniĂšre d’agir de la force; -St l’iimpression de celle-ci fera nulle. II faut donc que le germe parvienne Ă  un degrĂ© dĂ©terminĂ© d’accroissement pour ĂȘtre susceptible d’ir- ritation. Le grand Haller raisonnoit ainsi. XIV. 128,129. Je trouve ici une particularitĂ© qui m'embarrasse vous dites ; que la fĂ©condation artificielle ne rĂ©ussit pas dans les Salamandres avec le sperme pur ; Cf qu il faut p le 13 de Janvier 1781. Je vois par votre intĂ©ressante rĂ©ponse, mon cher ÔC cĂ©lĂšbre ami, que nous nous Ă©tions rencontrĂ©s fur divers points cet accord me fait damant plus de plaisir- qu’il rue prouve que j'a vois bien raisonnĂ© sur plusieurs de vos expĂ©riences. Mais un pareil accord n’elt pas chose nouvelle entre vous 8c moi; car, combien de fois nous est-il arrivĂ© de converger ainsi fur divers points d’Histoire naturelle ! On diroit que mon ame passe quelquefois dans votre cerveau , Sc que la vĂŽtre passe dans le mien. Je vous dois beaucoup de remercĂźmens d’avoir interrompu la composition de votre Ouvrage sur la gĂ©nĂ©ration des Plantes , pour m’écrire cette longue Sc excellente lettre , Ă  laquelle vous m’appelez Ă  rĂ©pondre. Je fuis surpris que vous ayez pu la faire en deux jours je ne fuis pas Ă­ĂŹ favorisĂ© que vous Ă  cet Ă©gard *jc ne puis donner chaque jour que quelques heures Ă  la composition, Sc quand je vous Ă©cris des lettres de 18Ă  20 pages, vous pouvez compter que j’y ai employĂ© au moins une douzaine de jours. Je vais donc suspendre Ă  mon tour le travail dc mes Oeuvres pour rĂ©pondre aux principaux articles de votre lettre SUR LA GkNÊRATIÒH. Z. 57 du 1 z de DĂ©cembre. Je suivrai Tordre de vos numĂ©ros , ou plutĂŽt celui des numĂ©ros de ma derniĂšre lettre, que vous suivez vous-mĂȘme 8t auxquels vous rĂ©pondez. I.i Je ne doutois pas que les expĂ©riences que je vous proposois pour dĂ©couvrir le germe dans l'ovaire avant la fĂ©condation , ne vous fussent venues aussi Ă  l’esprit. Vous ne me parodiez pas en espĂ©rer beaucoup vous prĂ©sumez que la petitesse extrĂȘme du germe fit sa transparence le dĂ©roberont Ă  toutes vos recherches. Vous ne perdez pas courage nĂ©anmoins, fit vous voulez me laisser penser que mes exhortations contribueront Ă  vous animer fit Ă  vous soutenir dans cette recherche si difficile mais les grands succĂšs qui ont couronnĂ© vos tentatives en tant d’au- 1 Pour mieux entendre ce paragraphe, il faut connoĂźtre celui de ma lettre auquel il sert de rĂ©ponse. M. Bonnet , dans la lettre prĂ©cĂ©dente §. I, difoit qn’il Teroit trĂšs-avantageux pour la Physique de chercher les embryons dans les ovaires des quadrupĂšdes & des oiseaux avant leur accouplement, Lc il croyoit que je pourrois avoir quelques succĂšs dans cette recherche ; je lui rĂ©pondis L’idĂ©e de porter mes » recherches fur les ovaires des quadrupĂšdes des » oiseaux m’étoit venue dans l’esprit ; mais je n’ai pas » eu le loisir d’en faire usage. Le vif dĂ©sir que vous » avez pour que j’en fasse mon occupation est un grand v motif pour me presser Ă  l’entreprendrc quoique je » n’espĂšre pas beaucoup, je crains que i’extrĂȘme pe- » titesse du germe &c fa transparence ne m’empĂȘchent » de le discerner ; mais une feule probabilitĂ© de succĂšs » dans un sujet auiĂŹi intĂ©ressant doit suffire pour lc » tenter. - » J’ai eu occasion de relire quelques-uns des MĂ©- R 253 ExpĂ©rience* tres genres, sont assurĂ©ment bien plus propres que mes exhortations , Ă  vous faire espĂ©rer que vous travaillerez pas ici en vain. Un heureux hasard, une circonstance imprĂ©vue, un accident que vous n’aurez pas plus prĂ©vu , pourront vous rendre les plus grands services. Vous saurez vous mĂȘme faire naĂźtre de ces circonstances heureuses, qui ne sont pas dans la marche ordinaire de la Nature, qui produiront Ă  vos yeux surpris ce qu’elle avoir cachĂ© aux Malpighi 6c aux II me paroĂźt qu’il s’agiroit sur tout de trouver un moyen qui diminuĂąt la transparence d u germe sans i’aitĂ©rer ; car je crois que c’est plutĂŽt par fa transparence que par sa petitesse , qu’il se dĂ©robe aux regards les plus per- çans de l’Observateur. Une trcs-petite gouttelette » moires de l’illustre RĂ©aumur fur les insectes, Sc j’y » trouvois l’oblervation d’un Naturaliste Italien qui » m’a paru trĂšs-analogue Ă  celle fur la prĂ©existence » des fƓtus dans les femelles des Grenouilles Sc des » Crapauds. Dans le Tome III, Part. I, MĂ©m. VII, » RĂ©aumur, en parlant des Vers du petit ScarabĂ©e » des Lys aprĂšs M. Lorenzo Patarol , dir II semble Ă  M. P A tarot, qu'on ne peut pas dire que les Vers sortent des oeufs , qu il y a apparence que chaque oeuf devient un petit Ver. Ce qui l'a dĂ©terminĂ© Ă  proposer une idĂ©e fi singuliĂšre , mais avec une modeste dĂ©fiance ; c’est que , quelque recherche & quelqu'examen qu'il ait fait , il n'a pu parvenir Ă  trouver aucune coque vuide. » Voyez ce qu’en pense » le Pline françois il paroĂźt curieux de rĂ©pĂ©ter cette ,, observation ; mais il ne l’a pas faite. Je fuis rĂ©solu » dc la refaire au primeras prochain ; elle est intĂ©res- » saute , Sc RĂ©aumur n’en a pas connu l’impor- tance. sur la GĂ©nĂ©ration. 159 de vinaigre 011 d’esprit de vin, versĂ©e sur la c\ca- tricule de l’ceuf, en Ă©paississant un peu l'huirĂ ir qui baigne les solides du germe, pourroit peut- ĂȘtre les rendre perceptibles. Vous pourriez encore essayer d’autres liqueurs. 11 me vient encore Ă  l’esprit deux autres moyens. Le premier con- sisteroit Ă  essayer de rĂ©pandre fur le jaune une liqueur colorĂ©e par quelque teinture vĂ©gĂ©tale que savons-nous i les vaisseaux du jaune ne pom- peroient point cette teinture, ÔCnela feroient point passer jusqu’au germe & quand elle ne feroit que colorer les environs de celui-ci, elle feroit au moins reconnoĂźtre son lieu ou son point. II faudroit aider le jeu des vaisseaux par une chaleur douce. Le procĂ©dĂ© ingĂ©nieux dont M. Beguelin s’étoit servi pour montrera Ă­ba auguste ElĂšve, le Prince Royal de Prusse, les progrĂšs successifs du Poulet dans l’Ɠuf, ne vous feroit pas inutile dans vos tentatives. Qui fait encore, st une certaine chaleur ne contri- bueroit point Ă  faire apparoĂźtre le germe en coagulant un peu fa lymphe ? Un second moyen feroit de substituer aux liqueurs dont je viens de parler, le sperme du Coq ou celui de quel- qu’autre oiseau. Comme le sperme est incontestablement la liqueur qui a le plus d’instuence fur le germe, il semble qu’elle doive ĂȘtre la plus propre Ă  y occasionner quelque changement subit, qui le rendroit accessible Ă  nos verres. Ce feroit en mĂȘme temps un moyen d’essayer de fĂ©conder artificiellement le germe dans l’Ɠuf. La machine de M. Beguelin feroit fur-tout R 1 ExpÉRitxces appropriĂ©e Ă  cette expĂ©rience. Si la gouttelette dtJsperme faisoit auĂ­Ti-tĂŽt apparoĂźtre l’embryon, on ne pourroit pas objecter qu’elle l’auroit portĂ© dans la cicatricule comme l’on avoit imaginĂ© que la poussiĂšre des Ă©tamines portoit la plantule dans la graine ; parce que l’observation HallĂ©rienne 2>Ă­ les vĂŽtres fur la prĂ©existence du TĂȘtard Ă  la fĂ©condation, dĂ©truiroient assez l’objection. Enfin , il faudroit encore essayer d’observer la cicatricule des Ɠufs non fĂ©condĂ©s au microscope solaire, qui agrandit beaucoup plus que tout autre les objets qui ont une certaine transparence. Que vous dirai-je enfin? Vous ne chercherez pas dans la cicatricule ce qui n’y existe point ; car vous avez les plus fortes assurances que ce que vous y chercherez y est rĂ©ellement. Des expĂ©riences curieuses nous ont appris, que l’Ɠuf, malgrĂ© son enveloppe crustacĂ©e, transpire beaucoup. Cette transpiration produit divers changemens dans l’intĂ©rieur. Vous ĂȘtes donc invitĂ© Ă  observer la cicatricule dans des Ɠufs non fĂ©condĂ©s , ĂŽĂ­ conservĂ©s pendant un temps plus ou moins long. Peut-ĂȘtre mĂȘme qu’il ne seroit pas inutile de faire dessĂ©cher un peu la cicatricule fur une lame de verre pour observer ensuite au microscope. Le germe y perdroit plus ou moins de fa transparence par le rapprochement des Ă©lĂ©mens des solides. Vous ferez tres-bien, mon cher Malpighi , d’observer attentivement ces Ɠufs vrais ou prĂ©tendus du petit ScarabĂ©e des Lys. II paroĂźt assez par le passage de mon illustre MaĂźtre RĂ©aumur que vous me citez , qu’il avoit bien senti la nĂ©- s v r la GĂ©nĂ©ration. z6t ceĂ­lĂźtĂ© de rĂ©pĂ©ter l’observation de Patarol ; c’est dommage qu’il ne lait pas fait, ou que du moins il ne vous ait pas dit savoir fait, mais il nous est trĂšs-permis de douter que ce grand Naturaliste attachĂąt Ă  cette observation la mĂȘme importance que vous 8t moi. II n’avoit pas Ă©tĂ© appelĂ© Ă  mĂ©diter autant que nous fur le mystĂšre de la gĂ©nĂ©ration, 8t en particulier sur l’in- tĂ©ressante question de la prĂ©existence du germe Ă  la fĂ©condation. Vous pensez bien que je ne seroĂ­s pas le moins du monde surpris, Ă­ĂŹ vous m’appreniez un jour que les Ɠufs de notre joli petit ScarabĂ©e n’en font point, St qu’iis font le Ver lui-mĂȘmc dĂ©guisĂ© sous la forme d’un Ɠuf. Si cela Ă©toit, il en seroit de ces prĂ©tendus Ɠufs comme de ceux des Grenouilles, 2c ce seroit une nouvelle preuve Ă  ajouter Ă  celles que nous avons dĂ©ja de la prĂ©existence dont il s’agit. Vous con- noissez les Ɠufs de laReine-abeille j’ai toujours quelque soupçon qu’ils ne font pas de vrais Ɠufs, Sc qu’ils font peut-ĂȘtre le Ver lui-mĂȘmc fous une forme un peu diffĂ©rente de celle qu’il revĂȘtira aprĂšs la fĂ©condation. Mais les Mouches vivipares, dont M. de RĂ©aumur nous a donnĂ© la curieuse histoire dans le Tome IV de ses MĂ©moires , vous fourniroient sĂ»rement de nouvelles preuves directes de la prĂ©existence des embryons dans les femelles. C’est une belle chose que cette matiĂšre roulĂ©e en spirale, dont parle notre auteur > 8 dont les diffĂ©rons tours font formĂ©s par plus de vingt mille Vers, rangĂ©s parallĂšlement &Ă­ de leur long , les uns auprĂšs de$ autres. Ri i6Ă­ ExpĂ©riences II. Je sais grĂ© Ă  MM. de RĂ©aumur & Nol- let de ces petites culottes de taffetas cirĂ©, qu’ils avoient imaginĂ© de mettre au mĂąle d’une espĂšce de Grenouille pour tĂącher de dĂ©couvrir la maniĂšre dont il fĂ©conde sa femelle ; 6c je ne vous sais pas moins de grĂ© d’avoir rĂ©pĂ©tĂ© cette ingĂ©nieuse expĂ©rience. Le mĂąle auquel vous aviez donnĂ© de pareilles culottes , 6c qui s’étoit accouplĂ© avec fa femelle, ne parvint donc pas Ă  la seconder, parce que le sperme resta dans ses culottes. Et puisque cette mĂȘme liqueur res tĂ©e dans les culottes a fĂ©condĂ© artificiellement les TĂȘtards fur lesquels vous l’avez appliquĂ©e , il n’est pas douteux qu’elle ne fĂ»t un vĂ©ritable sperme. III. Vous pensez donc que le soupçon que je vous indiquois dans cet article, n’est pas destituĂ© de fondement. Rapprends dans cet article de votre lettre une nouvelle vĂ©ritĂ© ; c’est que dans la Grenouille des Arbres , les TĂȘtards se trouvent quelquefois fĂ©condĂ©s quoiquils sĂ©journent encore dans le rectum , soit Ă  cause du sperme qui fe giijfe dans l’orificc du rectum , soit parce que les TĂȘtards , Ă  peine sortis de l'anus & dĂ©ja arrosĂ©s du sperme , y rentrent peut-ĂȘtre par les mouvemens que la femelle se donne au moment que l'ObservatcurJasurprend. Ces deux explications me paroissent bien plus probables que la mienne. V. Il y a toujours beaucoup Ă  gagner pour moi quand, selon vos deĂ­irs, je vous indique des expĂ©riences nouvelles Ă  tenter. Vous avez donc fait fur les Ɠufs fĂ©condĂ©s des Poissons Ă  Ă©cailles, SUR LA G Ê N É I 0 H. celle que j’indiquois, art. CCCXVI1I des Corps organisĂ©s , pour s’assurer Ă­ĂŹ ces Ɠufs peuvent se conserver au'sec comme ceux des Polypes Ă  panache j 8t vous avez expĂ©rimentĂ© qu'ils na possĂšdent point cette prĂ©rogative. Les diffĂ©rentes maniĂšres dont vous avez procĂ©dĂ© ĂŽC que vous me dĂ©taillez, ne me permettent pas de douter de la vĂ©ritĂ© de votre rĂ©sultat. Vous avez Ă©tendu encore cette expĂ©rience aux embryons des Grenouilles Sc des Crapauds fĂ©condĂ©s, &C vous vous ĂȘtes assurĂ© ainsi, qu’sts ne-possĂšdent pas plus que les Ɠufs des poissons, la propriĂ©tĂ© de se conserver au sec. Ma petite hypothĂšse sur le repeuplement des Ă©tangs dessĂ©chĂ©s ne sau- roit donc se soutenir mais ce quiparoĂźt avoir Ă©tĂ© refusĂ© aux Ɠufs des poissons n’auroit-il point Ă©tĂ© accordĂ© aux poissons eux-mĂȘmes dans l’état d’enfance ou dans queiqu’autre pĂ©riode de leur vie ? Je fuis fort curieux de savoir la conjecture que vous substituez Ă  la mienne, St que vous exposerez dans votre Ouvrage. Je viens de relire l’article de votre lettre qui m’occupe actuellement ; St je fais attention Ă  une circonstance qui m’avoit Ă©chappĂ© vous dites ; que vous laiJJĂźej sĂ©cher Ă  l'ombre vas Ɠufs de poijfons , tantĂŽt fur la vase oĂč vous les avie ÂŁ pris ; tantĂŽt dans des vaisseaux. Je remarque ces mots sur la vase mais n’en seroit-il point des Ɠufs fĂ©condĂ©s des poissons , comme des Roti- fĂšres, qui demandent Ă  ĂȘtre enveloppĂ©s de fable pour se conserver au sec. J’ai peine Ă  supposer que vous ayez nĂ©gligĂ© d’envelopper vos Ɠufs de poissons dans la mĂȘme vase oĂč ilsavoient ctĂ© R 4 *64 ExpĂ©riences dĂ©posĂ©s , car je Lis trop que vous ne nĂ©gligez rien en matiĂšre d’expĂ©riences t . VI. Vous m’avez fort rĂ©galĂ© en me racontant la maniĂšre Ă­inguliĂšre dont le mĂąle de la Salamandre fĂ©conde fa femelle tout cela Ă©toit trĂšs-nouveau pour moi. Les Salamandres font donc bien chastes dans leurs amours. II n’y a point de vĂ©ritable accouplement entre les deux individus ; mais il y a de petites agaceries de la part du mĂąle , qui prĂ©parent la femelle pour la fĂ©condation. Le mĂąle darde son sperme dans l’eau ; il y for ce un petit nuage blanchĂątre, qui va envelopper fanas ouvert 8c renflĂ© de la femelle , Sc elle eĂ­t fĂ©condĂ©e. C’est grand dommage que les poĂštes n'aient pas connu les chastes amours de nos Salamandres ils en atiroient tirĂ© bon parti dans leurs ingĂ©nieuses fictions. Celle de ZĂ©phyre SĂ­ de Flore a bien du rapport avec la fĂ©condation des palmiers ; 8c je ne con- nois rien dans le rĂšgne animal qui ressemble plus Ă  cette fĂ©condation que celle de vos Salamandres. Celle des plantes marines s'en rapproche encore davantage le mĂąle ne darde pas une poussiĂšre fine , comme dans les plantes terrestres j mais il darde une liqueur qui forme i Le savant Genevois a une idĂ©e trop avantageuse de moi. Je n’ai point pensĂ© Ă  tenir les Ɠufs des poiflĂČns & Jes fƓtus de Grenouilles & de Crapauds enveloppĂ©s dans la vase, St je ne crois pas probable qu’ils s’y conservassent la chose est, il est vrai, dans les possibles ; &Ă­ il conviendra de rĂ©pĂ©ter cette expĂ©rience avec ses circonstances, comme je me propose de la faste. S17R LA GÉXÉRATI 01 T . 2 aussi dans l’eau un petit nuage. Votre citation du Diclionnaire de M. de Bomare , au mot Salamandre aquatique , m’a engagĂ© Ă  lire cet article , que je ne m’étois pas encore avisĂ© de consulter. J’y ai vu en effet que M. Demours pa- roĂźt avoir observĂ© les mĂȘmes particularitĂ©s que vous, touchant la maniĂšre linguliĂšre dont la femelle de cet amphibie est fĂ©condĂ©e ; mais les Naturalistes compteront plus encore fur votre observation que sur celle de JV1. Demours, qui demandoit d’aillcurs Ă  ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©e par un Observateur de votre ordre. J’ai fait attention dans le mĂȘme article, Ă  ce que rapporte le cĂ©lĂšbre DU Fay fur les ouĂŻes des Salamandres, qui n’apparoiffent au dehors que dans leur jeunesse, 5c qui disparoiffent ensuite pour ne plus repa- roĂźtre. Pavois moi-mĂȘme observĂ© ce fait avec surprise, mais je n’en avois rien dit dans mes MĂ©moires. Je voulois le revoir 5c je n’y fuis pas encore parvenu. Cest une charmante chose que ces ouĂŻes, ĂŽc elles parent bien agrĂ©ablement la jeune Salamandre. J’ai pris garde aussi Ă  ce que dit M. du Fay fur les mues de la Salamandre. II avoit trĂšs-bien vu la forte d’orga- nifation de lepiderme, dont j’ai parlĂ© dans mon premier MĂ©moire , SĂ­fij’avois connu le passage de cet AcadĂ©micien, je 11 ’aurois pas manquĂ© d’en faire mention. Puisque le sperme du mĂąle se mĂȘle toujours avec l’eau, je vois pourquoi la fĂ©condation artificielle ne rĂ©ussit pas avec le sperme pur il faut bien que l’Observareur imite ici la Nature 8Ç qu’il mĂȘle aussi le sperme avec l’eau. Je pense- 266 ExpĂ©riences rois, comme vous, que le sperme de la Salamandre, qui est fort Ă©pais, demande Ă  ĂȘtre dĂ©trempĂ© pour opĂ©rer la fĂ©condation naturelle 8c artificielle. La sage Nature sait austi dĂ©tremper le sperme humain par la lymphe que de nombreux vaisseaux versent dans les testicules & dans la vĂ©sicule sĂ©minale. Les Physiologistes nous disent lĂ -dessus des choses admirables. Au reste ; il est peu de spectacle aussi intĂ©ressant pour TObservateur Philosophe, que celui que prĂ©sentent les amours des animaux, Sc la diversitĂ© des moyens par lesquels I’Auteur de la Nature a voulu qu’ìls conservassent l’espĂš- ce. Si quelque habile Physiologiste entreprend un jour de composer une Histoire complette de la GĂ©nĂ©ration, il ne manquera pas, fans doute, de commencer par tracer le tableau des amours des animaux ĂŽt des plantes ; &. s’il est austi grand peintre que l’illustre Buffon , il saura intĂ©resser l’esprit sans Ă©mouvoir les sens il ne fera pas une VĂ©nus phyjĂŹque ^ mais il fera une Minerve physique. II y a lieu de penser que les diffĂ©rentes maniĂšres dont la fĂ©condation s’opĂšre chez diffĂ©rons animaux font en rapport avec le degrĂ© de sentiment accordĂ© Ă  chaqu’espĂšce, ou ce qui revient au mĂȘme , Ă  sa capacitĂ© de jouir. Quelle diffĂ©rence Ă  cet Ă©gard entre le poisson ou la Salamandre, Sc le Singe, le Cerf ou le Chien! Et combien le moral modifie-t-il ici le physique dans l’espĂšce impĂ©riale de l’homme ! VIII. Il est assurĂ©ment bien remarquable que les amphibies, tels que les Crapauds 8c la Grenouille des arbres , ne dĂ©posent jamais leurs SVR LÀ GĂ©nĂ©ratiow* 16y embryons fur terre , oĂč ils pĂ©riroient infailliblement ; 8t qu’ils aient toujours foin de les dĂ©poser dans l’eau, leur Ă©lĂ©ment naturel. Vous m’apprenez mĂȘme qu’ils ne les dĂ©posent pas dans la premiĂšre eau qu’ils rencontrent ; qu’ils ne les dĂ©posent jamais dans les eaux courantes , qui les entraĂźneraient SĂ­ ne leur fourniraient pas une nourriture convenable; mais qu’ils les dĂ©posent conltamment dans les eaux croupissantes, oĂč les petits TĂȘtards ne font exposĂ©s Ă  aucun choc, ti oĂč ils font toujours environnĂ©s des ali- mens qui leur conviennent. Cette forte d’instinct imite bien en effet la prĂ©voyance 8t atteint Ă©galement fa fin. Mais, puisque nous ne saurions admettre ici une vraie prĂ©voyance, qui n’ap- partient qu’à la raison ou Ă  l’intelligence , il s’agiroit de dĂ©couvrir comment nos amphibies font dĂ©terminĂ©s Ă­i sĂ»rement Ă  quitter la terre pour aller pondre dans les eaux dormantes. II faut, ce me semble, qu’une femelle de Crapaud ou de Grenouille, qui est pressĂ©e du besoin de pondre, Ă©prouve un certain sentiment intĂ©rieur , qui lui rend pĂ©nible le sĂ©jour sur terre, 8Ă­ lui fait deĂ­irer de gagner l’eau. Et comme les eaux croupissantes sont moins froides que les eaux courantes, c’est peut-ĂȘtre la raison pour laquelle l’amphibie prĂ©fĂšre les premiĂšres, non pour ses petits qu’il ne peut connoĂźtre & dont il na peut prĂ©voir les besoins, mais uniquement pour lui-mĂȘme car c’est ainsi que la Nature a pourvu p a r-tout aux besoins des petits ; elle a su enchaĂźner ces besoins Ă  ceux que les parens dĂ©voient Ă©prouver dans certaines circonstances. r68 ExpĂ©riences Votre mĂ©moire vous en retrace trop d’exem- ples pour qu’il soit nĂ©cessaire que je vous en indique. Je vois d’ailleurs que vous ĂȘtes entiĂ©? rement de mon avis fur cette prĂ©voyance 8c cette intelligence qu’on accorde li gratuitement & ft peu philosophiquement aux brutes. IX. Je ne savois pas que votre illustre Compatriote Vallisnieri eĂ»t eu la mĂȘme idĂ©e que moi fur l’effet de ces longs embrassemens du mĂąle des Crapauds & des Grenouilles. Je ne me rappelois pas non plus que Swammerdam eĂ»t pensĂ©, au contraire, que loin de faciliter le passage des Ɠufs dans les trompes, ces forts embrassemens dĂ©voient plutĂŽt l’empĂȘcher. Je n’aurois donc su quel parti prendre entre ces deux grandes autoritĂ©s, fĂŹ la Nature elle-mĂȘme n'avoir prononcĂ© par votre bouche. Vous rĂ©apprenez donc, que l’opinion de Swammerdam , que les femelles ne font embrassĂ©es par les mĂąles , que lorsque les Ɠufs ont dĂ©jĂ  traversĂ© les trompes, n’efl pas gĂ©nĂ©ralement vraie ; qu’elle n’a lieu que pour les Grenouilles des arbres, 8Ă­ point du tout pour les Grenouilles aquatiques & pour les Crapauds ; mais que Vallisnieri est bien fondĂ©, relativement Ă  la Grenouille verte aquatique. On ne fau roi t donc Ă©tablir ici aucune rĂšgle gĂ©nĂ©rale, comme vous le remarquez trĂšs-bien , 8t il faut attendre que de nouvelles recherches aient plus multipliĂ© les faits. X. M. Demours nous avoit fort intĂ©ressĂ© en nous parlant de l’adresse avec laquelle le Crapaud mĂąle fait aider fa femelle Ă  accoucher. Ses dĂ©tails Ă©toient Ă­ĂŹ fort circonstanciĂ©s, qu'il n SVK L A GÉSÉBATlOti!. 269 tssavoit pas paru qu’on pĂ»t douter de la vĂ©ritĂ© du fait, 8C je n’avois pas hĂ©sitĂ© Ă  en faiire usage dans la Contemplation. Mais il est, en effet, bien singulier, que ni vous, mon digne ami, ni Roesel n’ayez jamais surpris de Crapaud mĂąle dans cette intĂ©ressante fonction. Cela sem- bleroit infirmer un peu le rĂ©cit de l’ObĂ­crvateur François ; si toutefois des tĂ©moignages simplement nĂ©gatifs pouvoient infirmer le tĂ©moignage le plus affirmatif. M. Demours auroitdĂ», comme vous l’observez, dĂ©crire son Crapaud de maniĂšre Ă  en faire connoĂźtrc l’espĂšcc. XI. Vos doutes fur la maniĂšre dont s’opĂšre la fĂ©condation des poissons Ă  Ă©cailles, font d’une bonne logique , Sc nous avons tous deux raisonnĂ© lĂ -dessus en apprĂ©ciant comme nous le devions, les autoritĂ©s de part Sc d’autre. II se- roit possible que les poissons se rapprochassent beaucoup Ă  cet Ă©gard des Salamandres. Nous savons au moins par l’expĂ©rience de M. Jacobi , que la simple dispersion du sperme dans l’eau suffit Ă  fĂ©conder les Ɠufs. Votre idĂ©e de vous servir des jolis poissons dorĂ©s de la Chine pour Ă©claircir la question me paroĂźt excellente , Sc je ne puis trop vous presser de la rĂ©aliser. Vous verrez plus Sc beaucoup plus en un jour, que tout ce qu’ont vu ou plutĂŽt entrevu les divers Naturalistes qui vous ont prĂ©cĂ©dĂ©. Combien de questions intĂ©ressantes, qui pouvoient ĂȘtre dĂ©cidĂ©es par les observations ou les expĂ©riences les plus simples, Sc qui ne 1 ont point encore Ă©tĂ© ! C’est que l’Esprit est toujours plus portĂ© Ă  imaginer ou Ă  discourir, qu a observer ou expĂ©rimenter. 170 ExpĂ©riences Que de raisonnemens n’avoit-on pas fait fur la digestion avant que les RĂ©aumur & les Spal- lanzani eussent instituĂ© ces belles expĂ©riences qui ont mis cette matiĂšre dans le jour le plus lumineux ! XIIÍ. Vous embrassez donc, comme moi, la doctrine HallĂ©rienne au sujet des embryons logĂ©s encore dans l’ovaire ou dans la partie supĂ©rieure des trompes de nos amphibies, ÔC qui ne peuvent ĂȘtre fĂ©condĂ©s artificiellement. Mais vous m’assignez une autre cause du fait, que je ne soupçonnois pas, ÔC qui me paroi t, comme . Ă  vous, devoir concourir Ă  le produire dĂšs que la glaire est la premiĂšre nourriture des embryons fĂ©condĂ©s ÔC que cette glaire n’enveloppe point ceux que renferme l’ovaire ou la partie supĂ©rieure des trompes, il est bien manifeste que lors mcme que le sperme pourroit les fĂ©conder artificiellement, ils pĂ©riroient bientĂŽt, faute de nourriture. Les expĂ©riences que vous avez tentĂ©es Ă  ce sujet ne laissent rien Ă  desirer, puisque les embryons que vous avez dĂ©pouillĂ©s entiĂšrement de leur glaire n’ont jamais pu ĂȘtre fĂ©condĂ©s ; ĂŽC que ceux qui n’en Ă©toient privĂ©s qu’en partie Ă©toient presque tous fĂ©condĂ©s. Je ne sache pas que les Naturalistes qui vous avoient prĂ©cĂ©dĂ© eussent bien connu les vrais usages de cette glaire. XV. Le sang des amphibies , leur salive, les sucs extraits de leur foie, des poumons, des reins, leur urine ĂŽC la nĂŽtre font donc les diffĂ©rentes liqueurs auxquelles vous aviez imaginĂ© d’incorporer le sperme. Vous y avez joint sur la GĂ©nĂ©ration. 17r encore le vinaigre ; Sc tous ces mĂ©langes n’ont point enlevĂ© au sperme sa facultĂ© prolifique. Vous avez seulement remarquĂ© que lorsque surine St le vinaigre onr Ă©tĂ© trop surabondans, la fĂ©condation n’a pas eu lieu. Je ne doutois pas que vous ne pensassiez comme moi, que le sperme n'est point dĂ©composĂ© par ces mĂ©langes. Mais ils prouvent admirablement bien rĂ©sonnante Ă©nergie de cette liqueur fĂ©condante. Ils pourroient encore vous conduire Ă  dĂ©couvrir quelle est celle des liqueurs de ranimai qui a le plus de rapport avec son sperme ; car la liqueur qui, Ă  doses Ă©gales, dĂ©truiroit le moins de la vertu du sperme, seroit prĂ©sumĂ©e Ă  bon droit avoir le plus de rapport avec lui Sc ceci ne seroit pas inutile dans la recherche des principes constituans du sperme. XVI. J’aime fort Ă  savoir que nous avons recouru tous deux Ă  la mĂȘme comparaison pour rendre raison de la vertu prolifique du sperme incorporĂ© en trĂšs-petite quantitĂ© Ă  une trĂšs- grande masse d’eau. Votre exemple tirĂ© du venin de la Vipere, dont une gouttelette peut donner la mort Ă  un grand animal, n’est ni moins bien appropriĂ© ni moins instructif. Vous ĂȘtes bien fondĂ© Ă  dire aprĂšs cela, qu’il n’y a pas lieu de s’étonner qu’une trĂšs-petite gouttelette de sperme suffise Ă  animer le cƓur de l’embryon. fi.'extrĂȘme cĂ©lĂ©ritĂ© avec laquelle certains poisons, tel que celui de la VipĂšre, agissent fur les animaux , donneroit lieu de prĂ©sumer que Ă  st principalement sur le stuĂŻde nerveux qu'ils exercent leur action. Vous n’avez pas oubliĂ© les cu- ExpĂ©hĂźences rieuses expĂ©riences que M. de RĂ©aumur avoĂźf tentĂ©es avec les flĂšches empoisonnĂ©es des AmĂ©ricains. Un Ours piquĂ© par une de ces flĂšches mourut, je crois , en demi minute. XVII. Vous me dĂ©taillez ici la maniĂšre dont vous avez procĂ©dĂ© dans vos fĂ©condations artificielles , Ă  j’y applaudis fort. II est bien remarquable assurĂ©ment, qu’un embryon touchĂ© avec la pointe dĂ©liĂ©e dune aiguille, qui avoitĂ©tĂ© plongĂ©e dans un mĂ©lange de trois grains de sperme SĂ­ de dix-huit onces d’eau , 8c qui en avoit retenu une gouttelette d’un cinquantiĂšme de ligne , se soit dĂ©veloppĂ© aussi bien 8c aussi promtement que d’autres embryons qui avoient Ă©tĂ© plongĂ©s dans le rĂ©flexion Ă  ce sujet est trĂšs- juste. Puisqu’une Ă­i petite gouttelette de sperme mĂ©langĂ© avec une li grande quantitĂ© d’eau , suffit Ă  animer l’embryon , il est bien naturel d'en infĂ©rer que le surplus du sperme fourni par le mĂąle ne concourt point Ă  l’opĂ©ration. Mais la Nature n’use pas d’épargne quand il s’agit de la propagation des espĂšces elle ne veut pas manquer son coup ; Sc elle risquerait de le manquer par une trop grande Ă©conomie. Elle a peut-Ă©tre encore Ă©gard ici aux plaisirs de la jouissance , relativement au mĂąle ; car rĂ©mission est , fans doute, une voluptĂ© pour celui-ci; Lc cette bonne MĂšre veut que tous ses enfahs jouissent. II falloir d’ailĂ­eurs un aiguillon au mĂąle. XVIII. Vous imaginez bien, mon cher Philosophe , toute l’attention que j’ai donnĂ©e Ă  cet article si intĂ©ressant de votre lettre. Je croyois contempler avec vous ces petites ouvertures mĂ©nagĂ©es svr la GĂ©nĂ©ration. L 7 Z xiagĂ©es dans l’enveloppe de l’embryon pour l’in- troduction du sperme. Vos dĂ©tails fur ce point me prouvent au mieux que vous ne vous en ĂȘtes point laissĂ© imposer, 8t que ces petites bouches que j’avois soupçonnĂ©es, font la chose du monde la plus rĂ©elle. Et puisqu’ellcs font rĂ©pandues dans toute l’enveloppe, que cette enveloppe en est, pour ainsi dire, criblĂ©e, il n’y a plus lieu des’étontierqu’enquelqu’cndroitqu’on touche l’embryon avec l’aiguille spermatisĂ©e , la fĂ©condation rĂ©ussisse Ă©galement. II s'agit maintenant de savoir s’il est de pareilles ouvertures dans l’enveloppe des embryons de toutes les espĂšces & combien* cela devient-il probable aprĂšs tout ce qui a Ă©tĂ© dĂ©couvert fur le mystĂšre de la fĂ©condation ? Je ne doute donc point, 8C je n’en ai jamais doutĂ© , que si le germe du Poulet, de la Brebis, de la Vache, &c. Ă©toit aussi perceptible que le TĂȘtard, vous n’y dĂ©couvrissiez des pores'absorbans, semblables ou analogues Ă  ceux que vous avez dĂ©couverts dans l’embryon de vos amphibies. N’avons-nous pas, je le demande, les plus fortes preuves que la fĂ©condation s'opĂšre par dehors ; 8c si elle s’opĂšre par dehors , ne faut-il pas qu’il y ait dans l’en- veloppe du germe de petites ouvertures prĂ©parĂ©es pour l’introduction de la liqueur fĂ©condante? Ces pores absorbans & leurs dĂ©pendances renferment, fans doute, des particularitĂ©s anato- que nous admirerions s’il nous Ă©toit permis de descendre au fond de cet abĂźme. Chaque pore est probablement l’orifice d’un vaisseau qui communique avec le cƓur, &c. S i 7 4 E xMRiĂŻnn XIX. Me voici parvenu Ă  l’article le plus curieux Sc le plus important de votre excellente lettre. Je n’avois pas soupçonnĂ©, je Pavane, que vous eussiez dĂ©jĂ  rĂ©ussi Ă  fĂ©conder artificiellement avec une petite seringue la femelle d’un grand animal, comme je vous proposois de le faire dans ma derniĂšre. C’cst lĂ  une des plus grandes Sc des plus intĂ©ressantes nouveautĂ©s qui se soient offertes aux yeux des Naturalistes 8c des Philosophes depuis la crĂ©ation du monde. La maniĂšre dont vous avez procĂ©dĂ© , Sc les prĂ©cautions vraiment scrupuleuses que vous avez prises pour constater rigoureulement la vĂ©ritĂ© de cette fĂ©condation artificielle , la mettent au-dessus de toute contradiction. Je n’avois pas mĂŽme besoin de votre seconde lettre du 15 de DĂ©c. pour ĂȘtre trĂšs-sĂ»r que vous n’aviez rien nĂ©gligĂ© de tout ce qui Ă©toit nĂ©cessaire pour prĂ©venir jufqu’à la plus petite chicane. Votre Chienne avoir donc Ă©tĂ© bien clĂŽturĂ©e vingt-trois jours avant PopĂ©ration le treiziĂšme jour elle Ă©toit entrĂ©e en chaleur le vingt-troisiĂšme depuis la clĂŽture vous injectĂątes le sperme, Sc vous continuĂątes Ă  tenir votre Chienne renfermĂ©e sous la clef vingt- cinq jours, Sc le soixante deuxiĂšme aprĂšs Pinjection elle accoucha de trois petits bien conditionnĂ©s, bien vifs. Sc qui avoient des traits de ressemblance soit avec leur mĂšre, soit avec le Chien qui avoir fourni la liqueur fĂ©condante. Rien de plus prĂ©cis Sc de mieux constatĂ© que tout cela , Sc rien de plus beau ni de plus neuf que cette expĂ©rience. Je vous fĂ©licite de toute mon ame d’un tel succĂšs. Mais, ce qui ajoute beaucoup Ă  ce suc- sur la GĂ©nĂ©ration. 27$ cĂšs , c’est qu’il a Ă©tĂ© obtenu avec moins de treize grains de sperme. Cette expĂ©rience se rapproche donc beaucoup de celles que vous avez exĂ©cutĂ©es fur les amphibies ; Sc nous sommes trĂšs-fondĂ©s Ă  en infĂ©rer, que la dose de sperme qui opĂšre la fĂ©condation chez les grands animaux est trĂšs-petite. Je prĂ©sume mĂȘme , que st vous pouviez parvenir Ă  fĂ©conder les embryons d’un grand animal dans l’o vaire par le procĂ©dĂ© que je vous indĂ­quois, vous auriez les mĂȘmes rĂ©sultats ou Ă -peu-prĂšs que chez les amphibies, ÔC qu’une gouttelette de sperme, d’un cinquantiĂšme de ligne, sussiroit Ă  animer l’embryon. Vous possĂ©dez Ă  prĂ©sent un moyen bien sĂ»r Sc bien facile de vous assurer Ă­i telles ou telles espĂšces peuvent procrĂ©er ensemble ; Sc les expĂ©riences que vous vous proposez de tenter au printems prochain en mettant votre voluptueux Barbet dans la compagnie des Lapines Si des Chattes, ne vaudront pas celles que vous tenteriez en introduisant avec votre sperme de ce Barbet dans la matrice d’une Lapine ou d’une Chatte , Si en introduisant le sperme du Lapin ou du Chat dans la matrice de la Chienne. Vous tenez un fil prĂ©cieux, qui voifs conduira aux dĂ©couvertes les plus importantes Si les plus imprĂ©vues. Je ne fais mĂȘme , st ce que vous venez dc dĂ©couvrir n’aura pas quelque jour dansl’espĂšce humaine des applications auxquelles nous ne songeons point, Sc dont les suites ne seront pas lĂ©gĂšres. Vous pĂ©nĂ©trez assez ma pensĂ©e. Quoi qu’il en soit ; je tiens le S 2 276 ExpĂ©riences mystĂšre de la fĂ©condation pour Ă -peu-prĂšs dĂ©voilĂ©. Ce qui reste principalement Ă  dĂ©couvrir, c’est la formation du Mulet , ou ce qui produit les divers traits de reĂ­femblance des enfans Ă  leurs parens ; Sc ceci me conduit Ă  votre article XX. XX. Vous me faites bien de l’honneur, mon cĂ©lĂšbre ConfrĂšre, de suspendre votre jugement entre M. de HallerĂŽC moi fur la maniĂšre dont sc forme le Mulet. Comment l’autoritĂ© du grand Haller ne l’emporte-elle pas dans votre esi prit fur la mienne qui lui est si infĂ©rieure ? Je n’aurois pas hĂ©sitĂ© un instant d’admettre avec lui que le sperme n’agit ici que comme un simple stimulant, si j’avois pu ainsi me rendre raison Ă  moi-mĂȘme de l’espĂšce de conversion du Cheval en Mulet. Son hypothĂšse, plus simple que la mienne, est par cela mĂȘme plus agrĂ©able Ă  l’esc prit. Mais fatisfait-elle Ă  tous les cas ? Suffit-il de dire pour expliquer la formation du grand Mulet , que le sperme de l’Ane est un plus puisi sant stimulant que celui du Cheval ? Que c’est ainsi qu’il alonge avec excĂšs les oreilles de l’em- bryon cachĂ© dans l’ovaire de la Jument ; car pourquoi une partie de la queue de l’embryon demeure-t-elle oblitĂ©rĂ©e? Pourquoi fa croupe est-elle si avalĂ©e? Mais fur-tout, d’oĂŹi vient ce larynx si diffĂ©rent de celui du Cheval, 8t si ressemblant Ă  celui de l’Ane ? J’avoue que je ne conçois point encore, comment faction instanta- nĂ©e d’utie gouttelette de sperme, sur le cƓur de l’embryon , peut produire des effets si grands , si divers, li durables. Le concevez-vous mieux , mon bon ami, Li trouvez-vous que notre illus- Sl 7 R LA GtNÉRATIOX. zyj tre Physiologiste eĂ»t portĂ© dans cette recherche difficile la forte d’analyfe dont elle Ă©toit susceptible, 8c qu’elle exigeoit si indispensablement? Vous avez lu plus d’une fois les articles CCCX- XXIII, CCCXXXVI, CCCLVI des Corps organisĂ©s voyez encore lçs Notes additionnelles fur ces articles, 8c celles fur l’Art. CCCXLV, qui font aux pages 494 8c 496 du Tom. III de mes Oeuvres in-4 0 . Je fuis revenu bien des fois Ă  examiner avec la plus grande attention ces divers endroits de mon Livre ; il m’a Ă©tĂ© impossible de dĂ©couvrir les vices secrets qui peuvent s’ĂȘtre glissĂ©s dans mes raifonnemens. Toutes mes propositions m’ont toujours paru dĂ©couler bien naturellement les unes des autres, 8 tenir toutes au principe fondamental de la prĂ©existence du germe dans la femelle. Je ne prĂ©tends point, comme vous le voyez , qu’il n’y ait point Terreurs ou de mĂ©prises cachĂ©es dans ma longue analyse ; une si sotte prĂ©somption siĂ©roit bien mal Ă  un ĂȘtre aussi faillible que je le suis. Je dis seulement que je n’ai pu encore parvenir Ă  les reconnoĂźtre. D’un autre cĂŽtĂ© , j’ai contre moi la forte de complication de ma propre hypothĂšse , dont Fexposition a exigĂ© une assez longue suite de propositions, qui la fait paroĂźtre plus compliquĂ©e encore, 8c qui ne peut ĂȘtre saisie en entier, que par un Lecteur trĂšs-attentif 8c trĂšs-fami- liarisĂ© avec la marche analytique. Aussi plusieurs Lecteurs se sont-ils Ă©trangement mĂ©pris fur mes principes 8>C fur leur application. Une autre chose encore paroĂźt militer contre S 3 ij % ExpĂ©riences mon hypothĂšse ; c’est !a trĂšs-petite dose dc sperme, qui sufĂŻit Ă  la gĂ©nĂ©ration on ne comprend pas comment une gouttelette de sperme, si disproportionnĂ©e avec le corps entier de l’em- bryon, peut lui servir de premier aliment. Mais cette difficultĂ© tomberoit autant fur M. de Halle r que fur moi ; car il suppose manifestement, qu’un certain sperme agit avec plus de force qu’un autre fur certaines parties, 8t qu’il y occasionne ainsi un plus grand dĂ©veloppement ; que le sperme de l’Anc, par exemple, pouffe le sang avcc plus de force dans les artĂšres de l'o- reille ce sont ses propres termes. 11 admettoit donc que le sperme de l’Ane parvient aux artĂšres de l’oreille de l'embryon du Cheval ; autrement, comment la simple action de ce sperme , sur le cƓur de l’embryon, pourroit-elle faire sentir son impression aux oreilles St les faire dĂ©velopper avec excĂšs ? Pourquoi encore les oreilles seroĂŹent-elles les seules parties de la tĂȘte , qui se prolongeroient avec un tel excĂšs ; puisque toutes participent Ă  l’impulsiondu cƓur? D’ailleurs M. de Haller parie dĂ» pouvoir qu’a le sperme dc faire croĂźtre la barbe de Vindividu , de prolonger les dĂ©fenses du Sanglier & de l'FAĂ©phant ; St il ajoute, s'il a le pouvoir de faire germer certaines parties du corps plus que les autres , dans le corps meme qui le prĂ©pare , il peut l’avoir dans le corps du foetus qu il anime. Ceci n’indiqueroit-il pas, que notre Auteur suppo- soit tacitement une dispersion du sperme dans le corps de l’embryon? Je la suppose pareillement ; St vous n’avez pas plus de peine que moi i sur la GĂ©nĂ©ration. 279 Ă  concevoir la prodigieuse division dont une gouttelette de sperme peut ĂȘtre susceptible. Ce que nous savons de la divilibilitĂš de la matiĂšre lĂšve bien la difficultĂ©. Au reste ; nous avons fort Ă  regretter que notre habile Physiologiste s'en soit tenu ici Ă  de simples gĂ©nĂ©ralitĂ©s , Sc qu'il n’ait point appliquĂ© son hypothĂšse Ă  l'explication des principales particularitĂ©s qu’ossre le Mulet, n U est bien vrai, dit-il, que ma rĂ©ponse n’explique » pas le comment ni le mĂ©chanisme par lequel n le sperme du mĂąle rĂ©veille le germe de l’oreil- » le Sc en agrandit ie dĂ©veloppement. Mais je » ne dois pas ĂȘtre obligĂ© Ă  expliquer ce com- » ment, pourvu que mes faits soient avĂ©rĂ©s. » L’influence du sperme sur l’acuoissement de n la barbe Sc des cornes est dĂ©montrĂ©e, quoi- » que le comment en soit peut-ĂȘtre ignorĂ© pour » toujours.... II suffit de faire voir qu'il y a une » certaine force dans la semence du mĂąle , qui » dĂ©termina l’accroissement du fƓtus, de fa- » çon que certaines parties se dĂ©veloppent da- » vantage il ne se roi t pas plus juste de nous , demander par quel mĂ©chanisme cela se fait, » qu'il ne le seroit de nous demander pourquoi » la rĂ©forbtion de la semence du mĂąle lui fait » pousser la barbe ». Je me serois Ă©pargnĂ© bien du travail si j’avois fait prĂ©cisĂ©ment comme feu mon illustre ami, Sc si je m’étois bornĂ© Ă  rĂ©pĂ©ter aprĂšs lui, que la semence du mĂąle a une certaine force pour faire dĂ©velopper davantage certaines parties. Mais une explication si vague ne pouvant me satisfaire , j’ai tĂąchĂ© d’analyser les faits, Sc j’ai i8o ExpĂ©riences cherchĂ© par cette analyse quelque solution quĂŻ RappliquĂąt aux particularitĂ©s les plus essentielles de ces faits. En un mot ; j’ai cru que les traits fi marquĂ©s de ressemblance du Mulet avec l’Ane supposoient dans le sperme de celui-ci quelque chose de plus qu’un simple pouvoir stimulant. Vous paroĂźc-il que je me sois trompĂ© dans cette conclusion ; 8c scriez-vous portĂ© Ă  penser que le seul pouvoir sljrnulant peut suffire Ă  tout? Je ne saurois encore le prĂ©sumer j mais il est bien possible qu’on imagine une hypothĂšse plus satisfaisante que la mienne, ÂŁc que je serai le premier Ă  adopter. XXI. Vous avez fait sur le sperme de vos amphibies tout ce que vous pouviez faire pour tĂącher d’en dĂ©couvrir la vĂ©ritable nature. Iln’est donc ni visqueux , ni inflammable, ni acide, ni alkalin ; 8C pourtant quelle n’est point sa merveilleuse Ă©nergie ! 11 s’évapore comme i’eau ; St il est bien digne de remarque , que fa partie la plus volatile soit prĂ©cisĂ©ment celle qui est inhabile Ă  la fĂ©condation. Elle n’est apparemment qu’une lymphe ou plutĂŽt une simple sĂ©rositĂ© destinĂ©e Ă  prĂ©venir un trop grand ĂȘpaĂŹffissement de la partie fĂ©condante. II seroit intĂ©ressant d’éten- dre ces recherches aux spermes des grands animaux elles n’ont pas Ă©tĂ© poussĂ©es aussi loin qu’elles le demandoient. II ne seroit pas moins intĂ©ressant de savoir, si le sperme des grands animaux, incorporĂ© comme celui des amphibies , avec une grande quantitĂ© d’eau ou avec d’autres liqueurs , con serve roi t de mĂȘme son ,Ă©nergie. E'heureuse tentative que vous avez faite SUR LA GÉKÉRATIOH. 281 sur votre Chienne, indique la route qu’il fau- droit suivre pour s’en assurer. Le sperme a Ă©tĂ© ordonnĂ© dans un rapport secret Ă  la nature de la force qui opĂšre l’irritabilitĂ© dans l’animal, puisqu’il est destinĂ© Ă  accroĂźtre son action mais nous ne pĂ©nĂ©trons pas encore le mĂ©chanisme de l’irritabilitĂ©. Je n’oserois pourtant pas assurer qu’il n’y eĂ»t point dans la nature d’autre liqueur que le sperme , qui pĂ»t faire dĂ©velopper le germe animal. Qui fait Ă­ĂŹ la poussiĂšre des Ă©tamines de certaines plantes nepourroit point faire quel- qu’i m pression fur certains germes du rĂšgne animal ? Cette idĂ©e est folle f> vous le voulez ; mais je vous dis tout ce qui me passe par la tĂȘte. Je voudrois fur- tout qu’on essayĂąt la poussiĂšre des Ă©tamines de ĂŻEpine-vinette , dont l’odeur fĂ©tide Sc pĂ©nĂ©trante semble annoncer beaucoup d’énergie. Les animaux &C les vĂ©gĂ©taux ne composent qu’une mĂȘme famille, ĂŽc leurs analogies font en grand nombre. L’expĂ©rience inverse devroit donc aussi ĂȘtre tentĂ©e ; car ce ne sera qu’en multipliant presqu’à l’infini les combinaisons des ĂȘtres, que nos connoissances accroĂźtront. Je me dĂ©fie toujours un peu de nos conclusions gĂ©nĂ©rales , en apparence les mieux fondĂ©es ; parce que nos prĂ©misses font toujours plus ou moins particuliĂšres. J’ai achevĂ© , mon trĂšs-cher ami, de parcourir avec vous tous les articles de votre bonne lettre , Sc je souhaite que vous soyez satisfait des diffĂ©rentes rĂ©flexions qu’elle m’a fait naĂźtre. Dans celle que vous m’écriviez le 7 de Novemb. vous releviez deux erreurs qui setoientglissĂ©es r8r ExpĂ©riences dans l’extrait que j’avois donnĂ© de vos expĂ©riences fur la fĂ©condation artificielle, dans mes Notes additionnelles des Corps organisĂ©s l’une fur le suc des testicules ; l’autre fur la vapeur du sperme. J’avois oubliĂ© de toucher Ă  cela en vous rĂ©pondant. Vous aviez bien Ă©crit de la vapeur du sperme ; 8c c’est moi qui avois Ă©crit par inattention , du sperme. Ces deux fautes seront corrigĂ©es dans un errata qui fera imprimĂ© dans le Tome IV. Je ne puis douter que Vallisnieri ne fe fĂ»t trompĂ© fur les cellules du Pipa, J’aĂŹ fait une addition lĂ -dessus Ă  mon MĂ©moire fur ce Crapaud ; 8c cela est dĂ©ja imprimĂ©. J’AI commencĂ© cette longue Ă©pĂźtre le 29 de DĂ©cembre, Sc elle m’a occupĂ© jufqu’à aujourd’hui 10 de Janvier. Je ne pourrai plus faire de semblables interruptions Ă  mon travail fur la Contemplation. Mes Editeurs auroient trop Ă  fe plaindre de mes retards. Les murmures des Soufcrivans augmentent. Si vous m’envoyez quelque chose fur vos nouvelles expĂ©riences touchant la fĂ©condation des Plantes , 8c que cela ne tarde pas trop , je pourrai encore en faire usage Ă  la fin de la partie X. Recevez tous mes vƓux, mon cher 8c cĂ©lĂšbre Ami, 8c aimez-moi toujours comme je vous aime. u'R la GĂ©nĂ©ra t i e n. i8z ADDITION S D E M. L’ABBÉ SPALLANZANI, Faites Ă  son MĂ©moire fur la gĂ©nĂ©ration de quelques animaux amphibies. I. NĂ©cessitĂ© cii Veau pour la naissance des TĂȘtards i. AprĂŹs avoir fĂ©condĂ© les TĂȘtards, il faut les mettre dans l’cau ; ils ne naissent point Ă­ĂŹ on les met alors dans la terre ou dans le fable, mĂȘme quand on les meuroit ensuite dans l’eau» Si, d’abord aprĂšs la fĂ©condation , on met les TĂȘtards au sec dans l’air libre, lors mĂȘme qu’on les meuroit dans l’eau aprĂšs s’ĂȘtre un peu fĂ©chĂ©s, ils ne naissent pas. Lorsque les TĂȘtards font restĂ©s dans l’eau suffisamment pour commencer Ă  se dĂ©velopper .i Ii s’agit toujours ici des TĂȘtards de Grenouilles. r 84 ExpĂ­ri EXCES & Ă  croĂźtre, on peut les mettre au°sec quelquĂ© tems fans courir le risque de les voir pĂ©rir ; ils continuent mĂȘme Ă  croĂźtre, mais ils meurent bientĂŽt aprĂšs. I I. Fluides qui ne peuvent contribuer Ă  la naijsance des TĂȘtards. Les TĂȘtards fĂ©condĂ©s ont Ă©tĂ© mis dans le vin blanc ou rouge pur, ou trempĂ© d’eau , de mĂȘme que dans le lait pur, ou mĂȘlĂ© avec l’eau, dans le petit lait, dans le blanc d’Ɠuf de Poule , dans surine mĂȘlĂ©e avec l’eau , dans seau teinte avec un peu d’encre ; jamais il n’y a eu un seul TĂȘtard qui s’y soit dĂ©veloppĂ©. L’eau paroĂźt donc le seul fluide favorable Ă  leur dĂ©veloppement. I I I. Effets de diffĂ©rentes teintures fur les TĂȘtards. TĂȘtards, fous la forme d’Ɠufs, font toujours renfermĂ©s dans l’amnios , 8t ils s’y nourrissent alors de fa liqueur , qui est fournie par le mucus , appelĂ© improprement le sperme de Grenouilles. Mais ce mucus, pour passer dans l’amnios, traverser la membrane qui l’enveloppe & une autre extĂ©rieure qui lui est concentrique , enfin, pour sc rendre propre Ă  nourrir le TĂȘtard , doit se filtrer au travers det 'sur la Gsrr-ratĂŹ OĂŹt. r 8 z plusieurs petits vaisseaux qui le conduisent au TĂȘtard lui-mĂȘme ; mais la petitesse des vaisseaux Sc leur transparence empĂȘchent de les appercevoit pour tĂącher de les appercevoir, je plaçai les TĂȘtards fĂ©condĂ©s dans l’eau oĂč j’avois fait infuser tantĂŽt du safran , tantĂŽt de l’indigo , ou de la gomme-gutte , ou de la garance , ou de l’encre. Quelques-unes de ces teintures ont Ă©tĂ© fatales aux TĂȘtards avant de naĂźtre ; mais il n’en a pas Ă©tĂ© de mĂȘme pour toutes, plus d’unTĂȘtard a Ă©tĂ© lĂ©gĂšrement teint par quelques - unes de ces substances ce qui m’a donnĂ© quelque lumiĂšre fur la structure du mucus, ses rapports avec le TĂȘtard Sc les parties qui l’environnent, comme je le dirai ailleurs. I V. Effet du froid & de la chaleur sur les TĂȘtards. Dans le MĂ©moire fur les fĂ©condations artificielles , j’ai dit quelque chose de relatif Ă  cet article ; mais de nouvelles expĂ©riences , faites fur ce sujet , m’ont fourni d’autres rĂ©sultats. Si l'on met dans une glaciĂšre plusieurs Grenouilles accouplĂ©es, elles ne tardent pas Ă  se sĂ©parer Sc Ă  tomber dans une lĂ©thargie ; fi au bout d’un ou deux jours on les tire de-lĂ  pour les mettre dans un air chaud , quand elles font revenues de leur lĂ©thargie , elles s’accou- plent de nouveau. Si on les laisse dans la gl^- r 86 ExpĂ©riences ciĂšre pendant une dixaine de jours, qu’on les en retire pour les mettre dans l’eau , elles s’ac- couplent de nouveau ; mais l’accouplement est fans effet pour la gĂ©nĂ©ration. Ce n’est pas la faute dti mĂąle; car, quand on le tire de la glaciĂšre, ses vĂ©sicules sĂ©minales font Ă  la vĂ©ritĂ© Ă©puisĂ©es de semence, mais pendant l’accouplement elles se remplissent de nouveau de semence ; & j’aĂŹ pu m’assurer qu’elle Ă©toit fĂ©conde. 11 y a plus, quand on tire le mĂąle hors de la glaciĂšre , si l’on exprime le suc des testicules , on le trouve trĂšs-propre Ă  fĂ©conder les TĂȘtards Ăźe dĂ©faut vient donc des femelles ; les TĂȘtards sortent de l’utĂ©rus environnĂ©s d’un mucus dcjĂ  viciĂ© ; il n’a plus au moins cette demi-fluiditĂ© qui lui est propre , mais il est condensĂ©, &. il ye peut fournir Ă  l’amnios la liqueur qui doit nourrir le TĂȘtard. Si l’on met les TĂȘtards fĂ©condĂ©s dans une glaciĂšre , Li fl on les y laisse pendant quelques heures, ils naissent fort bien , quand on les tire de-lĂ  & qu’on les met dans l’eau ; mais s’ils y restent plusieurs jours, ils pĂ©rissent. Les TĂȘtards dĂ©jĂ  fĂ©condĂ©s, & qui commencent Ă  se dĂ©velopper, mis dans une glaciĂšre , cessent alors de se dĂ©velopper LĂź. pĂ©rissent. Les TĂȘtards naissent Ă  Pavie dans le mois de Mai , alors la chaleur de l’athmofphĂšre est entre les douze & dix-huit degrĂ©s du thermomĂštre de RĂ©AUMUR. J’ai voulu voir ce qui leur arriveroit en leur faisant Ă©prouver la chaleur de notre sang ; mais iis n’ont point fous- sur la GĂ©nĂ©ration. 187 sert de cette chaleur, 6Ă­ ils se sont dĂ©veloppĂ©s trĂšs-vĂźte. V. La fumĂ©e appliquĂ©e aux TĂȘtards. Je n’ai pas cru inutile de chercher ce qui arrive aux TĂȘtards exposĂ©s Ă  diverses fumĂ©es, que je rĂ©employois pourtant que lorsqu’elles croient refroidies. Telles furent la fumĂ©e du soufre , d’une chandelle , du drap brĂ»lĂ© ; mais alors il ne naquit aucun TĂȘtard. Je me servis encore de la fumĂ©e du papier brĂ»lĂ© 6c du tabac en feuille brĂ»lant; mais alors quelques TĂȘtards qui la recevoient naquirent fort bien. V I. Nouvelles preuves de ct que f ai dit fur V excessive ardeur des Crapauds mĂąles pour leurs femelles. Je trouvai un jour un Crapaud mĂąle dans l’eau demi-pourrie d’un vase , qui embrassoit amoureusement un autre mĂąle , mort depuis quelques jours &C Ă  demi-corrompu ; je ne pus pas l’en sĂ©parer , quoique je lui eulse coupĂ© les cuisses. Si l’on arrache un mĂąle Ă  fa femelle , 8c qu’on lui prĂ©sente alors un doigt, il le saisit subitement 6c le serre, 8c s’y attache de maniĂšre qu’on peut le transporter suspendu en i $8 ExpĂ©riences l’air d'vin lieu Ă  un autre sans qu’il se dĂ©tache ; 8t mĂȘme lorsqu’on lui coupe les cuisses, il ne lĂąche pas encore prise mais ils ne saisissent jamais ainsi les doigts que dans le tems de leurs amours. Je fis ainsi, par hasard , une observation qui n'a, je crois, jamais Ă©tĂ© faite j les bras St les mains des Grenouilles mĂąles, toutes choses d’ailleurs Ă©gales , m’ont paru plus gros St plus forts que ceux des femelles, St cela fans doute pour favoriser leurs era- brassemens. J’avois un jour plusieurs Grenouilles accouplĂ©es , je fis fur un mĂąle accouplĂ©, les expĂ©riences suivantes j’approchai la flamme d’une chandelle d’un de fes pieds, de maniĂšre qu’il commençoit Ă  brĂ»ler, il ne laissa pas fa femelle , quoiqu’il eĂ»t toute la jambe brĂ»lĂ©e je continuai Ă  le brĂ»ler jusqu a la cuisse, alors il se sĂ©para. Cependant le feu , en lui brĂ»lant la jambe , lui occaĂ­ĂŹonnoit des convulsions ; mais lorsque je lui brĂ»lai la cuisse , sa respiration se hĂąta beaucoup, 8t alors il abandonna fa femelle. Je replaçai ce mĂąle de Grenouille, si maltraitĂ© , dans l’eau avec fa femelle , mais peu aprĂšs il s’accoupla de nouveau avec elle ; je le tirai alors de nouveau hors de l’eau , mais il ne s’en sĂ©para pas j’appliquai le mĂȘme feu Ă  l’autre jambe St Ă  la cuisse ; mais la jambe avoit Ă©tĂ© toute consumĂ©e sans qu’il quittĂąt fa femelle ; St il ne l’abandonna que lorsque la cuisse commença de brĂ»ler. J’ai rĂ©pĂ©tĂ© cette expĂ©rience sur une autre Grenouille sur la GĂ©nĂ©ration. 2X9 Grenouille mĂąle accouplĂ© , cjui supporta le feu plus courageusement ; car je commençai Ă  lui brĂ»ler la partie infĂ©rieure de la jambe, puis la jambe , ensuite un peu de la cuisse il ne quitta pas fa femelle ; il supporta la mĂȘme opĂ©ration Ă  l’autre jambe ensuite je donnai le feu aux deux moignons ; il rĂ©sista pendant quelques momens , enfin il se sĂ©para en criant fortement. * * Je remis dans l’eau ces "deux Grenouilles mutilĂ©s avec leurs femelles , & je les trouvai le jour suivant accouplĂ©s de nouveau. Je fis de nouvelles expĂ©riences fur deux autres Grenouilles accouplĂ©s je leur coupai les cuisses entiĂšres, mais ils ne laissĂšrent pas leurs femelles ; j’appliquai la flamme fur leurs blessures saignantes, ils Ă©prouvĂšrent une forte convulsion fans se sĂ©parer de leurs femelles ; la sĂ©paration se fit seulement un peu aprĂšs. Je mis les deux Grenouilles sĂ©parĂ©s avec leurs femelles dans l’eau , 8c je les vis bientĂŽt s’accoupler; alors je coupai la tĂȘte Ă  tous quatre fans qu’ils se sĂ©parassent mais le lendemain je les trouvai tous quatre morts Ôí sĂ©parĂ©s de leurs quatre femelles. Pendant qu’ils Ă©toient ainĂ­i attachĂ©s 'Ă  leurs femelles , quelqu’un deux fĂ©conda les TĂȘtards qui sortoient de la femelle je trouvai dans l’eau d u vase un mucilage de TĂȘtards qui n’y Ă©toit pas , &C les TĂȘtards naquirent ensuite ; ce qui est une preuve Ă©vidente qu’ils avoient ctĂ© fĂ©condĂ©s. T S / 1 9 ExpĂ©riences V I I. Conditions nĂ©cessaires pour la naissance des TĂȘtards, J’ai fait voir que les TĂȘtards peuvent vivre dans l’eau , mise avec eux dans des vases hermĂ©tiquement fermĂ©s, poiĂźrvu que la capacitĂ© des vases soit telle qu’elle contienne un volume d’air considĂ©rable ; mais cet air n’est point nĂ©cessaire pour leur naissance , ils naissent fort bien dans un vase parfaitement plein d’eau §€ hermĂ©tiquement fermĂ© mais Une condition indispensablement nĂ©cessaire , c’est que le lieu oĂč l'on place les TĂȘtards soit suffisamment large ; il est indiffĂ©rent que les vases soient ouverts ou fermĂ©s. Voici les expĂ©riences qui me l’ont appris je pris un tube conique d’un verre, long de neuf pouces, fermĂ© hermĂ©tiquement au sommet , dont le diamĂštre Ă©toit de demi-pouce ; il Ă©toit ouvert Ă  la base, qui avoit un pouce St trois quarts je le remplis d’eau , & le tins placĂ© verticalement avec la base en bas ; je plaçai des TĂȘtards, fraĂźchement fĂ©condĂ©s, Ă  diffĂ©rentes hauteurs; les uns Ă©toient au sommet, St les autres successivement plus Ă©levĂ©s , quelques-uns arrivoient jusqu’au sommet du tube. En commençant par le sommet 8c arrivant jusqu'Ă  la hauteur de cinq pouces, il ne naquit aucun TĂȘtard ; ensuite il commença d’en naĂźtre quelques-uns, mais Ă  peine Ă©toient-ils dĂ©veloppĂ©s qu’ils pĂ©rissoient les s u r la GĂ©nĂ©ra t io s. 291 TĂȘtards qui naquirent St qui rĂ©ussirent commencĂšrent Ă  la hauteur de lĂŹx pouces 8t demi. On voyoit que lĂ  oĂč le tube Ă©toit Ă©troit, Ă  un certain degrĂ© , il ne nailToit aucun TĂȘtard. Pour m'assurer Ă­i la petitesse du diamĂštre du tube , ou la plus grande profondeur de l’eau , y con- tribuoient, j’ouvris le sommet du tube , je fermai hermĂ©tiquement sa base , je tournai le sommet en en-bas, St la base devint en en-haut ; je le remplis d’eau , St je plaçai les TĂȘtards fĂ©condĂ©s Ă  diverses hauteurs. Mais les TĂȘtards du fond , ou de la base jusqu’à une certaine hauteur du tube , naissoient ; tandis que ceux qui Ă©toient plus haut, St dans un lieu plus Ă©troit, ne naissoient pas. Ce n’est donc pas la profondeur de seau , mais la petitesse du diamĂštre du tube qui s’opposoit Ă ~la naissance des TĂȘtards. Cette consĂ©quencq est fortifiĂ©e par le fait suivant ; je remplis d’eau un vase cylindrique de verre , haut de seize pouces ; c’est-Ă -dire, qu’il avoit sept pouces de plus que le tube conique de l’expĂ©rience prĂ©cĂ©dente je plaçai des TĂȘtards fĂ©condĂ©s Ă  diffĂ©rentes hauteurs ; cn commençant depuis fa base St en s’élevant ainĂ­i peu-Ă -peu jusqu’à la cime , ils y naquirent tous je rĂ©pĂ©tai la mĂȘme expĂ©rience avec les mĂȘmes circonstances dans un vase cylindrique de verre, large de quatre pouces ; les TĂȘtards naquirent fort bien depuis la cime jusqu’au fond, mais non pas dans le mĂȘme nombre que dans le cas prĂ©cĂ©dent ; je remplaçai ce vase par un autre de la mĂȘme hauteur, mais qui avoit seulement un tiers de pouce de lsr- T 2 z$z ExpĂ©riences geur, il n’y en eut que cinq qui naquirent ; Sc l’on peut dire que ce fut hors de l’espace Ă©troit du vase , puisque ce fut Ă  son sommet, lĂ  oĂč ils communiquoient immĂ©diatement avee l’air. VIII. Follicules glanduleux , dĂ©couverts dans VintĂȘrieur des canaux des Ɠufs des Grenouilles. Les TĂȘtards n’ont point de mucus, quand ils ne font pas dans les ovaires, mais ils le prennent en traversant les canaux des Ɠufs. Quel est l’organe qui fournit ce mucus aux canaux des Ɠufs ? J’ai trouvĂ© que c’étoit un aggrĂ©gat de follicules glanduleux , dont les petites bouches s’ouvrent dans la cavitĂ© des canaux des Ɠufs, 8c s’étendent jufqu’au commencement de l’utĂ©rus. I X. Moyen employĂ© par les TĂȘtards pour rompre l'amnios Ăč venir Ă  la lumiĂšre. Les TĂȘtards forcĂ©s par leur longueur 8c par la petitesse de l’amnios Ă  s’y loger en demi-lune , paroissent alors s’y Ă©tendre fans cesse, & unir pour un moment la tĂȘte Ă  la queue , ils font cet exercice pendant pi labeurs heures ; pendant ce tems ils grossissent, ils fe tournent alors avec beaucoup de lenteur SVR LA GÊX É RATIO X. LYZ dans l’amnios , St ils frappent l’amnios avec leur tĂȘte , en continuant cependant les contorsions dont j’ai parlĂ© par la rĂ©pĂ©tition de ces chocs, l’amnios se rompt enfin, 8t alors le TĂȘtard fort par la porte qu’il s’est faite. II y a l’aiitre membrane extĂ©rieure concentrique Ă  celle de l’amnios, que le TĂȘtard rompt bien plus facilement que l’amnios le TĂȘtard fort encore de cette membrane , St quand il est Ă  moitiĂ© dehors il fe courbe avec vitesse, St en fe redressant, l’autre moitiĂ© du corps fort entiĂšrement ; le TĂȘtard ainsi sorti perd la forme d’une demi-lune , il entre dans l’eau , il s’alonge du double de ce qu’il Ă©toit. Pendant quelque teins il reste immobile , s’agitant de tems en tems, mais prenant bientĂŽt des forces il commence Ă  nager. X. PrĂ©existence des fƓtus de la Torpille Ă  la fĂ©condation i . La maniĂšre dont les Torpilles fe multiplient a Ă©tĂ© un des objets les plus intĂ©ressans de mes recherches. Dans ma Lettre Ă  M. le Marquis Lucchesini , j’ai montrĂ© que, quoique les Torpilles fussent vivipares, St accou- i Cette addition est imprimĂ©e dans la premiĂšre de mes lettres fur les observations que j’ai faites dans mon dernier voyage on les trouve dans le second volume des MĂ©moires di Matematica e di Fijlca dĂ©lia SocietĂ  Italiana. T z 294 ExpĂ©riences chassent de fƓtus, elles avoient cependant de» Ɠufs comme ies animaux ovipares mes nouvelles observations ont amplement confirmĂ© cette vĂ©ritĂ©. J’ajoutai qu’ayant trouvĂ© quelques fƓtus dans l’utĂ©rus d’une Torpille , ces fƓtus Ă©toient attachĂ©s par le cordon ombilical aux parois internes de l’utĂ©rus. Je m’apperçus que cette proposition avoir besoin d’ĂȘtre rectifiĂ©e. 11 est vrai qu un examen ultĂ©rieur m’a montrĂ©, dans quelques fƓtus, le lien de ce cordon Ă  l’utĂ©rus ; mais ce lien est accidentel, parce qu’il suinte de l’utĂ©rus une humeur visqueuse, qui lie l’extrĂȘmitĂ© du cordon opposĂ©e Ă  celle qui tient au fƓtus avec l’utĂ©rus lui-mĂȘme. Au reste , ce cordon ombilical est attachĂ© Ă  l’ceuf quand il descend de l’ovaire dans l’utĂ©rus , ou plutĂŽt il paroĂźt en ĂȘtre une vraie continuation y car cet Ɠuf me paroĂźt composĂ© d’une enveloppe extĂ©rieure membraneuse 8c d’un canal intĂ©rieur membraneux. T'enveloppe extĂ©rieure n’est qu’u- ne continuation de la membrane extĂ©rieure de l’Ɠuf, 8c le canal intĂ©rieur n’est de mĂȘme qu’une continuation de la membrane intĂ©rieure du mĂȘme Ɠuf. Le cordon, par l’autre extrĂ©mitĂ© , est prolongĂ© avec le fƓtus, l’enveioppe extĂ©rieure est une expansion ou une continuation de la peau , 8c le canal intĂ©rieur est une continuation de l'intestin ; ainli donc, l’Ɠuf 8c le fƓtus, par le moyen du cordon ombilical, font continuĂ©s entr’eux 8c ne forment qu’un tout. Mais suivant plusieurs observations que j’ai faites, les Ɠufs des Torpilles existent dĂ©jĂ  dans les ovaires long-tcms avant qu’ils soient fĂ©condĂ©s S V R LA GÉVÈ RATIO V. par le mĂąle ; lorsqu’ils tombent de l’ovaire dans l’utĂ©rus, ils font mĂ»rs, St ils ont la grosseur du jaune d’un Ɠuf de Poule on trouve dans ce tems d’autres Ɠufs trĂšs-petits attachĂ©s aux ovaires, destinĂ©s fans doute Ă  mĂ»rir St Ă  propager l’efpĂšce pendant TannĂ©e suivante ; mais ces Ɠufs si petits font, comme les autres , enveloppĂ©s d’une double membrane, qui forme un tout avec le fƓtus, dans les Ɠufs mĂ»ris St prĂȘts Ă  ĂȘtre fĂ©condĂ©s. Donc les fƓtus prĂ©existent Ă  la fĂ©condation des femelles dans ces animaux. Voici donc encore , dans cette dĂ©couverte , un nouvel argument en faveur de la prĂ©existence des germes. Haller avoir montrĂ© cette prĂ©existence dans les oiseaux. Je Tai fait voir dans divers amphibies, St Ă  prĂ©sent elle est Ă©vidente dans les Torpilles. II est bien Ă  prĂ©sumer que ce fait ne sera pas le seul, entre les poissons, qui manifestera cette lumineuse vĂ©ritĂ©. Dans le tems que quelques fƓtus paraissent dans l’utĂ©rus, comme je Tai dit , on en trouve d’autres qui, Ă©tant plus prĂȘts Ă  naĂźtre, ont consumĂ© toute la substance de l’Ɠuf, St on les trouve parmi ceux qui restent quelquefois attachĂ©s par hasard aux parois de TutĂ©rus. X I. Sur le Pipai de Surinam. Ayant eu derniĂšrement un de ces animaux, j’ai pu faire fur lui diverses observations nouvelles , dont je ferai usage dans un tMĂ©moire Ă­ĂŹir T 4 i elle occupe presque tout l’intĂ©rieur des graines, qui font beaucoup plus grandes. Trois ou qUatre jours aprĂšs on apperçoit les lobes enveloppĂ©s dans la liqueur transparente , on ne tarde pas Ă  dĂ©couvrir au- dedans une toile mucilagineuse attachĂ©e par un cĂŽte Ă  la plantule , 8c de l’autre la cavitĂ© intĂ©rieure de la graine. Ensuite , quand les SUR LA GÉSÊRATIOR. 3Ăźf> graines mĂ»rissent, les deux lobes ont grandi, ÔC ils prennent grossiĂšrement la figure d’une Poire avec son pĂ©dicule , par le moyen duquel ils s'attachent lĂ©gĂšrement Ă  la surface concave de la graine. Quand on en a tirĂ© les lobes , ÔC qu’on les examine avec foin, on apperçoit que ce pĂ©dicule ess une portion de la plantule ; alors au lieu des deux lobes qu’on trouve dans les autres plantes , celle-ci en a quatre qui s’unisi sent bĂ­ s’attachent avec la plantule ; ensorte qu’on peut dire qu’ils ne forment qu’un corps. I X. Cicer arietinum. Le P ois chiche , dans les fleurs de cette plante, le pistil reprĂ©sente en petit une Courge dont le ventre est la base du pistil; ou , comme nous l’appelons Yovaire ; li on l’ouvre dans fa longueur on trouve deux petites graines pointues 8Ă­ massives d’une couleur verte, douze ou quinze jours avant la fĂ©condation. Pendant que la fleur mĂ»rit l’ovaire se gonfle , & il se change en une bourse Ă  laquelle les petites graines font attachĂ©es. Cinq ou six jours aprĂšs la* fĂ©condation, les petites graines commencent Ă  montrer la cavitĂ© dont j’ai parlĂ©, fur un cĂŽtĂ© de laquelle on volt peu aprĂšs'les deux trĂšs-petits lobes attachĂ©s, qui offrent Ă  leur ouverture la plantule qu’ils renferment; elle est attachĂ©e par un filet mucilagineux aux graines ensuite toutes ces parties prennent dans l’en- veloppe des graines un dĂ©veloppement ultĂ©rieur. X. Ixia Chinenfis. Quandon ouvre longitudina- lement l’ovaire dans un bouton des plus petits , Zzk ExpĂ©rience* sa figure est celle d’un corps long, proĂ©minentĂ© dans le milieu ; on y trouve les petites graines dans leur ordre naturel, fous la forme d’une Poire Sc entiĂšrement massives on observe la mĂȘme chose quand les fleurs font ouvertes 8C mĂȘme tombĂ©es ; la cavitĂ© ne s’y forme que neuf ou dix jours aprĂšs. Mais cette plante offre une singularitĂ© remarquable ; d’abord cette cavitĂ© est pleine d’une substance fluide 8c transparente , mais elle s’épaissit Sc fe convertit peu Ă  peu en une gelĂ©e blanche semblable au lait caillĂ©. La gelĂ©e mĂȘme s’épaissit toujours davantage ; Sc, avant la maturitĂ© des graines, elle s’est durcie au point de rĂ©sister au couteau avec lequel on voudroit la couper. Cette substance endurcie occupe toute la cavitĂ© de la semence, sans qu’on y voie aucun principe des lobes. Cette observation a Ă©tĂ© faite sur des graines qui n’étoient pas encore mĂ»res, St je n’ai pas pu la pousser jusques au bout. Mais je soupçonnerais que cette substance, d’abord fluide , ensuite Ă©paissie, Sc enfin durcie , tient lieu des lobes elle forme les lobes eux-mĂȘmes, mais fous une autre figure ; peut-ĂȘtre aussi les lobes se manifestent-iis plus tard dans cette graine que dans les autres mais les faits observĂ©s dans la plante suivante me portent Ă  croire le second cas plutĂŽt que le premier. X I . Delphinium consolida , ou le Pied d’Alouette, m’a offert dans ses graines les mĂȘmes change- mens que 1 ’lxia Chinenjis. C'est seulement aprĂšs la chute des fleurs qu’on observe la cavitĂ© dont s vi*. la GĂ©nĂ©ration. zzr j'ai parlĂ© dans les petites graines elle est d’abord pleine de liqueur fans couleur ; mais cette liqueur blanchit bientĂŽt, Sc devient comme du lait, dont elle acquiert mĂȘme l’épaisseur. Si l’on fait alors bouillir un peu ces petites graines, la liqueur blanche Sc lactĂ©e devient comme une pommade oĂč l’on ne peut rien dĂ©couvrir d’or- ganifĂ©. . Quand les graines Rapprochent davantage de la maturitĂ© , la liqueur blanche s’asser- mit toujours davantage jusques Ă  ce qu’elle ait acquis une certaine duretĂ© ; c’est alors qu’on commence Ă  y dĂ©couvrir la plantule avec les lobes, qui y font Ă­i bien cachĂ©s qu’on ne peut facilement les distinguer avec nettetĂ©, non-feulement parce qu’ils font trĂšs-petits, mais encore parce qu’ils ont la couleur de la substance endurcie. Ce fait, analogue Ă  celui du paragraphe X, m’a fait soupçonner fortement que cette matiĂšre laiteuse, prise 8Ă­ durcie , renfermoit les lobes , n’en tenoit pas lieu , 8t empĂȘchoit de les distinguer quand les graines n’étoient pas bien mĂ»res. Dans cette eĂ­pĂšce de plantes les lobes parodient tard ; on ne peut les distinguer Ă  l’Ɠil qu’un mois, ou un peu moins, aprĂšs la fĂ©condation i. i J’ai trouvĂ© trĂšs-fondĂ© le soupçon que savoir eu. AprĂšs i’observation des graines d’Ixia, plus mĂ»res que celles du paragraphe X , j’ai vu qu’en les partageant en deux on distingue la plantule qui a la figure d’un cĂŽne, dont la base repose au fond de la semence, &c le sommet arrive environ au milieu. Toute la plantule reste ensevelie dans cette matiĂšre laiteuse qui est trĂšs-dure. Je n’ai pu dĂ©couvrir les lobes malgrĂ© Zz- ExphiĂźSCĂŻĂ­ X I I. La CucurbĂŹta Pepo ou la Courge. Si l’on laisse les fleurs mĂąles, inutiles Ă  notre but par leur stĂ©rilitĂ© , ĂŽt qu’on observe les fleurs femelles , en commençant par leurs boutons les plus petits ; malgrĂ© leur petitesse , le fruit, ou la petite courge, est dĂ©jĂ  formĂ©e fous le bouton, & l’on y voit trĂšs-fenfiblement les petites graines qui offrent une singularitĂ©. Elles ne font pas formĂ©es d’une substance uniforme ou similaire, comme les autres graines qui ne font pas mĂ»res, mais elles font faites de deux substances ; c’est- Ă -dire , d’une Ă©corce 8t d’un noyau en partageant cette graine en deux, on voit ces deux substances dans le plan de la section , & mĂŽme si l’on prend un morceau de graine coupĂ©e par la partie plate entre l’index Sc le pouce , & si on la comprime vers la partie coupĂ©e, le noyau s'Ă©chappe hors de l’écorce , comme un noyau de cerise pressĂ© de cette maniĂšre. Si l’on ĂŽte ce noyau entier hors de l’écorce, il ressemble Ă  une poire avec son pĂ©dicule ; il a toutes les apparences des lobes avec la plantule mais tout cela fe passe-t-il ainsi ? la plantule paroĂźt- elle avant la fĂ©condation ? J’avoue que cet essai d’obfervations fur les fleurs de la Courge me donna cette idĂ©e. Mais j’eus aussi un doute , c’est que dans les l’exactitude de mes recherches, & je pancherois Ă  croire que le corps que j’ai appelĂ© la plantule Ă©toit en partie de l’espĂšce des lobes. La plantule paroĂźt Ă©galement tard dans la graine de l’Ixia & dans celle du Pied d’Alouette , comme je l’ai observĂ©. sur la GĂ©nĂ©ration. zzz autres plantes les lobes se sĂ©paroient aisĂ©ment en deux parties, Sc quelquefois en quatre, §. VIII; dans ce eas, le noyau ne se sĂ©paroit pas, mais il se formoit un tout unique. Pour rĂ©soudre cette difficultĂ©, je rĂ©solus de suivre ces observations j'examinai donc des boutons plus grands, le noyau s’étoit alors tellement attachĂ© Ă  lecorce, que je ne pus l’en dĂ©tacher qu’avec effort ; mais cette Ă©corce me parut plus composĂ©e que je n’avois imaginĂ©. Elle Ă©toit formĂ©e par trois membranes ou pellicules, la premiĂšre ou l’extĂ©rieure est trĂšs-fine Lc trĂšs- dĂ©licate , elle est l’épiderme de la graine. Celle qui fuit est plus Ă©paisse, plus blanche , plus dure, presque ligneuse ; elle est assez difficile Ă  sĂ©parer de la troisiĂšme , qui enveloppe le noyau. Cette peau est verte Sc ferme, mais elle ne Test pas autant que la prĂ©cĂ©dente. Les graines des fleurs , qui Ă©toient tombĂ©es depuis vingt-cinq jours, m’oftnrent d'autres nouveautĂ©s le noyau qui avoir tant de rapports avec les lobes avoir disparu, & Ă  sa place on voyoit un petit sac membraneux, terminĂ© par un petit bec, adhĂ©rent Ă  la partie intĂ©rieure de la graine ; le petit sac Ă©toit un peu gonflĂ©, Sc le gonflement Ă©toit produit par une petite dose de liquide, qui y Ă©toit renfermĂ©e, comme on s’en appercevoit en le perçant. Si l’on prend lĂ©gĂšrement, avec de petites pinces, le petit sac parla partiedubec , Sc en le soulevant, il n’est pas difficile de savoir entier on le trouve composĂ© de deux membranes, qui renferment un corps mucilagineux Sc imbu d’un fluide ; ce 334 ExpĂ©riences corps commence par la pointe interne de la graine , s’étend jusqu’à la moitiĂ© , Ă  laquelle elle est lĂ©gĂšrement attachĂ©e. En le touchant avec la pointe des pincettes , il fe rompt ÔC s’anĂ©antit, au microscope il paroĂźt fait Ă  rĂ©seau ce qui me lc fit croire organisĂ©. J’obscrvai des graines plus ĂągĂ©es ; c’est-Ă - dire , dont les fleurs Ă©toient tombĂ©es depuis plus d’un mois ; le corps mucilagineux, enfermĂ© dans lc petit sac membraneux , paroĂźt assez agrandi, lĂ  oĂč la graine sc termine en pointe il paroĂźt une particule solide 8c blanche , faite comme un cĂŽne , qui est le germe ou la plan- tule en miniature , mais il faut beaucoup d’at- tention pour la bien voir les deux lobes restent attachĂ©s Ă  la plantule, ils font blancs 8c un peu plus grands qu’elle ; le corps mucilagineux , dont j’ai parlĂ© , passe entr’eux, 8c il va s’enraciner avec la plantule. On prĂ©voir les changemens ultĂ©rieurs, Ă©prouvĂ©s par les petites graines, le corps mucilagineux s’étend, la plantule grossit, les deux lobes croissent en masse, au point de remplir enfin presque toute la capacitĂ© des graines. II rĂ©sulte de-lĂ  que je me serois bien trompĂ© si j’avois pris ce noyau, qui s’obscrve dans la graine avant l’épanouissement des fleurs, pour les deux lobes 8c la plantule, puisque ceux-ci ne paroissent qu’un mois aprĂšs le dessĂšchement des fleurs. XIII. Cucumis sativus , le Concombre ordinaire ; le? observations que j’ai faites fur ce fruit font si analogues Ă  celles que j’ai faites fur les svr la GĂ©nĂ©ration. z;z graines de la Courge , soit pour l’apparition du noyau avant la fĂ©condation, soit fur le petit sac membraneux, ou le corps gĂ©latineux, ou les deux lobes Sc la plantule, qu’il me paroĂźt inutile de les particulariser, rajouterai seulement que dans le Concombre il m’a semblĂ© que la plantule 8c les lobes tardent plus Ă  paroĂźtre que dans la Courge. AprĂšs ces observations , je ne crus point inutile d’en faire d’autres fur d’autres plantes, telles que Hybiscus Syriacus , Alcea Rofea , Acanthus mollis , Convolvulus purpureus , Ocy- mum bajĂźlicum , Cucurbita citrullus , Cannabis sativa , Mercurialis annua. Toutes ces observations s’accordĂšrent Ă  faire voir les graines avant la maturitĂ© 8c faction des poussiĂšres , tandis que la plantule St les lobes parurent aprĂšs ; ce rĂ©sultat gĂ©nĂ©ral de mes observations s’ac- corde fort bien avec celles de Du Hamel dans fa Physique des Arbres. Quand il parle de la formation des graines dans les arbres Ă  noyaux , comme les Amandes, les PĂȘches, les Prunes, les Cerises 8t d’autres , il dĂ©montre par des faits qu’en ouvrant un noyau , arrivĂ© Ă  fa perfection , mais dont le fruit est verd , quoiqu’il se soit passĂ© bien du rems depuis la fĂ©condation , le noyau est plein d’une humeur visqueuse , qu’on commence ensuite Ă  voir intĂ©rieurement vers la pointe du noyau un corpuscule blanc, qui semble enchĂąssĂ© dans une petite vessie transparente ce corpuscule est le commencement des lobes 8c de la plantule, qui, par un accroissement successif, parviennent Ă  z;6 ExpĂ©riences remplir la capacitĂ© intĂ©rieure du noyau. Ce nombreux accord de faits permet de soupçonner que ceci est une loi de la nature, si ce n’est pas pour tous les vĂ©gĂ©taux , elle est telle au moins pour un grand nombre. X I V. Quelle fera celle des trois thĂ©ories exposĂ©es fur la gĂ©nĂ©ration des plantes , §. I , qui quadrera le mieux avec mes nombreuses observations ? car le but final que je me fuis proposĂ© , c’cst la solution de ce fameux problĂšme. Si l’on vouloir s’en tenir aux apparences, ii semble qu’on dcvroit prĂ©fĂ©rer celui qui sait palier dans les ovaires les embryons des plantes, pendant la fĂ©condation , avec les poussiĂšres ; au moins je n’ai jamais vu d’embryons avant rĂ©mission des poussiĂšres, ÔC ils ont toujours paru quand on a vu les poussiĂšres fur les anthĂšres ; l’apparition des embryons dans les ovaires a donc une dĂ©pendance directe de cette poussiĂšre on peut donc infĂ©rer que les embryons prĂ©existent dans la poussiĂšre , & que quand elle arrose les stigmates des pistils, elle s’insinue par leurs conduits dans les ovaires. C’est la consĂ©quence qu’a tirĂ©e un savant Physicien , appuyĂ© sur les observations d’un Naturaliste i , qui prĂ©tend avoir vu l’em- bryon dans les ovaires aussi tĂŽt que la sommitĂ© des Ă©tamines avoit dĂ©chargĂ© leurs poussiĂšres fĂ©condantes. i Needham, nouvelles dĂ©couvertes faites avec le microscope. sur la GĂ©nĂ©ration. 337 FĂ©condantes. En pesant la valeur de cet argument , on volt bientĂŽt qu’il n’est pas dĂ©monE tratif. PremiĂšrement, il est faux que l’embryon se voie dans les ovaires d’abord aprĂšs que la poussiĂšre est tombĂ©e des Ă©tamines ; au contraire , on ne l’observe quelquefois que quelques semaines aprĂšs , Sc mĂȘme au bout d’un mois, comme mes observations l’ont prouvĂ© Sc le prouveront. Secondement, ce raisonnement est peu logique , comme l’obĂ­Ăšrve M. Bonnet 1 , puisqu’on ne peut conclure que l’embryon n’existe pas dans les ovaires avariĂ© la fĂ©condation , parce qu’on ne l’apperçoit pasj, fans conclure de /’invisibilitĂ© Ă  la non-existence, d’autant plus qu’jl y a mille exemples qu’on pourroit en allĂ©guer ; nous le voyons ainsi dans í’Ɠuf non- fĂ©condĂ© , oĂč les meilleurs microscopes ne peuvent dĂ©couvrir le Poulet , quoiqu’il y soit bien rĂ©ellement. II faut donc avouer que , malgrĂ© l’inexactitude de larguaient, il ne rĂ©pugne pas que l’embryon de la plante prĂ©existe dans la poussiĂšre , Lc passe avec elle dans lovasse mais pour terminer ces doutes , je peu-* Ă­ai convenable d’entreprendre d’autres recherches. X V . Si les embryons des plantes font dans les poussiĂšres, pourquoi ne pourroit-on pas, me disois-je Ă  moi mĂȘme , les dĂ©couvrir avec les meilleurs microscopes ? cela ne me paroissoit pas improbable, ÔC il me paroissoit avantageux 1 Corps organ. Y z;8 ExpĂ©riences de tourner mes vues de ce cĂŽtĂ©-lĂ . J’examinai donc les poussiĂšres mĂ»res de plusieurs fleurs , & sur tout de celles qui m’avoient servi dans mes observations ; je les trouvai fort analogues Ă  celles qui avoient Ă©tĂ© examinĂ©es par quelques Botanistes, ĂŽt sur-tout par Du Hamel elles me parurent un aggrĂ©gat de corpuscules, dont la forme varioit suivant les plantes, les unes Ă©toient arrondies, les autres Ă©toient comme des spirales, ou des pyramides, ou des cĂŽnes, les autres avoient des figures irrĂ©guliĂšres. Celles-ci font polies, celles-lĂ  Ă©pineuses, 8c les autres pleines de petites tumeurs ; tandis que les unes font transparentes, il y en a qui font opaques, ou jaunes, ou blanches, ou azurĂ©es, ou couleur de chair, la grandeur de ces poussiĂšres paroĂźt ĂȘtre comme la grandeur des plantes mĂąis ces petits corps n’intĂ©ressent pas immĂ©diatement la gĂ©nĂ©ration des plantes. Ils font des Ă©tuis ou de petites vĂ©sicules, pleines dune liqueur subtile , qu’elles laissent Ă©chapper avec force lorsqu’on les humecte ; Sc dans cette liqueur on voit nager une multitude de petits globules, qui, dans le moment de l’ex- plosion , s’agitent rapidement en divers sens. Cette liqueur, dans la thĂ©orie dont j’ai parlĂ©, doit contenir les rudimens ou les embryons des plantes nouvelles ; elle devoir donc fixer mon attention pour y chercher ce qu’il pour- roit y avoir d’analogue aux embryons. Quand on apperçoit d’abord ces embryons dans les graines, ils ressemblent Ă  un corpuscule pointu , auquel sont attachĂ©s ordinairement deux corps sur la GĂ©nĂ©ration. 559 pins grands , reĂ­ĂŹ'emblans aux ailes fermĂ©es d’un Papillon, ce font les lobes. Je cherchai donc soigneusement ces corpuscules, ou quelque chose qui leur fĂ»t semblable , dans cette liqueur , avec une lentille foible, ensuite avec de plus fortes , enfin avec les plus fortes ; mais e ne dĂ©couvris jamais que cette liqueur, qui ressemble Ă  l’huile ou Ă  un corps gras fondu, avec les petits globules qui y nageoient la liqueur Ă©tant inorganique ne pouvoit ĂȘtre les embryons , 8Ă­ je ne pus rien remarquer dans les globules qui ressemblĂąt aux lobes ou aux embryons ; car les globules font de petits corps sphĂ©riques ou Ă -peu-prĂšs, comme toutes les lentilles les font voir ; je les ai vu de mĂȘme avec le microscope solaire , qui grossit si fort les objets aprĂšs l’exposition de ces faits, il rĂ©sulte que les embryons ne font pas cachĂ©s dans les poussiĂšres des fleurs. On pourra peut-ĂȘtre m'objecter qu’il ne rĂ©pugne pas que les globules soient de vrais embryons, qui conservent une forme arrondie tant qu’ils font dans les poussiĂšres, mais quand ils font arrivĂ©s dans les ovaires, ils y trouvent un suc abondant pour les nourrir , qui dĂ©ploie leurs parties concentrĂ©es dans le globule, Sc qui leur donne alors la forme des lobes 8t de la plantule comme les TĂȘtards des Grenouilles 8c des Crapauds, qui ont une figure globuleuse dans le sein de leurs mĂšres, 8Ă­ qui ne prennent celle de TĂȘtards que quand ils ont Ă©tĂ© nourris par la liqueur de l’amnios l’objection se rĂ©duit Ă  ceci 3 est-il possible que Y z 34 » ExpĂ©riences les globules, nageant dans la liqueur des poussiĂšres , soient les embryons ? je ne cherche pas si la chose est postĂźble , mais si elle est probable ; si l’on peut croire que les embryons prĂ©existant dans les embryons des Ă©tamines ? & mes observations dĂ©truisent toutes ces probabilitĂ©s- Cependant , pour lever tous les doutes , j’intcrrogcai encore la Nature , Lc je lui fis une nouvelle question, qui me parut la derniĂšre Ă  lui faire pour rĂ©soudre ce problĂšme. Je cherchai si les embryons parodient dans les ovaires, 2>C s’ils pouvoient mĂ»rir quelquefois en empĂȘchant artificiellement faction des poussiĂšres fur les pistils ; car s’ils mĂ»rissoient, alors il Ă©toit Ă©vident que les embryons n’appartenoient plus aux poussiĂšres, mais aux ovaires. Je pouvois remplir ce but par trois moyens ; ou en coupant les anthĂšres avant que leur poussiĂšre fĂ»t tombĂ©e fur les pistils, ce qui pouvoit avoir lieu avec les plantes hermaphrodites, oĂč l’on trouve ensemble les pistils 8t les Ă©tamines ; ou en ĂŽtant les sieurs mĂąles ou Ă©tamines des plantes qui portent les fleurs mĂąles 8t femelles fur le mĂȘme individu, dans le moment oĂč elles Ă©closent ; ou, enfin, en Ă©cartant les fleurs mĂąles des fleurs femelles , de maniĂšre qu’on ne pĂ»t soupçonner que la poussiĂšre des premiĂšres RapprochĂąt des pistils des secondes, ce qui pouvoit fe faire avec les plantes qui ont les deux sexes dans deux individus. Ces trois genres d’expĂ©- riences Sc d’observations fourniront la matiĂšre des deux Chapitres suivans. $VR LA GÍnIR/ÍTION. 34V CHAPITRE III. GĂ©nĂ©ration de quelques plantes dont les unes Ă©toient hermaphrodites, 8c les autres Ă  fleurs mĂąles 8c Ă  fleurs femelles dans le mĂȘme individu , 8c fur lesquelles la poussiĂšre des Ă©tamines n’a point agi ; elles font appelĂ©es par Linneus Ocymum Bafilicum , Hybiscus Syriacus , Cucurbitus melo , Pepo frucĂźu elypei formi , Cucurbita citrullus. XVI. J’a 1 commencĂ© par une plante qui porte des fleurs hermaphrodites; 8c ce fut la petite espĂšce du BaĂ­ĂŹlic qu’on a coutume d'Ă©lever dans des vases , 8c qu’on appelle Ocymum ba/ĂŹlicum. Cette plante Ă©toit en partie fleurie 8c en partie fur le point de fleurir quand j’eus l’envie de faire certe expĂ©rience mais, pour mieux juger de mes expĂ©riences , je voulus Ă©tablir une comparaison entre ce qui arrivoit aux fleurs fur lesquelles j’avois secouĂ© les poussiĂšres, 8c celles qui n’avoient pas Ă©prouvĂ© leur action. Quant aux premiĂšres , voici les rĂ©sultats que j’obtins. Chaque fleur de BaĂ­ĂŹlic est composĂ©e de quatre Ă©tamines, au milieu dclquelles s’élĂšve le pistil. Les Ă©tamines 8c le pistil font trĂšs-viĂ­iblcs douze , V z 34 ÂŁ E X p É R I E K C E s jours 8t mĂȘme davantage avant que les fleur J s’ouvrent, pourvu qu'on en ĂŽte adroitement les pĂ©tales ; dans ce mĂȘme te ms les graines font cachĂ©es dans l’ovaire au nombre de quatre elles ont la forme d’un Ɠuf. Elles font alors massives, St elles continuent Ă  Terre quelques jours aprĂšs la chine de la fleur ; mais, en augmentant de volume , elles font voir cette cavitĂ© que j’ai fait connoĂźtrc dans les graines des autres plantes ; alors, au bout de quelques jours, on observe dans la cavitĂ© un point de matiĂšre qui semble informe , mais qui ne tarde pas Ă  faire voir deux lobes avec la plantule. Pendant que les lobes St la plantule s’accroilfent, la cavitĂ© s’étend , St ces corps occupent bientĂŽt toute la capacitĂ© de la graine. VoilĂ  le procĂ©dĂ© de la Nature dans les fleurs d u Basilic , fur lesquelles on a agitĂ© la poussiĂšre des Ă©tamines ; St c’est ce que j’ai observĂ© dans les autres plantes. XVII. Voyons Ă  prĂ©sent ce qui arrive aux embryons qui ne reçoivent pas les poussiĂšres des Ă©tamines. Chaque fois que les fleurs Ă©toient fur le point de s’épanouir, je coupai les quatre anthĂšres qui Ă©toient alors trĂšs-pleines d’une poussiĂšre mĂ»re ; mais je ne fus pas content de cette opĂ©ration , parce que la vapeur qui s’échappe des poussiĂšres est trĂšs-subtile , §. XV, St doit ĂȘtre , suivant les Botanistes, ce qui concourt immĂ©diatement Ă  la gĂ©nĂ©ration. Mais, quoi qu’il en soit, non-seulement j’écartai les poussiĂšres aprĂšs avoir coupĂ© les anthĂšres de ces fleurs qui Ă©toient le sujet des expĂ©riences, mais je les rie LA GĂ©NĂšRATlOV. 34* tins encore Ă©loignĂ©es des autres fleurs existantes fur la mĂȘme plante , 8Ă­ je m’en assurai complettement en ĂŽtant toutes les fleurs de ma plante , Ă©levĂ©e dans un vase , Ă  mesure qu’elles alloient s’épanouir. Le vase Ă©toit placĂ© sur une fenĂȘtre , dans le voisinage de laquelle on nele- voit aucune plante semblable. Quel fut l’esset de ces soins? Je ne le dirai pas fans Ă©tonnement ; les petites graines, quelque tems aprĂšs la chute des fleurs , montrĂšrent une cavitĂ© oĂč j’apperçus les deux lobes & la plantulc , SĂ­ ces petits corps qui s’accrurent remplirent la cavitĂ© intĂ©rieure de ces graines ; en un mot, elles subirent les mĂȘmes changemens que les graines qui avoient Ă©prouvĂ© l’influence des poussiĂšres, & l’on n’auroit pas cru qu’elles en eussent Ă©tĂ© privĂ©es. XVIII. Je n’ai pu me tranquilliser sur ce rĂ©sultat ; je craignois de n’avoir pas apportĂ© Ă  cette expĂ©rience dĂ©licate toutes les prĂ©cautions nĂ©cessaires. Les Physiciens croient communĂ©ment que les poussiĂšres des Ă©tamines agissent quand les fleurs font fraĂźchement Ă©panouies, ou quand elles s’épanouissent. Mais en ouvrant les fleurs du Basilic deux ou trois jours avant qu’elles Rouvrissent naturellement, je trouvai deux ou trois fois que la poussiĂšre Ă©toit en partie mĂ»re; 8t il pourroit arriver que quelques petits grains fussent passĂ©s des anthĂšres dans le pistil, puisque ces deux organes se touchent. Je soupçonnai donc d’avoir coupĂ© les anthĂšres trop tard; c’est- Ă -dire , aprĂšs faction des poussiĂšres. Je rĂ©solus Y 4 Z44 ExpĂ©riences donc de les couper fur d’autres fleurs qui dĂ©voient s’ouvrir plus tard, St qui ne laisseroient pas ainsi lieu au soupçon. Ici les rĂ©sultats furent diffĂ©rens, je fis l'opĂ©ration fur quatre-vingt - deux petits boutons Ă  fleurs. Les petites graines d’un tiers environ des fleurs tombĂšrent avant de mĂ»rir les ovaires des autres fleurs renfer- moient les autres plus ou moins, mais avec des circonstances diffĂ©rentes. Quelques-uns ren- fermoient des graines trĂšs-petites , quoique , dans le rems de la maturitĂ© , d’autres en con- tenoient dc plus grandes, mais froncĂ©es, passĂ©es St gĂątĂ©es ; d’autres en logeoient qui Ă©toient aussi bien formĂ©es 8t aussi grosses que celles qui avoient reçu Finfluence des poussiĂšres, au moins quant Ă  l’extĂ©rieur il y en eut vingt-cinq de ce nombre ; St en les observant intĂ©rieurement , j’y trouvois encore la plantule avec les lobes qui ne dilfĂ©roient point de la plantule St des lobes fournis par les graines des fleurs fĂ©condĂ©es. Entre ces vingt-cinq graines qui n’a- voient pas Ă©tĂ© sĂ»rement touchĂ©es par les poussiĂšres , j’en analysai douze de la maniĂšre que je viens de raconter, St j’en semai treize en terre pour voir Ă­i elles naĂźtroient, mais elles ne naquirent point ; tandis que treize graines de la mĂȘme plante de Basilic, exposĂ©es Ă  faction des poussiĂšres St semĂ©es dans la mĂȘme terre , naquirent toutes fans exception. La consĂ©quence importante St immĂ©diate qui rĂ©sulte de ces faits, c’est que les embryons du Basilic dĂ©pendent des poussiĂšres pour ctre fĂ©condĂ©s St dĂ©veloppĂ©s jusques Ă  un certain point; mais qu’ils n’en dĂ©pendent point pour leur existence. SOR LA GÏr'&R'ÀTIOR. X I X. Pendant que je faisois ces observations 8C ces expĂ©riences fur le Basilic, j’en suivois de pareilles fur I’Hibifcus Syriacus je coupai les anthĂšres de plusieurs fleurs dĂšs qu’elles furent ouvertes ; je dois dire que je ne fuis pas parfaitement sĂ»r que quelque grain de poussiĂšre ne soit pas passĂ© dans les pistils en ĂŽtant les anthĂšres ; j’ai trouvĂ© plus d’une fois les poussiĂšres mĂ»ries quelques graines tombĂšrent d’a- bord aprĂšs l’opĂ©ration , mais plusieurs subsistĂšrent , s’accrurent beaucoup , 8t feroient mĂ»ries si elles n’en avoient pas Ă©tĂ© empĂȘchĂ©es par le froid de f automne , comme d’autres graines de la mĂȘme espĂšce de plante qui dĂ©voient avoir Ă©tĂ© fĂ©condĂ©es. Je voulus analifer intĂ©rieurement quelques-unes de ces graines, qui s’étoient accrues considĂ©rablement, mais qui n’étoient pas parvenues Ă  leur maturitĂ© , 8t je vis que quelques-unes Ă©toient noircies 8t gĂątĂ©es, les autres Ă©toient blanches, saines en apparence ; mais ce qui intĂ©resse le plus, elles renfermoient la plantule dans les lobes, qui Ă©toient concentrĂ©s en cux-mĂȘmes St recoquillĂ©s comme une t qui est la petite Courge elle-mĂȘme, comme je l’ai insinuĂ© , §. XII. Tous les jours je viiitois ces deux plantes, pour en examiner avec attention les fleurs, afin de faire pĂ©rir les mĂąles dĂšs leur naissance, parce que je voulois ĂȘtre sĂ»r que la poussiĂšre des Ă©tamines n’avoit pas influĂ© fur les fleurs femelles ; Sc comme il est reconnu que les fruits font d’autant plus beaux qu’il y en a moins fur une plante , je ne laissai que deux fleurs femelles fur chaque individu , Sc j’îtai tous les autres boutons femelles Ă  mesure que j’enle- vois les mĂąles les quatre Courges crĂ»rent vigoureusement ; elles avoient acquis , vers le milieu du mois de Septembre, presque toute leur grosseur avec presque toute leur maturitĂ© j’en dĂ©tachai alors une de fa tige , pour en examiner l’intĂ©rieur ; fa chair , qui Ă©toit encore tendre , parce qu’elle n’étoit pas bien mĂ»re, avoit la couleur , la structure Sc le goĂ»t de cette espĂšce de Courge lorfqu’on n’en a pas enlevĂ© les fleurs mĂąles. Les graines, Ă  l’extĂ©- ricur comme Ă  l’intĂ©rieur, me parurent bien §4*» ExpĂ©rience formĂ©es 8c trĂšs - nombreuses ; seulement leĂȘ deux lobes, auxquels adhĂ©rois la plantule , ne remplissoient pas toute la capacitĂ© de la graine, parce qu’ils n’avoient pas pris encore leur accroissement. A la fin de Septembre , les autres trois Courges ctant bien mĂ»res, je les coupai 6t je gardai leur graine dans trois petits sacs sĂ©parĂ©s, pour pouvoir les Ă©tudier; j’observai d’abord que les deux lobes remplissoient les graines, ÔC qu’ils avoient tous les signes de la maturitĂ©. XXI. Jusqu’ici les rĂ©sultats ont Ă©tĂ© assez semblables Ă  ceux qui m’ont Ă©tĂ© fournis par les graines du Basilic , qui, quoiqu’elles n’eussent pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©es par les poussiĂšres, §. XVIII, avoient une apparence d’ĂȘtre parfaites ; il est vrai qu’elles ne se dĂ©veloppĂšrent pas en terre quand elles y furent semĂ©es , 6c j’imaginai qu’il en arriveroit autant aux graines des trois Courges dont j’ai parlĂ© ; mais il falloit faire l’expĂ©rience. AprĂšs donc qu’elles furent sĂ©chĂ©es au soleil, j’en semai cent cinquante dans trois vases ; c’est-Ă -dire , cinquante dans chacun , tirĂ©es de chaque Courge ; la saison Ă©tant avancĂ©e, pluvieuse 6cfroide, c’étoit le 10 Octobre, je fus obligĂ© de mettre les trois vases dans un lieu dont l’air Ă©toit assez Ă©chauffĂ© le succĂšs ne rĂ©pondit pas Ă  mes espĂ©rances, je croyois qu’aucune des graines ne naĂźtroit, ÔC elles levĂšrent presque toutes ; quinze jours aprĂšs qu’elles eurent Ă©tĂ© semĂ©es, trente-sept Ă©toient germĂ©es ; le 8 Novembre , cent trente-trois Ă©toient sorties hors de la terre du vase ; je nç sur la GĂ©nĂ©ration. 349 Voulus pas laisser fans examen les dix-sept graines restantes, 8c je les trouvai ou vuides- ou viciĂ©es. Je conservai le reste des graines pour le prin- tems suivant de TannĂ©e 1778, afin d’en faire une autre expĂ©rience ; car , pour dire que la fructification est parfaite , il ne faut pas seulement que les graines naissent, mais encore elles puissent en produire d’autres qui soient fĂ©condes SC qui perpĂ©tuent l’espĂšce. Je fis donc semer dans le mĂšme lieu des graines des trois Courges, vers les premiers jours dti mois de Mai de cette annĂ©e-lĂ  ; St quand elles furent un peu avancĂ©es , j'eus foin , comme TannĂ©e passĂ©e , de les dĂ©pouiller de toutes les fleurs mĂąles, ĂŽt de laisser Ă  chaque individu une fleur femelle ; chacune de ces fleurs produisit fa Courge , qui mĂ»rit Ă  feutrĂ©e de Tautomne, leurs graines , mises en terre , germĂšrent fort bien , St auroient pu donner naissance Ă  d’autres. II est donc clair que les Courges Ă  Ă©cu ne ressemblent point au Basilic , dont, quant Ă  fa gĂ©nĂ©ration , les graines ont besoin d’ĂȘtre fĂ©condĂ©es par les poussiĂšres pour pouvoir se dĂ©velopper mais il n’en est pas de mĂȘme des graines des Courges Ă  Ă©cu , elles n’ont pas besoin de ce moyen pour se propager ces faits font le plus solidement Ă©tablis, car les fleurs mĂąles, qui auroient pu fournir des poussiĂšres , Ă©toient soigneusement dĂ©truites long-tems avant que les poussiĂšres fussent mĂ»res & Ton ne sauroit prĂ©sumer que ces poussiĂšres aient Ă©tĂ© 350 E X P É R I E N C E S apportĂ©es par l’air ; car j’avois choisi pour ces expĂ©riences le pays de Scandiano, oĂč il n’y avoir dans ses environs aucune Courge Ă  Ă©cu , ni aucune plante analogue ; d’oĂč il rĂ©sulte que les embryons de cette plante St fa fructification ne dĂ©pendent point des poussiĂšres des Ă©tamines. XXII. Je fis les mĂȘmes expĂ©riences fur un Melon d’eau , que je plantai Ă  la fin du printems de 1779 , dans le mĂȘme j’avois plantĂ© mes Courges Ă  Ă©cu ; j’en dĂ©truisis les fleurs mĂąles ausiĂź-tĂŽt que leur bouton commençoit dc paraĂźtre, St j’y laissai seulement quelques fleurs femelles. Quoique cette plante fut isolĂ©e, 6c quoiqu’il n’y eĂ»t pas lieu de craindre qu’elle fut fĂ©condĂ©e par quelque poussiĂšre Ă©trangĂšre ; je voulus cependant joindre une nouvelle prĂ©caution , qui nc paraĂźtra pas superflue Ăč ceux qui connaissent ['importance du sujet 6c la dĂ©licatesse de ses observations. C’étoit de renfermer dans de grands vaisseaux de verre les rameaux de Melons Ă  fleurs femelles quand elles Ă©taient fur le point de s’ouvrir, St d’cn fermer l’ouverture avec un ciment Ă©pais, de maniĂšre Ă  en exclure tout l’air extĂ©rieur , qui aurait pu ĂȘtre le vĂ©hicule des poussiĂšres fĂ©condantes. Ce moyen prĂ©venait encore un autre doute , formĂ© par quelques Botanistes, qui croient que la fĂ©condation s’opĂšre quelquefois dans quelques plantes par le moyen des insectes, qui, comme les Abeilles, s’insinuent dans les fleurs pour y chercher leur miel ou la cire , 6t couvrent leur corps avec la poussiĂšre des sur la GĂ©nĂ©ration. 351 Ă©tamines ; alors en portant cette poussiĂšre dans d’autres fleurs analogues femelles, elles les fĂ©condent je n’ai point de peine Ă  le croire, aprĂšs les fĂ©condations artificielles que j’ai opĂ©rĂ©es fur les plantes, Sc dont je parlerai j’en- fermai donc dans deux vaisseaux de verre deux fleurs femelles, fort Ă©loignĂ©es de s’ouvrir ; la transpiration produite par ces deux rameaux occasionna une rosĂ©e si abondante fur les parois des vaisseaux, qu’elle forma des ruisseaux en fe rĂ©solvant, qui inondĂšrent les deux fleurs ĂŽt les firent pĂ©rir dans trois jours ce malheureux Ă©vĂ©nement me fit faire des efforts pour le prĂ©venir ; j’arrangeai mes fleurs dans les vaisseaux de maniĂšre qu’elles ne touchoient pas leur fond, mais elles Ă©toient suspendues en l’air, de forte que les fleurs furent seulement lĂ©gĂšrement humectĂ©es , Sc fe conservĂšrent saines* J’y conservai ces fleurs pendant onze jours; c’est-Ă -dire , depuis le tems oĂč elles dĂ©voient bientĂŽt s’ouvrir jufqu’à celui oĂč elles furent sĂ©chĂ©es ; 8c il ne faut pas oublier que, durant cet intervalle , les petits Melons avoient commencĂ© de grossir n’ayant plus rien Ă  craindre d’aucune poussiĂšre furtive, au douziĂšme jour j’îtai les vaisseaux de verre, 8Ă­ je laissai les deux petits Melons exposĂ©s Ă  l’air libre, oĂč ils restĂšrent jusqu’au moment de leur maturitĂ© ; c’est-Ă -dire, jusqu’au 8 de Septembre. Ces fruits me parurent trĂšs-bien constituĂ©s, leurs graines Ă©toient composĂ©es de leurs deux lobes & de la plantule, qui occupoient tout l’in- tĂ©rieur ; la fĂ©conditĂ© des graines de la Courge 35* ExpĂ©riences Ă  Ă©cu m’en fit espĂ©rer une pareille pour leĂ­ graines de mes Melons. Je semai donc cinquante graines de chacun de mes Melons ; & il y en eĂ»t quatre-vingt-neuf qui donnĂšrent le jour Ă  des plantes, onze furent stĂ©riles ; mais la cause de leur stĂ©rilitĂ© fut la mĂȘme que celle des dix-sept graines de Courge qui pĂ©rirent, §. XXI, par quelque vice organique de la plan- tule ou des lobes. Ce qui ne doit pas Ă©tonner , puisqu’il arrive Ă -peu prĂšs la mĂȘme chose aux graines naturelles des Courges Ă  Ă©cu St des melons d’eau. Je semai en 1780 la graine que ü’avois obtenue de mes Melons, dont les fleurs n’avoient pu ĂȘtre fĂ©condĂ©es, St les fruits qu’el- les produisirent furent aussi sains St aussi bons que ceux que j’avois eu des Courges Ă  Ă©cu en 1778 par les mĂȘmes moyens , §. XXI. Je puis donc conclure que la fructification de cette plante est absolument indĂ©pendante de la poussiĂšre des Ă©tamines. V e j» T V» - JCHAPITRE SÛR LA GÉR ÉRATION. ZZZ CHAPITRE IV. GĂ©nĂ©ration de quelques plantes Ă  individus mĂąles Sc Ă  individus femelles, fur lesquelles n’a point agi la poussiĂšre fĂ©condante Can- nabis saliva , Spinacia olcracca , Mercurialis annua . XXIII. ÂŁ anrabis Saliva , vulgairement le Chanvre . Dans TĂ©tĂ© de 1767 deux phĂ©nomĂšnes fixĂšrent Ă­ur-tout mon attention Ă  Scandiano. Le premier fut un pied de Chanvre femelle , nĂ© par hasard dans mon jardin ; fa tige Ă©toit grossie 8c Ă©levĂ©e , il Ă©toit couvert de feuilles comme lin arbrisseau vigoureux , Sc il portoit beaucoup de graines, qui paroissioient Ă  l'ceil excellentes, Sc que l’expĂ©rience me fit juger fĂ©condes, car je les semai en terre cependant, cette plante Ă©toit la seule de son espĂšce dans le jardin , qui est trĂšs-vaste , 8c il n’y avoir point d’individus mĂąles de cette espĂšce qu’à quelque distance. TĂ©tois alors prĂ©venu en faveur du svstĂȘme gĂ©nĂ©ralement reçu des deux sexes dans les plantes ; ce cas m’inlpira des soupçons , Sc je ne pus m’empĂȘcher d’en parler Ă  mes amis, 8i sur-tout au cĂ©lĂšbre Physicien le PĂšre Charles-Joseph Campi. Cependant il me sembla dans ce moment que le phĂ©nomĂšne s’expliquoit fur la Z 354 ExpĂ©riences poussiĂšre qui pouvoir ĂȘtre apportĂ©e des Che- neviers, qu’on trouve Ă­i abondamment dans le Marquisat de Scandiano ; d’autant plus que je savois que ces poussiĂšres Ă©toient en grande quantitĂ© , Ă  qu’en secouant un individu mĂąle quand ses fleurs font bien Ă©closes, on voit s’en Ă©lever comme un petit nuage ou une espĂšce de fumĂ©e. Le Stumulus lupulus mĂąle de Linneus fournit encore une quantitĂ© plus grande de poussiĂšre, 8c il ossroit aux dĂ©fenseurs du sexualisme des plantes un moyen d’expliquer la fructification du Stumulus lupulus femelle , quand on le dĂ©- couvriioit dans des lieux oĂč il n’y auroit point de mĂąles. .XXIV. Le second phĂ©nomĂšne qui me frappa fut le suivant Les paysans du Reggionois 8c du ModĂ©nois arrachent de leurs Cheneviers tous les individus mĂąles aprĂšs le x ou le z d’AoĂ»t, Sc ils y laissent seulement les femelles jusques Ă  la fin de Septembre. Si la saison est favorable Ă  la vĂ©gĂ©tation aprĂšs la destruction des mĂąles, les individus femelles continuent Ă  croĂźtre , 8c ils poussent plusieurs rameaux qu’on ne voyoit pas auparavant ces rameaux produisent des petits boutons Ă  fleurs, qui s’ouvrent Sc qui forment ensuite des graines. J’observai cela sur plusieurs individus femelles en 1767 le 8 Septembre , c’est-Ă -dire, trente-sept jours aprĂšs la destruction des mĂąles , comme cela me fut certifiĂ© par une personne digne de foi. Je fixai mes regards fur quelques rameaux les plus tendres , qui commençoient Ă  peine Ă  faire sur la GĂ©nĂ©ration. 355 soupçonner les premiers rudimens des fleurs fermĂ©es, & je les marquai avec un fil, afin de voir fi les graines mĂ»riroient j. elles-mĂ»rirent essectivement, ÔC germĂšrent en terre quand je les semai au mois d’Octobre. Ce second phĂ©nomĂšne me fit chercher comment les poussiĂšres auroient pu fĂ©conder les fleurs femelles nĂ©es fur les rameaux fi long-tems aprĂšs la destruction des fleurs mĂąles. Cependant, en y pensant, il me sembla que les dĂ©fenseurs du sexualisme pouvoient encore trouver quelque appui j savoir, que , malgrĂ© la destruction des fleurs mĂąles, les poussiĂšres qui en Ă©toient sorties pouvoient pendant long-tems nager dans l’air oĂč se trou- voient les individus femelles. XXV. Huit ans aprĂšs , c’est-Ă -dire en 1775 , il parut dans le Journal de Physique un MĂ©moire sur la fĂ©condation des Plantes , qui Ă©toit analogue Ă  tout ce que j’ai dit fur le Chanvre. Voici l’extrait de ce MĂ©moire rĂ©lativement Ă  mon objet. L’Auteur Ă©leva Ă  Paris dans un vase un pied de Chanvre femelle, qui donna beaucoup de graines d’une grosseur ordinaire , ayant leurs deux lobes bien nourris avec la plantule. Ces graines semĂ©es en terre germĂšrent & crurent , elles vinrent toutes Ă  bien. La plante ne fut jamais couverte ni de voiles , ni autrement, 8t fut tenue fur une fenĂȘtre Ă©loignĂ©e des autres plantes de son espĂšce. On ne veut pas supposer que cette expĂ©rience exclue tout soupçon de poussiĂšre fĂ©condante , mais seulement que c’étoit trĂšs- Z r 3 S n’ont pas Ă©tĂ© fĂ©condĂ©s par la liqueur sĂ©minale, qnoiqu’ils prĂ©existent dans les ovaires des femelles. II est tout aussi Ă©vident de dire que , puisque les embryons n'appartiennent point Ă  la poussiĂšre des Ă©tamines , il faut reconnoĂźtre qu’ils appartiennent aux ovaires qui font leurs siĂšges naturels. Quelques Naturalistes de rĂ©putation ont cru que Fembryon des plantes Ă©toit le rĂ©sultat de deux principes, Fun dĂ©pendant de la poussiĂšre des Ă©tamines , l’autre de celle des pistils mais mes observations, qui dĂ©montrent que Fexistence des embryons n’est pas dĂ©pendante des poussiĂšres, dĂ©montrent aussi la faussetĂ© de cette opinion. XXXVIII. Mais Fembryon, que nous avons dĂ©montrĂ© appartenir entiĂšrement aux ovaires , peut leur appartenir de deux maniĂšres ; ou en fe forr sv r la GĂ©nĂ©ration. 375 mant au-dedans d’eux par la matiĂšre que fournit la plante mĂšre, ou en y prĂ©existant. Quelle est la vraie maniĂšre entre ces deux-lĂ  ? Un EpigĂ©nĂ©siste , M. le Comte de Buffon , par exemple, accoutumĂ© de voir la nature fous un angle proportionnĂ© Ă  fes idĂ©es favorites, faiĂ­ĂŹroit vraisemblablement avec empressement la premiĂšre maniĂšre , aprĂšs avoir observĂ© les phĂ©nomĂšnes que j’ai dĂ©crits , l’embryon qui ne paroissoit pas d’abord dans les cavitĂ©s des graines , qui y paroĂźt ensuite sous la forme d’un point de matiĂšre gĂ©latineuse 8C informe, nageant dans une liqueur fans laisser voir long-tems la plus petite liaison avec les graines, qui croĂźt peu-Ă -peu dans cette liqueur , qui d’informe qu’il Ă©toit devient corps organisĂ© ce seroient-lĂ  des argumens suffisamment sĂ©dui- sans pour faire croire Ă  ce fameux Naturaliste que l’embryon se forme dans la graine, 8Ă­ vraisemblablement qu’il est formĂ© par la liqueur dans laquelle il nage. Mais voulant faire usage ' d’une logique rigoureuse , qui Ă©carte la prĂ©vention , je trouve ces argumens insussisans, i°. on comprend comment une liqueur , ou quelque autre matiĂšre non-organifĂ©e, peut nourrir un corps organisĂ© , 8c l’on observe tous les jours ce fait dans les hommes , les animaux t >C les plantes mais on ne comprend pas si aisĂ©ment comment un corps non-organisĂ© SĂ­ informe , solide ou fluide , peut par les seules loix mĂ©- chaniques s organiser ; auffĂŹ l’éloquence 8Ă­ l’a- dresse ne persuaderont jamais qu’un animal bĂ­ un vĂ©gĂ©tal, ceux-lĂ  mĂȘme qui paroissent le» A a 4 37 5 E x ? Ă­ * i ! »‹ c e Ă­ moins parfaits, les moins organisĂ©s, soient produits par un assemblage mĂ©chanique de parties. 2 °. Quoique l’embryon ne paroille pas d’abord organisĂ© , ce n’est pas une preuve qu’il ne le soit pas ; le Poulet, dans les premiĂšres heures de l’incubation , ne paroĂźt pas organisĂ© cependant c’c/f une chose indubitable qu’il a dans ce moment une organisation enticre , puisqu'il elĂŹ prouvĂ© qu’il prĂ©existe Ă  la fĂ©condation. Cette prĂ©existence dĂ©montrĂ©e par H aller dans le Poulet , je l’ai dĂ©montrĂ©e dans. les Grenouilles , les Salamandres 8Ă­ les Crapauds ; il est donc Ă©vident que ces amphibies font organisĂ©s avant d’ĂȘtre fĂ©condĂ©s. Cependant, cette organisation n’est pas manifeste , les apparences feroient regarder ces corps comme des erres informes ; ils n’ossrent au moins que des petites, sphĂšres, formĂ©es par une Ă©corce ou une peau remplie d’une matiĂšre Ă  demi-fluide. Cette sttucture , inorganisĂ©e en apparence , continue Ă  se faire voir quelque rems aprĂšs la fĂ©condation ; les embryons dans les plantes peuvent donc ĂȘtre organisĂ©s fans le paraĂźtre , & quoiqu’elle nc paroisse pas, j’aĂź de fortes preuves de son existence. Si l’on ouvre les graines lorsqu’on commence Ă  voir ati milieu de !a liqueur le point gĂ©latineux de matiĂšre , 6c qu’on l’observe , rien n’y annonce alors l’apparenced’unĂȘtrc organisĂ© on n’y voie ni lobes , ni plantule ; mais une particule purement muqueuse. Cependant li, avant d’ou- vrir ces graines , je leur faisais subir une lĂ©gĂšre Ă©bullition , plus d’une fois ’ai vu ce point fous s v r laGĂȘnĂ©ration. 577 une autre apparence , il n’étoit seulement pas gĂ©latineux si , avec la pointe d’une aiguille trĂšs-fine , je cherchois Ă  le tourmenter, quelquefois il se partageoit en deux trĂšs-pe- tites tranches, entre lesquelles se cachoit Sc s’enracinoit un petit atome pointu , 8c l’on s’ap- pcrcevoic bientĂŽt que ce petit atome ctoit la plantule, Sc les deux petites tranches les lobes ; & on le jugeoit encore mieux si on chcrchoit Ă  le voir avec une trĂšs-forte lentille , aprĂšs lavoir vu avec une lentille moins forte. Ainsi donc, ce point de matiĂšre Ă©toit organisĂ© quand nous croyons qu’il ne l’étoit pas, 8>C le feu a servi plus d’une fois Ă  dĂ©montrer une organisation qu’on ne soupçonnoit pas on fait que les vers des insectes volans, aprĂšs s’étre nourri de chairs corrompues 8c avoir acquis un grand accroissement, se changent en une boule alongĂ©e , oĂč la mouche se prĂ©pare 8c se dĂ©veloppe ; mais si l’on ouvre ces boules alongĂ©es au bout de quelques jours, loin d’y trouver les apparences d’une mouche, on n’y apperçoit que celles d’une bouillie, qui ne paroĂźt pas avoir rien d’organisĂ© ; le spectacle change quand on a fait bouillir ces boules pendant quelque tems ; vers le troisiĂšme jour on distingue les petites jambes, Lc vers le quatriĂšme les petites ailes , ensuite on observe la trompe , puis la tĂȘte ; enfin toute la figure de l’animal, comme RĂ©au- mur l’a observĂ© le premier, 8c mille autres aprĂšs lui. Le secours du feu m’a enseignĂ© une autre vĂ©ritĂ© importante ; c'est la dĂ©couverte que j’ai Z?r ĂŻnĂ­nnĂ­iĂ­ faite par l’ébullition, du point de matiĂšre j otĂ­ de l’embryon , quelques jours avant qu’il paroisse. Je ne l’ai pas vu seulement dans les graines qui se remplissent de la liqueur oĂč nage l’embryon , mais dans d’autres oĂč cette liqueur se durcit ; je pris dans les mĂȘmes ovaires plusieurs graines, j’cn sis bouillir quelques-unes pendant peu d’instans , 8c d’autres non ; dans celles qui ne furent pas bouillies je ne pouvois distinguer l’embryon , mais je le distinguois bien dans celles qui avoient supportĂ© l’ébullition, parce que seau bouillie avoir raffermi 8c rendu opaque cette particule qui renferme l’embryon ; Si l’on ne peut l’appercevoir dans les graines non-bouillies, parce qu’elles font fluides 8c transparentes. XXXIX. Enfin l’on objecte que , puisque l’embryon est isolĂ© dans les graines , on pourroit croire qu’il n’a aucune rĂ©lation de dĂ©pendance avec elles , 8c qu’il est seulement un rĂ©sultat de la liqueur dans laquelle il nage il est vrai que l’embryon m’a paru quelquefois nager librement dans ce fluide fans laisser apperccvoir aucun lien qui l’unĂźt aux graines, mais j’ai vu aussi clairement ces liens. On le voit nettement dans la FĂšve vulgaire , dans le Raifort, dans l 'Hibiscus Syriacus ; je veux parler d’une toile mu- cilagineuse , qui, en s’iniinuant au travers des deux lobes par un cĂŽtĂ© , va s’implanter dans la plantule, 8c qui, en sortant des lobes par l’autre, s’attache aux parties internes de la graine, §.VI, VIII 4 , XIX. Cette toile est trĂšs-probablement SUR LA GENERATION. un ĂĄggrĂ©gat de petits vaisseaux destinĂ©s, comme le cordon ombilical dans les animaux, Ă  fournir la nourriture Ăč la plantule ĂŽc aux lobes cette nourriture peut ĂȘtre, ou le liquide qui est dans la cavitĂ© des graines, qui se filtre ÔC se perfectionne dans de petits vases, ou la substance elle-mĂȘme des graines , aux dĂ©pens dc laquelle la plantule ÔC les lobes croissent ; au moins l’on volt qu’à mesure que ces derniers grossissent, la substance intĂ©rieure de la graine se dĂ©truit & se rĂ©duit Ă  une impie peau mais, outre cette communication sensible de cette toile avec l’embryon ĂŽc la graine , j’ai trouvĂ© plus d’une fois l’em- bryon liĂ© avec la graine par d autres parties , comme dans le Genet, les Pois, les Haricots, les Pois chiches, §. IV, Vil, IX. Mais si quelquefois je n’ai trouvĂ© aucun ligament entre l’embryon ĂŽc la graine , cela ne veut pas dire qu’il n’y en a point, mais plutĂŽt qu’à cause de son extrĂȘme petitesse , ou de sa transparence , on ne peut pas le distinguer ; de forte que, de mĂȘme que les embryons, dans lesquels ce ligament est visible, se dĂ©veloppent au milieu de la cavitĂ© des graines , ÔC croissent invariablement comme ceux dans lesquels ce ligament ne s’apperçoit pas , pareillement nous sommes fondĂ©s Ă  croire qu’il existe dans ceux-ci de mĂȘme que dans ceux oĂč nous lavons dĂ©montrĂ©. La petitesse, ÔC sur-tout la transparence de ces ligamens, peut les dĂ©rober Ă  l’Ɠil ; mais, outre la preuve que nous en avons dans les embryons qui n’ont pas subi faction du feu, §. XXXVIII nous cn avons un exemple frappant dans le; z8o E xpÏRĂ­f »f£Í tĂȘtards du Crapaud puant terrestre , pendant qu’ils nagent dans la liqueur de l’amnios, quoi- qu’ils soient fournis du cordon ombilical ; cependant leur transparence empĂȘche de les distinguer. On ne peut donc croire que l’embryon soit mĂ©chaniquement produit dans les ovaires de la plante ; bi comme il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© qu’il est indĂ©pendant de la poussiĂšre des mĂąles , il faut nĂ©cessairement conclure qu’il prĂ©existe dans les ovaires ; St nous avons une autre preuve trĂšs- forte de cette prĂ©existence , dans la communication physique de l’embryon avec la graine, par le moyen de ses ligamens, que j’ai dĂ©couvert ; car il est Ă©vident que la graine St l’embryon ne doivent faire qu’un tout organique. Puis donc que les graines prĂ©existent dans les ovaires, comme je l’ai fait voir, St qu’elles y prĂ©existent long-tems avant ['Ă©panouissement des fleurs, je ne comprends pas pourquoi on n’assureroit pas aussi la prĂ©existence des embryons. X L. Le cĂ©lĂšbre Muller , Gentilhomme Danois, fit Ă  GenĂšve il y a plusieurs annĂ©es , fous les yeux de M. Charles Bonnet , une observation fort analogue Ă  celle dont je parle dans cet Ă©crit. II fit voir les petites graines des Pois disposĂ©es en file dans les siliques avant ['Ă©panouissement des fleurs, St par consĂ©quent avant faction des poussiĂšres pour les fĂ©conder; mais il ne pensa pas Ăą pousser cette observation , en observant ['intĂ©rieur de ces petites graines St Ă  suivre leur dĂ©veloppement. M. Bonnet sentit ['importance de ce fait il rĂ©flĂ©chit sur ces l sur la GĂ©nĂ©ration. 3 S r graines ^ il y vit des corps organisĂ©s qui croient en petit ce qu’ils seroient en grand; que toutes leurs parties formoient des touts organiques, comme toutes les parties d’un Ɠuf, avant la fĂ©condation, forment la mĂȘme union organique. II jugea avec fondement que, dans les petites graines des Pois, dĂ©montrĂ©es par le Naturaliste Danois, on trouveroit la plantule avec ses lobes, comme on trouve dans l’ceuf l’embryon 8t ses enveloppes. 11 se crut suffisamment autorisĂ© pour en conclure que, comme les graines des Pois prĂ©existent Ă  l’épanouissement des fleurs, 8c par consĂ©quent Ă  faction des poussiĂšres fĂ©com dames , de mĂȘme l’embryon 8Ă­ les lobes y prĂ©existoient pareillement i . Cette consĂ©quence est Ă -peu-prĂšs la mĂȘme que celle que j’ai tirĂ©e de mes nombreuses observations, §. XXXIX. On me demandera peut-ĂȘtre si, aprĂšs avoir prouvĂ© la prĂ©existcnce'des embryons dans mes plantes Ă  leur fĂ©condation ou Ă  leur Ă©panouissement , j’ai pensĂ© rendre visibles ces embryons avant 1 Ă©panouissement ? mais je puis rĂ©pondre que j’ai fait inutilement cette expĂ©rience. Ayant pris ces petites graines hors des fleurs formĂ©es, je les ai anatomisĂ©es fous de fortes lentilles , mais je n’ai rien dĂ©couvert de plus qu’avec des lentilles plus foibles ; je ne voyois qu’une substance similaire 6c gĂ©latineuse, doutant si l’embryon s’échappoit aux regards Ă  cause de sa petitesse, ou Ă  caisse de sa transparence , puis- i PalingĂ©nĂ©sie, T. I, p. 410 Sc 411. 'zkr. ExpĂ©riences que cette gelĂ©e me paroiĂ­soit transparente ; jĂš fis bouillir un peu ces petites graines, j’en mis d’autres dans l’esprit de vin , la gelĂ©e s’affermit dans les deux cas, mais l’embryon n’en devint pas plus remarquable. Les infusions colorĂ©es servent avantageusement les Physiciens pour faire remarquer quelques organes des plantes. M. Bonnet a dĂ©couvert par ce moyen les petits .vaisseaux qui serpentent dans les lobes, ĂŽĂ­ qui partent de l’embryon i je laissai donc ces petites graines plus ou moins long-tems , dans ces infusions ; elles y prenoient leurs couleurs extĂ©rieurement, mais je n’appercevois pas la trace des embryons ; Sc comme je ne pus les appercevoir, je n’apperçus pas mieux les lobes, & je ne fus pas plus heureux pour les petites graines des fleurs formĂ©es, que pour celles des fleurs Ă©panouies. II en fut de mĂȘme quand la cavitĂ© s’étoit formĂ©e dans les petites graines aprĂšs la chute des fleurs , seulement l’esprit de vin , en coagulant la liqueur de leur cavitĂ© , raffermit la plantule 8c la rendit visible cinq ou six jours plutĂŽt quelle ne l’auroit Ă©tĂ© , comme je pus en juger en les comparant avec des graines du mĂȘme Ăąge , laissĂ©es fur la plante, qui ne laissĂšrent voir la plantule que plus tard. Ceci confirme la vĂ©ritĂ© Ă©tablie, que les embryons ne s’engendrent pas dans les petites graines, mais qu’ils s’y dĂ©veloppent seulement, comme je l’ai fait voir §. XXXVIII, XXXIX ; on voit ainsi en mĂȘme tems-la grande difficultĂ© L t Recherches fur l’usage des feuilles. SUR LA G ÉR É RAT I 0 N. z8; & presque l’impoffibilitĂ© de dĂ©couvrir la plan- tule avant l’épanouissement des fleurs. Quand l’esprir de vin me le fit voir , c’étoit un trĂšs- petit atome de matiĂšre , quoiqu’il y eut quinze jours que la fleur fur Ă©panouie. Cependant on ne peut douter que dans cet intervalle la plan- tule n’eur passĂ© par les degrĂ©s nuancĂ©s d’accrois sement, qui sont les plus grands dans les com- mencemens. Combien donc devoir - elle ĂȘtre immensĂ©ment petite avant l’épanouissement de la fleur ; 8c comment peut-on espĂ©rer de la distinguer, puisqu’elle est alors Ă­ĂŹ prodigieusement petite ? X L I. L’illustre Haller a montrĂ© le premier que dans les oiseaux le fƓtus prĂ©existoit Ă  la fĂ©condation j’ai dĂ©couvert la mĂȘme vĂ©ritĂ© en divers genres d’amphibies; 8Ă­, fondĂ© fur ces faits, j’ai cru qu’on pouvoir conclure que cette prĂ©existence des fƓtus, observĂ©e dans ces animaux , a vraisemblablement lieu dans les autres. Ce qu’on trouve da/is plusieurs animaux se voit de mĂȘme en diffĂ©rentes espĂšces de plantes , oĂč les embryons prĂ©existent Ă  l’épanouissement des fleurs. Je puis donc tirer une consĂ©quence semblable pour les autres plantes ; mais je voudrois bien dĂ©voiler fur ce point capital mon opinion. Je n’ose pas affirmer que les embryons de toutes les plantes prĂ©existent dans les ovaires Ă  l’épanouissement des fleurs ; mon jugement seroit trop prĂ©cipitĂ© , puisque mille exemples nous apprennent combien la nature varie ses opĂ©rations, quoiqu’elles aient le mĂȘme but 384 ExpĂ©riences pour objet; je dis seulement que, jusqu’à-ce que nous ayons des argumens qui dĂ©montrent 1 contraire, nous avons le droit de persister dans cette opinion ; or cette prĂ©existence universelle dans les animaux , ausii bien que dans les plantes, forme un nouveau trait trĂšs-lumi- neux d’analogie entre ceux qu’il faut ajouter Ă  tous ceux qui font connus, & augmente beaucoup le soupçon qu’on a que ces deux grands peuples d’ĂȘtres organisĂ©s forment peut-ĂȘtre une feule grande famille. X L I I. Le Basilic 6Ă­ la Mercuriale font deux plantes qui prouvent avec tant d’autres la nĂ©cessitĂ© des poussiĂšres pour la fĂ©condation ; la seconde sur-tout mĂ©rite la rĂ©flexion du Philosophe. Quelques pieds de Mercuriale femelle , peu Ă©loignĂ©s du mĂąle , restent stĂ©riles ; la petite quantitĂ© de ces poussiĂšres l’empĂȘche de se rĂ©pandre au loin dans l’athmosphĂšre, §.XXXI1I, XXXV I ; mais Ă­i l’on en approche les mĂąles , elles commencent alors Ă  produire des graines fĂ©condes, §. XXXIV. Si le voisinage est plus prĂšs, si les plantes mĂąles 6c femelles font en contact , alors toutes les graines font bonnes , §. XXXV. Eloigne-t-on les plantes mĂąles, les plantes femelles redeviennent stĂ©riles, tz. XXXVI. Cette expĂ©rience est tout-Ă -fait consonante avec celle de Bernard de Jussieu ĂŽc de Du Hamel , qui, voyant un ThĂ©rĂ©binte femelle , plantĂ© dans un jardin de Paris, fleurissant chaque annĂ©e sans donner du fruit, parce qu’il manquoit d’une plante mĂąle pour le fĂ©conder , svn'tA GĂ»kĂ©ration. z 8 ; pensĂšrent de lui en donner une , ce qn’ils firent , St la ThĂ©rĂ©binte femelle donna des fruits 8c des graines fĂ©condes, mais elle redevint stĂ©rile l’annĂ©e suivante , parce que le ThĂ©rĂ©binte mĂąle, qui Ă©toit dans un vase, fut rapportĂ© Ă  sa place i. X L I I I. L'expĂ©rience cĂ©lĂšbre bc heureuse faite par Gleditsch Ă­ĂŹir la Palme , noinmĂ©te par Chamairops, est connue cette Palme, qui se trouvoit dans le jardin royal de Berlin , ue donnoit point de fruits , quoiqu’elle eĂ»t quatre-vingt ans. Ce Naturaliste pĂ©nĂ©trant jugea que cela provenois de ce qu’il n’y avoir point de Palmiers mĂąles dans le jardin , 8>C ne pouvant pas y en faire porter un , il se procura les poussiĂšres d’un Palmier mĂąle de cette espĂšce , Sc il en poudra les fleurs de son Palmier femelle , qui donnĂšrent dans le rems des Dattes; les graines, semĂ©es en terre, germĂšrent Sc donnĂšrent naissance Ă  de petits Palmiers , tandis que les autres fleurs, qui n’avoient pas Ă©prouvĂ© Testet des poussiĂšres, laissĂšrent couler leur fruit ; dans le petit nombre de celles qui nouĂšrent, il n’y eut point de noyaux, Sc il n’y en eut point de fĂ©condes i. Cependant la poussiĂšre employĂ©e n’étoit pas fraĂźche , elle devoir ĂȘtre dessĂ©chĂ©e , puĂŹfqu’elle Ă©toit recueillie depuis neuf jours. Pendant que j’étudiois la Mercuriale , il ne i Physique des arbres, T. I. 2 Acadi de Berlin, 1767. Bb z86 ExpĂ©riences me vint point dans l’efprit d’essayer la fĂ©condation artificielle ; mais je n’hĂ©lĂŹte pas un moment Ă  croire qu’elle n’eut rĂ©ussi parfaitement comme au Botaniste Prussien ; Sc comme ces fĂ©condations artificielles font trĂšs-propres Ă  rĂ©pandre du jour fur la gĂ©nĂ©ration des ĂȘtres organisĂ©s, j’exhorte beaucoup les Botanistes philosophes Ă  les tenter fur la Mercuriale, qui est une plante fi commune, Sc qui a des rapports avec la Palme. 7e fouhaiterois d’abord, s’il m’est permis de faire connoĂźtre mes idĂ©es, que l’on portĂąt ses premiers regards furies poussiĂšres de la Mercuriale , pour dĂ©couvrir quelle est la partie de cette poussiĂšre qui est i’agent de la fĂ©condation. Je le difois §. XV ; cette poussiĂšre , dans les plantes, est un composĂ© de vĂ©sicules, oĂč l'on a su trouver une liqueur subtile , dans laquelle nagent plusieurs globules cette observation a produit divers scntimens ; les uns ont cru que les globules Ă©toient les agens de la fĂ©condation y d’autres ont pensĂ© que c’étoit la liqueur ; d’au- tres, enfin, ont imaginĂ© que cetoit une espĂšce de vapeur prodigieusement subtile, une espĂšce d’esprit vital qui s’cxhalc de cette liqueur, Lc dont elle est le vĂ©hicule i. Quelques expĂ©riences dĂ©licates pourroient faire connoĂźtre la vĂ©ritĂ©. Quant Ă  l’esprit soupçonnĂ© , on pourroit le mettre en expĂ©rience en faisant sortir hors des vĂ©sicules par le moyen de l’hu- miditĂ© la liqueur qu’elles renferment, la tenir exposĂ©e Ă  l’air Lc chercher Ă  fĂ©conder ainsi i Adanson, familles des plantes, sur la GĂ©nĂ©ration'. ^87 les fleurs Ă  pistils de la Mercuriale. Si la fĂ©condation ne rĂ©ussistoit pas par ce moyen , il faudroit conclure qu’il n’en est pas fagent , ou du moins que la partie la plus volatile dc cette liqueur n’y joue aucun rĂŽle. Ensuite , Ă­i la fĂ©condation avoir lieu, malgrĂ© cette Ă©vaporation, il faudroit voir Ă­i c’eĂ­f la liqueur ou les globules qui TopĂšrent ; $Ă­ par cette supposition on vĂ©ri- fleroit sur les plantes ce que j’ai vĂ©rifiĂ© fur les animaux ; c’elf-Ă -dire , que la partie la plus subtile dc la liqueur sĂ©minale n’est pas la partie prolifique , mais que c’est la partie la plus grossiĂšre St la plus sensible. Pour savoir si les globules ou la liqueur font sĂ©parĂ©ment les causes de la fĂ©condation de Tembryon, il faudroit sĂ©parer les uns des autres, ensuite toucher quelques pistils avec Tun , St quelques pistils avec l’autre ; cette sĂ©paration ne seroit pas si difficile pour des personnes exercĂ©es dans des expĂ©riences dĂ©licates. X L I V. M. Adanson Ă©tablit comme un fait que la plus petite particule de poussiĂšre suffit pour la fĂ©condation quand elle tombe sur le stigmate du pistil. Si les choses se palsoient ainsi, il en seroit dc mĂȘme pour la fĂ©condation des plantes que pour celles des amphibies dont j’ai parlĂ©, qu’une goutte trĂšs-perite de semence peut fĂ©conder mais le cĂ©lĂšbre AcadĂ©micien ne donne ici qu’une hypothĂšse qui ne prouve rien pour cela, ni pour Tinfluence dc Tesprit vital, fĂ©condateur des plantes, quoiqu’il prĂ©tende qu’un esprit analogue , sortant du sperme des ani- Bb z z88 F X P E R I I » C ! Ăź maux , en fĂ©conde les embryons, ce que mes expĂ©riences ont dĂ©montrĂ© absolument faux. II n’y auroit rien de plus facile que de soumettre cette hypothĂšse Ă  l’expĂ©rience par des fĂ©condations artificielles fur la Mercuriale ; en les variant comme j’ai fait fur les animaux - il n’est pas douteux quelles ne fournissent de belles connoissances. X L V. Je trouve une ressemblance entre la liqueur spermatique des animaux 8Ă­ celle des plantes, qui me semble frappante ; elles conservent leur fĂ©conditĂ© pendant quelque rems aprĂšs avoir Ă©tĂ© tirĂ©e de leurs vaisseaux naturels. La liqueur spermatique des Grenouilles 8t des Crapauds conserve sa vertu prolifique pendant quelques jours aprĂšs fa sortie du corps de ces animaux ; de mĂȘme la poussiĂšre de la Palme mĂąle , relativement Ă  la Palme femelle , conserve sa vertu fĂ©condante pendant quelques jours , §. XLIII mais la semence des animaux devient stĂ©rile quand elle a Ă©tĂ© tirĂ©e du corps de ces animaux au bout d’un tems qui n’est pas bien long. Dirai-je qu’il arrive la mĂȘme chose Ă  la poussiĂšre aprĂšs la chute des fleurs. Voulant conĂ­ĂŹ- dĂ©rer la cause physique pour laquelle la liqueur sĂ©minale des animaux perd sa fĂ©conditĂ© , suivant toutes les apparences , il sembleroit que cette application n’est pas bien juste , la liqueur sĂ©minale des animaux devient stĂ©rile quand le rems est assez long pour lui faire Ă©prouver la putrĂ©faction ; car, en la prĂ©venant, elle ne cesse pas d’ĂȘtre prolifique. II paroĂźt qu’on n’a sur la GĂ©nĂ©ration. 389 pas lieu de craindre autant la pourriture pour les poussiĂšres, ou plutĂŽt pour cette liqueur trĂšs- Ă­ubtile qui y est cachĂ©e. Les analyses, faites par de trĂšs-habiles Physiciens, font croire que cette liqueur est huileuse , 6c qu’elle refuse de se mĂȘler avec seau 1 il paroĂźtroit donc que, comme les autres huiles, cette liqueur devroit se conserver saine long-tems ; 6c par consĂ©quent, que la vertu prolifique des poussiĂšres dure plus long-tems qu’on ne croit, peut-ĂȘtre quelques mois , 6c mĂȘme plusieurs annĂ©es. Cependant, malgrĂ© la qualitĂ© huileuse de la liqueur des poussiĂšres, qui doit la mettre Ă  l’abri de la putrĂ©faction , je pense que sa vertu prolifique ne se conserve pas fi long-tems. Afin que cette liqueur 6c les globules qui y nagent, 6c mĂȘme l'esprit recteur de M. Adan- son conservent leur fĂ©conditĂ© , il faut que, quand elle agit sur les stigmates des pistils, elle forte alors des vĂ©sicules , ou qu’elle en soit sortie depuis peu de tems, puisque sa communication avec l’air commun , Ôt son exposition Ă  l'injure des mĂ©tĂ©ores, en la dispersant, saltĂ©rant, doit lui ĂŽter ses propriĂ©tĂ©s pour la fĂ©condation ; mais cela ne peut arriver que dans les poussiĂšres dĂ©jĂ  mĂ»res. M. Needham a observĂ© le premier , 6c son observation a Ă©tĂ© rĂ©pĂ©tĂ©e par d’autres comme par moi, qu’en Ă©tudiant avec le microscope la poussiĂšre quelconque des Ă©tamines lorsqu’elle est mĂ»re, on y trouve toujours des vĂ©sicules vuides , d’amres qui font encore 1 Gleditsch , MĂ©moires dc l’Ac. de Berlin. Bb 3 390 ExpĂ©riences pleines de leur liqueur mais on la fait fbrtfr en les humectant ; alors on voit avec plaisir, au bout de quelques secondes, que lorsque la poussiĂšre a Ă©tĂ© humectĂ©e , plusieurs vĂ©sicules Ă©clatent comme un Ă©olipyle fortement Ă©chauffe par le feu ; Sc pendant l’édat de ces vĂ©sicules, il en fort la liqueur qu’elles renfermoient. II rĂ©sulte de-lĂ  que le superflu des vĂ©sicules qui restera aprĂšs la fĂ©condation , qui communiquera avec l’athmosphĂšre Sc Rattachera aux corps terrestres, ne tardera pas Ă  Ă©clater 8c Ă  rĂ©pandre la liqueur concentrĂ©e, soit que les vĂ©sicules s’ouvrent dĂ©lies - mĂȘmes , soit que l’humiditĂ© contribue Ă  leur Ă©clat, comme, par exemple, celle que les vapeurs de l’air, ou les rosĂ©es, ou la pluie leur font Ă©prouver tout ceci me persuade que la vertu prolifique des poussiĂšres ne doit pas durer long-tems aprĂšs la fĂ©condation, fur-tout lorsqu’il a plu , comme on le voit dans plusieurs plantes qui font stĂ©riles lorsqu’clles fleurissent, au moins pendant qu’ilpleut, parce que la pluie dissout les vĂ©sicules des poussiĂšres avant qu’elles touchent le stygmate pour fĂ©conder les embryons dans l’ovaire, suivant l’obscr- vation de quelques Naturalistes. . Quoi qu’il en soit, il faudroit Ă©prouver dans la Mercuriale Sc dans d’autrcs plantes combien de te m s les poussiĂšres conservent leur vertu prolifique , Sc cette observation seroit trĂšs- intĂ©ressame. X L V I. On admettoit comme une chose prouvĂ©e, que la fĂ©condation avoit lieu dans les plantes sur lĂ  GĂ©nĂ©ration. zyr lorsque quelques vĂ©sicules ou petits grains de poussiĂšre, entrĂ©s par petits grains dans le pistil, s’introduisoient plus ou moins dans la longueur de ce conduit, oĂč, serrĂ©s par ses parois Ă©troites & humectĂ©s par le suc qui en suintoit, ils s’ouvroienc 8t lançoient la vapeur spermatique qui pĂ©nĂ©trois l’ovaire Sc y fĂ©condoit les graines mais cette explication n’a pas eu le bonheur de plaire Ă  M. Adanson ; il ne nie pourtant pas la prĂ©existence de la graine dans l’ovaire ni qu’elle soit fĂ©condĂ©e par la liqueur des poussiĂšres , ou, comme il dit, par l’esprit vital qui raccompagne ; mais il prĂ©tend seulement que le conduit dont j’ai pariĂ© n’est pas la route de l’esprit vital pour arriver Ă  la graine , 8Ă­ cela parce que cette route n’elt pas celle qu’elle fuit dans plusieurs plantes, quoiqu’il accorde que dans diverses plantes ce conduit s’étende depuis les stygmatcs jusques Ă  l’ovaire, comme dans plu- licurs LiliacĂ©es ; mais il nie que cela soit ainsi dans le plus grand nombre des autres plantes dont les pistils font , suivant lui, parfaitement fermĂ©s aussi , pour expliquer la fĂ©condation , il imagine son esprit vital, dont la subtilitĂ© ne doit pas ĂȘtre infĂ©rieure au stuĂŻde Ă©lectrique , qui s’inlĂŹnue dans les trachĂ©es terminant la surface des stigmates , qui descend au placenta, pĂ©nĂštre les graines & cn fĂ©conde l’embryon. M. Bonnet , dans son profond MĂ©moire intitulĂ© IdĂ©es fur la fĂ©condation des Plantes i, en rapportant le sentiment de M. Adanson , i Journal de Rosier, 1774. Bb 4 3 C mĂȘme pas si loin , 8t qu’enfin dans d’autres on ne voyoit aucun trou. Je n’ai fait aucune observation sur le pistil de la Mercuriale il convien- droit d’en faire, St l’on pourroit alors chercher la valeur de l'hypothĂšse qui prĂ©tend que la fĂ©condation ne rĂ©ussit pas par l’intromission d’une liqueur subtile fĂ©condante dans le conduit des pistils , mais feulement dans les trachĂ©es qui aboutissent Ă  la surface des stygmates. Je vou- drois donc qu’avec cette poussiĂšre on touchĂąt cette surface sans la laisser entrer dans l’ouver- ture du stygmate, Lt que, dans les autres pistils, on tentĂąt l’inverse de l’cxpĂ©nence, en faisant entrer la poussiĂšre dans l’ouverture du stygmate, mais" en laissant intacte fa surface. S V R LA GÉSÉRATION. Z9Z X L V I I. Mais parce que je n’ai dĂ©couvert aucun conduit dans les pistils, je fuis bienĂ©loignĂ© de croire qu’il n’y en ait point, comme M. Adanson, dont j’envie le savoir , sans ĂȘtre curieux dc fa logique. J’aivu , avec plusieurs Naturalistes avant moi, que les vĂ©sicules ou les petites graines des poussiĂšres varient de grandeur suivant l’es- pĂšce des plantes, de maniĂšre qu’il y cn a qui font aller grands pour ĂȘtre perceptibles au microscope, tandis que d’autrcs ne fauroient l’ĂȘtre qu’avec une trĂšs-grande peine Ă  cause de leur petitesse ; &Ă­ je vis facilement qu’il y en a de fi petits qu’on ne fauroit les distinguer. En supposant que le conduit des pistils soit le vĂ©hicule de la fĂ©condation , son calibre fera proportionnel aux petites graines , ce conduit fera grand quand ceux-ci feront grands, 8t quand les- petits grains deviendront invisibles , les conduits le deviendront pareillement, alors on ne pourra les distinguer , quoiqu’ils existent. Pour rendre cette rĂ©flexion vraie, il fa u droit voir Ă­i , lorsque les pistils se montrent Ă  l’Ɠil dans les plantes fans conduits, leurs grains font invisibles. Mais quand ces petits grains feroient encore sensibles, & que les pistils correspondant paroĂźtroient fans conduits , il ne fau- droit pas en conclure qu’il n’y en a point ; on pourroit les examiner dans un terris oĂč ils ne feroient pas encore ouverts, ou bien oĂč ils feroient fermes. Je veux Ă©claircir cette proposition. Le cĂ©lĂšbre LinnĂ© , dans fa Dissertation , intitulĂ©e Sponsalia plantarum , qui est la meilleure V 394 ExpĂ©riences 1 de toutes celles qu’on lit dans ses AmƓnitatcs AcademicƓ , entre les diffĂ©rens lignes qu’il donne pour montrer que la femelle des plantes recherche le mĂąle , raconte qu’elle tient ouvert vers lui le stigmate du pistil, St qu’elle le ferme aussi-tĂŽt qu’elle en est rassassiĂ©e. Gratiola , ce font ses paroles , ajlro vencreo agitata pijlillum stigmate hiat rapacis injlar draconis ml nifi majculinum pulverem affectant , at fatiata ricium claudit il fe sert des mĂȘmes expressions pour d’autres plantes. Le Lecteur m’a dĂ©jĂ  entendu. Je veux dire qu’il pourroit arriver qu’en ne prenant pas le tems prĂ©cis de l’amour de la plante , la petite bouche du stigmate ou fut fermĂ©e , ou ne fut pas encore ouverte , 8c qu’on jugeĂąt ainsi faussement que ces pistils font fans ouvertures. On voit cela dans les animaux, &Ă­ fur-tout dans divers amphibies, comme les Crapauds, les Grenouilles, les Salamandres , dont les femelles, dans le tems de leurs amours, onr les canaux des Ɠufs fort ouverts, quoiqu’ils soient fermĂ©s dans les autres momens de leur vie , qu’on peut Ă  peine y introduire un petit filet. Si l’on me demande quel est le vrai tems des amours des plantes pour y chercher alors les conduits des pistils , je rĂ©pondrai, avec le cĂ©lĂšbre GlĂ©ditsch , que c’est lorsque les dĂ©licates verrues , qui bordent le stigmate , font lĂ©gĂšrement couvertes d’une humiditĂ© analogue Ă  celle qui transfude des vĂ©sicules des poussiĂšres ; c’est alors prĂ©cisĂ©ment le tems de la fĂ©condation. s v r la GĂ©nĂ©ration. 395 X L V I I I. J’ai dit plus haut qu’au lieu de toucher avec la poussiĂšre de la Mercuriale l’ouvenure du stigmate , on pouvoit seulement toucher sa surface , §. XLVI ; mais je voudrois encore qu’on touchĂąt d’autrcs parties, pour voir fi cela ne rĂ©ussirent pas , comme par exemple la surface du stile ; on pourroit aussi tenter la fĂ©condation par les feuilles, fur-tout par les pĂ©tales de la Mercuriale femelle , 8t par les racines, comme M. Bonnet l’a pensĂ© St me savoir communiquĂ©, afin que je l’effectuassc , ce que mes autres Ă©tudes ne m’ont pas permis de faire. X L I X. Mais finissons les rĂ©flexions fur la Mercuriale , St passons Ă  celles que prĂ©sentent les autres plantes. La Mercuriale St le Basilic ont fait voir la nĂ©cessitĂ© des poussiĂšres pour la fĂ©condation. La Courge Ă  Ă©cu , le Melon d’eau, le Chanvre, les Epinars nous prĂ©sentent un phĂ©nomĂšne tout opposĂ© , elles produisent des graines fĂ©condes fans l’influence de la poussiĂšre des mĂąles, St pour m’assurer de ce fait, j’ai employĂ© les prĂ©cautions les plus recherchĂ©es, St j’ai eu les preuves les plus dĂ©cisives. La Courge Ă  Ă©cu a portĂ© des fruits dans un lieu oĂč , Ă  la distance de plusieurs milles , il n’y avoir pas des plantes de cette espĂšce , ni d’au- tres analogues. Toutes les fleurs mĂąles ont Ă©tĂ© dĂ©truites au moment oĂč elles paroissoient, §. XX , XXI. J’ai employĂ© ces deux prĂ©cautions pour le Melon d’eau ; mais pour augmenter la furetĂ© , j’y ai joint une prĂ©caution , c’est zy 6 ExpĂ©riences d’îter tout accĂšs Ă  l’air intĂ©rieur dans le IietĂ­ oĂč Ă©toient les fleurs femelles, pendant tout le tems nĂ©cessaire pour la fĂ©condation, en plaçant les fleurs 8c le rameau qui les portoit dans une bouteille de verre , §. XXII. J’ai eu diverses attentions pour les Chanvres, j’ai enfermĂ© quelques individus femelles dans une chambre trois semaines avant la floraison, 8c je les y ai tenues enfermĂ©es pendant le tems de ia maturitĂ© des graines ; j’ai mĂȘme gardĂ© pendant ce tems quelques rameaux de ces individus enfermĂ©s dans des bouteilles de verre pendant tout ce tems. Enfin, j’ai tait fleurir quelques pieds de Chanvres femelles un mois 8c demi avant la floraison des Chanvres de la campagne ; 8c je me fuis constamment assurĂ© qu’aucune fleur mĂąle n’avoit poussĂ© fur ces Chanvres femelles, tz. XXVI, XXVII, XXVIII, XXIX. J’ai pris les mĂȘmes prĂ©cautions pour les Epinars ; j’ai tenu quelques individus femelles dans un jardin oĂč il n’y avoit point de mĂąle. Secondement, je les ai gardĂ© dans le tems des fleurs Ă  pistils, couverts par un vase de verre ; troisiĂšmement, je les ai fait fleurir long-tems avant qu’il parut des fleurs Ă  Ă©tamines dans les jardins ÂŁĂ­ les campagnes enfin, je me fuis assurĂ© qu’il n’y avoit jamais eu de fleurs mĂąles fur ces Epinars femelles, §. XXX, XXXI, XXXII. Une circonstance qu’il ne faut pas omettre pour le Chanvre , c’est que les Chanvres enfermĂ©s dans la chambre ont donnĂ© moins de graines que les autres qui ont crĂ» dans la campagne , 8C elles ont Ă©tĂ© plus petites ; ce double dĂ©faut a SVJi la GĂ©SĂ©katiox. 397 Ă©tĂ© plus sensible dans les rameaux enfermĂ©s dans les bouteilles, §. XXVII, XXVIII. Est-ce parce que la poussiĂšre a manquĂ© ? Je ne puis le croire, la clĂŽture de la chambre , Sc fur-tour celle des bouteilles, peut y avoir contribuĂ© en empĂȘchant les plantes de se perfectionner, comme elles auroient dĂ» , SĂ­ par consĂ©quent, de former des graines vigoureuses , comme dans la campagne , oĂč elles ont joui de l’air libre Sc de l’influence immĂ©diate de la lumiĂšre ce qui me paroĂźt d’autant plus vrai que les Chanvres, qui fleurirent un mois Sc demi avant les autres, quoiqu’ils eussent Ă©tĂ© privĂ©s de poussiĂšre , produisirent cependant des graines Ă©galement nombreuses , grosses Sc fĂ©condes que celles de la campagne ; il efl vrai qu’ils avoient Ă©tĂ© toujours exposĂ©s Ă  1 air Sc au soleil , §. XXIX. II rĂ©sulte donc de ces observations fur le Chanvre , les Courges, les Epinars, confrontĂ©es avec celles qui ont Ă©tĂ© faites fur le Basilic , la Mercuriale , les Palmes, les ThĂ©- rĂ©bintes , &c. qu’il y a un trĂšs-grand nombre de plantes qui ont besoin des poussiĂšres des mĂąles pour ĂȘtre fĂ©condĂ©es, mais qu’il y en a qui font fĂ©condĂ©es fans ces poussiĂšres 8c si nous ne connoissons encore qu’un trĂšs-petit nombre de ces derniĂšres plantes, il ne faut pas douter qu’elles ne deviennent plus nombreuses en raison du nombre des observateurs, de leurs ta- lens, 8c de leur sagacitĂ©, pour Rappliquer Ă  cette branche de la physique vĂ©gĂ©tale. L. Mais en Ă©tablissant qu’il y a des plantes qui zy8 ExpĂ©riences sont fĂ©condĂ©es fans poussiĂšre mĂąle , j’attaque les Botanistes modernes 8c les Physiciens qui m’opposent CÉSALPIN SC tous ceux qui l’ont suivi, avec tous les Naturalistes les plus cĂ©lĂšbres, Grew, Ray, Camerarius, Morland, Geoffroy, Vaillant, Jussieu, DuHamel, Adanson , Bonnet, qui ont admis le double sexe dans les plantes 5c leur concours pour la fĂ©condation. 11s me mettent fous les yeux le prince des Botanistes modernes, qui a employĂ© une Dissertation pour cĂ©lĂ©brer les amours des plantes , pour dĂ©crire leurs parties sexuelles, 8C qui Ă©tablit tout son Systems de la Nature sur cette base comme surune base inĂ©branlable. II dĂ©finit aussi les fleurs les organes de la gĂ©nĂ©ration des plantes qui servent Ă  la fĂ©condation des graines. II fait voir que la poussiĂšre des Ă©tamines se rĂ©pand, que le stigmate des pistils en reçoit les influences , que la position des pistils est toujours telle qu’ils peuvent facilement recevoir la poussiĂšre en un mot, je me rappelle qu’il a prouvĂ© lumineusement la nĂ©cessitĂ© des pistils ÔC des Ă©tamines pour la fĂ©condation ; car , en coupant les Ă©tamines ou les pistils des fleurs hermaphrodites avant qu’elles soient Ă©panouies , il fait voir qu’il n’y a point de fructification , Sc qu’il arrive la mĂȘme chose quand les Ă©tamines se changent en pistils ou quand les pistils s’élargissent en petites feuilles. Enfin , ils joignent, pour la confirmation de tout cela, les diffĂ©rentes fĂ©condations artificielles obtenues fur diffĂ©rentes plantes par le moyen des poussiĂšres ; d’oĂč il semble ne rester aucun doute svr la GĂ©nĂ©ration. 399 que faction de la poussiĂšre fĂ©condante pour la fĂ©condation des plantes ne soit une loi gĂ©nĂ©rale de la Nature. L I . Je connoissois toutes ces raisons, j’avois pesĂ© leur force quand je faisois mes expĂ©riences ; je savois , de plus, que quelques-unes Ă©toient autant d’oppoĂ­ĂŹtions Ă  celles du Pline du Nord, enrr’aurres Ă  celle-ci Cannabemflores maflculos tantum ferentem , fl ante divelles ruflica quam cannabis fĂ©minisera flores piflilliferos non aperuerit , nullam aut fane exiguam portabit feminum copiam 1. Je connoissois de mĂȘme le sentiment de M. Du Hamel , dĂ©veloppĂ© dans fa Physique des arbres ; il a Ă©tĂ© observĂ© qu un pied isolĂ© d’Epinars ne produit que tr'es- peu de graines capables de germer. Aussi , la premiĂšre fois que je lus l’opinion de cet Ă©crivain , je la crus ; je n’avois aucune raison pour en douter ; je l’adoptai mĂȘme dans une note Ă  la Contemplation de la Nature , imprimĂ©e pour la premiĂšre fois Ă  ModĂšne en 1770. Ces autoritĂ©s me rendirent plus attentif 8c plus prĂ©cautionnĂ© dans mes expĂ©riences ; mais cela ne m’a point empĂȘchĂ© d’embrasser un sentiment contraire , St de combattre des autoritĂ©s aussi respectables ; d’ailleurs , il m’a paru que Linneus n’avoit fait aucune expĂ©rience fur le Chanvre , &Z qu’il avoit seulement adoptĂ© l’opinion vulgaire , lorsqu’il avoit dit qu’en arrachant les Chanvres mĂąles avant la floraison 1 Sponf. Plant. '400 ExpĂ©riences des femelles , cette derniĂšre nc produit que trĂšs-peu ou point de graines mais cette opinion est anĂ©antie par l’heureuse fĂ©conditĂ© de tous les pieds de Chanvres femelles, que j’ai Ă©levĂ© parfaitement sĂ©parĂ©s des mĂąles, dont ils nc pouvoient recevoir l’influence. La pratique d u pays de Reggio St de ModĂšne combat de mĂȘme Linneus , puisqu’its arrachent les pieds mĂąles dans le tems que les femelles vĂ©gĂštent encore pendant plusieurs semaines, St produisent encore abondamment des graines fĂ©condes; je rappelle un fait pareil au paragraphe XXIV. ĂŻ! faut encore confronter mes observations fur le Chanvre St leurs dĂ©tails avec ce que dit le Professeur d’Upfal fur ce sujet, St se dĂ©cider ensuite ; j’applique cette rĂ©ponse Ă  Du Hamel pour les Epinars. Si la stĂ©rilitĂ© de cette plante , isolĂ©e St sĂ©parĂ©e des mĂąles, eĂ»t Ă©tĂ© le rĂ©sultat des expĂ©riences entreprises par ce Physicien illustre , j'auroĂŹs examinĂ© ces expĂ©riences pour leur rendre la justice qu’elles mĂ©ritent ; mais il rapporte ce qu’on croit, St cette opinion est dĂ©montrĂ©e par les faits que j’ai rapportĂ©s. On voit clairement Ă  prĂ©sent que la disposition du pistil pour recevoir la poussiĂšre des Ă©tamines , n'est pas une preuve directe pour le concours des sexes, mais seulement des raisons de convenance plus propres Ă  entraĂźner un assentiment qu’à le forcer, pour parler avec Bacon. L I I. Quant Ă  l’argument tirĂ© de la fructification,- qui ne s'opĂšre plus quand on a coupĂ© les Ă©tamines svn la GĂ©hĂ©ratiox. 401 Ă©tamines ou les pistils, je dirai que ces exemples prouvent que les Ă©tamines 8t les pistils font les organes de la gĂ©nĂ©ration, mais qu’ils n’a- gissent pour la fructification que comme tant d’autres parties de la plante , qui, lorfqu’elles viennent Ă  manquer, nuisent Ă  la fructification fans qu’on ait imaginĂ© qu’elles pussent favoriser la gĂ©nĂ©ration. Les faits qui prouvent la nĂ©cessitĂ© du concours des sexes pour la fructification font ceux oĂč il n’y a point de fructification quand on Ă©loigne les plantes mĂąles des plantes femelles il en sera de mĂȘme des fĂ©condations artificielles. Mais ces faits, qui font si peu nombreux en comparaison de l’immense peuple des plantes, ne font pas suffisons pour gĂ©nĂ©raliser la loi du concours des sexes dans les plantes ; on ne tire pas des conclusions gĂ©nĂ©rales quand on n’a que des prĂ©misses particuliĂšres. Tout au plus pouvoir-on dire qu’à cause de la grande analogie qu’on observe dans les propriĂ©tĂ©s des plantes de classes, de genres, 8t d’espĂšces diffĂ©rentes, il Ă©toit permis de croire que le concours des sexes, qui Ă©toit dĂ©montrĂ© dans quelques individus, Ă©toit probable dans les autres plantes. Tout comme, parce que j’ai dĂ©couvert la prĂ©existence des fƓtus Ă  la fĂ©condation dans quelques femelles de divers animaux amphibies , 8c parce que Haller a fait une observation semblable dans les oiseaux, j’ai cru pouvoir avec fondement conclure qu’il Ă©toit probabse que cette prĂ©existence s’étendoit aux autres animaux ; & j’ai Ă©tendu cette consĂ©quence aux plantes, parce que j’ai observĂ© que les embryons de C c 4oi ExpĂ©riences de plusieurs plantes prĂ©existoient Ă  leur floraison , §. XLI. Mais les dĂ©fenseurs du concours des sexes dans les plantes ne doivent pas se prĂ©valoir d’un trĂšs-petit nombre de faits, pour faire , comme Linneus , une rĂšgle gĂ©nĂ©rale fans exception ni limites; car il dĂ©finit les fleurs les organes de la gĂ©nĂ©ration des plantes , qui servent Ă  la fĂ©condation des graines par le moyen des Ă©tamines, ou des poussiĂšres des fleurs mĂąles dont il fait autant de maris. Mais avant de dĂ©terminer ainsi le nombre de ces maris, il devoir au moins s’assurer s’ils en remplissoienr vĂ©ritablement les devoirs. Si ce cĂ©lĂšbre Naturaliste avoit moins sacrifiĂ© Ă  la nomenclature , ct s’ii avoir eu davantage l’efprit de recherches , il auroit fait une Ă©tude plus philosophique 8t plus approfondie des parties des fleurs, 8Ă­ il auroit pu mieux connoĂźtre la force ou la faiblesse de son syflĂȘme ; mais il vouloir l'Ă©lever fur les ruines de celui de Tournefort, ce qui n’a pas Ă©tĂ© bien avantageux pour la Physique botanique. L I I I. Entre les diverses choses que j’écrivois Ă  M. Bonnet, le 18 Octobre 1777, fur la gĂ©nĂ©ration des plantes, je lui faifois connoĂźtre les expĂ©riences qu6 j’avois faites & dont j’ai parlĂ© au commencement de la note du paragr. XXV; 8t quoique je commençasse seulement ces recherches , il me paroilfoit sĂ»r que la fĂ©conditĂ© des graines dans quelques plantes Ă©toit tout-Ă - fait indĂ©pendante de la poussiĂšre des Ă©tamines, & je lui faifois remarquer l’efpĂšce de sophisme des Botanistes jusques Ă  prĂ©sent. Cependant, sur la GĂ©nĂ©ration. 405 quoique je n’eus fait Ă  mon illustre ami qu’une esquille de ces expĂ©riences feulement commencĂ©es , il me fit la grĂące de les apprĂ©cier 8Ă­ d’en ĂȘtre persuadĂ© , quoiqu’il eĂ»t d’abord pensĂ© diffĂ©remment. Dans fa rĂ©ponse du r 9 Novembre, aprĂšs avoir exposĂ© toutes les raisons des dĂ©fenseurs du concours des sexes pour la fructification des plantes, il ajoute ces paroles qui font l’éloge de fa candeur MalgrĂ© cela , vos belles ex- » pĂ©riences me prouvent suffisamment que je » me trompois avec tous ces grands Naturalistes que je vous ai citĂ©s. Nous avons tous prĂ©ci- » pi tĂ© notre jugement, 8t tirĂ© une conclusion » gĂ©nĂ©rale de prĂ©misses particuliĂšres ; nous avons » cru nĂ©cessaire l’intervention des poussiĂšres » pour la fĂ©condation, parce qu’on avoit fait » des expĂ©riences fur diffĂ©rentes espĂšces de » plantes ; 8t nous devions nous borner Ă  dire , » qu’il sembloit rĂ©sulter de ces expĂ©riences que, » dans ces espĂšces, l’intervention des poussiĂšres » Ă©toit nĂ©cessaire pour la fĂ©condation ». L I V. Tel est l’écueil oĂč Ă©chouent les esprits systĂ©matiques ; ils concluent tous du particulier au gĂ©nĂ©ral. Ayant trouvĂ© quelques parties communes Ă  un nombre donnĂ© de plantes St qui ont un office dĂ©terminĂ©, des propriĂ©tĂ©s dĂ©terminĂ©es, ils s’imaginent aisĂ©ment que cela doit s’étendre Ă  toutes les plantes ; alors, fur ces parties qui ont de certaines fonctions, 8t fur leurs propriĂ©tĂ©s, ils bĂątissent un systĂšme botanique , sans rĂ©flĂ©chir qu’afin de donner Ă  ce systĂšme toute la gĂ©nĂ©ralitĂ© qu’ils lui attribuent, U falloit connoĂźue C c 1 > 404 ExpĂ©riences toutes les plantes du globe. Mais combien il y en a d’inconnues, combien les inconnues ne sont-elles pas plus nombreuses que les connues. Comment comprendre toute la masse des vĂ©gĂ©taux fous une rĂšgle ? Avons-nous dans le monde organique une feule loi qui soit vraiment universelle ? N’a-t-on pas Ă©tĂ© forcĂ© de borner celles qu’on avoit cru gĂ©nĂ©rales. M. Necker , dans fa Physiologie des Mousses , relĂšve ce dĂ©faut des Auteurs systĂ©matiques d’une maniĂšre qui caractĂ©rise l’Obfervateur l’Auteur systĂ©matique. Alterum fyjlematicum , alterum observatorem dijĂŹinguimus. Ille non nifi quibusdam planta- rum speciebus universa fiabilit fyflemata , Ă  particulari ad universale concludit , i. e. omnibus terraquei globi vegetabilibus easdem proprietates ac iis quĂČ expĂ©rimenta explorata sunt tribuit. Observator omnia theoretica rejieit syfiemata solis observationibus nec non experimentis in- nixas naturam scrutant. Perfeclio botanices ah individuorum fingulorum inter se affinium eo- rumque identicorum characierum notitia essen- tialiter pendet. Fa proportione notitia hac ac- quiritur quĂą Observatorum numerus qui valde exiguus augebitur syflematicorumque cumulus minuetur. Certum indubitatumque ejl quodsys- tematicum ingenium prƓcipua causa fit , cur de modico profeciu Botanices dolemus syfiemata botanica cum tempore exolescunt quia naturĂ­ ac experientiĂĄ potifiimum non nituntur. L V. La mĂ©thode de la Nature dans les plantes, par laquelle les unes ont besoin de poussiĂšres SVK LA GÉXÉRATIOH. 405 pour se multiplier, tandis que les autres n’en ont aucun besoin , est conforme Ă  ce qu’on observe tous les jours dans les animaux. Plu- lĂŹeurs animaux ne peuvent se multiplier sans accouplement ou le concours de la liqueur Ă  laquelle est attachĂ©e fimmortalitĂ© de i’espĂšce, comme on le volt dans les hommes , les quadrupĂšdes , les oiseaux, les poissons, les reptiles, les insectes ; mais un grand nombre d’animaux peuvent se multiplier sans ce secours , tels font les Polypes ĂŽt avec eux une foule d’animaux qui peuplent le fond des eaux douces, des fossĂ©s, des Ă©tangs, des marais 8t mĂȘme des eaux salĂ©es il faut leur joindre les pucerons des plantes dont le nombre est Ă­ĂŹ grand , 8c les animalcules des infusions qui se rapprochent des polypes 8t des pucerons dans leur multiplication. J’ai fait voir dans un de mes opuscules de Physique vĂ©gĂ©tale &. animale que ces animalcules se multiplioient par une division naturelle de leur corps ; qu’ils se partageoient en quatre , en lix, en huit; que les uns Ă©toient ovipares, les autres vivipares ; qu’ils Ă©toient tous rigoureusement hermaphrodites , comme on l’observe dans quelques plantes qui se multiplient d' fans l’influence de la poussiĂšre fĂ©condante. L V I. Mon impartialitĂ© ne me permet pas de dissimuler une objection qu’on peut me faire on pourroit me dire que , pendant que je faisois mes expĂ©riences fur la Courge Ă  Ă©cu fur le Melon d’eau , les Epinars St le Chanvre , je pouvois ĂȘtre sĂ»r que les poussiĂšres n’avoient eu C c 3 4 o 6 Exptnitucts aucun effet sur les pistils , mais que cela n’em- pĂȘchoit pas que les graines n'en eussent Ă©tc auparavant fĂ©condĂ©es, par exemple, quelques annĂ©es auparavant ; 6c que les graines festoient fĂ©condĂ©es par cette fĂ©condation, qu’elles avoient mĂ»ri cette annĂ©e, & que plusieurs autres qui en naĂźtroicnt pourroient encore mĂ»rir Ă  cause d’elle. Cette objection est celle du cĂ©lĂšbre Trem- bley Ă  M. Charles Bonnet aprĂšs fa dĂ©couverte de rhermaphroditisme des Pucerons. Qui fait, difoit ce Naturaliste plein de jugement, fi un accouplement ne sert pas Ă  plusieurs gĂ©nĂ©rations i . Quoique M. Bonnet reconnoisse ce doute pour ĂȘtre gratuit; cependant, comme il fortoit de la bouche d’un si grand Observateur, il s’occupa Ă  rĂ©pĂ©ter ses observations , St il crut ce soupçon dĂ©truit par dix gĂ©nĂ©rations consĂ©cutives de pucerons, obtenues fans accouplement i. Quant Ă  mes plantes, j’avouerai ingĂ©nument de n avoir eu que deux gĂ©nĂ©rations fans le concours des poussiĂšres. La nature de la chose ne me permettoit pas de satisfaire ma curiositĂ©, comme M. Bonnet, qui vit dans trois mois ces dix gĂ©nĂ©rations, 8t il m’auroit fallu r Bonnet , Corps organisĂ©s. i Quoique la dĂ©couverte de M. Bonnet soit publique depuis plusieurs annĂ©es, & qu’elle n’ait Ă©tĂ© attaquĂ©e par personne , en parlant des pucerons des plantes dans son Systema naturƓ, ne craint pas de dire dans l’édit. de 1767 A copula parentum facundas nasci filias , neptes , proneptes , abneptes djseverant entomotogi. f 17 R LA GÉNÉRATION. 407 dix ans pour en venir Ă  bout fur les plantes r; mais voici pourtant quelques lumiĂšres pour Ă©clairer l’objection i°. il n’y a aucun exemple qui apprenne qu’un accouplement ou une fĂ©condation ait servi Ă  plusieurs gĂ©nĂ©rations, car celui des Pucerons est dĂ©montrĂ© absolument faux ; x°. on a plulieurs exemples de gĂ©nĂ©rations multipliĂ©es fans accouplement ou fĂ©condation , comme dans le Polype Ă  bras, dont le corps poulie de petits Polypes, qui se dĂ©veloppent 8t donnent naissance Ă  d’autres Polypes , qui en engendrent d’autres de la mĂȘme maniĂšre ; de forte qu’on voit attachĂ©e fur la mĂȘme mĂšre une fuite de plulieurs gĂ©nĂ©rations St l’on fait que cette Polype mĂšre n’a eu aucun commerce avec d’autres Polypes, parcs qu’elle a Ă©tĂ© arrachĂ©e trĂšs-petite du corps d’une autre mĂšre, St tenue dans une parfaite solitude z. Si donc l’on observe cette suite de gĂ©nĂ©rations successives dans les animaux fans l’influence d’aucun principe sĂ©minal, pourquoi cela ne pourroit-il pas' avoir lieu dans quelques plantes ? ou plutĂŽt pourquoi cela ne devroit-il pas ĂȘtre ainli ? puifqu’il n’y a aucun fait qui prouve que les gĂ©nĂ©rations successives de quelque ĂȘtre organisĂ© soit le rĂ©sultat ou l’effet d’une fĂ©condation prĂ©cĂ©dente. L V I I. Cependant , quoique la multiplicitĂ© des faits que j’ai produis» me fasse exclure toute i Insectologie. r Tremblev, Polypes» C c 4 40 8 E X P É R I E N c r s action de la poussiĂšre des mĂąles fur mes plantes, cependant, je n'oserai pas nier toute fĂ©condation ; en mĂ©ditant ce sujet, j’ai pensĂ© quelquefois que les graines de ces plantes feroient peut-ĂȘtre fĂ©condĂ©es dans les ovaires par quelque principe sĂ©minal, cachĂ© dans les pistils ; ÔC ce doute est appuyĂ© fur l’obfervation que ü’ai faite d’une espĂšce de poussiĂšre fort semblable Ă  celle des Ă©tamines, fur le stigmate de quelques plantes, qui ne pouvoit pas sĂ»rement ĂȘtre la poussiĂšre dĂ©tachĂ©e des anthĂšres mais favoue que je n ai fait fur elles aucune autre observation ; j’ai Ă©tĂ© un peu confirmĂ© dans ce doute par la lecture du savant Kolreuter , qui dit que les propriĂ©tĂ©s de la poussiĂšre sĂ©minale des Ă©tamines font semblables Ă  celles que fournissent les stigmates. Ne pourroit-il donc pas arriver que cette poussiĂšre des stigmates eut la mĂȘme influence fur les graines de quelques plantes que celles des Ă©tamines. Mais ceci n’est qu’un doute , un soupçon, que je souhaite ardemment qu’urĂź habile Observateur veuille examiner par le moyen des expĂ©riences puisque je parle du stigmate , qui est la partie supĂ©rieure du pistil , je souhaiterois de mĂȘme que cet organe fut mieux approfondi, ÔC qu’on fit les recherches les plus exactes fur l’opinion qu’on a de son impermĂ©abilitĂ© dans quelques plantes, comme j'en ai parlĂ© §. XLVI, XLVIL Ces recherches , jointes Ȉ celles fur les Ă©tamines , dissiperoient bien des nuages, les fĂ©condations artificielles m’ont servi utilement pour diminuer les tĂ©nĂšbres qui voiloient Ja Tau. I. / A B atfuoiu S VR LA G É N É RA T Ăź 0 tf.' 40^ gĂ©nĂ©ration des animaux. J’indique donc aux Naturalistes ce moyen pour pĂ©nĂ©trer ce mystĂšre dans les plantes. L V I I I. Mais je voudrois engager encore les Naturalistes Ă  aller plus loin, 8i Ă  perfectionner davantage la Physique des plantes, les profondes recherches de Grew , Malpighi , Hales , Du Hamel , Bonnet, ont bien dĂ©veloppĂ© les plantes ligneuses, mais on a presque oubliĂ© lĂši plantes herbacĂ©es qui nous intĂ©ressent si fort, ĂŽt qui font si nombreuses nous en avons tout au plus une nomenclature fondĂ©e fur les descriptions des parties extĂ©rieures, nĂ©cessaires pour la mĂ©thode adoptĂ©e par leurs Nomen- clateurs. Je ne condamne point cette nomenclature , que je crois trĂšs-nĂ©cessaire ; car, enfin, il faut connoĂźtre les plantes avant de les Ă©tudier 1 je dis feulement que, comme la nomenclature effleure les choses, elle ne sauroit satisfaire la curiositĂ© d’un profond Observateur, ni avancer la Physique des plantes. Les corps naturels nĂ©* font pas des ĂȘtres simples , mais 1 La nomenclature est non-seulement nĂ©cessaire comme la Grammaire de l’Histoire naturelle , mais il faut la savoir pour se faire entendre des Naturalistes. Ainsi, en parlant des plantes 8c des animaux qui ne font pas les plus communs, on ne peut le faire fans fe servir des noms du SystĂšme de laNature de Linneus. MalgrĂ© ies dĂ©fauts de ce livre, on est sĂ»r d’ĂȘtre entendu par-totit. J’ai parlĂ© seulement des animaux 8c des plantes, parce que, pour les fossiles, on a coutume de se servir de Cronstidt & de Vallerius qui sont Jes Classiques de ce rĂšgne. 4io ExpĂ©riences ils font trĂšs-composĂ©s on peut les comparer, avec Muschembroeck, Ă  un horloge formĂ© par diffĂ©rentes roues, enfermĂ©es dans une boĂźte, qui empĂȘche de mesurer leur grandeur, leur action rĂ©ciproque 6c l’influence des ressorts ; de forte que, pour en avoir une idĂ©e juste], il faut mettre fous les yeux les parties intĂ©rieures, 6t les tirer de leur Ă©tui ; alors mĂȘme il ne suffit pas d’examiner la nature des corps employĂ©s , d’admirer leur poli, d’en suivre les apparences extĂ©rieures, mais il faut pĂ©nĂ©trer tous les dĂ©tails de leurs effets. Quand les premiers MinĂ©ralogistes eurent caractĂ©risĂ© les productions du rĂšgne fossile par la diversitĂ© des couleurs , la transparence , l’opacitĂ© , les surfaces rudes, polies, granuleuses, fibreuses, 6cc. ils n’avoient fourni que des idĂ©es vagues , superficielles , 6C presque trompeuses ; pour les connoĂźtre , iĂ­ falloir que la Chymie analysĂąt ces productions. Ce que la Chymie a fait pour le rĂšgne animal, l’Anatomie l’a fait de mĂȘme pour le rĂšgne animal ; 6t il faut savoir un trĂšs-grand grĂ© aux SWAMMERDAM, RhEDI, WaLLISNERI , RÉAU- mur , Lyonnet , d’Aubenton , 6c sur-tout pour les insectes Ă  l’ipimortel Malpighi , dont la Dissertation fur le Ver-Ă -soie est un tissu de dĂ©couvertes bien supĂ©rieur Ă  toutes les nomenclatures des insectes. Je voudrois donc qu’on fĂźt pour les plantes herbacĂ©es ce qu’on a fait pour les animaux 6c les minĂ©raux ; leur Ă©conomie , qui est l’objet le plus grand ÔC le plus important de l’histoire naturelle , doit sur-tout intĂ©resser nos recherches. Mais on ne peut 77rr,ls. l'ig. IX » ''fyfiĂŻĂ­W''’ S U J» * * r* U Ă  F / t f Ă­IlJ/IO/IL / n*W^'' ' Ă­ÂŁ,ĂĄ!íßß6 iĂ­^f- 38?»* r^^'-ĂŹ g * ,»v ‱‱ r. y^'tĂ­Ăźc^ ùù -'M' WSL L-Ăą^ WJrf r j . ‱ -^jyyA .d-'-'v 3^ MAL ^-W- ;> j'* UpsB ÂŁ/ LMU MK s»^> ;% ,SS3 LEM ĂąW /ĂĄĂ­yj'^'Vrf'- W pw-; ‱r\ Ă­Ă­t tĂ iĂ­ SĂ­saiP , V Ala recherche du savoir : Raison et RĂ©vĂ©lation en islam Abd-al-Haqq IsmaĂŻl Guiderdoni Selon la tradition prophĂ©tique, « la recherche du savoir est une obligation pour tout musulman et toute musulmane. »1 Puisque la recherche du savoir est une obligation religieuse, il nous faut, pour remplir cette obligation, savoir ce qu’est le savoir. Or se prĂ©sentent devant nous une multitude
Nouvelle ingĂ©rence Ă©trangĂšre Ă  Strasbourg, la Turquie ouvre une facultĂ© thĂ©ologique islamique En bonne logique, la nouvelle devrait secouer le landerneau politique. A Strasbourg, la Turquie vient d’ouvrir une facultĂ© de thĂ©ologie islamique pour former des imans Le Monde, 1er septembre 2012. Pour les autoritĂ©s officielles d’Ankara qui ont mis sur pied ce projet considĂ©rable, activement soutenu par la mairie socialiste, l’établissement Ă  caractĂšre universitaire doit servir de tĂȘte de pont Ă  l’organisation et au contrĂŽle de la diaspora turque demeurant en France et en Europe la crĂ©ation d’un Ă©tablissement secondaire privĂ© et l’implantation d’instituts culturels et religieux d’Etat sur notre sol devraient suivre sous peu
 Etonnamment, cette ingĂ©rence religieuse Ă©trangĂšre, qui vise au fond rien moins qu’à capter les esprits et brider les cƓurs des populations intĂ©ressĂ©es, n’a suscitĂ© jusqu’à prĂ©sent aucune rĂ©action d’indignation officielle de la part du gouvernement Ayrault qui, dans cette affaire plus que symbolique, a fait le choix de se rĂ©fugier dans un mutisme complaisant dĂ©jĂ  pratiquĂ© voici peu par le gouvernement Fillon. Tout bien considĂ©rĂ©, comment imaginer qu’il puisse en ĂȘtre autrement de la part de pouvoirs publics attentistes, bien dĂ©cidĂ©s depuis des lustres Ă  fermer les yeux, Ă  droite comme Ă  gauche, devant les multiples initiatives menĂ©es ces derniĂšres annĂ©es par des gouvernements ou des institutions Ă©trangĂšres en direction de la population musulmane de France ? Depuis son entrĂ©e en vigueur le 11 avril 2011, les Etats-Unis s’appliquent ainsi Ă  critiquer avec constance la loi interdisant en France la dissimulation du visage dans l’espace public. Dernier exemple en date de cette intrusion dans les affaires intĂ©rieures de la France dans un rapport rendu public le 31 juillet dernier, le dĂ©partement d’état amĂ©ricain vient de dĂ©noncer ouvertement, une fois de plus, en des termes sĂ©vĂšres, la lĂ©gislation française sur le port de la burqa. Sur cette question comme sur beaucoup d’autres, le gouvernement amĂ©ricain sait pouvoir compter sur le concours fidĂšle des autoritĂ©s europĂ©ennes. Dans une tribune parue le 8 aoĂ»t 2012, le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, Nils Muiznieks, a demandĂ© aux gouvernements europĂ©ens, dont notamment la France, de renoncer aux lois et mesure visant spĂ©cialement les musulmans et interdire la discrimination fondĂ©e sur la religion ou les convictions dans tous les domaines », en citant explicitement les rĂ©glementations qui prĂ©voient une amende ou un stage de citoyenneté’’ pour les femmes portant le voile dans l’espace public ». Cette dĂ©claration percutante s’inscrit indiscutablement dans l’offensive idĂ©ologique menĂ©e ces derniĂšres annĂ©es par les institutions internationales publiques, notamment europĂ©ennes, qui cherchent rien moins qu’à contraindre les gouvernements Ă  renoncer aux lois et mesures qui viseraient spĂ©cialement les musulmans, au nom d’une conception frelatĂ©e du principe de libertĂ© religieuse ainsi, des recommandations rĂ©currentes de la Commission europĂ©enne contre le racisme et l’intolĂ©rance du Conseil de l’Europe au rĂ©cent rapport co-rĂ©digĂ© en 2012 par l’UNESCO, l’OSCE Organisation pour la sĂ©curitĂ© et la coopĂ©ration en Europe et le Conseil de l’Europe prescrivant le respect de principes directeurs Ă  l’attention des Ă©ducateurs pour combattre l’intolĂ©rance et la discrimination Ă  l’encontre des musulmans », il s’agit Ă  chaque fois pour ces organisations internationales d’imposer aux Etats, contre toute cohĂ©rence anthropologique, une approche uniforme du rĂŽle et de la place dĂ©volus avantageusement aux communautĂ©s musulmanes en Europe pour mieux prĂ©venir et encadrer les lĂ©gislations nationales supposĂ©es attentatoires aux libertĂ©s religieuses des populations intĂ©ressĂ©es. En ce domaine, les ONG ne sont Ă©videmment pas en reste en tĂ©moigne ainsi le rapport d’Amnesty international, publiĂ© en avril 2012, qui stigmatise l’inertie des gouvernements europĂ©ens dans la lutte contre la discrimination dont sont victimes les musulmans », notamment celle qui se dĂ©velopperait en France. Au regard de ces contraintes extĂ©rieures qui pĂšsent manifestement sur les capacitĂ©s de notre pays Ă  organiser librement le culte musulman sur son territoire, que va-t-il se passer dans les prochains mois en France ? Il n’y a probablement guĂšre d’initiative inĂ©dite Ă  attendre d’un gouvernement socialiste qui semble Ă  l’évidence n’avoir pris aucunement la mesure exacte des dissensions considĂ©rables qui paralysent l’action du Conseil français du culte musulman CFCM, lequel est profondĂ©ment minĂ© depuis sa fondation, le 28 mai 2003, par les luttes d’influence impitoyables que se livrent sur notre sol, par associations de fidĂšles interposĂ©es, les gouvernements turc, algĂ©rien ou marocain. Cette instance cultuelle, – chargĂ©e aussi bien de concevoir des solutions pour la construction de mosquĂ©es, la crĂ©ation de carrĂ©s confessionnels dans les cimetiĂšres que de former et de nommer des aumĂŽniers au sein des institutions militaire, hospitaliĂšre ou carcĂ©rale, en relation avec les pouvoirs publics – n’est jamais parvenue Ă  surmonter ces profondes divisions politiques au point que son inertie actuelle condamne dĂ©sormais l’islam de France Ă  n’ĂȘtre plus qu’un islam des consulats qui constituera sans doute demain le terreau fertile Ă  l’expression larvĂ©e dans notre pays des innombrables conflits gĂ©opolitiques qui embrasent le monde. Inaugurant la grande mosquĂ©e de Cergy Val-d’Oise, le 6 juillet dernier, Manuel Valls, ministre de l’intĂ©rieur, Ă©galement chargĂ© des cultes en France, n’a-t-il pas avouĂ© Ă  demi-mots l’impuissance du gouvernement auquel il appartient Ă  rĂ©agir devant l’impotence d’un CFCM aujourd’hui passablement moribond ? Les divisions, les Ă©goĂŻsmes, la concurrence ne peuvent pas diffĂ©rer plus longtemps le dialogue indispensable qui doit s’ouvrir sur les sujets cultuels », a-t-il affirmĂ©. Un cadre existe ; il est sans doute imparfait. Il mĂ©rite peut-ĂȘtre d’évoluer ». Certes, avec l’application du principe de laĂŻcitĂ© qui impose Ă  l’Etat une stricte neutralitĂ© dans l’exercice des cultes en France, les marges de manƓuvres disponibles pour permettre aux pouvoirs publics français de rĂ©guler l’exercice du culte musulman Ă  l’intĂ©rieur de nos frontiĂšres sont assurĂ©ment limitĂ©es. Mais pour un Etat soucieux de prĂ©server les libertĂ©s, qui se garde avec raison de toute intrusion confessionnelle dans l’espace public, ces possibilitĂ©s d’action sont loin d’ĂȘtre inexistantes, dĂšs lors qu’il s’agit pour notre pays de contenir l’interventionnisme des puissances Ă©trangĂšres qui aspirent tant Ă  peser sur les destinĂ©es de l’islam de France. PrioritĂ© absolue pour notre pays d’abord et avant tout, il lui appartient de prendre conscience avec discernement que l’islam, dans son essence comme dans la pratique contemporaine qui en est faite par ses adeptes, est une religion qui lui est absolument Ă©trangĂšre, si peu compatible en effet, par son caractĂšre Ă©minemment singulier, avec les traits historiques de la civilisation française qu’il lui faut dĂšs lors limiter avec volontarisme la prĂ©sence Ă  venir en France du nombre de ses fidĂšles. Ce dĂ©fi historique, vĂ©ritable enjeu de civilisation, impose donc Ă  notre pays d’enrayer l’immigration, sous toutes ses formes, dont les flux massifs et continus pourvoient largement Ă  l’expansion de l’islam en France, ce qui implique Ă  coup sĂ»r de tourner le dos Ă  la politique migratoire de l’Union europĂ©enne dont Mme CĂ©cilia Malmström, Commissaire europĂ©enne aux affaires intĂ©rieures, n’a pas dissimulĂ© le dessein politique, rien moins que suicidaire, en affirmant voici peu que l’immigration sera nĂ©cessaire pour l’Europe » Le Monde, 11 juillet 2012. Ensuite, maĂźtrisant pleinement Ă  l’intĂ©rieur de ses frontiĂšres les conditions juridiques dans lesquelles les cultes doivent s’exercer,la France ne doit pas craindre de prohiber sĂ©vĂšrement sur son territoire toutes actions Ă  caractĂšre prosĂ©lyte ou manifestant un soutien quelconque Ă  la pratique dans notre pays de la foi musulmane qui Ă©maneraient pareillement d’Etats Ă©trangers, surtout lorsque ces derniers se distinguent, sur le registre de la libertĂ© confessionnelle, par les discriminations intolĂ©rables dont sont perpĂ©tuellement victimes leurs propres minoritĂ©s religieuses, au Soudan, en AlgĂ©rie comme en Turquie. Intraitable sur le respect qui est dĂ» Ă  sa souverainetĂ© politique, dĂ©positaire de l’autoritĂ© ultime dans son espace intĂ©rieur,la France doit enfin ne pas se laisser intimider par la pression idĂ©ologique qui est exercĂ©e en permanence Ă  son endroit par les organisations internationales, publiques ou privĂ©es, lesquelles s’obstinent en effet Ă  lui imposer un cadre religieux qui n’est pas le sien, Ă  savoir un modĂšle confessionnel de type anglo-saxon oĂč, par un dĂ©ni de la rĂ©alitĂ© historique de l’hĂ©ritage chrĂ©tien dela France, toutes les religions seraient placĂ©es de maniĂšre absurde sur un mĂȘme pied d’égalitĂ©. Ainsi donc, avec ou sans l’action cultuelle du CFCM,la France ne saurait tolĂ©rer que les musulmans rĂ©sidant dans notre pays soient dĂ©pendants de quelque façon que ce soit dans la pratique de leur foi, matĂ©riellement comme au plan pastoral, du concours, explicite ou dissimulĂ©, d’institutions ou d’organismes dont l’inspiration et le fonctionnement dĂ©riveraient de l’action nĂ©cessairement intĂ©ressĂ©e de puissances Ă©trangĂšres. Devant la poussĂ©e de l’entrisme islamique qui se pratique ouvertement dans notre pays, François Hollande sera-t-il l’artisan inspirĂ© d’une politique de fermetĂ© lucide et d’indĂ©pendance bien comprise ? Rien n’est moins sĂ»r si l’on songe que la nouvelle majoritĂ© politique, visiblement gĂȘnĂ©e aux entournures sur cette question de sociĂ©tĂ©, n’a manifestĂ© jusqu’à prĂ©sent aucune intention sincĂšre de rompre vĂ©ritablement avec la politique munichoise que le PrĂ©sident Sarkozy avait opposĂ©e, avec un laxisme assumĂ©, aux pratiques bien peu tolĂ©rables menĂ©es sur notre sol par certains pays Ă©trangers quatre mois aprĂšs le changement de locataire Ă  l’ElysĂ©e, les pouvoirs publics tolĂšrent ainsi toujours que des Etats Ă©trangers puissent encore porter impunĂ©ment atteinte Ă  la souverainetĂ© dela France, Ă  l’exemple dela Turquie et de son invraisemblable politique d’expansionnisme religieux mais aussi des Etats-Unis ou du Qatar qui n’ont pas renoncĂ©, l’un comme l’autre, Ă  sĂ©duire Ă  grand frais les jeunes’’ des banlieues françaises en leur vendant pareillement un modĂšle de sociĂ©tĂ© qui n’est pas le nĂŽtre. Avec autorisation de publication de *Riposte LaĂŻque*
UndĂ©tenu srilankais qui espĂ©rait soustraire un portable Ă  la fouille de sa cellule en le dissimulant dans son rectum a Ă©tĂ© confondu lorsque le tĂ©lĂ©phone a sonnĂ©, a-t-on appris vendredi de Le 09/02/2015 Ă  945 MAJ Ă  1731Une marche blanche Ă  la mĂ©moire de Patricia Bouchon, le 14 fĂ©vrier 2012. - AFPPatricia Bouchon, une mĂšre de famille sans histoires, avait Ă©tĂ© retrouvĂ©e morte en fĂ©vrier 2011 Ă  Bouloc, en Haute-Garonne, aprĂšs ĂȘtre partie courir, comme chaque matin. Le suspect, interpellĂ© lundi matin, avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© entendu dans ce homme, qui avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© placĂ© en garde Ă  vue dans l'enquĂȘte sur le meurtre de la joggeuse Patricia Bouchon en fĂ©vrier 2011 Ă  Bouloc, en Haute-Garonne, a Ă©tĂ© interpellĂ© lundi en examenSelon nos informations, le suspect a Ă©tĂ© mis en examen pour homicide volontaire, ce lundi en dĂ©but d'aprĂšs-midi, avant d'ĂȘtre placĂ© en dĂ©tention provisoire. Il ne serait pas passĂ© aux aveux. L'homme, ĂągĂ© de 35 ans, aurait Ă©tĂ© reconnu par plusieurs tĂ©moins comme Ă©tant l'homme du portrait-robot, diffusĂ© aprĂšs les faits. EmployĂ© du bĂątiment, le suspect vivrait repliĂ© sur lui-mĂȘme et serait toxicomane, dĂ©crit comme ayant, parfois, un comportement agressif."Ce suspect avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© entendu dans cette enquĂȘte. Le temps de sa garde Ă  vue Ă©tant quasiment expirĂ©, il devrait ĂȘtre dĂ©fĂ©rĂ© dans les plus brefs dĂ©lais" devant la justice, a expliquĂ© une source proche du dossier, confirmant une information du site internet de la DĂ©pĂȘche du suspect dĂ©jĂ  entendu"Ce suspect avait Ă©tĂ© auditionnĂ© une premiĂšre fois en octobre 2011 dans le cadre des investigations des enquĂȘteurs", a prĂ©cisĂ© une autre source. "Il a ensuite Ă©tĂ© placĂ© en garde Ă  vue en janvier et en juin 2014, aprĂšs avoir Ă©tĂ© reconnu par plusieurs tĂ©moins comme l'homme du portrait-robot diffusĂ© en 2013", a-t-elle portrait-robot avait Ă©tĂ© Ă©laborĂ© dĂšs le dĂ©but de l'enquĂȘte sur la base du tĂ©moignage d'un automobiliste qui avait remarquĂ© une Renault Clio de premiĂšre gĂ©nĂ©ration immobilisĂ©e, sans lumiĂšre. Il avait alors aperçu le conducteur Ă  la lumiĂšre de ses phares, vers 4h30 sur une petite route proche de Bouloc, lĂ  oĂč Patricia Bouchon disparaissait cette mĂȘme nuit du 14 fĂ©vrier 2011, lors de son procureur s'exprime Ă  16h30Dans cette affaire, plus d'une dizaine de personnes avaient Ă©tĂ© placĂ©es en garde Ă  vue par les gendarmes de la section de recherches de Midi-PyrĂ©nĂ©es, avant d'ĂȘtre mis hors de l'issue de multiples vĂ©rifications, "aucun lien n'avait pu ĂȘtre Ă©tabli entre cet homme et l'affaire de Bouloc", avait alors dĂ©clarĂ© le procureur de Toulouse de l'Ă©poque, Michel procureur de la RĂ©publique de Toulouse, Pierre-Yves Couilleau, a annoncĂ© la tenue d'une confĂ©rence de presse lundi vers mĂšre de famille sans histoiresÂgĂ©e de 49 ans, Patricia Bouchon, secrĂ©taire dans un cabinet d'avocats toulousains et mĂšre de famille sans histoires, Ă©tait partie le 14 fĂ©vrier 2011 vers 4h30, comme chaque matin, faire son jogging autour de Bouloc, Ă  25 km au nord de Toulouse. Cette femme mince de 1,60 mĂštre et 50 kilos, aux cheveux chĂątain clair, n'est jamais corps n'a Ă©tĂ© retrouvĂ© qu'un mois et demi plus tard dissimulĂ© dans un conduit d'eau sous une petite route Ă  14 km de chez elle. Patricia Bouchon avait eu les vertĂšbres et le crĂąne enfoncĂ©s par des coups. Son meurtrier avait aussi essayĂ© de l'Ă©trangler, mais n'aurait pas abusĂ© d'elle. Dans cette affaire, une dizaine de personnes avaient Ă©tĂ© placĂ©es en garde Ă  vue par les gendarmes de la section de recherches de Midi-PyrĂ©nĂ©es, avant d'ĂȘtre mis hors de cause. LemystĂšre du message codĂ© dissimulĂ© dans le verdict du procĂšs en plagiat concernant le best-seller planĂ©taire Da Vinci Code a Ă©tĂ© percĂ©, a rĂ©vĂ©lĂ© le journal britannique The Guardian. Cliquer ici pour voir la y a blagues de bureau et blagues de bureau. Ce robot capable de canarder des balles de ping pong et de se dissimuler dans le faux plafond fait sans aucun doute partie de la derniĂšre par un type du CKBot group de l'UPenn’s Modlab, cet appareil terrifiant se dissimule dans le plafond au-dessus d'un bureau. Quand il est activĂ©, il soulĂšve une dalle du faux-plafond et crache sa haine sous la forme de balles de ping pong sur une innocente victime. C'est, en un mot, Ă©tonnant. [Modlab via BotJunkie] Avoirdans la mĂ©moire. PossĂ©der quelque science, quelque art, ĂȘtre instruit, habile en quelque profession, en quelque exercice. Avoir l’esprit ornĂ© et rempli de choses utiles. Être accoutumĂ© Pays Tous les pays Afrique du Sud AlgĂ©rie Angola Botswana Burkina Faso Burundi BĂ©nin Cameroun Cap-Vert Centrafrique Comores Congo-Brazzaville Congo-Kinshasa Cote d'Ivoire Djibouti Egypte ErythrĂ©e Eswatini Ethiopie Gabon Gambie Ghana GuinĂ©e GuinĂ©e Bissau GuinĂ©e Equatoriale Ile Maurice Kenya Lesotho Liberia Libye Madagascar Malawi Mali Maroc Mauritanie Mozambique Namibie Niger Nigeria Ouganda Rwanda Sahara Occidental Seychelles Sierra Leone Somalie Soudan Sud-Soudan SĂŁo TomĂ© and PrĂ­ncipe SĂ©nĂ©gal Tanzanie Tchad Togo Tunisie Zambie Zimbabwe Toute l'Afrique Afrique Centrale Accueil Afrique Centrale Angola Burundi Cameroun Centrafrique Congo-Brazzaville Congo-Kinshasa Gabon GuinĂ©e Equatoriale Rwanda SĂŁo TomĂ© and PrĂ­ncipe Tchad Afrique de l'Est Accueil Afrique de l'Est Burundi Comores Djibouti ErythrĂ©e Ethiopie Ile Maurice Kenya Madagascar Ouganda Rwanda Seychelles Somalie Soudan Sud-Soudan Tanzanie Afrique du Nord Accueil Afrique du Nord AlgĂ©rie Egypte Libye Maroc Sahara Occidental Tunisie Afrique Australe Accueil Afrique Australe Afrique du Sud Angola Botswana Eswatini Lesotho Malawi Mozambique Namibie Zambie Zimbabwe Afrique de l'Ouest Accueil Afrique de l'Ouest Burkina Faso BĂ©nin Cameroun Cap-Vert Cote d'Ivoire Gambie Ghana GuinĂ©e GuinĂ©e Bissau Liberia Mali Mauritanie Niger Nigeria Sierra Leone SĂŁo TomĂ© and PrĂ­ncipe SĂ©nĂ©gal Togo Rubriques Toutes les Rubriques Afrique et AmĂ©rique Latine Afrique et Europe Afrique et Moyen Orient Afrique, Asie et Australie Agroindustrie Aide et Assistance Aliments et Agriculture Armes et ArmĂ©es AthlĂ©tisme Banques Bourse Climat Commerce Conflit Construction Coronavirus Corruption Coupe du Monde Dette Devises Divertissement Droits de l'Homme DĂ©veloppement Durable Eau Ebola Eco-tourisme Education Energie Enfance Entreprises Environnement Fabrication Faune Femmes et Genre Finance Flux de Capitaux Football Gouvernance Grossesse et Accouchement Infrastructures Innovation Investissement Jeux Olympiques Justice et Lois Livres MNT Maintien de la Paix Migrations Musique MĂ©dia NTIC Nutritive ONG OcĂ©ans Organisations Internationales Paludisme Parcs Animaliers Polio Privatisation Produits PĂ©trole Relations ExtĂ©rieures Religion Ressources MiniĂšres Revue LittĂ©raire Revue Musicale RĂ©fugiĂ©s SIDA SantĂ© et MĂ©decine Science Sports Terres et Gestion Rurale Terrorisme Transport Travail et Syndicats Tuberculose USA, Canada et Afrique Urbanisation Voyages Divertissement Accueil Divertissement Livres Musique Revue LittĂ©raire Revue Musicale Finance Accueil Finance Agroindustrie Banques Bourse Commerce Construction Dette Devises Energie Entreprises Fabrication Flux de Capitaux Infrastructures Investissement NTIC Privatisation Produits PĂ©trole Ressources MiniĂšres Transport Travail et Syndicats Conflit Accueil Conflit Armes et ArmĂ©es Maintien de la Paix RĂ©fugiĂ©s Terrorisme Environnement Accueil Environnement Climat Eau Faune OcĂ©ans SantĂ© et MĂ©decine Accueil SantĂ© et MĂ©decine Coronavirus Ebola Grossesse et Accouchement MNT Nutritive Paludisme Polio SIDA Tuberculose Sports Accueil Sports AthlĂ©tisme Coupe du Monde Football Jeux Olympiques Voyages Accueil Voyages Eco-tourisme Parcs Animaliers Coronavirus DĂ©veloppement Aide et Assistance Aliments et Agriculture Education Environnement Femmes et Genre SantĂ© et MĂ©decine BizTech Accueil Finance Agroindustrie Banques Bourse Commerce Construction Dette Devises Energie Entreprises Fabrication Flux de Capitaux Infrastructures Investissement NTIC Privatisation Produits PĂ©trole Ressources MiniĂšres Transport Travail et Syndicats Divertissement Accueil Divertissement Livres Musique Revue LittĂ©raire Revue Musicale Sports Accueil Sports AthlĂ©tisme Coupe du Monde Football Jeux Olympiques Afrique/Monde Afrique et AmĂ©rique Latine Afrique et Europe Afrique et Moyen Orient Afrique, Asie et Australie Organisations Internationales USA, Canada et Afrique Gouvernance Corruption Droits de l'Homme Gouvernance Justice et Lois MĂ©dia ONG Terres et Gestion Rurale MultimĂ©dia VidĂ©o Audio Document Site Pages Focus Sur Reportages photos Sustainability D'AllAfrica News Sources Media Kit Who We Are Con
Commentsavoir si une coupe rase me va bien femme ? Un simple crayon et une rĂšgle vous permettent de savoir si les cheveux courts vous iront. Pour savoir si une coupe courte flattera votre visage, mesurez simplement la distance qui sĂ©pare le menton du lobe de l’oreille. Placez le crayon horizontalement sous le menton et posez la rĂšgle
27/01/2021 150700Charlene de Monaco, le crĂąne rasĂ© dissimulĂ© sortie en famille pour embraser le RocherIl n'y a pas que Jacques et Gabriella qui ont soignĂ© leurs tenues mardi soir leur mĂšre, la princesse Charlene, a elle aussi misĂ© sur un look sophistiquĂ©. Une tenue pour laquelle elle a prĂ©fĂ©rĂ© cache...Les deux petites tĂȘtes blondes accompagnent de plus en plus leurs parents lors de leurs sorties princiĂšres, pour le plus grand plaisir des MonĂ©gasques. Les jumeaux, scolarisĂ©s Ă  l'Ă©cole maternelle publique Stella-de-Monaco, ne se contentent plus seulement de saluer du balcon du palais princier deux fois l'an, puisqu'ils prennent dĂ©sormais part Ă  diffĂ©rentes cĂ©rĂ©monies, inaugurations, Ă©vĂ©nements culturels et sportifs... Lire la suite » Charlene de Monaco affiche dĂ©sormais une coiffure mi-crĂąne rasĂ©, mi coupe au bol PHOTO – Charlene de Monaco lookĂ©e Ă  la garçonne pour une nouvelle sortie avec Albert - Gala Charlene de Monaco en solo pour les funĂ©railles du roi des Zoulous - Gala Charlene de Monaco affiche dĂ©sormais une coiffure mi-crĂąne rasĂ©, mi coupe au bolL'Ă©pouse du prince Albert II arborait une coupe de cheveux punk lors d'une distribution de cadeaux de NoĂ«l, organisĂ©e au Palais princier mi-dĂ©cembre. Elle persiste et signe ce choix capillaire pour le moins inattendu de la part de la princesse, en rasant la nuque et l'autre cĂŽtĂ©. ... En a-t-elle ras le bol ? lĂ  est la question! De pire en pire! 15€ la coupe alors , voir 10€PHOTO – Charlene de Monaco lookĂ©e Ă  la garçonne pour une nouvelle sortie avec Albert - GalaÀ l'occasion d'une sortie au Yacht Club de Monaco, la princesse CharlĂšne arborait un look androgyne, aux cĂŽtĂ©s du prince Albert II de Monaco ce mardi 9 fĂ©vrier....Charlene de Monaco en solo pour les funĂ©railles du roi des Zoulous - GalaCharlene de Monaco s'est rendue seule aux funĂ©railles de Goodwill Zwelithini, le roi des Zoulous d'Afrique du Sud, ce jeudi 18 mars Ă  Nongoma, comme le montrent des images de SABC News. TrĂšs proche... Y a la vidĂ©o ?PHOTOS – De StĂ©phanie Ă  Charlene de Monaco les coiffures les plus excentriques du gotha - propose une rĂ©trospective de ces fois oĂč les princesses ont optĂ© pour des coiffures excentriques sous bien des formes. Des colorations folles, des assemblages Ă©tonnants... DĂ©couvrez notre d...PHOTOS – De StĂ©phanie Ă  Charlene de Monaco les coiffures les plus excentriques du gotha - propose une rĂ©trospective de ces fois oĂč les princesses ont optĂ© pour des coiffures excentriques sous bien des formes. Des colorations folles, des assemblages Ă©tonnants... DĂ©couvrez notre d...Une publication partage par Eugenia Garavani eugeniagaravani Les deux petites tĂȘtes blondes accompagnent de plus en plus leurs parents lors de leurs sorties princiĂšres, pour le plus grand plaisir des En ce moment ChloĂ© Friedmann 1, Justine Feutry ‱ Le 10 fĂ©vrier 2021 L'Ă©pouse du prince Albert II arborait une coupe de cheveux punk lors d'une distribution de cadeaux de NoĂ«l, organisĂ©e au Palais princier de Monaco n'en finit pas de surprendre avec ses au deuxiĂšme rang de l'Ă©glise temporaire installĂ©e Ă  Nongoma, une ville du KwaZulu-Natal, province cĂŽtiĂšre de l'Afrique du jumeaux, scolarisĂ©s Ă  l'Ă©cole maternelle publique Stella-de-Monaco, ne se contentent plus seulement de saluer du balcon du palais princier deux fois l'an, puisqu'ils prennent dĂ©sormais part Ă  diffĂ©rentes cĂ©rĂ©monies, inaugurations, Ă©vĂ©nements culturels et sportifs.. Partager Tilda Swinton, Rihanna et Kristen Stewart l'ont un temps adoptĂ©e.. Ce style colle parfaitement Ă  sa nouvelle coupe de cheveux , rĂ©vĂ©lĂ©e en dĂ©cembre dernier et qui lui donne de l'allure. Les deux enfants font la fiertĂ© du prince Albert, comme Charlene a pu l'Ă©voquer lors d'une rĂ©cente interview accordĂ©e au magazine Point de vue " Il adore chaque instant passĂ© avec eux, il aime leur parler, les prendre en photo, ils sont le grand amour de sa vie. L'Ă©pouse d'Albert II arborait Ă©galement une longue mĂšche coiffĂ©e sur le cĂŽtĂ© et des mĂšches plus foncĂ©es. Un amour qui ne connaĂźt pas d'Ă©quivalent et qu'il a la chance d'avoir en double ! " Un entretien au cours duquel la princesse avait Ă©galement adressĂ© . "C’est un jour difficile car nous avons perdu un arbre", a-t-il dĂ©clarĂ©, citĂ© par Histoires Royales, avant de poursuivre "J’adresse mes plus profondes et sincĂšres condolĂ©ances Ă  la famille royale, au nom de tous les Sud-Africains. bYTWR.
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